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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 7 juin 2024, n° 23/08934

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Ze Boite (EURL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Renard

Vice-président :

Mme Lehmann

Conseiller :

Mme Marcade

Avocats :

Me Ledieu, Me Ingold, Me Bassat, Me Illouz

TJ Paris, 3e ch. 2e sect., du 13 août 20…

13 août 2021

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement réputé contradictoire rendu le 13 août 2021 par le tribunal judiciaire de Paris.

Vu la déclaration d'appel du 25 novembre 2021 de la société Ze Boite.

Vu l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 30 juin 2022 ordonnant le sursis à statuer jusqu'à l'issue de la procédure en cours devant la cour d'appel de Paris dans l'instance opposant la société Ze Boite à Mme [P] [V] et la société Ellaechim Trading (RG n° 22/06534).

Vu l'ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 8 septembre 2022 ordonnant la radiation de l'affaire, la cause du sursis n'ayant pas disparue.

Vu les conclusions de la société Ze Boite déposées et notifiées le 22 avril 2023 sollicitant le rétablissement de l'affaire au rôle, la cause du sursis ayant disparue en raison de l'arrêt rendu le 16 mars 2023 par la cour d'appel de Paris (RG n° 22/06534).

Vu l'ordonnance sur incident devant le magistrat chargé de la mise en état rendue le 22 juin 2023.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 13 février 2024 par la société Ze Boite, appelante à titre principal et intimée à titre incident.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 9 octobre 2023 par la Mme [P] [V] et la société Aphinitea Corporation (intervenante volontaire) venant aux droits de la société Ellaechim Trading, intimées à titre principal et appelantes à titre incident.

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 29 février 2024.

SUR CE, LA COUR

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

La société Ellaechim Trading de droit philippin, immatriculée en 2010, se présente comme spécialisée dans le commerce de la fabrication d'emballage alimentaire et particulièrement de boîtes inspirées de l'art japonais origami, consistant à utiliser une seule feuille pliée de manière intelligente qui ne nécessite pas d'adhésif. Elle est dirigée par Mme [P] [V] et indique exercer son activité sous la marque semi-figurative de l'Union européenne « Aphinitea » déposée le 2 octobre 2020 :

La société française Ze Boite, immatriculée le 1er juin 2011 et dirigée par [Y] [J], a pour activité la fabrication d'emballages alimentaires sur mesure en carton destinés à des produits dits de « streetfood ».

Mme [P] [V] expose avoir conçu une boîte en carton en forme de fleur dénommée «Magnolia» représentée ci-dessous et sur laquelle elle revendique des droits d'auteur :

Elle explique que ce modèle a été ensuite décliné pour différentes formes de boites qui sont exploitées et commercialisées sous la marque semi-figurative de l'Union européenne Aphinitea Redefining Packaging.

Constatant à la fin du mois de juillet 2020 que la société Ze Boite commercialisait sur son site internet à l'adresse «https://www.ze-boite.fr » des articles et en particulier une référence « Flower » qu'elles estimaient identiques à leurs boîtes de carton pliées, Mme [P] [V] et la société Ellaechim Trading ont fait établir le 5 août 2020 un procès-verbal de constat par huissier de justice relatif à ces agissements puis le 10 septembre 2020, ont adressé à la société Ze Boite une lettre de mise en demeure d'avoir à cesser toute commercialisation des boites litigieuses et de leur présenter une offre indemnitaire.

Cette mise en demeure étant demeurée vaine, Mme [P] [V] et la société Ellaechim Trading ont, par acte du 31 décembre 2020, fait assigner la société Ze Boite devant le tribunal judiciaire de Paris en contrefaçon de droit d'auteur et de marque et en concurrence déloyale et parasitaire.

En suite de cette assignation, elles ont fait établir un second procès-verbal de constat par huissier de justice le 23 avril 2021.

C'est dans ce contexte qu'a été rendu le jugement dont appel, qui a :

- dit que la boite « Magnolia » bénéficie de la protection par le droit d'auteur,

- dit que la société Ze Boite a commis des actes de contrefaçon de droit d'auteur en reproduisant les caractéristiques de la boîte « Magnolia » au préjudice de Mme [P] [V],

- rejeté les demandes fondées sur la contrefaçon de la marque « Aphinitea »,

- rejeté les demandes fondées sur la concurrence déloyale et parasitaire,

- condamné la société Ze Boite à payer à Mme [P] [V] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l'atteinte à la valeur patrimoniale de la boite « Magnolia »,

- fait interdiction à la société Ze Boite d'importer ou d'exporter, de fabriquer ou faire fabriquer, de proposer à la vente et de vendre en France des produits « Flower » ou autrement référencés, mais constituant la contrefaçon de la boîte « Magnolia » ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de 10 jours suivant la signification du présent jugement, la dite astreinte courant pendant une durée de 3 mois,

- s'est réservé la liquidation de l'astreinte,

- ordonné la destruction de l'ensemble des produits contrefaisants détenus en France par la société Ze Boite, aux frais de celle-ci,

- rejeté les autres demandes indemnitaires, en ce inclus les frais d'huissier et débours,

- condamné la société Ze Boite à payer à Mme [P] [V] ensemble (sic) la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande formée de ce chef par la société Ellaechim Trading,

- condamné la société Ze Boite aux dépens,

- dit n'y avoir lieu d'écarter l'exécution provisoire.

Mme [P] [V] et la société Ellaechim trading ont, en exécution de cette décision, fait procéder à une saisie-attribution sur les comptes de la société Ze Boîte, saisie critiquée devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Créteil, la société Ze Boîte contestant la régularité de la signification du jugement du tribunal judiciaire de Paris du 13 août 2021.

Le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Créteil, par décision en date du 11 mars 2022, a considéré comme valable cette signification et a débouté la société Ze Boite de ses demandes. Celle-ci a relevé appel de ce jugement devant la cour d'appel de Paris (RG n°22/06534).

La société Ze Boite a également interjeté appel du jugement du tribunal judiciaire de Paris suscité dont est saisie la cour. La recevabilité de l'appel formé plus d'un mois après la signification du jugement, a été contestée par les intimées qui ont soulevé un incident devant le conseiller de la mise en état. La question de la validité de la signification du jugement du tribunal judiciaire de Paris étant également en question dans cette procédure, le conseiller de la mise en état a par ordonnance en date du 30 juin 2022 décidé de surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt de la cour d'appel de Paris dans l'affaire RG n°22/06534.

Par ordonnance du 8 septembre 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la radiation du rôle de l'affaire (RG 21/20623).

Par un arrêt du 16 mars 2023 rendu dans l'affaire RG n°22/06534, la cour d'appel de Paris a infirmé le jugement rendu du 11 mars 2022 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Créteil en ce qu'il a débouté la société Ze Boite de sa demande de nullité de la signification du jugement et déclaré nulle la signification du jugement du tribunal judiciaire de Paris en date du 13 août 2021.

La cause du sursis ayant disparue, l'affaire a été rétablie au rôle le 22 avril 2023 sous le numéro de RG 2323/08934.

La signification du jugement en date du 13 août 2021 ayant été déclarée nulle, la contestation de la recevabilité de l'appel formé plus d'un mois après la signification du jugement n'est en conséquence plus en débat.

Par ordonnance en date du 22 juin 2023, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de la société Ze Boite tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions de la société Ellaechim Trading et de Mme [P] [V].

La société Aphinitea Corporation a été créée le 18 janvier 2023 et a pour gérante Mme [P] [V].

Elle précise avoir repris l'intégralité des droits, actions et créances de la société Ellaechim Trading et venir désormais aux droits de cette société (pièces 17 à 19). Elle intervient volontairement en cause d'appel par conclusions déposées et notifiées le 11 septembre 2023.

Par ses dernières conclusions, la société Ze Boîte demande à la cour de :

- déclarer son appel recevable,

- infirmer le jugement du 13 août 2021 en ce qu'il a :

- dit que la boîte Magnolia bénéficie de la protection par le droit d'auteur,

- dit que la société Ze Boite a commis des actes de contrefaçon de droit d'auteur en reproduisant les caractéristiques de la boite Magnolia au préjudice de Mme [P] [V],

- condamné la société Ze Boite à payer à Mme [P] [V] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l'atteinte à la valeur patrimoniale de la boîte Magnolia,

- fait interdiction à la société Ze Boite d'importer ou d'exporter, de fabriquer ou faire fabriquer, de proposer à la vente et de vendre en France des produits Flower ou autrement référencés, mais constituant la contrefaçon de la boîte Magnolia ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de 10 jours suivant la signification du présent jugement, ladite astreinte courant pendant une durée de 3 mois,

- ordonné la destruction de l'ensemble des produits contrefaisants détenus en France par la société Ze Boite, aux frais de celle-ci,

- condamné la société Ze Boite à payer à Mme [P] [V] ensemble la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Ze Boite aux dépens,

- confirmer le jugement du 13 août 2021 en ce qu'il a :

- débouté Mme [P] [V] de ses demandes fondées sur la contrefaçon de la marque Aphinitea,

- débouté Mme [P] [V] de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et parasitaire.

Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées,

- juger que madame [B] [P] [V] ne peut pas revendiquer de droits d'auteur sur la boîte « magnolia »,

- juger qu'elle n'a pas commis des actes de contrefaçon de droit d'auteur de la boite magnolia au préjudice de [G] [B] [P] [V], -

- débouter Mme [P] [V] et la société Aphinitea corporation venant aux droits de la société Ellaechim Trading de l'ensemble de leurs demandes,

- condamner la société Aphinitea corporation venant aux droits de la société Ellaechim trading et Mme [P] [V] à lui payer 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens

Par leurs dernières conclusions Mme [P] [V] et la société Aphinitea Corporation (intervenante volontaire) venant aux droits de la société Ellaechim Trading, demandent à la cour de :

A titre liminaire,

- recevoir la société Aphinitea Corporation en sa demande d'intervention volontaire comme venant aux droits de la société Ellaechim Trading,

A titre principal,

- confirmer le jugement du 13 août 2021 du tribunal judiciaire de Paris, en ce qu'il a

- dit que la boîte « Magnolia » bénéficie de la protection par le droit d'auteur,

- dit que la société Ze Boite a commis des actes de contrefaçon de droit d'auteur en reproduisant les caractéristiques de la boîte Magnolia au préjudice de Mme [P] [V],

- condamné la société Ze Boite à payer à Mme [P] [V] la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l'atteinte à la valeur patrimoniale de la boîte Magnolia,

- fait interdiction à la société Ze Boite d'importer ou d'exporter, de fabriquer ou faire fabriquer, de proposer à la vente et de vendre en France des produits « Flower » ou autrement référencés, mais constituant la contrefaçon de la boîte Magnolia ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de 10 jours suivant la signification du présent jugement, la dite astreinte courant pendant une durée de 3 mois,

- s'est réservé la liquidation de l'astreinte,

- ordonné la destruction de l'ensemble des produits contrefaisants détenus en France par la société Ze Boite, aux frais de celle-ci,

- condamné la société Ze Boite à payer à Mme [B] [P] [V] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

En outre infirmer le jugement en ce que le tribunal ne s'est pas prononcé sur le préjudice moral invoqué par les intimées et statuant à nouveau de ce chef :

- condamner la société Ze Boite à leur payer la somme de 8 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subis du fait des actes de la contrefaçon commis,

A titre subsidiaire, pour le cas où par impossible la cour débouterait les concluantes sur leurs demandes fondées sur la contrefaçon,

- juger que la société Ze Boite s'est rendue coupable d'actes de concurrence déloyale et de parasitisme à leur encontre ;

En conséquence,

- condamner Ze Boite à verser à la société Aphinitea Corporation (venant aux droits de la société Ellaechim Trading) des dommages-intérêts à hauteur de 20 000 euros,

En tout état de cause, y ajoutant,

- condamner la société Ze Boite à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Ze Boite aux entiers dépens.

La cour relève que les parties ne critiquent pas le jugement entrepris qui a rejeté les demandes de Mme [P] [V] et de la société Ellaechim Trading au titre de la contrefaçon de marque. Ce chef du jugement est en conséquence irrévocable.

La recevabilité de l'intervention volontaire de la société Aphinitea Corporation venant aux droits de la société Ellaechim Trading n'est pas discutée. Elle sera constatée au dispositif de la présente décision.

- Sur la contrefaçon de droit d'auteur

La société Ze Boite critique le jugement entrepris qui a reconnu qu'elle avait commis des actes de contrefaçon de droits d'auteurs dont Mme [P] [V] est titulaire et la société Ellaechim Trading, licenciée exclusive.

Elle considère tout d'abord que l'originalité du modèle de boite opposé n'est pas caractérisée et que la date de création de ce modèle n'est pas établie.

Il résulte des dispositions des articles L. 111-1, L. 112-1 et L. 112-2 10° du code de la propriété intellectuelle que l'auteur d'une 'uvre de l'esprit jouit sur cette 'uvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous, comportant des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial, que ce droit est conféré à l'auteur de toute 'uvre de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination et que sont considérées comme des 'uvres de l'esprit, les 'uvres d'arts appliqués.

La société Ze Boite conteste la date de création et l'originalité du modèle de boite « Magnolia » qui lui est opposé.

Elle soutient que Mme [P] [V] ne démontre pas avoir créé ce modèle de boite en 2011, ni l'avoir commercialisé en France à partir de 2011. Elle relève des contradictions sur la date de création, Mme [P] [V] prétendant que l'année de création du modèle est désormais l'année 2009 alors que le certificat délivré aux Philippines date de 2020 et n'a aucune valeur probante s'agissant de reprendre les déclarations de Mme [P] [V].

Elle fait valoir que Mme [P] [V] ne démontre pas que son modèle est une 'uvre originale, en ce qu'elle est l'expression de la personnalité de l'auteur. Elle considère que le seul fait d'emprunter le concept de pliage en origami sous forme de fleur pour en faire une assiette ne constitue pas une création. Elle ajoute que ce modèle existait déjà en 1999 dans un livre intitulé « Prototypes » puis en 2006 dans le livre « More Prototypes » de la même société Rotovision (pièces 10 et 11 appelante), modèle à partir duquel elle a fait le choix de fabriquer les boites « Flower » arguées de contrefaçon qui sont commercialisées par son fournisseur portugais depuis 2008 (pièce 8 appelante). L'appelante cite également d'autres antériorités afin de démontrer l'absence d'originalité du modèle de boîte en cause.

Néanmoins, il convient de rappeler que la notion d'antériorité est indifférente en droit d'auteur, celui qui se prévaut de cette protection devant justifier de ce que l''uvre revendiquée présente une physionomie propre traduisant un parti pris esthétique et reflétant l'empreinte de la personnalité de son auteur.

Il appartient donc à Mme [P] [V] et à la société Aphinitea Corporation venant aux droits de la société Ellaechim Trading qui revendiquent une protection au titre du droit d'auteur sur ce modèle de boite dont l'originalité est contestée de caractériser en quoi l''uvre revendiquée porte l'empreinte de la personnalité de son auteur.

Il résulte des éléments fournis au débat par Mme [P] [V] et la société Aphinitea Corporation et notamment des articles de presse publiés en 2011 et 2012 en langues française et anglaise (pièce 4 intimées) que le modèle de contenant jetable opposé est présenté comme créatif, esthétique et recyclable et créé par Mme [P] [V]. Si le certificat de dépôt et d'enregistrement de « copyright » en date du 17 décembre 2020 fait mention d'une date de création du 2 janvier 2009 déclarée par Mme [P] [V] (pièce 6 intimée), cette divergence de date ne remet pas en cause les publications d'articles susvisées en 2011 et 2012 consacrés à ce modèle et précisant le nom de son créateur comme étant Mme [P] [V].

Mme [P] [V] démontre bien être le créateur de ce modèle de boite nommé « Magnolia », ce modèle ayant été divulgué sous son nom en 2011, peu important que les articles en cause fassent état d'un nouveau concept développé et utilisé à [Localité 4].

Pour ce qui est de l'originalité, les intimées, loin de revendiquer un concept de pliage en origami, énumèrent les caractéristiques sur lesquelles des droits d'auteur sont revendiqués : boite en carton érigée à la verticale, présentant une base et des côtés plats, huit rabats, dotée d'un système d'auto-fermeture par pliage, permettant de servir de contenant et notamment de contenir des aliments et pouvant être aplatie pour se transformer en une assiette révélant des pétales arrondis. Ainsi qu'il est démontré, Mme [P] [V] a procédé à des choix de forme, de pliage et de fermeture sans attache alliant ainsi fonction, forme et émotion, la boîte révélant à l'ouverture une fleur aux pétales arrondis au c'ur de laquelle se trouve les produits contenus dans la boîte.

Ces choix arbitraires et esthétiques même s'ils empruntent au concept de pliage en origami qui a été utilisé antérieurement à 2011 font que l'aspect global de l''uvre constituée par le modèle de boite qui figure un bourgeon qui se déploie en fleur à pétales arrondis porte l'empreinte de la personnalité de son auteur.

En conséquence, les modèles divulgués en 1999 et 2006 dans les ouvrages intitulés « Prototypes » et « More Prototypes » publiés par la société Roto Vision invoqués par l'appelante, qui ne reprennent pas cette caractéristique de bourgeon qui se déploie en fleur à pétales arrondis, et la facture du 15 janvier 2008 de la société portugaise Medipub, qui n'est pas traduite en français et qui ne permet pas à la cour de faire le lien entre les produits objets de la factures et la boite en cause, sont inopérants à remettre en cause l'originalité du modèle opposé.

De même, les diverses autres antériorités citées par l'appelante ne sont pas datées de façon certaine et ne peuvent être prises en considération par la cour.

Enfin, la décision du tribunal judiciaire de Paris en date du 8 février 2024 (pièce 13 appelante) qui a dénié toute originalité au modèle opposé par Mme [P] [V] est indifférente, cette décision qui n'a pas été rendue entre les mêmes parties ne liant pas la cour.

La boite « Magnolia » doit en conséquence être considérée comme une 'uvre originale éligible à la protection du droit d'auteur. Le jugement sera confirmé de ce chef.

La société Aphinitea Corporation venant aux droits de la société Ellaechim Trading est licenciée exclusive de ce droit d'auteur en vertu d'une contrat de licence du 2 juin 2017.

Il résulte des deux procès-verbaux de constat dressés par huissier de justice les 5 août 2020 et 23 avril 2021 (pièces 8 et 13 intimées) que la société Ze Boite propose sur son site ze-boite.fr une boîte dénommée « Flower » qui est la reproduction du modèle de la boite « Magnolia », celle-ci reprenant l'ensemble des caractéristiques de ce modèle ainsi que l'a justement relevé le tribunal, ce qui n'est pas discuté par l'appelante.

Les actes de contrefaçon sont ainsi caractérisés.

Les actes de concurrence déloyale étant invoqués à titre subsidiaire, il n'y a pas lieu de statuer à ce titre.

- Sur les mesures réparatrices

Les mesures d'interdiction et de destruction ordonnées par le tribunal seront confirmées.

Les dispositions des articles L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle prévoient que pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération les conséquences économiques négatives de l'atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subies par la partie lésée, le préjudice moral causé à cette dernière et les bénéfices réalisés par l'auteur de l'atteinte.

Il est établi par Mme [P] [V] et la société Ellaechim Trading aux droits de laquelle vient la société Aphinitea Corporation que les faits de contrefaçon ont duré du mois d'août 2020 au mois d'avril 2021, les boites contrefaisantes étant largement diffusées sur le site internet de la société Ze Boite.

Mme [P] [V] et la société Aphinitea Corporation sollicitent la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Ze Boite à payer à Mme [P] [V] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l'atteinte à la valeur patrimoniale de la boite « Magnolia ».

Elles critiquent toutefois la décision entreprise qui a rejeté leur demande au titre du préjudice moral.

La société Ze Boite sollicite l'infirmation du jugement de ce chef en arguant uniquement de l'inexistence de droit d'auteur sur le modèle de boite opposé.

La commercialisation par la société Ze Boite d'un produit reprenant l'ensemble des caractéristiques originales de la boite « Magnolia » dont Mme [P] [V] est l'auteur et la société Aphinitea Corporation le licencié exclusif a causé non seulement un préjudice patrimonial mais également un préjudice moral par banalisation de l''uvre en cause en raison de la commercialisation des boites contrefaisantes pendant près d'une année.

En conséquence, au vu des éléments dont dispose la cour, prenant en considération les conséquences économiques négatives de l'atteinte aux droits de Mme [P] [V] dont le manque à gagner en raison de la commercialisation des boites contrefaisantes, il lui sera alloué la somme totale et définitive de 10 000 euros de dommages et intérêts en indemnisation de son entier préjudice patrimonial au titre de la contrefaçon de droit d'auteur.

Le jugement mérite confirmation de ce chef.

Il sera également alloué à Mme [P] [V] et à la société Aphinitea Corporation la somme 5 000 euros de dommages et intérêts en indemnisation de leur entier préjudice moral au titre de la contrefaçon de droit d'auteur.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

- Sur les autres demandes

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer les dispositions du jugement concernant les dépens et les frais irrépétibles.

Partie perdante, la société Ze Boite sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à Mme [P] [V] et à la société Aphinitea Corporation, en application de l'article 700 du code de procédure civile, une indemnité qui sera, en équité, fixée à la somme de 5 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, dans les limites de l'appel,

Dit recevable l'intervention volontaire de la société Aphinitea Corporation venant aux droits de la société Ellaechim Trading,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté les autres demandes indemnitaires,

Statuant à nouveau sur le chef infirmé et y ajoutant,

Condamne la société Ze Boite à payer à Mme [B] [P] [V] et à la société Aphinitea Corporation venant aux droits de la société Ellaechim Trading la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi en raison des actes de contrefaçon de droit d'auteur,

Condamne la société Ze Boite à payer à Mme [B] [P] [V] et à la société Aphinitea Corporation venant aux droits de la société Ellaechim Trading la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

Condamne la société Ze Boite aux dépens d'appel.