CA Paris, Pôle 5 ch. 3, 13 juin 2024, n° 22/14829
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Café au Départ (SNC)
Défendeur :
Laffite Pierre (SCI)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Recoules
Conseillers :
Mme Leroy, Mme Lebée
Avocats :
Me Bellichach, Me Chabrerie, Me Serra, Me Normand
FAITS ET PROCEDURE
Par acte du 03 janvier 2006, la société Foncière Burho, aux droits de laquelle se trouve la SCI Laffitte Pierre, a donné à bail commercial en renouvellement à la SNC Café Au Départ un local commercial dépendant d'un immeuble situé [Adresse 2], [Adresse 12] et [Adresse 1] à [Localité 4] pour une durée de neuf années à compter du 1er janvier 2006 moyennant un loyer annuel en principal de 54.800 € hors charges et hors taxes à destination de « café, bar, brasserie ».
Par acte extrajudiciaire du 30 novembre 2017, la SNC Café Au Départ a demandé le renouvellement du bail pour une durée de neuf ans à compter du 1er janvier 2018 aux mêmes clauses et conditions que le bail expiré.
Par acte extrajudiciaire en date du 16 février 2018, la SCI Laffitte Pierre a accepté le principe du renouvellement du bail et a demandé que le loyer annuel du bail renouvelé soit fixé à la somme de 104.000 € hors charges et hors taxes.
Par un mémoire en demande notifié le 9 octobre 2018, la SCI Laffitte Pierre a sollicité la fixation du prix du loyer du bail renouvelé à la somme annuelle de 104.000 € en principal.
Par acte du 24 décembre 2018, la SCI Laffitte Pierre a assigné la SNC Café Au Départ devant le juge des loyers commerciaux près le tribunal de grande instance de Paris aux fins de fixation du loyer du bail renouvelé et subsidiairement de désignation d'un expert.
Par un jugement rendu le 7 mai 2019, le juge des loyers commerciaux a constaté, par l'effet de la demande de renouvellement délivrée le 30 novembre 2017 par la SNC Café au départ et l'acceptation de la SCI Laffitte Pierre dans les trois mois qui ont suivi, à savoir le 16 février 2018, le principe du renouvellement du bail concernant les locaux situés [Adresse 2], [Adresse 12], et [Adresse 1] à [Localité 8] 8ème à compter du 1er janvier 2018, ordonné une mesure d'expertise qu'il a confiée à Mme [O] [Y] avec mission de procéder à l'examen des faits qu'allèguent les parties, et notamment en ce qui concerne la modification des caractéristiques des locaux et des facteurs locaux de commercialité et rechercher la valeur locative des lieux loués au regard des caractéristiques du local, de la destination des lieux, des obligations respectives des parties, des facteurs locaux de commercialité, des prix couramment pratiqués dans le voisinage, en retenant tant les valeurs de marché que les valeurs fixées judiciairement, en application des dispositions des articles L. 145-33 et R. 145-3 à R. 145-8 du code de commerce et a fixé le loyer provisionnel pour la durée de l'instance au montant du loyer contractuel en principal, outre les charges.
L'expert a déposé son rapport le 15 janvier 2021.
Par jugement du 17 mai 2022, le tribunal judiciaire de Paris a :
- fixé à 91.610 € par an en principal, hors taxes et hors charges, à compter du 1er janvier 2018 le loyer du bail renouvelé depuis cette date entre la SCI Laffitte Pierre et la SNC Café Au Départ pour les locaux situés [Adresse 2], [Adresse 12], et [Adresse 1] à [Localité 4], toutes autres clauses et conditions du bail expiré demeurant inchangées ;
- dit qu'ont couru des intérêts au taux légal sur le différentiel entre le loyer effectivement acquitté et le loyer finalement dû, à compter du 24 décembre 2018 pour les loyers échus avant cette date, puis à compter de chaque échéance contractuelle pour les loyers échus après cette date ;
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- partagé les dépens par moitié entre les parties, qui incluront le coût de l'expertise judiciaire de Mme [O] [Y] ;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration d'appel du 4 août 2022, la SNC Café Au Départ a interjeté appel total du jugement.
Par conclusions du 17 janvier 2023, la SCI Laffitte Pierre a formé un appel incident.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 février 2024.
MOYENS ET PRETENTIONS
Vu les conclusions déposées le 14 avril 2023, par lesquelles la SNC Café Au Départ, appelante, demande à la Cour de :
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;
- débouter la SCI Laffitte Pierre de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
- infirmer le jugement du juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Paris en date du 17 mai 2022 qui a considéré que le loyer du bail renouvelé à effet du 1er janvier 2018 des locaux sis [Adresse 1] loués à la SNC Café au départ devait être fixé à la valeur locative à la somme de 91.610 € par an en principal ;
Et statuant à nouveau,
Au principal,
- juger qu'il n'existe en l'espèce aucun motif de déplafonnement ;
- faire application des règles normales du plafonnement résultant des dispositions de l'article L. 145-34 du code de commerce ;
- fixer en conséquence, pour un bail de neuf années, renouvelé à compter du 1er janvier 2018, et portant sur les locaux situés [Adresse 2], [Adresse 12] et [Adresse 1] à [Localité 4], le loyer à la somme annuelle en principal de 65.195,76 €, les autres clauses et conditions du bail demeurant inchangées ;
Subsidiairement, si par extraordinaire, la Cour estimait que le loyer du bail renouvelé devait être déplafonné,
- fixer celui-ci à la somme de 67.000 € par an HT HC, à compter du 1er janvier 2018 ;
En tout état de cause,
- condamner la société bailleresse en tous les dépens, dont distraction au profit de Me Jacques Bellichach, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Vu les conclusions déposées le 06 juillet 2023, par lesquelles la SCI Laffitte Pierre, intimée, demande à la Cour de :
- débouter la SNC Café Au Départ de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- recevoir la SCI Laffitte Pierre en son appel incident et l'y déclarer bien fondée ;
- confirmer le jugement en ce qu'il a considéré que le loyer du bail renouvelé devait être déplafonné et fixé à la valeur locative ;
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a néanmoins fixé le montant du loyer du bail renouvelé à la somme de 91.610 € par an en principal à compter du 1er janvier 2018 ;
Et statuant à nouveau de ce chef,
- fixer à la somme de 109.296 € hors taxes, hors charges et hors indexation, par an, le loyer du bail renouvelé dont la SNC Café Au Départ sera redevable à compter du 1er janvier 2018 ;
- dire que la SNC Café Au Départ sera tenue de payer à la SCI Laffitte Pierre les intérêts au taux légal sur les arriérés de loyer à compter du 1er janvier 2018 conformément aux dispositions de l'article 1155 ancien du code civil ;
- condamner la SNC Café Au Départ à une somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la SNC Café Au Départ aux entiers dépens, en ce compris les frais de l'expertise, dont le recouvrement sera poursuivi selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie à leurs conclusions, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
SUR CE,
1. Sur le montant du loyer renouvelé
Par application des dispositions de l'article L.145-33 du code de commerce le montant des loyers de baux renouvelés ou révisés doit correspondre à leur valeur locative.
Cependant, l'article L. 145-34 du même code institue cependant un plafonnement du loyer lors des renouvellements auquel il peut être dérogé en cas de modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 145-33 parmi lesquels les facteurs locaux de commercialité.
Aux termes de l'article R. 145-6, les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l'intérêt que présente, pour le commerce considéré, l'importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l'attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l'emplacement pour l'activité considérée et des modifications que ces éléments subissent d'une manière durable ou provisoire.
Une modification notable des facteurs locaux de commercialité ne peut constituer un motif de déplafonnement qu'autant qu'elle est de nature à avoir une incidence favorable sur le commerce considéré et plus précisément pour le commerce exercé dans les lieux loués, dans le respect de la destination contractuelle. La preuve en incombe au bailleur.
La modification doit être intervenue au cours du bail expiré.
Le bailleur, qui demande que le loyer soit déplafonné, doit donc démontrer la modification notable, au cours du bail expiré, d'un des éléments de la valeur locative, qui sont, soit les facteurs internes c'est-à-dire les caractéristiques des lieux loués (travaux financés par le bailleur, améliorations du locataire, travaux de mise en conformité, modification de l'assiette du bail, location par bail distinct, terrasses, changement d'affectation, pondération des surfaces, état d'entretien des locaux d'habitation), la modification de la destination des lieux, la modification des obligations des parties, soit les facteurs externes c'est-à-dire la modification des facteurs locaux de commercialité, pendant la période entre la date initiale du bail et la date de son renouvellement, dont il doit également démontrer l'intérêt qu'elle présente pour le commerce considéré, et son incidence favorable pour celui-ci.
L'article L. 145-34 du code de commerce n'exige pas la modification de tous les éléments qu'il énumère, la modification notable d'un seul élément suffisant pour écarter le plafonnement.
Aux termes du jugement querellé, le premier juge a fixé le loyer de renouvellement du bail litigieux à sa valeur locative à compter du 1er janvier 2018 et ordonné son déplafonnement, après avoir considéré que :
- l'expert judiciaire conclut à une modification notable des facteurs locaux de commercialité qui a pu entraîner l'apparition d'un flux supplémentaire de chalands sur la période étudiée lequel a pu bénéficier au commerce étudié, en l'état d'une hausse de la fréquentation des stations de métro Saint Lazare et Saint-Augustin, de 2,68 % et de 36,59 %, d'une édification de 14.074 m² de bureaux et 929 m² de commerces dans un rayon de 400 mètres des locaux loués, de la rénovation d'ampleur de la gare [14] au cours du bail, la salle des pas perdus étant transformée à partir de 2012 en galerie commerciale sur trois niveaux, avec de grandes enseignes d'équipement de la personne et des commerces de services et de restauration, et les places extérieures de la gare étant rénovées à compter de 2013, de la rénovation du centre commercial du Passage du Havre sur deux niveaux de même que du magasin Printemps Haussmann en 2012, de l'ouverture d'un nouveau Printemps Homme en 2017 et d'un nombre de commerces aux alentours des locaux loués qui a connu une certaine stabilité s'agissant des enseignes nationales et une légère diminution du nombre de commerces avec un taux de vacances passant de 4,26 en 2006 à 10,12 en 2018,
- si la SNC Café Au Départ conteste ces analyses et conclusions en se prévalant du rapport d'expertise amiable de M . et Mme [U] qui ont considéré qu'il existait bien une modification notable des facteurs de commercialité mais que celle-ci a eu un effet limité sur le commerce exercé compte tenu de la présence de nombreux établissements de bar restaurants dans le secteur et au sein de la gare [14] restructurée, il n'en demeure pas moins que la concentration des commerces d'une même spécialité, par l'émulation, par l'élargissement de la palette des choix pour les consommateurs, par la certitude de trouver dans le secteur un établissement correspondant à ses besoins, attire plutôt la clientèle,
- si la rénovation de la gare [14] a contribué à augmenter le flux de voyageurs se rendant à leur travail, et à offrir à l'intérieur même de la gare les services de restauration pouvant dissuader les voyageurs de rechercher à se restaurer en dehors de la gare, elle n'est pourtant pas de nature à priver le commerce de la SNC Café Au Départ des retombées positives d'une importante augmentation des flux de voyageurs, la fréquentation de la station de métro Saint-Lazare ayant au cours de la période considérée connu un accroissement de 18,20 % avec plus de 7,2 millions de voyageurs entrants, ce taux étant supérieur à celui de l'ensemble du réseau métropolitain au cours de la même période.
- de plus, le secteur étudié a connu une évolution notable en termes de connexion des moyens de transports puisqu'une partie du réseau de bus a retrouvé sa desserte sur la [Adresse 7], étant précisé que les locaux étudiés sont situés en partie ouest de la [Adresse 7], depuis la réalisation de la sortie de métro par la lentille de verre sur ladite cour,
- ainsi, la très forte hausse de la fréquentation de la gare [14], même si une part importante de ce flux est resté dans ou sous la gare pour bénéficier des interconnexions en termes de transport et fréquenter la galerie commerciale en ce inclus ses commerces de restauration, a nécessairement entraîné un flux de chalands supplémentaire dans les rues situées aux abords de la gare [14] et de la [Adresse 7] auxquels le commerce étudié fait face, ce dont témoigne d'ailleurs les bilans comptables de la SNC Café Au Départ, laissant apparaître une hausse entre 2008 et 2017 de son chiffre d'affaires, passé de 1.236.000 € à 1.463.000 €,
- il est donc justifié de s'en tenir à la constatation objective d'une très forte augmentation de la clientèle potentielle pour ce commerce de café brasserie, pouvant intéresser, outre les voyageurs et les touristes, les salariés des bureaux avoisinants en augmentation, ce qui caractérise une modification notable des facteurs locaux de commercialité ayant eu une incidence favorable sur le commerce étudié.
La SNC Café Au Départ sollicite l'infirmation du jugement de ce chef et la fixation à sa charge, à compter du 1er janvier 2018, d'un loyer révisé annuel plafonné à titre principal, tandis que la SCI Laffitte Pierre sollicite la confirmation du jugement querellé en ce qu'il a ordonné le déplafonnement du loyer révisé et l'a fixé à sa valeur locative.
- Sur le déplafonnement du loyer renouvelé
En l'espèce, le preneur conteste l'existence d'une modification notable des facteurs locaux de commercialité retenue par le premier juge, conduisant à un déplafonnement de son loyer du fait de la rénovation de la gare [14], qui n'aurait pas eu d'impact favorable sur le commerce de la SNC Café au départ, en l'état du nombre croissant de commerces de restauration aux abords de la gare, qui a dilué par ailleurs l'augmentation de la fréquentation de la gare, et peine à capter des flux de non voyageurs, tel que cela ressort du chiffre d'affaires de la locataire, lequel a baissé de 21,6 %.
Elle ajoute que la modification des accès entre la gare et les autres transports en commun aurait desservi le local litigieux, situé à l'opposé des grandes locomotives commerciales et ce alors que le trafic de la gare [14] serait essentiellement constitué par les trajets entre le domicile et le lieu de travail ou d'études et qu'aucun TGV ou trains internationaux n'y arrivent ou n'en partent de sorte que la fréquentation touristique y est quasi nulle et que 69 % des voyageurs arrivant à la gare en repartiraient en prenant le métro ou le RER et donc en empruntant les passages souterrains sans passer devant les commerces, la plupart des opérations de constructions dans le quartier Saint Lazare provenant de surcroît des travaux réalisés dans la gare et dont la bailleresse tente déjà de se prévaloir, le taux de vacance commerciale ayant doublé dans le quartier pendant la durée du bail.
La SNC Café Au Départ conteste en outre la modification des caractéristiques propres des locaux alléguée par la bailleresse, la surface de 16m2 invoquée étant déjà comprise dans l'assiette du bail de sorte qu'elle ne constituerait pas une mise à disposition de locaux supplémentaires et donc un motif de déplafonnement du loyer du bail renouvelé, la SNC Café Au Départ soulignant par ailleurs que les travaux effectués par le bailleur ne seraient que des travaux d'aménagement et de mise en conformité avec la destination contractuelle en lien direct avec son obligation de délivrance qui ne sauraient pas davantage constituer un motif de déplafonnement du loyer, devant être fixé au contraire en fonction de la variation de l'indice des loyers commerciaux.
La SCI Laffitte Pierre, laquelle sollicite la confirmation du jugement querellé de ce chef, invoque au soutien de ses prétentions une modification notable des facteurs locaux de commercialité, tenant d'une part à la modification de la population du quartier, laquelle est constituée de plus en plus de cadres et professions intellectuelles supérieures dont les bureaux s'installent dans ce quartier, de sorte que ce dernier connaît une hausse de la moyenne des revenus, d'autre part à l'augmentation des flux de voyageurs entrant dans la station de métro Saint Lazare et à un renforcement de la circulation piétonne aux abords de la gare, encourageant les usagers à se déplacer autour de la gare, malgré l'utilisation importante des souterrains ainsi qu'à la création de nouveaux bureaux de nature à augmenter notablement la fréquentation du quartier d'affaires ce qui a eu un impact positif sur la SNC Café au départ, la rénovation de la gare [14] ainsi que la création du centre commercial ayant nécessairement entraîné une augmentation de la fréquentation de la gare et de ses abords ainsi qu'une évolution des habitudes de consommation des usagers de la gare mais également des riverains. Elle souligne à ce titre que la configuration de la gare ne serait pas de nature à conserver sa clientèle qui au contraire fréquenterait les alentours de la gare, le local litigieux étant situé juste en face de l'entrée principale du métro, le parvis de Rome, situé en face des locaux litigieux ayant de surcroît été rendu piéton et réaménagé aux fins de créer de véritables salons urbains à cet emplacement et la fréquentation de cet espace ayant été encouragée par la création de voies de stationnement pour deux roues et vélo et par la création d'une station Vélib.
La SCI Laffitte Pierre excipe en outre d'une modification des caractéristiques du local loué au cours du bail, par la livraison par le bailleur d'une surface supplémentaire de 16m2 au preneur par des travaux de gros 'uvre qu'il a lui-même réalisés au préalable auxquels il n'était nullement tenu aux termes du bail, qui ont permis le réaménagement des locaux et ainsi l'augmentation de la surface accessible à la clientèle, ce qui n'était aucunement prévu ni autorisé aux termes du bail à renouveler.
Elle observe qu'il y aurait donc lieu d'acter de la modification des caractéristiques des locaux consécutive à cette extension de surface, laquelle a permis une augmentation notable de la surface de vente constituant un motif de déplafonnement du loyer et qu'aux termes de la clause d'accession prévue au bail, les travaux de redistribution interne des locaux loués effectués par la SNC Café au départ constitueraient également un motif de déplafonnement au titre d'une modification notable des caractéristiques des locaux.
Or, l'augmentation de la fréquentation du quartier constituerait nécessairement un facteur favorable pour un commerce de café, bar, brasserie en raison des flux de clientèle qu'elle génère et la modification des caractéristiques du local aurait permis une augmentation de près de 43 % du nombre de places assises de la SNC Café Au Départ, ce qui serait notable, l'augmentation du chiffre d'affaires de la SNC Café au départ entre 2008 et 2017 confirmant les répercussions favorables de l'ensemble de ces modifications.
Au cas d'espèce, la cour renvoie à la motivation du jugement entrepris s'agissant de la description matérielle des locaux donnés à bail telle qu'elle résulte des constatations faites par l'expert. Il sera précisé s'agissant de leur destination que le preneur y exerce une activité de café-bar-brasserie, connue du bailleur et dûment autorisée et qu'il n'est pas contesté qu'au cours du bail, des travaux de réaménagement intérieurs sont intervenus et ont consisté dans le déplacement de la cuisine à la place d'une surface complémentaire de 16,19 m², et la transformation de l'ancienne cuisine en une zone accessible à la clientèle, et exploitée en salle de restaurant, dans le prolongement de la partie brasserie.
Si la SCI Laffitte Pierre invoque cette modification comme étant notable et de nature à fonder un déplafonnement du loyer, force est cependant de relever que « la surface complémentaire de 16,19 m² » était incluse dans l'article 1 du bail dans la description des locaux « au rez-de-chaussée, un local commercial accessible à la vente selon plan numéro 1 en annexe pour une surface d'environ 69,60 m² et en partie arrière une surface complémentaire de 16m² environ qui sera mise à disposition du preneur dans les conditions prévues à l'article 8-9» à savoir au plus tard le 1er septembre 2006 « et ce, après avoir procédé aux travaux de gros 'uvre permettant la fermeture de cette surface par rapport à l'extérieur, ainsi qu'au rebouchage des trémies existantes, de telle sorte que le preneur puisse par tous travaux appropriés à sa charge réunir cette surface avec celle dont il dispose » ce dont il s'infère que cette surface ne saurait s'analyser en une adjonction de surfaces supplémentaires consentie par le bailleur en cours de bail, dès lors qu'elle était prévue par le contrat tant dans son principe que dans ses modalités, de nature à justifier un déplafonnement du loyer.
De même, si le déplacement de la cuisine à la place de la surface complémentaire de 16,19 m², et la transformation de l'ancienne cuisine en une zone accessible à la clientèle, et exploitée en salle de restaurant, dans le prolongement de la partie brasserie constituent un aménagement et une transformation des lieux, dont il est n'est contesté qu'ils ont été réalisés avec l'accord du bailleur, il n'en demeure pas moins que l'article 8.5 du contrat stipule que «tous embellissements de même que tous aménagements ou transformations ou constructions réalisés avec l'accord du bailleur sont acquis à celui-ci par accession sans indemnité à l'expiration du présent bail et seront pris en compte dans le calcul de la valeur locative à l'occasion du renouvellement consécutif à leur exécution, même s'il s'agit de travaux de mise en conformité des locaux avec la destination contractuelle, le bailleur ne pouvant exiger au départ du preneur que les lieux loués soient remis dans leur état primitif ».
Si la SCI Laffitte Pierre se prévaut des aménagements ainsi réalisés par la société locataire, cette clause d'accession ainsi formulée prévoit une accession à la fin du bail, et est cependant corrélée à une obligation éventuelle de rétablissement des lieux dans leur état primitif, laquelle ne peut intervenir qu'à la fin des relations contractuelles entre les parties et non pas lors du renouvellement du bail.
Il se déduit de cette constatation que la clause d'accession stipulée au bail, et invoquée par la SCI Laffitte Pierre, qui vise l'ensemble des travaux réalisés, ne pourra recevoir application qu'au départ de la société locataire, à la fin des relations contractuelles, la remise en état des locaux dans leur état primitif ne pouvant intervenir lors du renouvellement du bail. Le bailleur ne peut par conséquent, pour ce motif, se prévaloir des travaux ainsi réalisés pour obtenir le déplafonnement du loyer.
Il est toute aussi vainement recherché dans les pièces versées aux débats une modification des caractéristiques du local considéré, dont la superficie n'a pas évolué de manière notable depuis la signature du bail initial, et dont la visibilité n'apparaît pas notablement accrue.
En revanche, s'agissant de la modification notable des facteurs locaux de commercialité reconnue par le premier juge, c'est par des motifs dont la pertinence en cause d'appel n'a pas été altérée et que la cour adopte que le premier juge a ainsi statué.
En effet, si au cours du bail expiré l'évolution de la population dans le quartier de la gare [14] dont dépendent les locaux en cause et dans les quartiers limitrophes a baissé (-4,22 %) et que le taux de vacance des locaux s'est accru passant de 4,26 en 2006 à 10,12 en 2018, l'expert relève cependant sur la même période un accroissement de la part des cadres et professions intellectuelles supérieures dans le secteur (3,33 %) et une augmentation de 2,68 % du métro Saint Lazare et 36,59 % de la fréquentation de la station de métro 'Havre Caumartin' situées à proximité immédiate des locaux litigieux, et dans un rayon de 400 mètres, la construction de 14.074 m² de bureaux et 929 m² de commerces, ainsi que la rénovation de commerces « moteurs » tels le Passage du Havre et du Printemps Haussman et de la gare [14], qui a transformé à partir de 2012 la salle des pas perdus en une galerie marchande sur trois niveaux, comprenant des grandes enseignes d'équipement de la personne et des commerces et services de restauration.
Si la SNC Café Au Départ conteste le déplafonnement du loyer en arguant que les modifications invoquées n'auraient pas eu d'impact favorable sur son activité, la cour rappelle toutefois que la modification alléguée doit être de nature à avoir une incidence favorable sur l'activité, sans qu'il soit besoin d'établir l'effet in concreto sur celle-ci.
Or, si la rénovation de la gare [14] a contribué à augmenter le flux de voyageurs se rendant à leur travail, et à offrir à l'intérieur même de la gare les services de restauration pouvant dissuader les voyageurs de rechercher à se restaurer en dehors de la gare, elle n'apparaît pourtant pas de nature à priver la SNC Café Au Départ des retombées positives de cette importante augmentation des flux de voyageurs, la fréquentation de la station de métro Saint-Lazare ayant au cours de la période considérée connu un accroissement de 18,20 % avec plus de 7,2 millions de voyageurs entrants, ce taux étant supérieur à celui de l'ensemble du réseau métropolitain au cours de la même période, et le commerce de la SNC Café Au Départ étant situé en face de la sortie de la station.
Si une partie conséquente de ce nouveau flux de voyageurs reste dans la gare ou utilise les interconnexions souterraines, l'accroissement du nombre de voyageurs de la gare a nécessairement entraîné une augmentation du flux de chalands aux abords de la gare et de la [Adresse 7], piétonnisée, auxquels la SNC Café Au Départ fait face, et apparaît donc de nature à favoriser une augmentation de la clientèle potentielle constituée de personnes aux revenus plus élevés.
Cette augmentation de la clientèle potentielle présente un caractère notable au regard de l'activité de « café, bar, brasserie » exercée dans les lieux et la société locataire ne peut utilement opposer au bailleur une baisse de son chiffre d'affaires, au demeurant contredite par la propre attestation de l'expert-comptable de la SNC Café Au Départ laissant apparaître une hausse du chiffre d'affaires en cours de bail pour la SNC Café Au Départ (de 1.215.919 € en 2006 à 1.378.980 € en 2017).
Enfin, si la SNC Café Au Départ invoque l'accroissement de la concurrence dans le secteur suite à la rénovation d'ampleur de la gare [14], il n'est nullement établi que cette concentration de commerces de bouche serait de nature à préjudicier à la SNC Café Au Départ, alors que parallèlement, l'afflux de chalands augmente, ainsi que les revenus de ces derniers.
Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a ordonné le déplafonnement du loyer.
- Sur le montant du loyer renouvelé
- Sur la surface pondérée
Aux termes du jugement entrepris, le premier juge a retenu une surface pondérée de 78,59 m², préconisée par l'expert après avoir considéré que si la bailleresse conteste le coefficient de pondération de la zone d'angle, retenu par l'expert à hauteur de 1,10, fourchette basse de la charte de l'expertise prévoyant pour une telle zone un coefficient de 1,10 à 1,30, ainsi que la pondération à 0,80 retenue pour la zone 2 correspondant à l'ancienne cuisine et le coefficient de 0,40 retenu pour la cuisine annexe, l'expert a toutefois pris en compte la configuration de chacune de ces zones et a notamment considéré à juste titre que le linéaire est situé principalement sur la [Adresse 1], de moindre attrait, de sorte que la pondération de la zone d'angle à 1,10 est justifiée et a par ailleurs relevé l'accessibilité moins fluide pour la clientèle de l'ancienne cuisine de sorte que le coefficient de 0,80 pour la zone 2 est pertinent, le coefficient de 0,40 retenu pour la cuisine annexe étant justifié au regard du caractère inaccessible à la clientèle de cette zone et de la méthode de pondération de la charte de l'expertise.
Si la SNC Café Au Départ acquiesce à la surface pondérée retenue par le premier juge, la SCI Laffitte Pierre sollicite quant à elle l'infirmation du jugement entrepris de ce chef et que soit retenue une surface pondérée de 82,73 m²P, en contestant la pondération retenue par l'expert et le premier juge concernant la zone d'angle, l'ancienne cuisine, la cuisine actuelle et la base escaliers, en faisant valoir pour l'essentiel que le linéaire du local serait parfaitement visible même dans sa partie [Adresse 1] et ce directement depuis le parvis de la gare, qu'il permettrait d'abriter la terrasse qui se situe dans une rue plus calme et donc plus favorable pour la clientèle de sorte que rien ne justifierait de retenir le coefficient de 1.10, soit le bas de la fourchette, au titre du linéaire.
Elle ajoute que la zone 2 peut accueillir un nombre non négligeable de personnes assises par rapport au total de la surface louée et que le choix de disposition des tables par le locataire ne saurait être pris en compte pour retenir le coefficient le plus bas, étant relevé en outre que la cuisine annexe, si elle n'est pas accessible à la clientèle, n'en demeurerait pas moins indispensable eu égard à la spécificité de l'activité de bar restaurant du local.
Au cas d'espèce, s'agissant de la pondération de la « zone d'angle » retenue à 1,10 par l'expert et le premier juge, soit la fourchette basse de la charte de l'expertise, qui pondère cet espace avec un coefficient compris entre 1,10 et 1,30, force est de relever que ce coefficient a été retenu en raison de la situation principale du linéaire sur la [Adresse 1], de moindre attrait, bien que disposant d'une belle visibilité en angle depuis la [Adresse 7].
En l'état de cette visibilité en angle du linéaire, et donc inévitablement réduite, le premier juge doit être approuvé d'avoir retenu un coefficient de 1,10 pour la zone d'angle, minoré, mais traduisant la visibilité amoindrie du linéaire.
S'agissant de la pondération de la zone 2 correspondant à l'ancienne cuisine, retenue à un coefficient de 0,80 par l'expert et le premier juge, soit la fourchette basse de la charte de l'expertise, qui pondère cet espace avec un coefficient compris entre 0,80 et 1, force est de relever que ce coefficient a été retenu en raison de l'accessibilité moins fluide pour les clients de cette zone.
Si la SCI Laffitte Pierre soutient que la moindre accessibilité de la zone serait imputable au choix d'aménagement des tables de la SNC Café Au Départ, dont elle ne saurait supporter le poids, alors même que cette zone peut accueillir 18 couverts, il n'en demeure pas moins, à la lecture du plan des lieux, que l'accès à cette zone, bien qu'essentiel à l'activité de la SNC Café Au Départ, n'en reste pas moins extrêmement étroit et peu fluide, élément peu favorable à l'activité de restauration.
Dès lors, le premier juge était parfaitement fondé à retenir un coefficient de 0,80 pour cette zone, représentatif de son utilité dans l'activité de la SNC Café Au Départ.
S'agissant de la pondération de la cuisine actuelle, retenue à 0,40 par le premier juge, si cette zone du local est certes indispensable à l'activité de restauration de la SNC Café Au Départ, elle n'en demeure pas moins inaccessible au public, et constitue donc un local technique dont la pondération à 0,40 correspond aux coefficients de la Charte de l'expertise pour de tels locaux, compris entre 0,10 et 0,40.
Dès lors, le premier juge sera approuvé d'avoir retenu cette pondération pour la cuisine.
Enfin, s'agissant des bases escaliers, dont la pondération a été retenue par le premier juge à 0,25, si la SCI Laffitte Pierre sollicite une pondération avec un coefficient de 0,30, aucun élément ne justifie une telle pondération, fondée sur la configuration de ces deux zones.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu une surface pondérée de 78,59 m²P.
- Sur la valeur locative
Le juge est tenu d'apprécier la valeur locative selon les critères de l'article L. 145-33 et des articles R. 145-2 et suivants du code du commerce. Selon ce même article L. 145-33 du code de commerce, il appartient au juge d'apporter les correctifs nécessaires au vu des spécificités du local loué, de la date de renouvellement du bail et des éléments de comparaisons qui peuvent être identifiés.
Aux termes du jugement attaqué, le premier juge a retenu une valeur locative brute unitaire de 1.200 €/m²P, après avoir considéré que :
- l'expert a proposé 7 loyers de renouvellement dont 5 pour des commerces de restauration et 2 pour des activités de parfumerie et de prêt à porter, situés [Adresse 10], [Adresse 11], [Adresse 13], [Adresse 9] et[Adresse 6]n entre 2009 et 2017 variant de 450 € le m²P à 2.356 € le m²P, 12 éléments de comparaison issus des nouvelles locations dont la moitié concerne des commerce de restauration dans le même quartier avec des loyers variant de 434 € le m²P et 2.696 € le m²P et 3 fixations judiciaires dont deux relatifs à un commerce de restauration avec des loyers variant de 243 € le m²P à 1.894 € le m²P, l'expert reprenant également les éléments de comparaison retenus par les deux experts amiables, M. et Mme [U] et M. [C] ;
- il convient de prendre en compte l'ensemble des critères visés à l'article L. 145-33 du code de commerce, repris par l'expert, soit l'emplacement des locaux aux abords de la gare [14] avec une visibilité directe depuis le parvis de la gare, la bonne configuration des locaux qui bénéficient d'un linéaire de façade important et la destination contractuelle du bail à usage de café bar brasserie et vente à emporter bien adaptée à la clientèle du quartier ;
- si les références portent notamment sur des commerces dont la destination est distincte de celle des locaux étudiés, elles ne peuvent être écartées au simple motif de leur absence d'équivalence au regard de la destination des lieux dès lors qu'à défaut d'équivalence, les loyers recueillis peuvent être néanmoins utilisés en étant corrigés pour tenir compte des différences constatées entre le local en cause et les locaux de références, la valeur locative n'étant pas le résultat d'une moyenne arithmétique des loyers unitaires sélectionnés de sorte que c'est à tort que le preneur demande de retenir les seules références similaires en terme de surface, de sorte que le tribunal retiendra le prix unitaire de 1.200 € le m²P proposé par l'expert.
La SNC Café Au Départ conteste la valeur locative ainsi retenue, en soulignant qu'il ressort des éléments de comparaison pertinents, eu égard à leur destination commerciale, leur emplacement, leur visibilité et leur proximité avec les locaux loués, des prix unitaires compris entre 425 et 1.000 €.
La SCI Laffitte Pierre fait valoir quant à elle qu'en écartant les références plus éloignées et celles plus anciennes, la valeur locative ressortirait à la somme de 1.325 € / m2, la SNC Café Au Départ bénéficiant d'une localisation et d'une visibilité plus avantageuses que celles des références sur lesquelles s'est appuyé le juge des loyers commerciaux tandis que les références proposées par la locataire seraient incomparables en termes de périodes comme de localisation.
Elle souligne qu'il y aurait lieu de tenir compte du bon état de l'immeuble, de la bonne situation des locaux, de l'importance superficielle des locaux, de la bonne configuration de la salle de restauration et l'avantage de la terrasse ouverte permettant le nombre de couverts servis.
Au cas d'espèce, c'est par des motifs dont la pertinence en cause d'appel n'a pas été altérée et que la cour adopte que le premier juge a ainsi statué.
En effet, il résulte de la synthèse des différentes références retenues par l'expert, tenant tant à des fixations judiciaires de loyers, que des renouvellements amiables et le prix du marché, une valeur locative de 1.200 €/m²P, cette valorisation tenant également compte de l'état des locaux et de l'immeuble au sein duquel les locaux se trouvent, ainsi que de la commercialité de la zone.
Si les références portent sur des commerces de nature certes différentes (banque, prêt à porter...), il n'en demeure pas moins qu'elles se trouvent à proximité, et reflètent un marché à proximité présentant à la date la plus proche possible du renouvellement, une valorisation comprise entre 243 €/m² et 2.696 €/m²P, de sorte qu'une valeur locative de 1.200 €/m²P apparaît pertinente.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a fixé la valeur locative à 1.200 €/m².
- Sur les correctifs
En application de l'article R. 145-8 du code de commerce, il convient de tenir compte des clauses du bail transférant sur le preneur des charges attachées à la qualité de propriétaire qui constituent un facteur de diminution de la valeur locative, l'affirmation selon laquelle ces clauses seraient habituelles ne permettant pas d'écarter l'application de ce facteur de minoration du loyer, chaque contrat de bail constituant un ensemble d'obligations réciproques spécifique.
- Sur l'abattement par application de l'article R. 145-8 du code de commerce pour la prise en charge des travaux de conformité
Au cas d'espèce, il est constant que l'article 8.2 du contrat de bail liant les parties prévoit que «le preneur sera tenu de se conformer à ses frais à la réglementation en vigueur notamment en ce qui concerne la voirie, la salubrité, la police, l'hygiène et la sécurité (en ce compris toutes les conséquences découlant de la réglementation sur l'amiante ou la lutte contre les termites) en procédant à toutes interventions requises dans les lieux loués pour mettre ceux-ci en conformité avec les normes applicables».
Si cette clause se retrouve fréquemment dans les contrats de baux commerciaux en région parisienne, cette circonstance ne saurait toutefois sérieusement éluder le fait qu'elle procède ainsi à un transfert du coût de travaux de mise en conformité sur le locataire, sans contrepartie pour ce dernier, et s'analyse dès lors en une clause exorbitante ouvrant ainsi droit à un abattement par application de l'article R. 145-8 du code de commerce.
Il convient, eu égard au montant des investissements d'ores et déjà réalisés, d'appliquer un abattement de 5 % et d'approuver le premier juge d'avoir retenu cet abattement.
Le jugement sera par conséquent confirmé de ce chef.
- Sur l'abattement par application de l'article R. 145-8 du code de commerce pour la taxe foncière
En l'espèce, le contrat de bail transfère sur le preneur le paiement de l'impôt foncier.
Si cette clause se retrouve fréquemment dans les contrats de baux commerciaux en région parisienne, cette circonstance ne saurait toutefois sérieusement éluder le fait qu'elle procède ainsi à un transfert d'une charge tenant à la qualité de propriétaire sur le locataire, sans contrepartie pour ce dernier, et s'analyse dès lors en une clause exorbitante ouvrant ainsi droit à un abattement par application de l'article R. 145-8 du code de commerce.
Compte tenu de cette clause exorbitante du droit commun des baux, le jugement déféré a opéré à juste titre à une minoration de la valeur locative en opérant un abattement équivalent au montant de l'impôt foncier, soit 2.697,65 €.
Le jugement sera donc confirmé de ce chef.
- Sur la majoration liée à la terrasse
En application de l'article R. 145-4 du code de commerce, il convient de tenir compte de l'avantage constitué par la présence d'une terrasse bordant l'établissement et donnant sur la [Adresse 1], cet avantage accroissant de manière notable la surface de réception de la clientèle, la visibilité et l'attractivité de l'établissement.
Dans l'appréciation de cet avantage, il convient toutefois de tenir compte du fait que la terrasse, qui augmente de 30 couverts la capacité de l'établissement, donne principalement sur la [Adresse 1], de moindre attractivité, dans un environnement extérieur bruyant, conduisant ainsi à fixer en conséquence à 5 % la majoration résultant de la terrasse, et de confirmer en conséquence le jugement de ce chef et débouter la SCI Laffitte Pierre sollicitant qu'elle soit portée à 10 %.
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a fixé le loyer renouvelé minimum garanti à la charge de la SNC Café Au Départ à compter du 1er janvier 2018 à la somme de 91.610 € HT/HC résultant du calcul suivant :(78,59 m²P x 1.200 € soit 94.308 € - 2.697,95 € - 4.715,40 € + 4.715 €).
2. Sur les intérêts
En vertu du nouvel article 1231-6 et 1231-7du code civil, le premier juge doit être approuvé d'avoir fait partir le cours des intérêts à compter du 24 décembre 2018, date de l'assignation introductive d'instance, faute de mise en demeure antérieure.
Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a fait courir les intérêts sur le différentiel entre le loyer effectivement acquitté et le loyer finalement dû à compter du 24 décembre 2018, puis au fur et à mesure des échéances échues.
3. Sur les demandes accessoires
Chaque partie succombant en son appel principal ou incident, conservera ses dépens d'appel, les dépens de première instance restant répartis ainsi que décidé par le premier juge.
En outre, il n'apparaît pas inéquitable de débouter les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort ;
Confirme le jugement rendu le 17 mai 2022 par le Tribunal judiciaire de Paris sous le n° RG 19/245 en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Déboute les parties de leurs autres demandes ;
Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel.