Livv
Décisions

CA Chambéry, ch. civ. sect. 1, 11 juin 2024, n° 21/02269

CHAMBÉRY

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

Ski What Else (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Pirat

Conseillers :

M. Sauvage, Mme Real del Sarte

Avocats :

SCP Milliand - Dumolard - Thill, Me Lazzarima, Me Baudot

CA Chambéry n° 21/02269

10 juin 2024

Faits et procédure

Suivant acte authentique en date du 23 juin 2014, la Sci Ski What Else a acquis de Mme [U] [K] épouse [F], dans un ensemble immobilier [Adresse 7] à [Localité 11] station [6] lieudit [Localité 10], un appartement en duplex constituant le lot n°91, la jouissance privative d'un box à skis dans le local prévu à cet effet, ainsi qu'une cave constituant le lot n°24, moyennant un prix total de 235 000 euros.

Se plaignant de ne pouvoir identifier ni accéder à la cave qui lui a été vendue, malgré les démarches effectuées auprès de sa venderesse et du syndicat des copropriétaires, la SCI Ski What Else a, suivant exploit d'huissier en date du 21 juin 2019, fait assigner Mme [K] devant le tribunal de grande instance d'Albertville aux fins notamment d'obtenir la délivrance de la cave constituant le lot n°24 de l'immeuble, ainsi que le paiement de dommages et intérêts.

Par acte d'huissier du 28 novembre 2019, Mme [K] a appelé en la cause le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 7] afin qu'il produise le plan des caves, le règlement de copropriété et l'état descriptif de division. Ces deux instances ont été jointes le 19 décembre 2019.

Par jugement du 10 novembre 2021, le tribunal judiciaire d'Albertville a :

- condamné Mme [K] à délivrer à la SCI Ski What Else la cave constituant le lot N°24 une cave portant le numéro 24 située cage 1 niveau 2 et les 1/10 000èmes de la propriété du sol et des parties communes générales de la Résidence [Adresse 7] située à [Localité 11], station [6] lieudit [Localité 10] et cadastrée Section [Cadastre 2], dans les deux mois suivant le dépôt du rapport du géomètre-expert, et ce, à peine d'une astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard passé ce délai ;

- dit que l'astreinte courra pendant un délai de quatre mois ;

- invité le cas échéant la SCI Ski What Else à saisir le juge de l'exécution en liquidation de l'astreinte ;

- condamné Mme [K] à payer à la SCI Ski What Else une indemnité annuelle de 600 euros depuis le 23 juin 2014 et jusqu'à délivrance de la cave, au titre du préjudice de jouissance ;

- débouté la SCI Ski What Else de sa demande au titre des charges de copropriété et des impôts ;

- commis le géomètre [N] [X] à [Localité 5], à l'effet d'établir les plans des caves situées dans la Cage 1 au niveau 2 du bâtiment dénommé la Résidence [Adresse 7] située à [Localité 11], station [6], lieudit [Localité 10] ;

- condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 7] à en supporter les frais ;

- condamné Mme [K] à payer à la SCI Ski What Else la somme de 2 000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [K] au paiement des entiers dépens ;

- autorisé Mme Lazzarima, avocat, à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision.

Au visa principalement des motifs suivants :

bien que l'acte de vente stipule que l'acquéreur a visité les lieux et accepté de les recevoir en l'état, rien n'établit que la SCI Ski W Hat Else ait non seulement pu visiter la cave mais surtout qu'elle ait pu entrer en possession de ce bien par la remise des clés ;

il se déduit d'un mail du notaire du 4 mai 2015 que la venderesse n'a elle-même jamais disposé des clés de cette cave depuis qu'elle a fait l'acquisition du bien en 2003 ;

il n'existe aucun plan des caves du niveau 2 de la cage 1 et la détermination du lot n°24 n'est pas possible à ce stade dès lors, il convient d'ordonner la désignation d'un géomètre-expert aux frais du syndicat des copropriétaires de l'immeuble étant donné qu'il entrait dans ses missions de mettre tout en oeuvre pour assurer l'exécution du règlement de copropriété et de permettre d'identifier les parties privatives.

Par déclaration au greffe du 19 novembre 2021, Mme [K] a interjeté appel de la décision en toutes ses dispositions hormis en ce qu'elle a :

- débouté la SCI Ski What Else de sa demande au titre des charges de copropriété et des impôts ;

- commis : [N] [X] à [Localité 5] à l'effet d'établir les plans des caves situées dans la Cage 1 au niveau 2 du bâtiment dénommé la Résidence [Adresse 7] située à [Localité 11], station [6], lieudit [Localité 10] ;

- condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 7] à en supporter les frais ;

- autorisé Mme Lazzarima, avocat, à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision.

Prétentions et moyens des parties

Par dernières écritures du 16 février 2022, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, Mme [K] sollicite l'infirmation des seuls chefs critiqués de la décision et demande à la cour, statuant à nouveau de ces chefs, de :

- débouter la SCI Ski What Else de l'intégralité de ses demandes ;

- débouter le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble résidence [Adresse 7] des demandes formulées à son encontre ;

- condamner la SCI Ski What Else à lui payer la somme de 4 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, Mme [K] fait valoir notamment que :

elle a rempli son obligation de délivrance, la SCI Ski What Else ayant pu visiter le bien avant son acquisition, comme il se déduit des mentions de l'acte authentique de vente ;

les difficultés sur l'identification actuelle de la cave, qui seraient apparues postérieurement à la vente de 2014, lui sont inopposables ;

la cave vendue aurait été identifiée postérieurement au jugement entrepris, de sorte que le débat portant sur son identification est devenu sans objet;

le jugement du 10 novembre 2021 est inapplicable puisqu'elle est dans l'incapacité de restituer une cave qu'elle a vendue il y a plus de dix ans, à laquelle elle n'a aucun accès et qui serait occupée de manière illicite par un autre copropriétaire, cette occupation illicite étant au demeurant non démontrée.

Par dernières écritures du 29 janvier 2024, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la SCI Ski What Else demande à la cour de :

- débouter Mme [K] de son appel à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Albertville le 10 novembre 2021 ;

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 20 novembre 2021 ;

- si par impossible, la cour infirmait le jugement rendu le 20 novembre 2021 et pour le cas où, elle ne pourrait pas entrer en possession de sa cave, juger que, par application des dispositions de l'article 1626 du code civil, Mme [K], venderesse, est tenue en cette qualité, de la garantie d'éviction ;

- condamner, par application des dispositions de l'article 1630 du code civil, Mme [K] à réparer l'intégralité du préjudice qu'elle a subi ;

- condamner Mme [K] à lui payer la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice ;

- dire et juger que le syndicat des copropriétaires l'immeuble « [Adresse 3]-[Adresse 7] » a engagé sa responsabilité contractuelle à son endroit ;

- condamner le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble « [Adresse 3]-[Adresse 7] » à lui payer la somme de 25 000 euros en réparation de son préjudice ;

- dans tous les cas, condamner Mme [K] ou le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble « [Adresse 3]-[Adresse 7] » à lui payer la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [K] ou le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble « [Adresse 3]-[Adresse 7] » aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront distraits au profit de Mme Lazzarima, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, la SCI Ski What Else fait valoir notamment que :

Mme [K] n'a pas respecté son obligation de délivrance de la cave n°24, puisqu'à ce jour elle n'en a pas pu en récupérer la jouissance ;

les problèmes d'occupation illicite de la cave sont nés du chef de sa venderesse en ne procédant pas aux travaux de réparation de sa cave quand elle en a fait l'acquisition ;

Mme [K] est tenue, au titre de la garantie d'éviction, de lui garantir la jouissance paisible de la cave et de la protéger contre toute occupation illicite par un tiers;

elle ignore toujours l'emplacement de sa cave et l'identité de son occupant;

ses tentatives pour obtenir la désignation d'un géomètre se sont heurtées à l'inaction fautive du syndic.

Dans ses dernières écritures du 22 janvier 2024, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, le Syndicat des copropriétaires Résidence [Adresse 3] [Adresse 7] demande quant à lui à la présente juridiction de :

- le dire recevable et bien fondé en son appel incident ;

Ce faisant,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a ordonné une mesure d'expertise judiciaire à ses frais ;

Statuant à nouveau,

- débouter la SCI Ski What Else de sa demande visant à obtenir une mesure d'expertise judiciaire aux fins de dresser le plan des caves de la copropriété ;

- confirmer le jugement déféré dans ses autres dispositions ;

Y ajoutant,

- condamner solidairement la SCI Ski What Else et Mme [K] à lui verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement la SCI Ski What Else et Mme [K] aux entiers dépens, dont recouvrement au projet de la Selarl Egide AvocatsCîmes.

Au soutien de ses prétentions, le Syndicat des copropriétaires Résidence [Adresse 3] [Adresse 7] fait valoir notamment que :

il ne peut pas pallier la carence de Mme [K], ayant seulement une mission d'administration des parties communes ;

il ne peut être responsable des dommages causés aux copropriétaires ayant leur origine dans les parties privatives, comme en l'espèce ;

seule Mme [K] est tenue d'assurer la délivrance de la cave lot n°24 et d'ainsi d'en fournir les accès ;

il justifie pleinement remplir sa mission visant à s'assurer de l'application du règlement de copropriété.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience ainsi qu'à la décision entreprise.

Exposé du litige

Une ordonnance en date du 13 février 2024 a clôturé l'instruction de la procédure. L'affaire a été plaidée à l'audience du 5 mars 2024.

Motivation

Motifs de la décision

- Sur l'obligation de délivrance

Aux termes de l'article 1603 du code civil, le vendeur est tenu de délivrer la chose vendue. L'article 1604 définit quant à lui la délivrance comme étant 'le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur'. S'agissant des immeubles, cette obligation est remplie par la remise des clés s'il s'agit d'un bâtiment, ou par la remise des titres de propriété, conformément à l'article 1606 du même code.

Cette obligation de délivrance qui pèse sur le vendeur lui impose en particulier de mettre à la disposition de son acquéreur un bien qui soit à la fois identifiable et libre d'occupation. Il est par ailleurs de jurisprudence constante qu'il appartient au vendeur de prouver qu'il a mis la chose vendue à la disposition de son contractant (voir sur ce point notamment C. Cass, Civ 1ère, 19 mars 1996, n°94-14.155).

En l'espèce, pour justifier de la délivrance de la cave constituant le lot n°24 de la copropriété [Adresse 7], Mme [U] [K] se contente de se référer à la mention contenue dans l'acte de vente du 23 juin 2014, aux termes de laquelle l'acquéreur indique avoir visité les lieux et accepté de les recevoir en l'état. Cependant, il se déduit clairement des échanges intervenus entre les parties postérieurement à la signature de cet acte, ainsi que des explications qu'elles livrent dans leurs conclusions respectives, qu'en réalité, la SCI Ski What Else n'a à aucun moment pu procéder à la visite de la cave litigieuse, et que la clé qui lui a été remise par la venderesse était uniquement celle permettant d'ouvrir l'accès à l'espace commun donnant accès aux caves, mais en aucun cas celle permettant d'ouvrir la cave objet du contrat de vente, laquelle n'était en tout état de cause pas localisée clairement au sein de l'immeuble.

Il se déduit en particulier du courriel daté du 4 mai 2015 établi par son notaire que Mme [U] [K] a expressément admis n'avoir jamais eu en sa possession les clés de la cave litigieuse, l'intéressée expliquant, après plusieurs relances de son acquéreur, que lors de l'achat du bien en 2003, la porte de cette cave était cassée et qu'ayant donné à bail son appartement tout de suite, elle n'avait pas fait procéder aux réparations nécessaires. Il est constant du reste, comme le font apparaître les baux qu'elle produit, que seul l'appartement a été donné en location, entre le 1er décembre 2005 et le 1er mai 2014, à la Sarl 4-6. Il est permis de penser qu'en réalité, la cave n'a jamais été occupée par ses propriétaires successifs, à tout le moins depuis 2003.

A cet égard, Mme [U] [K] prétend que la cave litigieuse aurait été occupée par des tiers postérieurement à l'acte de vente du 23 juin 2004. Or, elle n'apporte aucun élément susceptible de le démontrer, ni n'apporte la moindre précision sur les circonstances dans lesquelles une telle occupation serait intervenue, alors que, de son côté, elle n'a pas permis à son acquéreur d'identifier et de localiser précisément le bien qu'elle lui a vendu et que c'est à elle qu'il appartient de justifier du respect de son obligation de délivrance.

Bien que ses écritures soient parfois ambigües sur ce point, Mme [U] [K] semble indiquer que la cave objet du contrat de vente serait en réalité clairement identifiée et qu'il n'appartiendrait qu'à l'acquéreur d'en reprendre possession. Or, il se déduit des pièces qui sont versées aux débats par les parties qu'il n'existe aucun plan précis des 27 caves qui sont implantées au niveau 2 de la cage 1 de l'immeuble (contrairement aux niveaux 1 de la cage 1 et à la cage 2) permettant d'identifier la cave vendue.

Deux photographies distinctes de portes de cave portant l'inscription '907", correspondant au numéro de l'appartement propriété de la SCI Ski What Else, sont produites, se rapportant à deux caves différentes, situées à des niveaux différents, avec d'autres références (1001 ou 307) qui sont barrées ou recouvertes. Aucune identification certaine de la cave vendue ne peut ainsi en être déduite.

Le syndicat des copropriétaires indique du reste dans ses dernières écritures avoir procédé à des investigations longues et fastidieuses, à partir des plans d'origine et d'un plan établi par relevé des numéros d'appartements sur les paumelles en aluminium des portes, permettant d'identifier les caves n°1 à 21 et 25 à 27, ainsi que leurs propriétaires respectifs, mais n'ayant pas permis à ce jour d'identifier de manière claire les caves n°22, 23, 24 et 26. Le syndic émet ainsi l'hypothèse que des échanges 'officieux' de caves soient intervenus entre les copropriétaires concernés. Le plan qui a été dressé par le syndic en décembre 2023 semble ainsi rattacher une cave pouvant correspondre à la n°24 à l'appartement n°408, qui appartiendrait à une dénommée [R] [J]...

Force est ainsi de constater que l'identification précise de la cave litigieuse n'est toujours pas possible au jour de la présente décision, et que la SCI Ski What Else n'est, contrairement à ce qu'indique sa venderesse, nullement en mesure d'entrer en possession de son bien.

Le manquement de la venderesse à son obligation de délivrance apparaît ainsi clairement caractérisé.

Pour autant, il ne saurait être mis à sa charge de l'appelante une obligation sous astreinte de procéder à la délivrance de la cave litigieuse, dès lors que Mme [U] [K], qui a vendu son bien il y a plus de dix ans, ne dispose d'aucun moyen effectif de remplir une telle obligation, laquelle suppose par ailleurs, au préalable, que la cave soit identifiée de manière claire, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Or, un contractant ne peut exiger l'exécution en nature d'une obligation que lorsque celle-ci est possible, et force est de constater que la SCI Ski What Else n'apporte aucun élément susceptible de démontrer que Mme [U] [K] serait aujourd'hui en mesure d'exécuter son obligation de délivrance.

Le jugement entrepris ne pourra donc qu'être infirmé en ce qu'il a condamné l'intéressée à une telle exécution sous astreinte.

Au regard de ce qui précède, la SCI Ski What Else apparaît par contre fondée à réclamer Mme [U] [K] des dommages et intérêts au titre du non-respect de son obligation de délivrance.

Elle justifie ainsi d'un préjudice de jouissance, qui lui est causé par la privation de la cave litigieuse depuis le 23 juin 2014 et qui subsiste à ce jour. L'indemnisation fixée à ce titre par le premier juge, à hauteur d'une somme de 600 euros par an, montant non contesté par les parties au litige, ne pourra cependant courir jusqu'à la délivrance effective de la cave, dès lors que les démarches nécessaires à une telle entrée en possession, supposant au préalable que ce bien soit clairement localisé, que son utilisateur soit identifié et qu'il soit libre de toute occupation, ne peuvent être entreprises par Mme [U] [K], qui ne dispose plus d'aucun droit au sein de la copropriété. Une telle fixation aboutirait ainsi, dans une telle hypothèse, à laisser à la SCI Ski What Else la libre détermination du montant de son indemnisation, celle-ci pouvant retarder indéfiniment les démarches permettant son entrée en possession.

La cour dispose d'éléments suffisants, au regard de ce qui vient d'être exposé, pour évaluer le préjudice global subi par la SCI Ski What Else, en lien avec le défaut de délivrance, à hauteur d'une somme totale de 10 000 euros, que Mme [U] [K] sera condamnée à lui payer.

- Sur la garantie d'éviction

La SCI Ski What Else réclame la somme de 50 000 euros à titre de dommages

et intérêts sur le fondement de la garantie d'éviction prévue à l'article 1626 du code civil, dans l'hypothèse où elle ne pourrait entrer en possession de sa cave.

Cependant, elle n'allègue ni a fortiori ne prouve qu'elle se trouverait définitivement privée de la cave litigieuse, et qu'elle ne pourrait jamais en recouvrer la jouissance, alors que les démarches en vue de permettre son identification se poursuivent, comme en justifie le syndicat des copropriétaires. Elle ne peut donc se prévaloir d'aucun préjudice de ce chef.

Sa demande formée à ce titre ne pourra donc qu'être rejetée.

- Sur les demandes formées à l'encontre du syndicat des copropriétaires

Aux termes de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965, le syndic est tenu d'assurer, pour le compte du syndicat des copropriétaires, l'exécution des dispositions du règlement de copropriété, lequel détermine notamment, conformément à l'article 8 de la loi précitée, la destination des parties privatives et communes ainsi que les conditions de leur jouissance.

C'est sur le fondement de ces dispositions que le premier juge a ordonné la désignation d'un géomètre-expert afin d'établir les plans des caves situées dans la cage 1 au niveau 2 de la résidence, et ce aux frais du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 3] [Adresse 7].

Cependant, ce dernier n'est, comme il le fait observer, investi que d'une mission d'administration des parties communes de l'immeuble, et non des parties privatives, et ne peut être responsable des dommages causés aux copropriétaires ayant leur origine dans de telles parties privatives, conformément aux dispositions de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965.

Or, le règlement de copropriété précise, en son article 3, que les parties privatives de l'immeuble comprennent non seulement les caves, mais également les portes de celles-ci. Et la SCI Ski What Else se trouve en l'espèce confrontée à une difficulté qui ne concerne nullement les parties communes de l'immeuble, dès lors que la clé permettant d'accéder aux caves lui a bien été remise lors de la vente, mais uniquement à un problème d'accès privatif à sa cave, qui est étranger à la mission du syndicat des copropriétaires.

Par ailleurs, si ce dernier est tenu d'assurer l'exécution de règlement de copropriété, et que l'objet de celui-ci est notamment de déterminer la destination des parties privatives et communes, aucune disposition légale ou réglementaire n'impose au syndicat des copropriétaires d'effectuer des recherches permettant l'identification d'une partie privative de l'immeuble appartenant à l'un des copropriétaires ni de déterminer la propriété de chacune des parties privatives ni encore, a fortiori, de trancher les différends qui pourraient s'élever entre copropriétaires sur la propriété d'une partie privative.

C'est probablement consciente de cette difficulté que la SCI Ski What Else n'a pas fait assigner le syndicat des copropriétaires, mais uniquement sa venderesse.

Force est ainsi de constater que la SCI Ski What Else échoue à rapporter la preuve d'un manquement du syndicat à ses obligations qui serait susceptible d'engager sa responsabilité contractuelle à son égard.

Elle ne précise du reste nullement en quoi l'intervention d'un géomètre-expert pourrait permettre d'apporter une solution du litige, la difficulté à laquelle elle est confrontée ne consistant nullement en un mesurage des caves, mais en une absence de localisation de celles-ci sur le plan existant, et de désignation suffisamment précise de la cave vendue dans les titres de propriété. Il convient d'observer, en tout état de cause, que le premier juge ne pouvait, conformément aux dispositions des articles 256 et suivants du code de procédure civile, ordonner une consultation sans en fixer le coût ni les modalités précises d'exécution, et sans renvoyer l'examen de l'affaire à une date ultérieure après réalisation de cette mesure.

D'une manière plus générale, compte tenu des échanges de caves qui semblent être intervenus entre les copropriétaires, à des époques indéterminées, avec de possibles prescriptions acquisitives pouvant le cas échéant être invoquées par les possesseurs éventuels, seule la mise en oeuvre éventuelle d'une procédure plus lourde, impliquant l'ensemble des copropriétaires concernés, semble être de nature à permettre à la SCI de retrouver la jouissance de la cave qui lui a été vendue, sauf à ce qu'elle accepte, à ses risques et périls, de prendre possession d'une autre cave vide au sein de l'immeuble.

Le jugement entrepris sera en tout état de cause infirmé en ce qu'il a commis un géomètre-expert. Statuant à nouveau, les demandes formées par la SCI à l'encontre du syndicat des copropriétaires seront rejetées.

- Sur les mesures accessoires

En tant que partie perdante, Mme [K] sera condamnée aux dépens exposés en cause d'appel, avec distraction au profit de Maître Lazzarima et de Maître Stéphanie Baudot, avocats, ainsi qu'à payer à la SCI Ski What Else la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais exposés en cause d'appel.

Les autres demandes formées à ce titre seront enfin rejetées.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi, dans les limites de sa saisine,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a :

- condamné Mme [U] [K] à payer à la SCI Ski What Else la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [U] [K] au paiement des entiers dépens ;

- autorisé Me Lazzarima, avocat, à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision;

Rejette la demande d'exécution forcée sous astreinte de l'obligation de délivrance de Mme [U] [K];

Condamne Mme [U] [K] à payer à la SCI Ski What Else la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice consécutif au manquement à son obligation de délivrance;

Rejette la demande indemnitaire formée par la SCI Ski What Else sur le fondement de la garantie d'éviction ;

Rejette la demande tendant à ordonner la désignation d'un géomètre-expert dans le cadre d'une consultation;

Rejette les demandes indemnitaires formées à l'encontre du syndicat des copropriétaires de l'immeuble Résidence [Adresse 7],

Condamne Mme [U] [K] aux dépens exposés en cause d'appel, avec distraction au profit de Me Lazzarima et de Me Stéphanie Baudot, avocats.

Condamne Mme [U] [K] à payer à la SCI Ski What Else la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais exposés en cause d'appel,

Rejette les autres demandes formées à ce titre.