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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 6, 12 juin 2024, n° 22/10424

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Société Générale (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Braud

Vice-président :

M. Bailly

Conseiller :

Mme Chaintron

Avocats :

Me Barbelane, Me Gastebled, Me Rieth

TJ Paris, 9e ch. 2e sect., du 25 mars 20…

25 mars 2022

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

[S] [G] était titulaire d'un compte no [XXXXXXXXXX01] dans les livres de la Société générale. Trois virements étaient réalisés au débit du compte :

' 30 000 euros le 12 novembre 2013 ;

' 130 000 euros le 7 décembre 2013 ;

' 100 000 euros le 17 décembre 2013.

Suivant une offre préalable du 28 novembre 2013, acceptée le 5 décembre 2013, la Société générale consentait à [S] [G] un prêt d'un montant de 334 935,02 euros, d'une durée de 144 mois, portant intérêt au taux fixe de 4,05 % l'an. Le taux effectif global mentionné était de 5,48 % l'an, et le taux de période mensuel de 0,456 9 %.

Ce prêt faisait l'objet d'un avenant émis le 12 décembre 2013 et accepté le 14 décembre 2013, destiné à informer l'emprunteur d'une surprime d'assurance.

Par exploit en date du 9 novembre 2018, [S] [G] a assigné la Société générale devant le tribunal de grande instance de Paris en responsabilité du fait des virements et du prêt, en annulation de celui-ci, en annulation de la stipulation d'intérêts ou subsidiairement en déchéance du droit aux intérêts.

Par jugement contradictoire en date du 25 mars 2022, le tribunal judiciaire de Paris a :

' Débouté [S] [G] de l'ensemble de ses demandes ;

' Condamné [S] [G] aux dépens, dont distraction au profit de la société civile professionnelle Lussan ;

' Condamné [S] [G] à verser à la Société générale la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' Déclaré n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration du 27 mai 2022, [S] [G] a interjeté appel du jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 18 avril 2024, [S] [G] demande à la cour de :

- INFIRMER la décision du 25 mars 2022 en ce qu'elle a débouté Madame [G] de l'ensemble de ses demandes tendant à voir:

"Condamner la SOCIETE GENERALE à la somme de 260.000 euros au titre du préjudice financier subi par Madame [G] au titre des virements litigieux ;

Prononcer la nullité de l'acte de prêt, de l'avenant et de l'acte notarié de prêt ;

Condamner la SOCIETE GENERALE à verser à Madame [G] l'ensemble des intérêts indûment versés du fait de la nullité ;

Condamner la SOCIETE GENERALE à hauteur du capital restant dû au titre du préjudice financier subi par du fait de son manquement à l'obligation d'information, de conseil et de mise en garde mais aussi de la nullité du contrat de prêt;

En tout état de cause, prononcer à titre principale, la nullité de la clause de stipulation d'intérêts du prêt, de l'avenant et de l'acte notarié et la substitution au taux d'intérêt conventionnel, du taux légal applicable ou à titre subsidiaire, la déchéance du droit aux intérêts à hauteur du taux d'intérêt légal soit, 0,04% ;

Condamner la SOCIETE GENERALE à payer à Madame [G] la somme correspondant aux intérêts indûment versés au titre du prêt depuis sa conclusion jusqu'au jour des présentes, sauf à parfaire ;

Enjoindre à titre subsidiaire si la nullité du prêt ne devait pas être prononcée la SOCIETE GENERALE, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un avenant accompagné d'un nouveau tableau d'amortissement, prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal applicable au jour de la décision à intervenir, au taux conventionnel ;

Condamner la SOCIETE GENERALE à payer la somme de 10.000 euros au titre du préjudice moral de Madame [G] ;

Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;

Condamner la SOCIETE GENERALE à payer la somme de 5.000,00 euros à Madame [G] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la SOCIETE GENERALE aux entiers dépens, en application de l'article 699 du code de procédure civile."

- INFIRMER la décision du 25 mars 2022 en ce qu'elle a condamné Madame [G] aux dépens, dont distraction au profit de la SCP LUSSAN ;

- INFIRMER la décision du 25 mars 2022 en ce qu'elle a condamné Madame [G] verser à la SOCIETE GENERALE la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

ET STATUANT A NOUVEAU

- CONDAMNER la Société Générale à la somme de 260.000 euros au titre du préjudice financier subi par Madame [G] au titre des virements litigieux ;

- PRONONCER la nullité de l'acte de prêt, de l'avenant et de l'acte notarié de prêt ;

- CONDAMNER la Société Générale à verser à Madame [G] l'ensemble des intérêts indûment versés du fait de la nullité ;

- CONDAMNER la Société Générale à hauteur de 334.935,02 euros au titre du préjudice financier subi par du fait de son manquement à l'obligation d'information, de conseil et de mise en garde mais aussi de la nullité du contrat de prêt;

- EN TOUT ETAT DE CAUSE, PRONONCER à titre principal, la nullité de la clause de stipulation d'intérêts du prêt, de l'avenant et de l'acte notarié et la substitution au taux d'intérêt conventionnel, du taux légal applicable ou à titre subsidiaire, la déchéance du droit aux intérêts à hauteur du taux d'intérêt légal soit, 0,04% ;

- CONDAMNER la Société Générale à payer à Madame [G] la somme correspondant aux intérêts indûment versés au titre du prêt depuis sa conclusion jusqu'au jour des présentes, sauf à parfaire ;

- ENJOINDRE A TITRE SUBSIDIAIRE SI LA NULLITE DU PRET NE DEVAIT PAS ETRE PRONONCEE la Société Générale, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8 ème jour suivant la signification de la décision à intervenir, de produire un décompte de sa créance, prenant en considération cette substitution du taux d'intérêt légal applicable au jour de la décision à intervenir, au taux conventionnel ;

- CONDAMNER la Société Générale à payer la somme de 10.000 euros au titre du préjudice moral de Madame [G] ;

- CONDAMNER la Société Générale à payer la somme de 5.000,00 euros à Madame [G] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNER la Société Générale aux entiers dépens, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 8 avril 2024, la société anonyme Société générale demande à la cour de :

CONFIRMER le jugement du Tribunal judiciaire de Paris en date du 25 mars 2022, en ce qu'il :

- « DÉBOUTE Madame [S] [G] de l'ensemble de ses demandes ;

- CONDAMNE Madame [S] [G] aux dépens, dont distraction au profit de la SCP LUSSAN ;

- CONDAMNE Madame [S] [G] à verser à la Société Générale la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ; »

En tout état de cause,

ECARTER des débats l'attestation de Madame [M] [U]

DEBOUTER Madame [G] de l'ensemble de ses demandes, moyens, fins et conclusions

CONDAMNER Madame [G] à payer la somme de 5.000 € à SOCIÉTÉ GÉNÉRALE en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile.

La CONDAMNER aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP LUSSAN.

Pour l'essentiel, les parties développent les moyens et arguments suivants.

I. ' Sur la responsabilité de la Société générale au titre des virements litigieux.

A. ' Sur la forclusion de Mme [G] en son action en responsabilité au visa des dispositions du code monétaire et financier.

Mme [G] fait valoir qu'en vertu de l'article 1147 devenu 1231-1 du même code, le débiteur peut être condamné au payement de dommages et intérêts à raison de l'inexécution d'une obligation. En vertu des dispositions du code monétaire et financier, sont considérés comme moyens de payement tous les instruments qui permettent à toute personne de transférer des fonds, quel que soit le support ou le procédé technique utilisé. Une opération de payement est autorisée si le payeur a donné son consentement à son exécution. En l'absence d'un tel consentement, l'opération ou la série d'opérations de payement est réputée non autorisée. En cas d'opération de payement non autorisée signalée par l'utilisateur dans les conditions prévues à l'article L. 133-24 du même code, le prestataire de services de payement du payeur rembourse immédiatement au payeur le montant de l'opération non autorisée et, le cas échéant, rétablit le compte débité dans l'état où il se serait trouvé si l'opération de payement non autorisée n'avait pas eu lieu. Le payeur et son prestataire de services de payement peuvent décider contractuellement d'une indemnité complémentaire. Lorsqu'un utilisateur de services de payement nie avoir autorisé une opération de payement qui a été exécutée, ou affirme que l'opération de payement n'a pas été exécutée correctement, il incombe à son prestataire de services de payement de prouver que l'opération en question a été authentifiée. La Cour de cassation rappelle que « le banquier ne se dessaisit valablement des fonds ou des titres inscrits dans ses livres au nom de son client que sur les ordres du titulaire du compte, de son représentant légal ou des personnes qu'ils ont habilitées et qu'il lui appartient d'établir la régularité des ordres de virement qu'il a exécutés ». En l'espèce, Mme [G] a été informée à son retour en France par le directeur de l'agence « [Localité 9] Mirabeau » de la Société générale que son compte était en situation de découvert. Mme [G] fait valoir que la Société générale lui a ensuite fait souscrire un prêt afin de combler ce découvert non autorisé et de pallier ses propres carences.

Mme [G] fait valoir que la Société générale prétend qu'elle serait forclose sur le fondement de l'article L. 133-18 du code monétaire et financier, prévoyant un délai de treize mois pour contester les virements litigieux. Mme [G] cependant fait valoir qu'elle engage la responsabilité de la Société générale sur le fondement de l'article 1147 du code civil, alors applicable, notamment en qualité de mandataire. Il est de jurisprudence constante que si la banque a commis une faute dans l'exécution d'une opération, elle ne peut s'exonérer de sa responsabilité contractuelle du fait de sa mauvaise exécution contractuelle. Il s'agit de deux actions distinctes, l'un en remboursement automatique en cas de contestation fondée sur le code monétaire et financier, l'autre en responsabilité contractuelle du fait de la qualité de mandataire de la banque. En tout état de cause, il convient de préciser que le délai de treize mois n'est pas applicable lorsque l'établissement de crédit n'est pas en mesure de justifier avoir informé sa cliente conformément aux dispositions du chapitre IV du titre 1er du livre III du code monétaire et financier. En l'espèce, Mme [G] a été informée oralement par son agence de la situation débitrice de son compte et du besoin de régulariser ladite situation dans les plus brefs délais. Il ne s'agissait pas d'une information écrite conformément aux dispositions précitées. Si le

tribunal a retenu que la Société générale avait valablement produit aux débats des relevés du compte de Mme [G], faisant état des virements litigieux, la jurisprudence récente rappelle qu'il appartient au créancier de rapporter la preuve de l'exécution des formalités légales auxquelles il est tenu et que la seule production de la copie de lettres d'information ne suffit pas à justifier de leur envoi. Au cas particulier des relevés de compte, la jurisprudence a pu confirmer que la seule production de relevés de compte ne suffisait pas à démontrer leur envoi et leur réception.

La Société générale fait valoir qu'en vertu des articles L. 133-18 et L. 133-24 du code monétaire et financier, l'utilisateur du service de payement qui constate l'existence d'une opération de payement non autorisée peut la signaler à son prestataire de services de payement. Cependant, pour qu'une telle contestation puisse donner lieu à un effet juridique, il est nécessaire qu'elle intervienne dans un délai de treize mois suivant la date de débit, sous peine de forclusion. En l'espèce, Mme [G] sollicite la condamnation de Société générale au payement de la somme de 260 000 euros correspondant à trois virements bancaires qu'elle présente comme « non autorisés » réalisés entre le 12 novembre 2013 et le 17 décembre 2013. Cependant, lorsque Mme [G] a porté le présent contentieux devant le tribunal judiciaire de Paris par acte du 9 novembre 2018, ses demandes étaient déjà forcloses s'agissant de l'intégralité de ces opérations, la dernière l'étant depuis le 17 janvier 2015.

La Société générale fait valoir que si Mme [G] prétend que le délai de forclusion de treize mois ne serait pas applicable en l'espèce, car elle engagerait la responsabilité de la Société générale sur le fondement de l'article 1147 du code civil, ce raisonnement est manifestement erroné. Mme [G] ne fonde pas ses demandes au seul visa de l'article 1147 ancien du code civil, mais également au visa des articles L. 311-3, L.133-6, L.133-7 et L.133-18 du code monétaire et financier, qui définissent le régime juridique spécial applicable à la contestation des opérations de payement et notamment des opérations de payement non autorisées. Elle reproduit dans ses conclusions l'article L.133-18 du code monétaire et financier selon lequel il est expressément indiqué qu'en cas d'opération de payement non autorisée, l'utilisateur doit le signaler dans les conditions prévues à l'article L. 133-24 du code monétaire et financier. Il est donc indiscutable que les dispositions spéciales relatives à la contestation des opérations de payement ont vocation à s'appliquer en l'espèce, et tout particulièrement l'article L. 133-24 du code monétaire et financier prévoyant un délai de forclusion de treize mois. Contrairement à ce que Mme [G] croit pouvoir soutenir, elle ne dispose pas de la faculté de choisir, pour engager la responsabilité de la banque au titre de virements prétendument non autorisés, entre une action « en remboursement automatique » prévue par l'article L. 133-18 du code monétaire et financier, d'une part, et une action en « responsabilité contractuelle du fait de sa qualité de mandataire » sur le terrain de l'article 1147 ancien du code civil, d'autre part, seuls les articles L. 133-18 et suivants du code monétaire et financier étant applicables aux opérations de payement non autorisées, à l'exclusion de l'article 1147 ancien du code civil. Si Mme [G] prétend, par ailleurs qu'elle aurait été informée des virements litigieux oralement, par téléphone, de sorte qu'elle n'aurait reçu aucune « information écrite conformément aux dispositions du chapitre IV du titre 1er du livre III du code monétaire et financier », cela est erroné en ce qu'elle a été rendue destinataire des relevés de compte sur lesquels figurent les virements objet du litige, de sorte qu'elle ne peut valablement prétendre ne pas avoir été informée par écrit de l'existence des virements litigieux. Il est de jurisprudence que la production par la banque de l'ensemble des relevés bancaires suffit à prouver que la banque les a valablement adressés à son client, sauf si ce dernier apporte la preuve d'éléments permettant de douter qu'il les ait bien reçus. La jurisprudence rappelle également qu'un client qui ne s'est jamais plaint pendant plusieurs années de ne pas avoir été destinataire de ses relevés de compte, n'est plus fondé à soutenir que la banque ne les lui aurait pas envoyés, car il lui appartenait en cas d'absence de réception de ses relevés périodiques d'en aviser sa banque. L'arrêt dont se prévaut Mme [G] dans ses écritures est un arrêt d'espèce portant sur le taux d'intérêt applicable en matière de compte professionnel, non applicable au présent litige.

B. ' Sur la responsabilité de la Société générale au visa des obligations incombant au mandataire gestionnaire.

Mme [G] fait valoir que l'article 1992 du code civil prévoit que le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion. La jurisprudence a posé le principe de la responsabilité de plein droit du banquier teneur de compte en cas d'exécution d'un ordre donné par une personne non habilitée. Le banquier ne saurait invoquer son absence de faute pour échapper à sa responsabilité. La Société générale se doit ainsi de voir sa responsabilité engagée pour avoir exécuté des virements non autorisés par Mme [G], ayant créé un découvert de plus de 300 000 euros.

La Société générale n'a pas explicitement conclu sur ce point.

C. ' Sur la responsabilité contractuelle de la Société générale du fait du découvert créé par les virements.

Mme [G] fait valoir que la Société générale se doit, en tout état de cause, de voir sa responsabilité engagée du fait des virements litigieux, dès lors qu'elle a laissé le compte de Mme [G] être en situation de découvert de plus de 300 000 euros alors qu'aucune autorisation de découvert n'existait.

La Société générale n'a pas explicitement conclu sur ce point.

D. ' Sur l'existence d'une procuration.

Mme [G] fait valoir, à titre liminaire, qu'elle reconnaît la teneur du courriel du 13 novembre 2013 par lequel elle confirme l'existence d'une procuration. Mme [G] rappelle elle-même que M. [B] pouvait signer à sa place tout ordre de virement. Il n'est ainsi pas contesté que M. [B] avait procuration et qu'un premier virement de 30 000 euros a été autorisé par lui. Ce courrier ne saurait cependant être assimilé à une demande de virement en ce qu'il ne fait que constater une situation et qu'il date du 13 novembre 2023, là où le relevé bancaire communiqué par la Société générale laisse apparaître que le virement a été réalisé la veille. En tout état de cause, il incombe aussi à la Société générale de justifier de l'existence des ordres de virements signés, soit de la main de Mme [G], soit de la main de M. [B] du fait de sa procuration. À défaut, elle engage sa responsabilité.

La Société générale fait valoir qu'en toute hypothèse, les virements objet du litige ont bien été autorisés par Mme [G] qui a écrit à Société générale pour lui demander d'y procéder dans les meilleurs délais afin d'aider son fils qui rencontrait des difficultés financières, tout en soulignant par ailleurs qu'il disposait d'une procuration sur son compte. Ainsi, à supposer même que les demandes de Mme [G] ne soient pas forcloses, elles seraient manifestement infondées.

II. ' Sur la validité de l'attestation de Mme [U].

Mme [G] fait valoir, à titre liminaire, qu'alors même que la Société générale a refusé de communiquer les ordres de virements, ce qui aurait pourtant confirmé l'intégralité de la position de Mme [G], la Société générale n'a eu de cesse de soutenir que cette dernière mentait afin d'essayer de reprocher à la banque sa situation financière. En suite du jugement, Mme [G] s'est vue remettre une attestation de Mme [U], la directrice de l'agence « [Localité 9] [Localité 8] » de la Société générale chargée des comptes de Mme [G], et ayant succédé à un précédent directeur d'agence en raison de manquements de ce dernier. Mme [U] atteste notamment du fait qu'aux fins « d'apurer la dette » et d'« effacer l'historique douteux » du découvert litigieux, le responsable de l'époque avait accordé un crédit de trésorerie englobant le découvert en compte et les crédits en cours de Mme [G]. Mme [U] fait, par ailleurs, état des « conséquences dramatiques » que ce prêt a eu à l'égard de Mme [G], exposée depuis dix ans maintenant à une grande précarité financière. Mme [G] fait valoir que cette attestation confirme son argumentaire, tant sur la question des virements litigieux que la question de la nullité du contrat ou du manquement à l'obligation de conseil et de mise en garde de la banque.

La Société générale fait valoir qu'en vertu de l'article 202 du code de procédure civile, l'attestation comporte la « relation des faits auxquels son auteur a assisté ou qu'il a personnellement constatés ». Or, Mme [U] fait référence à l'historique des opérations du compte afin d'étayer ses propos et indique que le compte litigieux n'était pas de son ressort. Elle n'a ainsi ni assisté, ni personnellement constaté les faits qu'elle relate dans l'attestation, ce qui constitue une violation de l'article 202 du code de procédure civile précité. La Société générale fait aussi valoir que si Mme [U], arrivée à son poste en 2014, déclare que le compte de M. [B] était en situation de découvert de plus de 400 000 euros, ayant été comblé par « le crédit de trésorerie » accordé à Mme [G], elle n'a pu chronologiquement assister à ces opérations, le crédit ayant été accordé à cette dernière en 2013. L'attestation versée aux débats par Mme [G] est ainsi dépourvue de toute force probante et doit être écartée des débats.

III. ' Sur la nullité du contrat de prêt.

A. ' Sur la nullité du contrat de prêt pour erreur et dol.

Mme [G] fait valoir qu'en vertu des articles 1109 et 1110 du code civil alors applicables, il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol. L'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet. En l'espèce, il est manifeste que le consentement de Mme [G] a été donné par erreur puisque la Société générale lui a présenté un prêt afin de rembourser un découvert qui ne lui était pas imputable, ce que la Société générale ne pouvait par ailleurs ignorer. Mme [G] fait valoir qu'elle était, quant à elle, parfaitement ignorante de la situation réelle de son compte et des virements opérés.

Mme [G] fait valoir qu'en vertu des dispositions du code civil alors applicables, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. L'article 1315 du code civil prévoit, par ailleurs, que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le payement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. La Cour de cassation précise que le banquier est tenu de délivrer une information complète mentionnant tant les avantages que les risques inhérents et qui sont le corollaire des avantages annoncés par le « professionnel boursier ». En l'espèce, force est de constater que la Société générale s'est abstenue d'informer Mme [G] de la situation réelle de son compte, que les virements réalisés avaient été faits sans son autorisation et qu'elle avait la possibilité de les contester. Il incombe ainsi à la Société générale de justifier du fait qu'elle ait informé Mme [G] des conséquences de la souscription d'un tel prêt, alors même que les fonds n'étaient pas dus par Mme [G].

Mme [G] fait valoir, sur l'intention dolosive, qu'il est de jurisprudence constante de la Cour de cassation que le dol peut être constitué par le silence d'une partie dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter. L'intention dolosive dans ce dossier est manifeste dès lors que la Société générale ne pouvait ignorer que les virements n'avaient pas été réalisés à la demande de Mme [G]. En dépit de cette connaissance de la situation, la Société générale n'a pas entendu en informer Mme [G] et lui a fait souscrire un prêt afin de pallier ses propres carences. Le tribunal a estimé de manière erronée que, dès lors que les opérations n'avaient pas été contestées dans le délai de treize mois, elles étaient nécessairement autorisées. Le tribunal judiciaire semble aussi omettre que, dans le cadre de la procédure de première instance, Mme [G] a, par voie d'incident, sollicité que lui soient communiqués les ordres de virement des trois opérations litigieuses. Le juge de la mise en état a fait droit à cette demande. Ces ordres de virement n'ont cependant jamais été communiqués, la Société générale prétextant ne pas les retrouver. Ainsi, il convient de conclure que les virements n'ont jamais été autorisés.

La Société générale fait valoir que le tribunal a jugé que Mme [G] ne justifiait nullement sa demande de nullité, mais se contentait de procéder au soutien de chacune de ses demandes par pures allégations. Mme [G] affirme qu'elle « était parfaitement ignorante quant à la situation réelle de son compte et quant aux virements opérés », et qu'il appartenait à Société générale de l'informer de la situation réelle de son compte, que les virements avaient été fait sans son autorisation et qu'elle avait la possibilité de les contester. Or, Mme [G] a été rendue destinataire des relevés de compte sur lesquels figurent les virements objet du litige, de sorte qu'elle ne peut valablement prétendre avoir ignoré la situation exacte de son compte quant aux virements opérés, sauf à admettre qu'elle ait fait preuve d'une attitude négligente.

B. ' Sur la nullité du contrat de prêt pour violence économique.

Mme [G] fait valoir que l'article 1111 ancien du code civil prévoyait que la violence exercée contre celui qui a contracté l'obligation est une cause de nullité, encore qu'elle ait été exercée par un tiers autre que celui au profit duquel la convention a été faite. La Cour de cassation a rappelé qu'il existait un principe de violence économique consistant en l'exploitation abusive d'une situation de dépendance économique, faite pour tirer profit de la crainte d'un mal menaçant directement les intérêts légitimes de la personne et pouvant vicier de violence son consentement, comme l'article 1143 du code civil issu de la réforme le prévoit désormais. En l'espèce, Mme [G], à son retour de l'étranger, s'est retrouvée dans une situation de découvert sans aucune autorisation de ce dernier et sans même que les virements litigieux aient été autorisés. Face à cette situation, et sans aucun conseil de la Société générale ni accompagnement afin de les contester, Mme [G] s'est vue contrainte de souscrire ce prêt proposé par la Société générale afin de préserver sa situation précaire et ne pas voir cette dernière engager des poursuites à son encontre. La Société générale a donc manifestement exploité abusivement de la situation de dépendance économique de Mme [G] et ce, dans son seul intérêt. Elle a pu, par ce biais, récupérer l'intégralité des fonds frauduleusement débités et profiter largement des intérêts produits, toute l'opération étant garantie par de multiples sûretés. La Société générale a donc obtenu un engagement de Mme [G] qu'elle n'aurait jamais souscrit en l'absence de cette contrainte, tout en tirant un avantage manifestement excessif de ce dernier.

La Société générale fait valoir que Mme [G] ne verse aux débats aucun élément qui permettrait d'étayer la thèse selon laquelle la Société générale aurait fait preuve de « violence économique » à son égard, à l'occasion de l'octroi du prêt querellé.

C. ' Sur la nullité du contrat de prêt pour absence de cause et d'objet.

Mme [G] fait valoir qu'en vertu de l'article 1131 ancien du code civil, l'obligation sans cause, sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet. En l'espèce, la Société générale a fait souscrire ce prêt de trésorerie dans le seul but de pallier ses propres carences. L'acte notarié précise par ailleurs que : « l'emprunteur destine les fonds à provenir du présent prêt à un investissement divers ». Or, le capital du prêt a été versé sur le compte courant de Mme [G] afin de combler le seul découvert. Il n'existe aucune contrepartie, ni aucun avantage procuré à Mme [G], puisque le découvert n'était aucunement causé de son fait. Ce prêt n'avait vocation qu'à rembourser un découvert non imputable à elle, ce qu'atteste par ailleurs Mme [U].

La Société générale fait valoir que contrairement aux prétentions de Mme [G], elle est à l'origine non seulement des trois virements objet du litige, mais également du prêt dont elle sollicite l'annulation. Les virements litigieux ont été réalisés le 12 novembre 2013 pour un montant de 30 000 euros, le 7 décembre 2013 pour un montant de 130 000 euros et le 17 décembre 2013 pour un montant de 100 000 euros. Le 13 novembre 2013, soit le lendemain du premier virement, et près d'un mois avant les deux virements subséquents, Mme [G] indiquait à son conseiller bancaire : « (') Pourriez-vous procéder au plus vite au déblocage des fonds et les verser sur le compte d'[K] (M. [B]) ' ». Par le biais de ces trois virements, Mme [G] a entendu aider son fils, qui rencontrait des difficultés sur le plan financier. Il n'est donc pas sérieux de prétendre que les virements objets du litige seraient frauduleux alors que Mme [G] en est manifestement à l'origine. Mme [G] énonce par ailleurs dans ses conclusions d'appelant qu'elle « reconnaît parfaitement la teneur du courriel du 13 novembre par lequel elle confirme l'existence de la procuration ». En outre, la thèse selon laquelle le prêt aurait été consenti postérieurement aux trois virements afin d'en couvrir le montant ne présente aucune crédibilité. Cela est démontré par la chronologie des circonstances du litige. Si le premier virement a été exécuté le 12 novembre 2013, l'offre de prêt a été émise par la Société générale dès le 13 novembre 2013, soit près d'un mois avant les deux virements subséquents, intervenus respectivement les 7 et 17 décembre 2013. Mme [G] a, par ailleurs, accepté l'offre de prêt dès le 5 décembre 2013, soit antérieurement aux deux derniers virements précités. La Société générale fait ainsi valoir qu'elle n'a pu consentir le prêt afin de combler le découvert issu des virements prétendument frauduleux, ces derniers n'étant pas encore intervenus.

D. ' Sur les sanctions applicables.

Mme [G] fait valoir que les articles 1116 et 1133 du code civil prévoient expressément la nullité du contrat. Le droit de demander la nullité du contrat n'exclut pas l'exercice, par la victime des man'uvres dolosives, d'une action en responsabilité délictuelle afin d'obtenir réparation du préjudice subi. Quel que soit le fondement de la nullité, les conséquences de l'anéantissement rétroactif du prêt litigieux ne peuvent être

supportées par Mme [G], qui serait amenée à devoir restituer à la Société générale la différence entre le montant du capital emprunté et l'ensemble des sommes qu'elle aurait versées au titre de ce prêt, jusqu'au jugement à intervenir. Si la nullité du contrat est prononcée, le préjudice financier de Mme [G] sera égal à cette différence. Dans un tel cas, Mme [G] fait valoir qu'elle sera bien fondée à solliciter la condamnation de la Société générale à lui verser des dommages et intérêts à hauteur de cette différence, au titre de la réparation de son préjudice financier.

La Société générale n'a pas conclu sur ce point.

E. ' Sur la confirmation des obligations au titre du contrat de prêt.

Mme [G] fait valoir que la Société générale prétend qu'en remboursant le prêt, elle aurait confirmé ses obligations. Or, la Cour de cassation exige désormais la réunion de deux conditions permettant de caractériser la confirmation d'un acte inopposable, à savoir la connaissance du vice affectant l'acte et l'intention de le réparer. Mme [G] ne pouvait avoir connaissance de la situation réelle de ses comptes puisqu'elle n'était pas destinataire des relevés de compte, ni d'aucune alerte quant à la situation.

La Société générale fait valoir qu'il ressort de l'article 1338 ancien du code civil, de la jurisprudence et de la doctrine que les conditions de la confirmation sont réunies dès lors que l'auteur de la confirmation a agi en connaissance du vice qui affecte l'acte, a exécuté volontairement l'acte, et ce, même si cette exécution est partielle, et a manifesté son intention de réparer le vice dont il a connaissance. Dès lors, l'emprunteur qui, en connaissance du vice affectant le contrat, procède tout de même à son exécution, confirme nécessairement les stipulations dudit contrat et notamment la clause d'intérêt convenue avec le prêteur, de sorte qu'il sera manifestement irrecevable à en solliciter la nullité. En l'espèce, l'offre de prêt objet du litige a été émise le 28 novembre 2013 et signée le 5 décembre 2013. Mme [G] a exécuté le contrat de prêt dont elle sollicite l'annulation, alors qu'elle avait parfaitement connaissance, à tout le moins à partir du mois de janvier 2014, du vice dont il était affecté. En effet, elle était destinataire des relevés de compte envoyés mensuellement par la Société générale. Ainsi, dès réception du relevé de compte du mois de janvier 2014, retraçant les opérations du mois de décembre 2013, et faisant figurer au débit de son compte les virements d'un montant de 100 000 euros et de 130 000 euros, Mme [G] disposait de tous les éléments lui permettant de connaître le prétendu vice dont elle estime aujourd'hui que l'acte serait affecté. Partant, l'exécution du contrat de prêt, et donc son remboursement, pendant de nombreuses années en connaissance du prétendu vice dont elle estime aujourd'hui que l'acte serait affecté, constitue bien une exécution volontaire de l'acte de prêt, valant confirmation. La Société générale fait aussi valoir que Mme [G] a remboursé par anticipation le prêt au mois de juillet 2022 et a donc renoncé à se prévaloir de l'action en nullité du prêt qui lui a été octroyé.

La Société générale fait par ailleurs valoir que Mme [G] aurait tenté d'inverser la charge de la preuve en soulevant, par conclusions devant le juge de la mise en état en première instance, un incident tendant à la communication sous astreinte par la Société générale des « courriers d'accompagnement (courrier, fax ou courriel) et justificatifs d'envoi par lequel la Société générale aurait transmis à Mme [G] les relevés de compte ». La Société générale fait valoir qu'elle s'est fermement opposée à cette communication en rappelant, notamment, la jurisprudence selon laquelle la production par la banque de l'ensemble des relevés bancaires suffit à prouver que la banque les a valablement adressés à son client, sauf si ce dernier apporte la preuve d'éléments permettant de douter qu'il les avait bien reçus. Or, cette preuve n'est nullement rapportée en l'espèce comme l'a rappelé le premier juge. De plus, la Société générale fait valoir qu'elle a rappelé la jurisprudence selon laquelle un client qui ne s'est jamais plaint, pendant plusieurs années, de ne pas avoir été destinataire de ses relevés de compte, n'est plus fondé à soutenir plusieurs années après, que la banque ne les lui aurait pas envoyés, car il lui appartenait en cas d'absence de réception de ses relevés périodiques d'en aviser sa banque. À l'inverse, l'arrêt produit par Mme [G] est un arrêt d'espèce portant sur le taux d'intérêt applicable en matière de compte professionnel, inapplicable à la présente espèce. Le juge de la mise en état a fait droit à l'argumentation de la Société générale et a rejeté la demande de communication des justificatifs d'envoi des relevés de compte au motif notamment que Mme [G] ne se prévalait pas d'avoir porté à la connaissance de la Société générale le défaut de communication de tels relevés. La Société générale avait, quant à elle, versé aux débats trois relevés du compte bancaire ouvert au profit de Mme [G] dans ses livres et couvrant la période allant de novembre 2013 à février 2014. En conséquence, et comme l'a confirmé le premier juge, c'est à tort ou du fait de la négligence de Mme [G] que cette dernière affirme ne pas avoir reçu les relevés de compte, qu'en tout état de cause elle ne rapporte pas la preuve contraire, de sorte qu'elle avait nécessairement connaissance ou aurait dû nécessairement avoir connaissance du vice dont l'acte aurait été affecté.

IV. ' Sur le manquement de la Société générale à son obligation de conseil.

Mme [G] fait valoir qu'il appartient au débiteur de l'obligation d'information, de conseil et de mise en garde de rapporter la preuve du respect de son obligation en vertu de l'article 1315 ancien du code civil. L'obligation d'information et de conseil est justifiée par le fait que le professionnel doit privilégier l'intérêt du client et orienter son choix en portant une appréciation d'opportunité allant même jusqu'à déconseiller une opération qui se révèlerait désastreuse sur le plan financier pour le client. Il ressort aussi que la Cour de cassation consacre, en sus d'un devoir d'information, un devoir de conseil mis à la charge du banquier vis-à-vis de son client. En l'espèce, la Société générale a manqué à ses obligations de conseil à deux reprises.

Mme [G] fait valoir que la Société générale a manqué à son obligation de conseil en ce qui concerne la contestation des virements litigieux. La Société générale n'a, à aucun moment, informé Mme [G] que les virements avaient été réalisés sans son autorisation. La Société générale avait pourtant cette obligation puisqu'elle savait pertinemment que les ordres de virement avaient été donnés sans son accord. Si le tribunal a retenu que c'est à tort que Mme [G] prétend que la Société générale était tenue de lui délivrer un conseil sur la contestation des virements non autorisés, la jurisprudence constante rappelle qu'il existe, par exception, une obligation de conseil du banquier lorsqu'il est clairement intervenu dans un rôle de conseil. Ainsi, et encore récemment, la jurisprudence de la Cour de cassation rappelle que si le banquier n'est pas, en cette seule qualité, tenu d'une obligation de conseil à l'égard de son client, il est tenu, lorsque, à la demande de celui-ci ou spontanément, il lui recommande un service ou un produit et lui prodigue ainsi un conseil, de le faire avec pertinence, prudence et loyauté, en s'enquérant de ses connaissances, de son expérience en matière d'investissement, ainsi que de sa situation financière et de ses objectifs, afin que l'instrument financier conseillé soit adapté.

Mme [G] fait valoir que la Société générale a manqué à son obligation de conseil en ce qui concerne la souscription d'un prêt aux fins de rembourser des sommes indues. Alors même que les sommes n'étaient aucunement dues par Mme [G], la Société générale n'a pas hésité à lui faire souscrire un prêt pour rembourser de telles sommes. Cette opération était ainsi dépourvue de toute viabilité et de toute cause. La Société générale estime qu'elle n'avait aucune obligation de conseil puisque le prêt aurait été souscrit antérieurement à deux des trois virements litigieux et que ce prêt ne serait pas lié aux virements et donc au découvert. La Société générale fait cependant elle-même valoir que dès le courrier du 13 novembre 2013, elle avait eu connaissance de la volonté de Mme [G] de procéder à ces futurs virements, au point qu'elle estime que ce courriel est un accord donné pour valider ces virements. Dès lors que la Société générale a admis qu'elle savait, dès le 13 novembre, que d'autres opérations seraient réalisées, elle ne peut prétendre que ce contrat de prêt n'était pas lié au remboursement du découvert déjà connu et à venir. Enfin, l'attestation de Mme [U] confirme que ce montage a été proposé par la Société générale sans que cela ait été sollicité par Mme [G]. La Société générale était donc bien débitrice d'une obligation de conseil à l'égard de Mme [G] eu égard au montage proposé par cette dernière.

La Société générale fait valoir, en ce qui concerne la responsabilité du banquier en matière de fourniture de crédit, que ce dernier est susceptible d'engager sa responsabilité lorsqu'il manque à son devoir de mise en garde, se concrétisant par l'obligation d'alerter l'emprunteur sur les risques courus. En revanche, et conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, aucun devoir de conseil n'est mis à la charge du banquier lors de l'octroi d'un concours financier. La responsabilité du banquier pour avoir manqué à son devoir de conseil est exceptionnelle et est envisagée uniquement en présence d'opérations spécifiques nécessitant une responsabilité renforcée de ce dernier. Dès lors, la jurisprudence citée par Mme [G] ne dit pas autre chose, puisqu'elle vise un devoir de conseil dans des situations particulières susceptibles de justifier une responsabilité renforcée, telles que la présence d'un crédit relais ou la souscription d'un produit d'assurance vie. En l'espèce, l'offre de prêt souscrite par Mme [G] n'était adossée à aucun instrument financier ou produit d'assurance, et n'était nullement complexe, de sorte que conformément à la jurisprudence précédemment citée, la Société générale n'était tenue d'aucun devoir de conseil, en sa qualité de banquier prêteur de deniers.

La Société générale fait valoir, en ce qui concerne la responsabilité du banquier dans l'accomplissement du service de caisse, qu'il est également admis au regard du devoir de non-ingérence du banquier en jurisprudence, et comme le tribunal l'a relevé, qu'il n'est soumis à aucun devoir de conseil envers son client.

La Société générale fait valoir, en ce qui concerne sa responsabilité alléguée au titre de l'absence de conseil quant à la contestation des virements litigieux, qu'il ne fait pas de doute qu'elle n'était, là encore, pas tenue à un quelconque devoir de conseil. En l'espèce, Mme [G] reproche à la Société générale de ne pas lui avoir conseillé de contester immédiatement les virements litigieux. Or, conformément à la jurisprudence précédemment citée, la banque n'est nullement tenue à un devoir de conseil dans l'accomplissement de son service de caisse. En tout état de cause, les arguments avancés par Mme [G] sur le fondement du devoir de conseil témoignent de la volonté de cette dernière d'échapper de manière artificielle au délai de forclusion de treize mois pour la contestation des virements litigieux.

V. ' Sur le manquement de la Société générale à son obligation de mise en garde.

Mme [G] fait valoir que la Cour de cassation consacre un devoir de mise en garde à la charge de tout établissement de crédit. Avant d'apporter son concours, le banquier doit vérifier les capacités financières de l'emprunteur au jour où il octroie le crédit en tenant compte de la situation à venir de l'emprunteur. Si la vérification des capacités financières de l'emprunteur laisse apparaître des risques résultant de l'endettement, le banquier doit alerter ce dernier sur ces risques. La Cour de cassation admet que les dommages et intérêts subséquents à ce manquement à l'obligation de mise en garde de la banque puissent être équivalents au montant de la dette des emprunteurs victimes de cette absence de mise en garde fautive. Le devoir de mise en garde doit être rempli par le banquier à l'égard de l'emprunteur profane. Par ailleurs, il appartient au débiteur de l'obligation d'information, de conseil et de mise en garde de rapporter la preuve du respect de son obligation en vertu de l'article 1315 du code civil. Lors de l'octroi du prêt, Mme [G] fait valoir qu'elle a communiqué son contrat de travail. Une simple lecture de la première page de ce dernier permettait à la Société générale de s'apercevoir qu'il s'agissait d'un contrat à durée déterminée et que Mme [G] avait la qualité d'agent non titulaire. La deuxième page du contrat de travail de Mme [G] faisait état que le contrat arrivait à terme au 31 août 2014. Il incombe ainsi à la Société générale de se justifier quant à l'exécution de son obligation de mise en garde, eu égard à la situation de Mme [G]. En l'espèce, le préjudice de Mme [G] est évident en ce qu'elle se retrouve aujourd'hui endettée et doit faire face à des mensualités de plus de 3 081,26 euros. À la fin de son contrat à durée déterminée, Mme [G] s'est retrouvée au chômage. Depuis septembre 2014, elle tente de faire face à ses échéances grâce à ses allocations de chômage et à ses économies. Toutefois, la période d'indemnisation de Mme [G] est aujourd'hui terminée et cette dernière ne peut plus faire face à ses échéances.

Mme [G] fait valoir que dans ses dernières écritures, la Société générale prétendait que le seul fait que Mme [G] soit en contrat à durée déterminée ne suffisait pas à caractériser un manquement à l'obligation de mise en garde. Pour cela, la Société générale évoque plusieurs décisions d'espèce. Il convient pourtant d'apprécier ces décisions dans leur ensemble. Si la souscription d'un emprunt dont le terme intervenait avant le terme du contrat à durée déterminée pourrait effectivement ne pas être contestable, tel n'est pas le cas en l'espèce puisque le prêt était prévu pour une durée de douze ans alors que le contrat à durée déterminée arrivait à terme dans moins d'un an. La Société générale prétend, en outre, qu'il est justifié que ce prêt était adapté à Mme [G], puisqu'elle arrive encore aujourd'hui à y faire face. Or, il a d'ores et déjà été développé que Mme [G] y faisait face grâce aux indemnisations qu'elle percevait et grâce à ses économies, et qu'elle est aujourd'hui en fin de droits. Mme [G] a par ailleurs été contrainte, au regard de sa situation financière, de vendre le bien servant de garantie à la Société générale le 18 juillet 2022. La Société générale continue de prétendre de mauvaise foi que Mme [G] aurait eu une rémunération lui permettant de faire face aux échéances sans apporter le moindre élément. Les échéances ont été difficilement réglées jusqu'à juin 2021 par l'intermédiaire du loyer du bien immobilier apporté en garantie au prêt. Ce bien immobilier était la propriété de M. [G], tiers garant ayant apporté le bien en garantie hypothécaire, les fonds versés n'étaient donc pas ceux de Mme [G]. À compter de juillet 2020, date du congé du locataire du bien de M. [G] et jusqu'à la vente du bien, les échéances ont été réglées par l'intermédiaire de deux prêts de 12 000 euros des s'urs de Mme [G] afin de lui éviter de se retrouver en défaut de payements.

La Société générale fait valoir que l'obligation de mise en garde n'est due par le banquier qu'à l'égard de clients que la jurisprudence qualifie de non avertis. Le banquier sera aussi tenu à un devoir de mise en garde uniquement si le crédit envisagé présente un risque particulier compte tenu de la situation de l'emprunteur. La Cour de cassation a, en effet, précisé que la portée de l'obligation de mise en garde s'apprécie eu égard aux capacités financières de l'emprunteur et des risques de l'endettement nés de l'octroi du prêt. Il est de jurisprudence que les revenus à prendre en compte dans l'appréciation de la capacité financière de l'emprunteur sont ceux réellement perçus par ce dernier et non seulement ceux qui sont mentionnés dans la demande de prêt. De même, le fait que l'emprunteur soit employé en vertu d'un contrat à durée déterminée ne préjuge en rien de sa capacité financière. Enfin, le préjudice né du manquement par un établissement de crédit à son obligation de mise en garde s'analyse en la perte d'une chance de ne pas contracter, et ne saurait être égal aux sommes dues au titre du prêt ou du cautionnement.

La Société générale fait valoir que le prêt accordé à Mme [G] ne présentait pas de risque particulier et était adapté à sa situation financière. En effet, le prêt qui lui a été consenti portait sur un montant de 330 000 euros avec des échéances mensuelles de 3 081,26 euros, et au taux d'intérêt ferme et définitif de 4,05 %. De plus, l'offre de prêt ne comportait aucun risque d'endettement à la date de souscription du prêt, puisque Mme [G] percevait à cette date des revenus s'élevant à 25 841,80 euros pour le mois de décembre 2012, 10 213,94 euros pour le mois de février 2013, 10 213,95 euros pour le mois de mars 2013, 10 086,25 euros pour le mois d'avril 2013, 10 086,23 euros pour le mois de mai 2013, 10 060,62 euros pour le mois d'août 2013 et 10 060,59 euros pour le mois de septembre 2013. Conformément à la jurisprudence précitée, le fait que Mme [G] fût employée en vertu d'un contrat à durée déterminée lors de la souscription du contrat de crédit, n'est pas un élément permettant à lui seul de considérer qu'il existât un risque d'endettement justifiant un devoir de mise en garde à la charge de la Société générale, d'autant que Mme [G] était chargée de mission pédagogique, employée par le ministère des affaires étrangères et européennes depuis de nombreuses années, et qu'elle percevait à ce titre des revenus confortables. Mme [G] ne peut valablement reprocher à la Société générale de ne pas l'avoir mise en garde sur le risque de ne pas retrouver de travail après la fin de son contrat à durée déterminée, qui est un risque inhérent à ce type de contrat et qui ne pouvait être ignoré par Mme [G] elle-même. Enfin, malgré la perception des allocations de chômage par Mme [G] depuis le 28 novembre 2014, la Société générale fait valoir que cette dernière a continué d'honorer les échéances du prêt sans le moindre incident de payement. Elle a même procédé, au mois de juillet 2022 et par anticipation, au remboursement de la totalité du prêt qui lui avait été accordé.

La Société générale fait valoir que Mme [G] ne justifie d'aucun préjudice, alors même qu'en sa qualité de demandeur, la charge de la preuve du préjudice lui incombe. En effet, elle se contente d'affirmer qu'elle est depuis septembre 2014 au chômage pour justifier l'étendue de son préjudice, alors que cela n'est nullement une conséquence de l'octroi du crédit. Elle sollicite ainsi le payement par la Société générale d'une somme équivalente au capital restant dû. Toutefois et conformément à la jurisprudence précitée, le préjudice né du manquement par un établissement de crédit à son devoir de mise en garde s'analyse en la perte d'une chance de ne pas contracter, et ne saurait être égal aux sommes dues au titre du prêt.

VI. ' Sur les irrégularités au titre du coût total du crédit et du taux effectif global du prêt, de l'avenant et de l'acte notarié.

Mme [G] fait valoir que quel que soit le type de contrat de prêt immobilier, l'établissement prêteur doit être en mesure de donner un coût du crédit. La Cour de cassation retient que dès lors qu'à la date de l'acte, les frais de notaire et d'inscription hypothécaire étaient déterminables, ceux-ci devaient être compris dans le taux effectif global (ci-après « TEG »). En outre, la jurisprudence précise qu'un prêteur a toujours la possibilité d'interroger un notaire ou d'intégrer dans son système informatique les barèmes des notaires afin de déterminer ces coûts Enfin, il est de jurisprudence qu'il revient à l'établissement financier d'intégrer le juste montant des frais dès l'émission de l'offre de prêt ou à tout le moins au jour de l'acte notarié si la banque rapporte la preuve qu'elle ne pouvait avoir connaissance de ces frais au jour de l'émission de l'offre.

Mme [G] fait valoir, sur l'erreur de TEG au jour de l'émission de l'offre de prêt, qu'à ce jour, la Société générale ne justifie toujours pas avoir réclamé au notaire la communication du montant précis de ces frais. En effet, la Société générale ne rapporte aucun élément de preuve, ce qui prouve qu'elle n'a pas entrepris les démarches pour se renseigner auprès du notaire afin de connaitre le coût des garanties et les émoluments de celles-ci. En l'espèce, faute pour la Société générale de rapporter la preuve d'avoir accompli ces diligences, ou du moins de prouver qu'elle a entrepris les démarches pour déterminer au plus près la réalité de ces frais, elle échoue à démontrer en quoi le TEG ne serait pas erroné.

Mme [G] fait valoir, sur l'erreur de TEG au jour de l'acte notarié, qu'il ressort de la lecture de l'acte notarié que seule l'évaluation est encore indiquée, l'acte notarié se contentant de reprendre les stipulations de l'offre de prêt. Dès lors, il est manifeste que la Société générale n'a pas mentionné l'exact montant des frais de garantie dans son contrat de prêt, et quand bien même la banque venait à démontrer qu'elle ne pouvait avoir connaissance du montant exact de ces frais au jour de l'émission de l'offre, il est démontré qu'elle n'a pas régularisé ce montant au jour de l'émission de l'acte notarié. La cour d'appel de Paris a déjà jugé en ce sens, en rappelant que les frais d'actes notariés sont nécessairement déterminables au jour de l'acte notarié de prêt.

Mme [G] fait valoir, sur les sanctions applicables, que, s'agissant d'un TEG erroné ou plus généralement des inexactitudes entachant le TEG, les tribunaux peuvent prononcer la substitution du taux d'intérêt légal au taux d'intérêt conventionnel sur le fondement de l'article 1907 du code civil. La jurisprudence considère aussi que l'application d'un TEG erroné, quand bien même l'erreur serait minime, équivaut à l'absence de mention et doit être sanctionnée par l'annulation, non du contrat mais de la clause d'intérêts, étant observé que le prêteur est toujours fondé à réclamer aux emprunteurs les intérêts au taux légal. La chambre commerciale reprend elle aussi cette position mais précise que le mode de calcul étant faux, c'est le TEG tout entier qui l'est aussi et que, dans ce cas, cela équivaut à une absence de TEG écrit, la sanction étant alors la substitution du taux légal au taux conventionnel pour l'ensemble du crédit. Il ressort de ces jurisprudences que la sanction d'un TEG erroné est bien la nullité de la clause de stipulation d'intérêts conventionnels. Par ailleurs, la jurisprudence rappelle que dans le cas du prononcé de la nullité de la clause de stipulation d'intérêts, le taux légal qui doit lui être substitué est celui en vigueur à la date de la conclusion du contrat de prêt. Or, au jour de la conclusion du contrat de prêt, le taux légal applicable était de 0,04 %.

La Société générale fait valoir que contrairement aux prétentions de Mme [G], l'offre de prêt du 28 novembre 2013 n'est pas soumise aux dispositions des articles L. 311-1 et suivants, tel que cela ressort de la première page de cette dernière et tel que le tribunal l'a relevé. Elle ne peut ainsi prétendre que l'offre de prêt qui lui a été remise violerait les dispositions du code de la consommation. De même, la sanction de la déchéance dont Mme [G] demande l'application ne saurait être prononcée en l'espèce, l'article L. 312-33 du code de la consommation, devenu l'article L. 341-34, n'ayant pas vocation à s'appliquer à l'offre de prêt.

La Société générale fait valoir qu'il appartient à l'emprunteur agissant en contestation du TEG mentionné dans l'offre de prêt qui lui a été remise, en tant que demandeur, de démontrer l'erreur qu'il allègue. Cette charge de la preuve implique qu'il démontre en quoi le TEG serait erroné, en indiquant précisément quels frais il aurait engagés sans qu'ils aient été intégrés dans le calcul du TEG, alors même que ces frais constituaient une condition d'octroi du crédit, ce dont il doit également rapporter la preuve. L'emprunteur qui conteste l'intégration d'une estimation au calcul du TEG doit également démontrer que ces frais étaient déterminables avec précision antérieurement à la conclusion du prêt. En tout état de cause, l'emprunteur doit également apporter la preuve que l'erreur qu'il allègue dépasse le seuil légal de la décimale admis par le d de l'annexe à l'article R. 313-1 du code de la consommation. En l'espèce, Mme [G] n'apporte nullement la preuve de ses allégations. Elle ne démontre pas avoir engagé des frais ayant conditionné l'octroi du crédit, et qui n'auraient pas été intégrés à l'assiette du TEG et ne verse aucun élément permettant d'étayer ses affirmations et, notamment, aucune analyse mathématique.

La Société générale fait valoir que les honoraires et débours issus de la rédaction des actes notariés, ainsi que les charges liées aux garanties dont les prêts sont éventuellement assortis, doivent, en principe, être inclus dans le TEG. L'alinéa 2 de l'article L. 313-1 du code de la consommation prévoit une dérogation lorsque « leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat ». Cependant, en ce qui concerne les frais exposés par le notaire à l'occasion de constitution de garanties, la banque est tenue de les intégrer au calcul du TEG dès lors qu'elle a eu connaissance de leur montant exact, ou, dans le cas contraire, dès lors qu'elle est en mesure d'en donner une estimation. Or, au jour de l'émission de l'offre de prêt, l'emprunteur n'a pas encore déboursé les frais de garanties, qu'il n'engagera qu'après la réalisation des formalités d'inscription des garanties par le notaire, soit postérieurement à la conclusion du contrat. La banque n'est alors en mesure que de donner une estimation de ces frais, et non leur valeur exacte, qui ne sera connue qu'a posteriori, à l'occasion de l'inscription des garanties par le notaire. Cela implique donc que les sommes décaissées postérieurement par l'emprunteur ne seront pas nécessairement égales aux montants initialement annoncés, sans que cela puisse être reproché à la banque. En l'espèce, le prêt consenti à Mme [G] a donné lieu à l'inscription de deux hypothèques de premier rang à hauteur du montant du prêt, soit 334 935,02 euros sur un bien situé au [Adresse 7]. Les frais liés à la constitution de ces garanties ont été estimés à 10 048,94 euros (4 874,11 euros plus 5 174,83 euros), et Mme [G] a bien été informée de leur intégration à l'assiette du TEG, tel que cela apparaît en page six de l'offre de prêt. Ces frais ont donc bien été intégrés au calcul du TEG, au titre des frais de constitution des sûretés réelles. De la sorte, la banque a bien intégré au TEG mentionné l'ensemble des frais liés à l'octroi du prêt et il ne peut lui être reproché d'avoir intégré une simple estimation de ces frais. En tout état de cause, il appartient au demandeur d'apporter la preuve du montant des frais qui auraient dû selon lui être pris en compte. Or, Mme [G] ne verse aux débats aucun élément établissant les frais qu'elle aurait réellement acquittés ni ne démontre que le montant de tels frais aurait été connu de la banque au moment de l'émission de l'offre de prêt. Plus encore, Mme [G] prétend que la Société générale aurait également donné une estimation de ces frais dans l'acte notarié, qu'elle ne verse même pas aux débats.

La Société générale fait valoir qu'en vertu de l'article L. 312-8 du code de la consommation, l'offre de prêt doit mentionner son coût total conformément à l'article L. 313-1 du même code. Si le calcul du TEG doit répondre aux exigences fixées à l'article L. 313-1 du code de la consommation, il n'existe cependant aucune définition légale du coût total du crédit. En outre, aucune disposition du code n'impose que le coût total du crédit intègre l'ensemble des frais requis au titre du calcul du TEG. De même, si la loi sanctionne l'absence de mention du TEG à l'article L. 312-33 du code de la consommation, aucune disposition ne prévoit de sanction en l'absence de mention du coût total du prêt. Ainsi, une offre de prêt peut mentionner séparément le coût total du crédit d'une part, et le TEG calculé sur la base d'éléments spécifiquement déterminés à l'article L. 313-1 du code de la consommation et indiqués de façon distincte dans l'offre d'autre part, l'objectif d'information de l'emprunteur prévu à l'article L.312-8 du code de la consommation étant, dans cette hypothèse, parfaitement rempli. En l'espèce, l'offre de prêt indique, en page deux, le « coût total du prêt », incluant le montant des intérêts contractuels, le coût des assurances obligatoires « DIT », les frais de dossier, ainsi que le montant des garanties. Malgré l'absence de disposition du code imposant que le coût total du crédit intègre l'ensemble des frais requis au titre du calcul du TEG, la Société générale a fait le choix d'indiquer l'estimation du montant des garanties qui était en sa possession, même si ce chiffre n'était pas définitif. Ainsi, elle a indiqué en page deux de l'offre de prêt que le montant des garanties s'élevait à 10 048,94 euros. De la même manière que pour le calcul du TEG, il ne peut lui être reproché d'avoir intégré une estimation de ces frais, dès lors qu'elle n'était pas en mesure d'en connaître le montant exact. En outre, Mme [G] ne verse aux débats aucun élément établissant les frais qu'elle aurait réellement acquittés ni ne démontre que le montant de tels frais aurait été connu de la banque au moment de l'émission de l'offre de prêt.

La Société générale fait valoir qu'en vertu du nouvel article L. 341-1 du code de la consommation, issu de l'ordonnance du 17 juillet 2019 : « En cas de défaut de mention ou de mention erronée du taux annuel effectif global déterminé conformément aux articles L. 314-1 à L. 314-4, le prêteur peut être déchu du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, au regard notamment du préjudice pour l'emprunteur ». Dans l'hypothèse où la cour ne ferait pas une application immédiate des dispositions de l'ordonnance précitée, la sanction applicable au prêteur qui ne respecte pas l'obligation de mentionner le TEG dans l'offre de prêt est spécifiquement prévue à l'article L.312-33 du code de la consommation, qui dispose qu'il pourra être déchu du droit aux intérêts en totalité ou dans la proportion fixée par le juge. La Société générale fait valoir qu'en présence d'un texte légal particulier, et en application du principe selon lequel les lois spéciales dérogent aux lois générales, aucune autre sanction ne devrait pouvoir être appliquée. Cette règle s'applique à plus forte raison dans l'hypothèse où un texte légal s'oppose à une règle simplement jurisprudentielle, comme la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels prononcée sur le fondement de l'article 1907 du code civil. De plus, s'agissant de la déchéance, elle ne constitue pas une sanction automatique, mais bien une sanction dont le prononcé relève du pouvoir discrétionnaire du juge du fond, comme en témoigne la jurisprudence. Enfin, le TEG a pour objet d'informer le candidat à l'emprunt du taux global pratiqué par la banque afin de lui faire connaître le coût du financement envisagé et de lui permettre de comparer ce taux avec ceux des offres concurrentes. Aussi, le préjudice susceptible de découler de la communication d'un TEG erroné consiste principalement en une perte de chance pour l'emprunteur d'avoir conclu une offre de prêt plus favorable. L'emprunteur devra donc établir qu'il disposait d'offres concurrentes qui présentaient un coût moindre et qu'il a effectivement perdu une chance de contracter à des conditions plus favorables. L'indemnisation de cette perte de chance, si elle est établie, ne pourra en tout état de cause être égale à l'avantage que cette chance aurait procuré si elle s'était réalisée, ni, a fortiori, supérieure. En l'espèce, Mme [G] sollicite la nullité du taux d'intérêt contractuel et sa substitution par le taux d'intérêt légal. Pour autant, Mme [G] n'apporte nullement la preuve d'un quelconque préjudice. Cette dernière a souscrit en 2013 un prêt au taux d'intérêt ferme et définitif de 4,05 %, elle a été informée par l'offre de prêt des éléments intégrés à l'assiette du TEG et ne fait état d'aucune offre de concurrents qui aurait été plus intéressante que l'offre de prêt à laquelle elle a souscrit auprès de la Société générale. Mme [G] ne rapporte ainsi pas la preuve que le caractère prétendument erroné du TEG mentionné dans l'offre lui aurait causé un préjudice qui justifierait que la Société générale soit déchue partiellement de son droit aux intérêts au taux contractuel.

La Société générale fait enfin valoir que le taux légal applicable en substitution du taux d'intérêt conventionnel ne saurait correspondre au taux légal applicable au titre de l'année de souscription du prêt. La sanction du TEG erroné mentionné dans une offre de prêt consentie pour des besoins professionnels est la nullité de la clause d'intérêts conventionnels, et la substitution du taux conventionnel par le taux d'intérêt légal, lequel est réévalué chaque année par décret. La Cour de cassation a rappelé par un arrêt du 23 janvier 2019 « que, lorsqu'il est substitué au taux conventionnel d'un prêt mentionnant un taux effectif global erroné, l'intérêt au taux légal court, à compter de la souscription de ce prêt, au taux alors en vigueur, et obéit aux variations auxquelles la loi le soumet ». En l'espèce, si la cour venait à considérer que la clause d'intérêt conventionnel mentionnée dans l'offre de prêt était erronée, il ne saurait être fait application du taux légal applicable en 2013. Il convient de prononcer l'application du taux légal au jour de la conclusion de l'offre de prêt, qui sera adapté année par année en fonction des variations imposées par la loi.

VII. ' Sur la demande d'indemnisation de Mme [G] au titre de son préjudice moral.

Mme [G] n'a pas conclu sur ce point.

La Société générale fait valoir qu'alors que Mme [G] se contente de solliciter la condamnation de la Société générale au payement de la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice moral, elle ne justifie nullement ce préjudice dans ses écritures. En outre, la Société générale fait valoir qu'elle n'a commis aucune faute dans l'octroi du crédit litigieux à Mme [G].

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 avril 2024 et l'audience fixée au 30 avril 2024.

CELA EXPOSÉ,

Sur le contradictoire :

L'article 15 du code de procédure civile dispose : « Les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense. »

L'article 16, alinéas 1 et 2, du même code dispose : « Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

« Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. »

Suivant bordereau du 21 avril 2024, [S] [G] a communiqué cinq pièces nos 12 à 16.

Par un message électronique du 22 avril 2024, la Société générale demande que ces pièces soient écartées des débats.

Il s'agit de trois attestations, de la situation de retraite de [S] [G], d'un avis d'imposition et d'une attestation d'hébergement. La communication de ces pièces l'avant-veille de la clôture n'a pas permis à la partie adverse et à son avocat d'en prendre connaissance et d'y répliquer au besoin. [S] [G] n'a ainsi pas fait connaître à son adversaire en temps utile les nouveaux éléments de preuve qu'elle produit, de sorte que la Société générale n'a pas été à même d'organiser sa défense avant la clôture de l'instruction. Les dernières pièces de l'appelante, communiquées le 21 avril 2024, doivent en conséquence être écartées des débats.

Sur les virements :

[S] [G] recherche la responsabilité de la Société générale du fait des virements litigieux, tant sur le fondement des dispositions du code monétaire et financier que sur celui des dispositions du code civil. Elle nie avoir autorisé lesdits virements. Les premiers juges en ont déduit à raison que la responsabilité de la banque ne pouvait être recherchée que sur le fondement de l'article L. 133-18 du code monétaire et financier.

En effet, la responsabilité contractuelle de droit commun n'est pas applicable en présence d'un régime de responsabilité exclusif.

Par arrêt en date du 16 mars 2023, la Cour de justice de l'Union européenne a interprété en ces termes les article 58, 59 et 60 de la directive no 2007/64/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les services de payement dans le marché intérieur :

« 37[...] le régime de responsabilité des prestataires de services de paiement prévu à l'article 60, paragraphe 1, de la directive 2007/64 ainsi qu'aux articles 58 et 59 de cette directive a fait l'objet d'une harmonisation totale. Cela a pour conséquence que sont incompatibles avec ladite directive tant un régime de responsabilité parallèle au titre d'un même fait générateur qu'un régime de responsabilité concurrent qui permettrait à l'utilisateur de services de paiement d'engager cette responsabilité sur le fondement d'autres faits générateurs (voir, en ce sens, arrêt du 2 septembre 2021, C-337/20, CRCAM, [...] points 42 et 46).

« 38 En effet, le régime harmonisé de responsabilité pour les opérations non autorisées ou mal exécutées établi dans la directive 2007/64 ne saurait être concurrencé par un régime alternatif de responsabilité prévu dans le droit national reposant sur les mêmes faits et le même fondement qu'à condition de ne pas porter préjudice au régime ainsi harmonisé et de ne pas porter atteinte aux objectifs et à l'effet utile de cette directive (arrêt du 2 septembre 2021, C-337/20, CRCAM, [...] point 45). » (C-351/21, Beobank)

Il s'ensuit que, dès lors que la responsabilité d'un prestataire de services de payement est recherchée en raison d'une opération de payement non autorisée ou mal exécutée, seul est applicable le régime de responsabilité défini aux articles L. 133-18 à L. 133-24 du code monétaire et financier, qui transposent les articles 58, 59 et 60, paragraphe premier, de la directive du 13 novembre 2007, à l'exclusion de tout autre régime de responsabilité résultant du droit national (Com., 27 mars 2024, no 22-21.200).

Aux termes de l'article L. 133-24, alinéa premier, du code monétaire et financier, l'utilisateur de services de payement signale, sans tarder, à son prestataire de services de payement une opération de payement non autorisée ou mal exécutée et au plus tard dans les treize mois suivant la date de débit sous peine de forclusion à moins que le prestataire de services de payement ne lui ait pas fourni ou n'ait pas mis à sa disposition les informations relatives à cette opération de payement conformément au chapitre IV du titre Ier du livre III.

La cour partage l'analyse du tribunal qui a considéré comme établi que la Société générale avait fourni à [S] [G] ou mis à sa disposition les informations relatives aux virements litigieux conformément à la loi. L'allégation de [S] [G] qui n'aurait été informée qu'oralement de la situation de son compte est d'ailleurs démentie par les termes de son message à la banque du 13 novembre 2013 : « D'ores et déjà merci' j'ai vu que vous aviez mis à disposition d'[K] [fils de [S] [G]] 30 000 euros » (pièce no 3 de l'intimée).

Les premiers juges ont par suite fait une juste application de l'article L. 133-24 précité pour conclure que [S] [G] était forclose en sa contestation et en sa demande d'indemnisation des virements litigieux et du découvert créé par lesdits virements. Le jugement querellé sera confirmé en ce qu'il la déboute de ses demandes de ce chef.

Sur le prêt :

Sur la nullité du contrat :

[S] [G] poursuit l'annulation du prêt :

' pour erreur, en ce qu'elle ignorait la situation réelle de son compte et les virements opérés ;

' pour dol, en ce que le prêteur ne l'a pas informée de la situation de son compte ni des virements qu'elle n'avait pas autorisés ;

' pour violence économique, en ce qu'elle s'est trouvée dans une position largement débitrice, sans autorisation de découvert, ce qui l'a contrainte de souscrire l'emprunt en cause ;

' pour absence de cause et d'objet, en ce que le prêt avait vocation à rembourser un découvert non imputable à [S] [G].

C'est par des motifs pertinents et détaillés, que la cour fait siens, que les premiers juges ont écarté les causes de nullité avancées.

Il sera seulement ajouté sur l'erreur, d'une part, que l'ignorance alléguée par [S] [G] est démentie par les termes précités de son message du 13 novembre 2013 ; d'autre part, que l'erreur décrite par l'emprunteuse ne tombe pas sur la substance même de l'objet du prêt comme l'exige l'article 1110, alinéa premier, du code civil dans sa rédaction applicable à l'espèce.

Sur le dol, le tribunal a jugé à raison que la réticence dolosive imputée à la banque n'est pas démontrée dès lors qu'il est établi que [S] [G] était informée des opérations réalisées sur son compte et que, nonobstant l'absence de production des ordres de virement litigieux, ceux-ci sont réputés avoir été autorisés par elle faute d'avoir été dénoncés en temps utile, ce que confirment encore les termes de son message électronique du 13 novembre 2013 :

« D'ores et déjà merci' j'ai vu que vous aviez mis à disposition d'[K] 30 000 euros.

« Pourriez-vous procéder au plus vite au déblocage des fonds [en gras dans le texte] et les verser sur le compte d'[K] '

« Mieux que moi vous savez à quel point il est en difficulté en ce moment et qu'il a des échéances urgentes à régler.

« Il a par ailleurs procuration sur mon compte ce qui lui permet de régulariser pour moi la situation et de signer à ma place tout ordre de virement.

« En vous remerciant par avance de votre coopération ».

Sur la violence, comme le tribunal l'a relevé, le prêt est antérieur aux deux derniers virements en litige, et donc au découvert qui en est résulté. Il n'est ainsi pas démontré que [S] [G] se soit trouvée dans un état de dépendance économique à la date d'émission de l'offre de prêt.

Sur l'absence de cause et d'objet, [S] [G] ne prétend pas que la somme empruntée n'ait pas été mise à sa disposition, si bien que le contrat de prêt n'est pas dépourvu d'objet. Il n'est pas davantage dépourvu de cause puisqu'il ressort du message précité, comme de l'attestation de la directrice de l'agence bancaire versée aux débats devant la cour, que l'emprunt, souscrit en vue d'un « investissement divers » (pièce no 2 de l'appelante et no 4 de l'intimée : offre de prêt), était destiné, d'une part, à combler non le découvert en compte de [S] [G] mais celui de son fils, d'autre part, à reprendre ses propres crédits en cours :

« Par ce courrier, je ne fais que relater des faits qui se sont déroulés à ma prise de poste en tant que directeur d'agence de [Localité 8] en 2014. À cette prise de poste, un comité risques est organisé afin de prendre connaissance de l'ensemble des comptes en situation difficile, ayant des découverts importants ou de longue date non régularisés.

« Lors de ce comité, le dossier de M. [B] [K] en fait partie, ayant un découvert de plus de 100 k€, et ne peut donc être suivi classiquement en agence mais par la cellule risques et une analyse particulière est donc effectuée'

« Au vu du montant astronomique, ce compte n'est pas de mon ressort , mais demande un suivi particulier. Selon l'historique, ce découvert a été octroyé semble-t-il par l'ancien directeur d'agence sans autorisation hiérarchique alors que le client n'avait plus de revenus domiciliés sur le compte, et sans document contractualisé et signé par M. [B].

« Afin d'apurer cette dette et effacer l'historique douteux de ce découvert, le responsable de l'époque réalise donc un crédit de trésorerie de 334 k englobant le découvert en compte et les crédits en cours de Mme [G] [S] (maman de M. [B]), ayant des revenus mensuels domiciliés en compte courant.

« Ce montage efface par conséquence la dette pharaonique sur le compte de M. [B]. » (pièce no 8 de l'appelante : attestation de [M] [U])

Le jugement critiqué mérite pleine confirmation en ce qu'il déboute [S] [G] de ses demandes d'annulation du prêt et de restitution subséquente.

Sur la nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et la déchéance du droit aux intérêts :

[S] [G] poursuit à titre principal l'annulation de la stipulation d'intérêts conventionnels, et à titre subsidiaire la déchéance du droit aux intérêts, au motif que le coût total du crédit et le taux effectif global mentionnés dans l'offre de prêt comme dans l'acte notarié ne comprennent pas les émoluments du notaire et les frais de garantie.

La Société générale objecte en premier lieu, à raison, qu'il est indiqué en page 1 de l'offre de prêt que celle-ci n'est pas soumise aux dispositions des articles L. 311-1 et suivants et L. 312-1 et suivants du code de la consommation.

Il s'ensuit que [S] [G] n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions de ces textes relatives au coût total du prêt.

En revanche, en application de l'article L. 313-4 du code monétaire et financier dans sa rédaction applicable à l'espèce, le taux effectif global, déterminé selon les modalités prévues par les dispositions du code de la consommation communes au crédit à la consommation et au crédit immobilier, doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de crédit.

Aux termes de l'article L. 313-1, alinéas 1 et 2, dans tous les cas, pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels.

Toutefois, pour l'application des articles L. 312-4 à L. 312-8, les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d'officiers ministériels ne sont pas compris dans le taux effectif global défini ci-dessus, lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat.

Compte tenu de l'évolution de ce contentieux et du droit du crédit, en cas d'erreur affectant la mention du taux effectif global dans l'écrit constatant un contrat de crédit conclu avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 17 juillet 2019 relative aux sanctions civiles applicables en cas de défaut ou d'erreur du taux effectif global, le prêteur n'encourt pas l'annulation de la stipulation de l'intérêt conventionnel et la substitution à celui-ci de l'intérêt légal, mais peut être déchu de son droit aux intérêts dans une proportion fixée par le juge (Com., 24 mars 2021, no 19-14.307, 19-14.404). Il résulte toutefois de l'article R. 313-1 du code de la consommation pris en application des textes précités qu'il appartient à l'emprunteur qui se prévaut d'une erreur dans la fixation du taux effectif global de rapporter la preuve que cette erreur entraîne un écart d'au moins une décimale entre le taux réel et le taux mentionné dans le contrat (1re Civ., 25 mars 2020, no 18-20.174).

Le prêt en cause a donné lieu à l'inscription de deux hypothèques de premier rang à hauteur du montant du prêt, soit 334 935,02 euros, sur un bien sis au [Adresse 7], dans le vingtième arrondissement de [Localité 9].

D'une part, l'appelante ne verse pas aux débats l'acte notarié qu'elle critique, de sorte qu'elle n'apporte pas la preuve de l'erreur alléguée dans cet acte.

D'autre part, le prêteur reconnaît que le taux effectif global mentionné dans l'offre de prêt ne comprend pas les frais d'élaboration de l'acte notarié, mais une estimation des frais liés à la constitution des garanties. Cependant, l'emprunteuse ne prouve pas, ni même ne prétend, que l'erreur affectant le taux effectif global dans l'offre de prêt excède la décimale prévue par l'article R. 313-1 précité. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il déboute [S] [G] de ce chef.

Sur la responsabilité de l'établissement de crédit :

[S] [G] recherche la responsabilité de la Société générale pour avoir manqué à son obligation de conseil et de mise en garde. Elle reproche ainsi à la banque de :

' ne pas lui avoir conseillé de contester les virements litigieux ;

' lui avoir fait souscrire un emprunt pour rembourser des fonds que [S] [G] ne devait pas ;

' ne pas l'avoir mise en garde contre les risques de l'endettement né de l'octroi du prêt.

Sur le devoir de conseil :

Comme le tribunal l'énonce par de justes motifs, d'une part, le banquier prestataire de services de payement n'est pas, en cette seule qualité, tenu d'une obligation de conseil à l'égard de son client ; d'autre part, sauf disposition légale ou contractuelle contraire, un établissement de crédit n'est pas tenu à une obligation de conseil à l'égard de son client et n'est susceptible d'engager sa responsabilité que dans le cas où il lui a fourni un conseil inadapté à sa situation dont il a connaissance.

Contrairement à ce qu'avance l'appelante, il n'est pas établi par la lettre précitée de [M] [U], qui n'était pas en fonction lors de l'octroi du prêt en cause et ne peut donc en témoigner, que la Société générale ait fourni un conseil en ce sens à sa cliente. Le courriel de cette dernière du 13 novembre 2013 laisse plutôt entendre que [S] [G] est à l'initiative du montage financier destiné à aider son fils. Dans ces circonstances, les premiers juges en ont exactement déduit que la Société générale n'avait pas de conseil à donner à ce sujet (Com., 13 janv. 2015, no 13-25.856).

Le jugement attaqué sera confirmé en ce qu'il déboute [S] [G] de son action en responsabilité fondée sur un manquement au devoir de conseil.

Sur le devoir de mise en garde :

La banque qui consent un prêt à un emprunteur non averti est tenue à son égard, lors de la conclusion du contrat, d'un devoir de mise en garde en considération de ses capacités financières et des risques d'endettement excessif nés de l'octroi du prêt. Il appartient à l'emprunteur qui invoque le manquement de la banque à son obligation de mise en garde d'apporter la preuve de la disproportion de son engagement au regard de ses capacités financières ou du risque d'endettement né de l'octroi du crédit. Cette disproportion s'apprécie lors de la conclusion de l'engagement, au regard du montant de l'engagement, de l'endettement global, des biens et revenus déclarés par l'emprunteur, dont le créancier, en l'absence d'anomalies apparentes, n'a pas à vérifier l'exactitude.

Il n'est pas soutenu que [S] [G] ait été un emprunteur averti.

Lors de la conclusion du prêt, [S] [G] percevait les revenus suivants, en vertu d'un contrat de travail à durée déterminée prenant fin le 31 août 2014 (pièce no 1 de l'appelante) :

' 25 841,80 euros pour le mois de décembre 2012,

' 10 213,94 euros pour le mois de février 2013,

' 10 213,95 euros pour le mois de mars 2013,

' 10 086,25 euros pour le mois d'avril 2013,

' 10 086,23 euros pour le mois de mai 2013,

' 10 060,62 euros pour le mois d'août 2013,

' 10 060,59 euros pour le mois de septembre 2013 (pièce no 5 de l'intimée).

Il ressort par ailleurs de l'attestation précitée de [M] [U] que [S] [G] supportait un en-cours de crédits de quelque 234 000 euros dont la Société générale avait connaissance, en-cours repris par l'emprunt souscrit le 5 décembre 2013. Ce prêt était remboursable par mensualités de 3 081,26 euros, qui ne représentaient pas une charge excessive au regard des revenus de [S] [G]. Néanmoins, l'endettement né de l'octroi du prêt, accru de 100 000 euros, faisait apparaître un risque manifeste au terme du contrat de travail de l'emprunteuse neuf mois plus tard, tandis que le prêt durait douze ans. Le risque de perdre son salaire s'est d'ailleurs réalisé (pièce no 4 de l'appelante : déclarations de chômage de 2014 à 2016 ; pièce no 5 : attestation de fin de droits du 4 .octobre 2017), si bien que [S] [G] a vendu le 18 juillet 2022 le bien donné en garantie à la Société générale (pièce no 9 de l'appelante : attestation de remboursement anticipé).

Au regard de la précarité de son emploi, du montant et de la durée du prêt, [S] [G] s'exposait à un risque d'endettement excessif contre lequel la Société générale aurait dû la mettre en garde.

Le prêteur n'établissant ni même ne soutenant s'être acquitté de cette obligation, il doit répondre envers [S] [G] de la perte de chance de ne pas contracter et ainsi de ne pas s'exposer au risque d'endettement accru qui s'est réalisé. La réparation de la perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée. Elle s'apprécie en l'espèce au regard notamment de l'endettement supplémentaire né de l'octroi du prêt (100 000 euros), et de la probabilité que [S] [G], mise en garde contre le risque d'endettement au terme de son contrat de travail, renonce à s'engager, alors qu'elle était employée comme chargée de mission pédagogique par le ministère des affaires étrangères depuis de nombreuses années, et qu'il s'agissait pour elle d'aider son fils.

La Société générale sera condamnée en conséquence à indemniser [S] [G] à concurrence de 70 000 euros. Le jugement attaqué sera infirmé de ce chef.

[S] [G] sollicite en outre une indemnité de 10 000 euros en réparation d'un préjudice moral, sans justifier dans ses écritures de son existence ni de son quantum. Or, l'article 954, alinéas 3, du code de procédure civile dispose : « La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. » [S] [G] sera donc déboutée de ce chef.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. L'intimée en supportera donc la charge.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :

1o À l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

2o Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991.

Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.

Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent.

La somme allouée au titre du secundo ne peut être inférieure à la part contributive de l'État majorée de 50 %.

Sur ce fondement, la Société générale sera condamnée à payer à [S] [G] la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

LA COUR, PAR CES MOTIFS,

ÉCARTE des débats les pièces numéros 12 à 16 communiquées par [S] [G] le 21 avril 2024 ;

INFIRME PARTIELLEMENT le jugement en ce qu'il :

' Déboute [S] [G] de ses demandes fondées sur un manquement de la Société générale à son devoir de mise en garde ;

' Condamne [S] [G] aux dépens, dont distraction au profit de la société civile professionnelle Lussan ;

' Condamne [S] [G] à verser à la Société générale la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau dans cette limite, et y ajoutant,

CONDAMNE la Société générale à payer à [S] [G] la somme de 70 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

CONFIRME toutes les autres dispositions non contraires ;

CONDAMNE la Société générale à payer à [S] [G] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la Société générale aux dépens de première instance et d'appel ;

REJETTE toute autre demande plus ample ou contraire.

* * * * *