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Décisions

CA Colmar, 1re ch. A, 5 juin 2024, n° 23/00481

COLMAR

Arrêt

Autre

PARTIES

Demandeur :

Mclb (SARL)

Défendeur :

Auto Exclusive 67 (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Walgenwitz

Conseillers :

M. Roublot, Mme Rhode

Avocats :

Me Harter, Me Harnist, Me Tort

TJ Colmar, ch. commerciale, du 15 déc. 2…

15 décembre 2022

Vu l'assignation délivrée le 21 janvier 2020, par laquelle M. [O] [Z] et la SARL MCLB ont fait citer la SARL Auto Exclusive 67 devant la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Colmar,

Vu le jugement rendu le 15 décembre 2022, auquel il sera renvoyé pour le surplus de l'exposé des faits, ainsi que des prétentions et moyens des parties en première instance, et par lequel le tribunal judiciaire de Colmar a statué comme suit :

'DEBOUTE la SARL MCLB de l'intégralité de ses demandes ;

DEBOUTE Monsieur [O] [Z] de l'intégralité de ses demandes ;

CONDAMNE solidairement la SARL MCLB et Monsieur [O] [Z] à supporter les entiers dépens, y compris ceux de la procédure de référé expertise ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de la SARL MCLB et Monsieur [O] [Z] ;

CONDAMNE solidairement la SARL MCLB et Monsieur [O] [Z] à payer à la SARL AUTO EXCLUSIVE 67 la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire par provision de plein droit.'

Vu la déclaration d'appel formée par M. [O] [Z] et la SARL MCLB contre ce jugement et déposée le 27 janvier 2023,

Vu la constitution d'intimée de la SARL Auto Exclusive 67 en date du 14 février 2023,

Vu les dernières conclusions en date du 23 février 2024, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles M. [O] [Z] et la SARL MCLB demandent à la cour de :

'Vu les articles 1240 et suivants, 1604 du Code civil, L 120-1, L 121-2 et suivants, L 213-1, L 213-2 du Code de la consommation, 700 du Code de procédure civile et les pièces produites :

AU PRINCIPAL :

- juger que la société AUTO EXCLUSIVE 67 a, par ses allégations mensongères, trompé la société MCLB et Monsieur [Z],

- juger que la société AUTO EXCLUSIVE 67 a livré un véhicule non-conforme à ses allégations publicitaires et aux spécifications contractuelles,

- infirmer le jugement du 15 décembre 2022,

- condamner la société AUTO EXCLUSIVE 67 à payer à Monsieur [Z] et à la société MCLB les sommes de :

o 43.281,74 € au titre des frais de remise en état et frais annexes tels qu'énumérés par l'expert judiciaire,

o 4.108 € au titre des primes d'assurance réglées par Monsieur [Z] depuis l'avarie du véhicule, somme à parfaire au jour de l'arrêt,

o 7.729,2 € (43.219,20 €-cumul des loyers - 35.490 €-prix d'achat-),

o 5.000 € au titre du préjudice de jouissance,

o 5.000 € au titre de son préjudice moral résultant de l'utilisation par lui-même et ses proches d'un véhicule particulièrement dégradé et dangereux,

o 11.693 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société AUTO EXCLUSIVE 67 à payer à la société MCLB la somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts,

- juger que Monsieur [Z] fera sa seule affaire du règlement de toute somme restant due à la société MCLB en exécution du contrat de location par toute compensation des sommes réglées en exécution des condamnations prononcées à l'encontre de la société AUTO EXCLUSIVE 67,

SUBSIDIAIREMENT, à supposer que la Cour considère ces demandes comme étant des prétentions nouvelles :

- condamner la société AUTO EXCLUSIVE 67 :

o à restituer à la société MCLB le prix de vente, soit la somme de 35.990 €, à charge pour la société MCLB de désintéresser Monsieur [Z] à due concurrence des versements opérés en exécution du contrat de location au jour du jugement à intervenir,

o à reprendre possession du véhicule immobilisé à ses frais et sous sa responsabilité,

o à verser à Monsieur [Z] les sommes suivantes :

* 14.512,01 € au titre des frais de main d'oeuvre de dépose de la culasse, de mise à disposition et de gardiennage du véhicule du 6 mars 2018 au 15 juin 2021 €,

* 2.287,98 € au titre du coût de l'expertise judiciaire,

* 69,75 € au titre des honoraires de l'huissier ayant délivré l'assignation en référé,

* 3.214 € au titre des honoraires de l'avocat ayant engagé les diligences nécessaires en référé et lors de l'expertise,

* 1.432 € et 1.377,78 € au titre des primes d'assurance réglées par Monsieur [Z] de février 2018 à juin 2021

* 5.000 € au titre de son préjudice moral résultant de l'utilisation par lui-même et ses proches d'un véhicule particulièrement dégradé et dangereux,

* 5.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

ET EN TOUTE HYPOTHESE :

- condamner la société AUTO EXCLUSIVE 67 aux entiers dépens dont les honoraires de l'expert judiciaire et le coût du constat d'huissier du 8 décembre 2021.

- Ordonner la publication, aux frais de la société AUTO EXCLUSIVE 67, de tout ou partie de l'arrêt à intervenir dans au moins deux quotidiens d'information régionale (L'Alsace et Les Dernières nouvelles d'Alsace), la surface de la publication devant être équivalente à un quart de page intérieure de chacune des titres mentionnés dans un délai de quinze jours à compter dudit jugement,

- Ordonner l'insertion dans la page d'accueil du site internet http://www.autoexclusive67.fr/ du même texte pendant trois mois à compter du jugement sur une surface au moins égale à la moitié de cette page d'accueil, sous astreinte de 500 € passé un délai de 10 jours à compte de la signification du jugement à intervenir

- Condamner la société AUTO EXCLUSIVE 67 aux entiers dépens dont :

o 2.501,97 € au titre des honoraires de l'expert judiciaire réglés par Monsieur [Z],

o le coût du constat d'huissier du 8 décembre 2021'

et ce, en invoquant, notamment :

- un mandat, confié par M. [Z] à la société MCLB, à la suite de la pollicitation, engageant sa responsabilité d'annonceur, de la société Auto Exclusive 67, avec laquelle des échanges préalables auraient eu lieu, ce mandat aux fins d'acquisition du véhicule, pour mise en location à son profit, fondant les demandes de M. [Z],

- une attitude mensongère de la société Auto Exclusive 67, qui aurait prétendu, jusqu'à ses dernières écritures constituant une volte-face, ne pas connaître M. [Z],

- l'existence de graves désordres affectant le véhicule cédé par la société Auto Exclusive 67, et démentant ses allégations publicitaires, comme établi par les deux expertises successives,

- une action de la société MCLB, fondée non sur le code de la consommation mais sur des dispositions civiles de droit commun, et, s'agissant des prétentions de M. [Z], l'existence d'une faute délictuelle résultant des allégations mensongères imputées à la société intimée, ainsi que d'un manquement à son obligation de délivrance envers les concluants, à défaut de vérification des documents d'entretien, par ailleurs établis en langue étrangère, comme du véhicule lui-même, sur lequel elle n'aurait pratiqué qu'une vidange,

- l'absence de contestation, par la partie adverse, des conclusions d'expert démontrant le caractère mensonger de ses allégations publicitaires et la tromperie qu'elle aurait commise, à la fois, comme annonceur, dans sa présentation du véhicule et, comme vendeur, dans les informations contractuelles délivrées, outre l'absence de diligence de la partie adverse pour s'assurer de l'état du véhicule, comme de l'exactitude du kilométrage, et en occultant l'acte de cession du véhicule à son profit, sans, de surcroît, exercer de recours contre son vendeur, et ce sans qu'il ne soit nécessaire de stipuler sur les caractéristiques essentielles du véhicule,

- une première faute ainsi constituée par le délit de pratique commerciale trompeuse et d'allégation fausse et trompeuse sur le kilométrage et l'entretien du véhicule, dont l'état rendrait peu vraisemblable l'ignorance de l'intimée de ces éléments, ce qui fonderait l'exercice d'une action du tiers au contrat ou d'une responsabilité contractuelle sur la base d'une chaîne de contrats,

- la mauvaise foi de la partie adverse, tenue de connaître les caractéristiques exactes, de surcroît annoncées, de la chose vendue et ne pouvant se prévaloir d'une clause limitative ou exclusive de garantie,

- la circonstance aggravante d'indications frauduleuses tendant à faire croire à une opération antérieure et exacte, consistant en des 'révisions exclusivement en centre Land Rover',

- un manquement à l'obligation de délivrance du vendeur, en vendant un véhicule ayant selon l'expert judiciaire, un kilométrage de l'ordre de 320 000 et non de 98 000 comme mentionné par sa publication publicitaire, puis par sa facture, peu important que l'acheteur soit ou non un professionnel, et sans qu'il ne soit nécessaire de démontrer qu'il était susceptible d'avoir connaissance de ces éléments, et ce d'autant plus qu'il n'aurait jugé utile ni d'appeler en la cause la personne auprès de laquelle il a acquis le véhicule, ni de procéder à une quelconque inspection du véhicule et de ses organes, ni même de s'assurer de l'authenticité ou de la teneur exacte de documents rédigés en langue étrangère, ni, encore d'interroger le constructeur ou son représentant sur le territoire français comme a pu aisément le faire l'expert judiciaire pour conclure à la présentation trompeuse dudit véhicule,

- un préjudice subi par les concluants au titre de la remise en état du véhicule et des frais annexes, qu'ils détaillent, outre un préjudice financier, de jouissance et moral, invoqué par M. [Z], et une demande d'indemnisation à hauteur d'un euro également mise en compte par la société MCLB, demandes dont le caractère nouveau est contesté, et sans incidence de l'absence de demande en restitution, qui n'est présentée qu'à titre subsidiaire, parmi d'autres demandes qui sont détaillées,

- en tout état de cause, la prise de mesures de publication selon des modalités qu'ils développent.

Vu les dernières conclusions en date du 14 février 2024, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles la SARL Auto Exclusive 67 demande à la cour de :

'DECLARER l'appel régularisé par Monsieur [Z] et la SARL MCLB à l'encontre du jugement rendu par la Chambre Commerciale du Tribunal Judiciaire de Colmar le 15 décembre 2022, n° RG 2/00057, mal fondé

LES EN DEBOUTER ainsi que de l'intégralité de leurs fins, moyens et conclusions

En conséquence

CONFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Et, si par extraordinaire la Cour venait à infirmer le jugement rendu par la Chambre Commerciale du Tribunal Judiciaire de Colmar,

Statuant à nouveau,

DEBOUTER Monsieur [Z] et la SARL MCLB de toute demande en lien avec le retard pris dans la réparation du véhicule, comme étant mal dirigées,

LIMITER la condamnation de la société AUTO EXCLUSIVE 67, au titre de la prise en charge des frais de remise en état du véhicule, à la somme de 17.374,62 €

CONDAMNER solidairement Monsieur [Z] et la SARL MCLB à payer à la société AUTO EXCLUSIVE 67 la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de la procédure d'appel'

et ce, en invoquant, notamment :

- un accord sur le prix de vente, élément essentiel du contrat de vente, n'ayant été conclu qu'entre la société MCLB et la société concluante, toutes deux professionnelles de l'automobile, sans participation de M. [Z] aux négociations du prix, ni contreseing du bon de commande par ses soins, excluant toute action de sa part au titre de la responsabilité contractuelle ou du droit de la consommation, et le contrat de location étant exempt d'option d'achat,

- l'irrecevabilité des prétentions nouvelles émises à hauteur d'appel, au titre des frais de remise en état et frais annexes, laissant subsister le contrat, alors que la résolution du contrat était demandée en première instance,

- des relations de la concluante uniquement, s'agissant à tout le moins de la négociation et de la conclusion du contrat, avec la société MCLB, société ayant, de par son activité principale, la qualité de professionnelle de l'automobile, en mesure de vérifier la conformité du véhicule au regard de l'annonce publicitaire et du contrôle technique, ayant renoncé, de surcroît, à toute garantie, et dont la qualité de mandataire à l'achat est contestée,

- l'absence de manoeuvres frauduleuses de la concluante dans le cadre de cette vente entre professionnels, la question se posant d'une légèreté blâmable de la société MCLB, qui avait la possibilité de vérifier l'état du véhicule, sans se fier à l'annonce faisant, certes, état de qualités toutefois non reprises sur le descriptif de présentation du véhicule,

- l'absence de manquement de la concluante à son obligation de délivrance ou de garantie des vices cachés, constatés a posteriori et dont elle n'avait pas connaissance, alors que ni le très bon état du véhicule, ni l'entretien régulier du véhicule en centre Land Rover n'étaient érigés en qualités essentielles à l'achat sans lesquelles la société MCLB n'aurait pas contracté, la concluante ajoutant n'avoir aucune raison de douter du kilométrage ou des conditions d'entretien du véhicule, cette dernière ayant elle-même racheté ce véhicule à un concessionnaire Land Rover, donc à fortiori à un professionnel de l'automobile, et le contrôle technique du véhicule ne révélant aucun défaut,

- l'application de la clause d'exclusion de garantie, contenue dans le bon de commande passé entre les deux sociétés, alors que la garantie des vices cachés n'est pas d'ordre public et peut être limitée entre professionnels de même spécialité, outre que, en tout état de cause, comme retenu par le premier expert, la défaillance n'aurait pas été décelable au jour de la vente,

- sur les demandes de M. [Z], et en l'absence de distinction faite par les appelants dans le traitement de la responsabilité de la concluante envers chacun d'entre eux ni dans la définition de leur dommage respectif, l'inapplicabilité du droit de la consommation, à défaut de contrat de vente conclu avec l'intéressé ; sur la responsabilité contractuelle, même en retenant, à compter du 7 avril 2023, la qualité de propriétaire du véhicule de M. [Z], une action limitée aux droits qu'aurait eus la société MCLB, en sa qualité de professionnelle, à l'encontre de la société concluante, envers laquelle, en toute hypothèse, ne serait démontrée aucune faute, par omission ou négligence, en ne contrôlant pas dans le détail l'état du véhicule litigieux ; et sur la responsabilité délictuelle, l'application du principe de non-cumul des responsabilités, en vertu tant de la jurisprudence que de la clause de substitution prévue à l'article 2 du contrat de location, et, quoi qu'il en soit, l'impossibilité, pour le tiers lésé, de fonder son action sur le seul manquement à une obligation contractuelle de résultat pour caractériser la faute délictuelle, à défaut de démonstration de la faute de la concluante, ce qui suppose de démontrer qu'elle avait effectivement connaissance des vices affectant le véhicule, et même en cas de faute, son absorption par la propre faute de la société MCLB dans l'exécution de ses obligations contractuelles à l'égard de M. [Z], notamment en exigeant la clause d'exonération de garantie,

- en tout état de cause, dès lors que l'ordonnance définitive du 23 janvier 2019 du tribunal de grande instance de Nîmes, ordonnant la mesure d'expertise judiciaire, a déjà statué sur la charge des dépens devant sur les demandeurs, à savoir M. [O] [Z] et la SARL MCLB, sans qu'aucun appel ne soit interjeté à son encontre, le nécessaire rejet de la demande de la condamnation de la société AUTO EXCLUSIVE 67 aux honoraires de l'expert judiciaire, comme à ceux du constat d'huissier du 8 décembre 2021, parfaitement inutiles en présence d'une expertise en cours,

- la rupture du lien de causalité par la faute de la société MCLB en sa qualité de loueur.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 28 février 2024,

Vu les débats à l'audience du 20 mars 2024,

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS :

Sur l'irrecevabilité des demandes 'nouvelles' :

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. En outre, il résulte des articles 565 et 566 du même code, que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges, même si leur fondement juridique est différent, les parties pouvant aussi expliciter les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises aux premiers juges et ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément.

La société Auto Exclusive 67 fait grief aux parties appelantes de former, à hauteur de cour, des demandes nouvelles en sollicitant l'allocation de frais de remise en état et autres frais annexes, laissant subsister le contrat, alors que la résolution du contrat était demandée en première instance.

Or, la société Auto Exclusive 67 ne conclut pas à l'irrecevabilité des prétentions adverses dans la partie 'dispositive' de ses conclusions.

Pour autant, en vertu de l'article 564 précité, et dès lors que le moyen de l'irrecevabilité se trouve dans les débats, il appartient à la cour de le relever d'office.

À cet égard, si les parties désormais appelantes invoquaient déjà, devant la juridiction de première instance, notamment le bénéfice de l'article 1240 du code civil et sollicitaient l'indemnisation de frais de main d'oeuvre et primes d'assurance, elles demandaient la reprise du véhicule et la restitution du prix de vente, de sorte que les demandes qu'elles forment devant la cour au titre des frais de remise en état et frais annexes, en tant qu'elles excèdent les montants sollicités en première instance, et sollicités à nouveau à titre subsidiaire, apparaissent bien comme nouvelles et comme s'inscrivant dans le cadre d'une action en responsabilité laissant, contrairement à celle sous-tendant les autres chefs de préjudice sollicités, subsister le contrat, dont l'anéantissement était demandé au juge de première instance.

Dans ces conditions, s'il est vrai que ces demandes ne tendent ni aux mêmes fins que les prétentions soumises aux premiers juges, ni n'en constituent l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire, il n'en demeure pas moins qu'elles ne relèvent pas de la survenance ou de la révélation d'un fait nouveau, le choix de M. [Z] de devenir propriétaire du véhicule et de renoncer, par conséquent, à ses demandes d'annulation du contrat conclu avec la société Auto Exclusive 67 relevant, certes, de sa volonté, mais étant de nature à modifier l'économie du litige et, en particulier, le fondement des prétentions des parties et le préjudice dont elles peuvent justifier, sans que l'évolution de la position de M. [Z] qui invoquait en première instance la dangerosité du véhicule, choisissant par la suite de le racheter, moyennant tout de même une remise en état à ses frais avancés, ne puisse être regardée comme susceptible d'avoir des conséquences sur la recevabilité de ses demandes.

La cour déclarera donc recevable le chef de demande formulé au titre des frais de remise en état et frais annexes, à l'instar des autres chefs de demande formulés par les appelants.

Sur les demandes de M. [Z] et de la société MCLB :

Tout d'abord, il y a lieu d'observer qu'à hauteur de cour, les parties appelantes visent, à l'appui de leurs demandes, les articles '1240 et suivants, 1604 du Code civil, L. 120-1, L 121-2 et suivants, L. 213-1, L. 213-2 du Code de la consommation', tout en affirmant que 'la société MCLB a expressément fondé ses demandes sur les dispositions civiles de droit commun et non les dispositions du Code de la consommation', tout en précisant ensuite que 'il est de plus rappelé que les concluants avaient fondé leurs demandes en première instance sur les articles L. 120-1, L. 121-2 et suivants, L. 213-1, L. 213-2 du Code de la consommation, 1240 et suivants du Code civil, 700 du Code de procédure civile et les pièces produite[s]'.

Cela étant, la cour, tout en relevant une certaine confusion dans l'invocation des fondements des demandes des appelants, note qu'ils entendent reprocher à la société intimée d'une part, des pratiques mensongères, d'autre part un manquement à l'obligation de délivrance, de sorte que leurs demandes apparaissent relever de l'application des articles 1240 et 1604 du code civil, les premiers juges ayant, au demeurant et pour le surplus, relevé par de justes motifs que la cour approuve, que la société MCLB avait conclu le contrat litigieux dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale, de sorte qu'il ne relevait pas de l'application des dispositions invoquées du code de la consommation, étant à cet égard ajouté que la cour, tout comme d'ailleurs les juges de première instance dans le cadre de la présente procédure, n'est pas compétente pour statuer sur le délit de pratique commerciale trompeuse dont les appelants font grief à l'intimée.

De la même manière, les appelants entendent opposer à la partie adverse une présomption de connaissance des vices qui n'aurait lieu d'être, que dans le cadre d'une action sur le fondement des vices cachés, laquelle n'est pas invoquée en l'espèce.

La cour doit aussi tirer les conséquences de la cession du véhicule litigieux par la société MCLB à M. [O] [Z], dont il est justifié par la production du certificat de cession en date du 7 avril 2023, ce document administratif ne permettant, certes, pas de connaître le montant de la cession.

Quoi qu'il en soit, cette opération a eu pour effet de transférer, avec la chose, en l'espèce le véhicule, à M. [Z] les droits contractuels dont disposait le premier acheteur, à savoir la société MCLB. Or, en raison du principe du non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle, lorsqu'un sous-acquéreur cherche à engager la responsabilité du vendeur initial, en raison d'un défaut caché ou d'une non-conformité de la chose, son action directe est 'nécessairement de nature contractuelle' (Cass. 1ère Civ., 9 oct. 1979, Bull. 1979, I, n° 241).

Quant à la société MCLB, qui était liée contractuellement à la société Auto Exclusive 67, elle ne saurait désormais se prévaloir d'un manquement délictuel de son vendeur, en tout cas tant que l'on se place dans le cadre de l'exécution du contrat, pas plus, d'ailleurs, qu'elle ne justifie d'un préjudice, à tout le moins matériel, car si les éléments versés aux débats laissent à penser que le véhicule a été cédé à M. [Z] après avoir été remis en état, il n'est pas établi que le montant de cette vente aurait été préjudiciable à la société MCLB qui était à même de céder à M. [Z] un véhicule remis en état au prix du marché.

Ceci précisé, la cour relève que le véhicule litigieux, tel qu'il a été vendu à la société MCLB, figurait sur l'annonce parue sur 'le Bon Coin' comme ayant 98 000 km et se trouvant 'en très bon état, révisé exclusivement en centre Land Rover'.

Or, non seulement le rapport d'expertise judiciaire, venant en cela conforter le rapport de l'expert amiable, a relevé sur le véhicule, pourtant cédé par un professionnel de l'automobile, de multiples dysfonctionnements ou défectuosités, de nature à rendre le véhicule 'impropre à l'usage auquel il est destiné', tels de multiples fuites d'huile ou des défauts affectant les têtes de piston, les cylindres ou l'admission turbo, mais aussi les injecteurs, les arbres de roue et la vanne EGR, mais encore une 'incohérence kilométrique', puisque le kilométrage réel était estimé à 135 000 km. Outre que les désordres relevés apparaissent révélateurs d'un défaut d'entretien suivi, les documents versés, en langue étrangère et plus particulièrement en caractère cyrillique, si l'on excepte, il est vrai la mention 'Land Rover', ne sauraient être regardés comme attestant à suffisance d'un entretien et/ou d'une révision exclusive en centre Land Rover comme indiqué dans l'annonce.

Il s'infère de ce qui précède, que la société Auto Exclusive 67, sans incidence de l'ignorance des vices allégués, a manqué à son obligation de délivrance conforme, sans pouvoir opposer à la partie adverse le bénéfice de clauses limitatives ou exclusives de garantie, telle que celle qui ressort du bon de commande mentionnant 'véhicule vendu au marchand sans garantie', ce qui ne fait pas obstacle à l'exigence de livraison d'un véhicule promis en 'très bon état'.

L'acquéreur, et en l'occurrence son ayant droit, est fondé, même s'il ne poursuit pas la résolution du contrat de vente, à solliciter réparation des préjudices causés par la violation, par le vendeur, de son obligation de délivrance.

M. [Z] est bien fondé à mettre en compte, à ce titre :

- les frais de remise en état du véhicule, tels qu'évalués à bon droit par l'expert pour un montant de 16 897,62 euros TTC, cette remise en état étant la conséquence directe de la non-conformité et supposant la remise du véhicule en 'très bon état',

- les frais annexes énumérés par l'expert et constituant, également, une conséquence directe du défaut de conformité allégué, ayant rendu nécessaire non seulement l'organisation d'une mesure d'expertise, d'abord à titre amiable, et donc la mise à disposition du véhicule à cette fin, mais également son immobilisation dans l'attente de l'issue du présent litige, jusqu'à ce que M. [Z] décide de l'acquérir après remise en état, soit un montant total de frais annexes de 17 440 euros,

- le surcoût lié à la location pour un montant de 7 729,20 euros, dont M. [Z] n'a pu bénéficier pendant la durée du contrat, sans qu'il n'y ait lieu d'indemniser séparément le préjudice de jouissance,

- le coût des primes d'assurance exposées en pure perte en présence d'un véhicule non conforme, que la cour évaluera, au regard des pièces produites aux débats et de la date d'acquisition du véhicule par M. [Z], à un montant de 3 500 euros,

- un préjudice moral d'un montant de 500 euros destiné à indemniser les conséquences et les risques liés à l'utilisation d'un véhicule non conforme, cette utilisation ayant, cependant, été très limitée dans le temps, le véhicule ayant rapidement été immobilisé.

La société Auto Exclusive 67 sera donc condamnée au paiement à M. [Z] de la somme de 46 066,82 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, et ce en infirmation du jugement entrepris qui avait débouté M. [Z] de ses demandes.

Quant à la société MCLB, il n'y a pas lieu, pour les raisons qui ont été précisées précédemment, de faire droit à ses demandes communes à M. [Z], outre que, si elle formule, en propre, une demande d'indemnisation à hauteur de 5 000 euros (le montant d'un euro apparaissant dans le corps des conclusions), elle ne s'en explique que pour indiquer

avoir été confrontée aux pratiques mensongères de la société Auto Exclusive 67, qui n'aurait 'pas daigné, de l'expertise amiable jusqu'à la procédure au fond, tenter la moindre résolution amiable qui aurait évité la poursuite des instances'. Cela étant, la nécessité dans laquelle elle a été d'introduire, puis de poursuivre peut être, le cas échéant, indemnisée à suffisance par l'octroi de frais irrépétibles.

Pour le surplus, il sera rappelé qu'elle a perçu les loyers de la part de M. [Z], alors même que le véhicule était immobilisé et lui a revendu le véhicule. Elle sera donc déboutée de ses demandes, en confirmation, sur ce point, du jugement entrepris.

Quant aux mesures de publication sollicitée, la cour considère que la publication du dispositif du présent arrêt doit être ordonnée sur la page d'accueil du site internet http://www.autoexclusive67.fr/ pendant trois mois à compter de la signification du présent arrêt, sur une surface au moins égale à la moitié de cette page d'accueil, sous astreinte de 150 euros par jour passé un délai de 10 jours à compter de la signification du présent arrêt, sans qu'il n'apparaisse nécessaire de faire droit au surplus des demandes de publication sollicitées.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La partie intimée, succombant pour l'essentiel, sera tenue des dépens de l'appel, par application de l'article 696 du code de procédure civile, ainsi que de ceux de la première instance, en infirmation du jugement déféré sur cette question, sans pour autant inclure ceux de l'expertise judiciaire, laissés à la charge des demandeurs par le juge des référés, ni ceux du constat d'huissier en date du 8 décembre 2021, dont l'utilité n'est pas démontrée.

L'équité commande en outre de mettre à la charge de l'intimée une indemnité de procédure pour frais irrépétibles de 6 000 euros au profit des appelants, tout en disant n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de ces derniers, et en infirmant les dispositions du jugement déféré de ce chef.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Infirme le jugement rendu le 15 décembre 2022 par la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Colmar, sauf en ce qu'il a débouté la SARL MCLB de l'intégralité de ses demandes,

Confirme le jugement entrepris de ce seul chef,

Statuant à nouveau des chefs de demande infirmés et y ajoutant,

Condamne la SARL Auto Exclusive 67 à payer à M. [O] [Z] la somme de 46 066,82 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Ordonne la publication du dispositif du présent arrêt sur la page d'accueil du site internet http://www.autoexclusive67.fr/ pendant trois mois à compter de sa signification, sur une surface au moins égale à la moitié de cette page d'accueil, sous astreinte de 150 euros par jour passé un délai de 10 jours à compter de la signification du présent arrêt,

Condamne la SARL Auto Exclusive 67 aux dépens de première instance et d'appel, à l'exclusion des frais de l'expertise judiciaire et des frais d'huissier de justice, liés à l'établissement du constat en date du 8 décembre 2021,

Condamne la SARL Auto Exclusive 67 à payer à M. [O] [Z] et à la SARL MCLB, ensemble, la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la SARL Auto Exclusive 67.