Décisions
CA Chambéry, 2e ch., 13 juin 2024, n° 23/00530
CHAMBÉRY
Ordonnance
Autre
COUR D'APPEL de CHAMBÉRY
2ème Chambre
ORDONNANCE DU CONSEILLER DE LA MISE EN ETAT
du 13 Juin 2024
N° RG 23/00530 - N° Portalis DBVY-V-B7H-HGXF
Appelante
Mme [R] [A] [K] [B] épouse [Z]
née le 03 Juillet 1976 à [Localité 9], demeurant [Adresse 5]
Représentée par Me Vianney LEBRUN, avocat postulant au barreau d'ANNECY et Me Florence ROMEO, avocat plaidant au barreau de NICE
contre
Intimés et appelants
M. [T] [H]
né le 01 Juillet 1942 à [Localité 6], demeurant [Adresse 1]
M. [L] [H]
né le 27 Juin 1973 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]
Représentés par Me Delphine OTTONE, avocat postulant au barreau d'ANNECY et la SCP LAGRAVE - JOUTEUX, avocat plaidant au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
Intimés
M. [G] [C], demeurant [Adresse 8]
Représenté par Me Carole MORLON-RUFFINI, avocat postulant au barreau d'ANNECY et Me Alain VOISARD, avocat plaidant au barreau de NANTES
S.A.R.L. JPB 'CARIBBEAN YACHT' dont le siège social est [Adresse 7] prise en la personne de son représentant légal
Représentée par la SCP VISIER PHILIPPE - OLLAGNON DELROISE & ASSOCIES, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et Me Christophe CUARTERO, avocat plaidant au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
Mme [F] [M], demeurant [Adresse 3]
sans avocat constitué
M. [W] [I], demeurant [Adresse 3]
sans avocat constitué
*********
Nous, Alyette FOUCHARD, Conseillère chargée de la mise en état de la 2ème Chambre de la Cour d'appel de Chambéry, assistée de Sylvie DURAND, Greffière, avons rendu l'ordonnance suivante le 13 Juin 2024 après examen de l'affaire à notre audience du 16 Mai 2024 et mise en délibéré :
Le 23 janvier 2018, Mme [R] [B], épouse [Z], a vendu un navire de marque Fountaine Pajot, type Lavezzi 40, millésime 2006 dénommé Mare, à M. [W] [I]. Ce navire avait, préalablement à la vente, fait l'objet d'une expertise le 15 décembre 2017 par M. [G] [C], expert maritime, laquelle n'a mis en évidence aucune anomalie majeure.
Dès le 29 janvier 2018, M. [W] [I] a donné mandat de vendre ce navire à la société Caribbean Yachts. Le 19 mars 2018, MM. [T] et [L] [H] ont signé avec la société Caribbean Yachts une promesse d'achat de ce navire pour le prix de 120 000 euros, sous diverses conditions suspensives habituelles. Une nouvelle expertise du navire sera réalisée à cette occasion par M. [C], à la demande des acquéreurs, le 29 mars 2018. Aucune anomalie n'a été relevée.
Le 3 avril 2018, le navire a fait l'objet de deux ventes successives : M. [I] l'a d'abord vendu à Mme [F] [M] (sa compagne), laquelle l'a immédiatement revendu aux consorts [H] pour le prix de 120 000 euros.
L'acte de francisation a été établi le 10 avril 2018, et le navire a été rebaptisé Ohana.
Courant juin 2018, lors d'une sortie en mer, les acquéreurs ont constaté l'existence d'une fissure et un éclatement de section du plancher de la cabine avant tribord, proche de la cloison placée sous la ligne du mât.
Après investigations, ils ont ainsi découvert que le navire avait subi une grave avarie le 25 juillet 2009, à la suite de laquelle des réparations avaient été réalisées, masquées par une couche de peinture sous le plancher.
Un nouvel expert maritime était mandaté par les consorts [H], lequel a établi un rapport le 25 juillet 2018 aux termes duquel M. [P] [S] conclut à l'existence d'un dommage structurel qui n'a pas été réparé dans les règles de l'art et qu'il est vivement déconseillé de naviguer avec ce navire dans son état actuel, hormis pour des petites navigations côtières au moteur ou par temps calme.
C'est dans ces conditions que, par actes délivrés les 4 octobre, 8 novembre et 6 décembre 2018, les consorts [H] ont fait assigner Mme [M], M. [I], la société Caribbean Yachts et M. [C] devant le tribunal de grande instance d'Annecy aux fins d'annulation et, subsidiairement, de résolution de la vente du navire sur le fondement de la garantie des vices cachés, et paiement de la somme de 120 000 euros en restitution du prix, outre 25 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Par acte délivré le 9 décembre 2019, les consorts [H] ont fait assigner Mme [B] en intervention forcée.
Mme [M] et M. [I] n'ont pas comparu devant le tribunal. Les autres défendeurs ont comparu et ont fait valoir leurs observations.
Par jugement réputé contradictoire rendu le 9 mars 2023, le tribunal judiciaire d'Annecy a :
rejeté la demande aux fins de nullité du contrat de vente du navire entre M. [T] [H] et M. [L] [H] et M. [W] [I] et Mme [F] [M],
ordonné la résolution de la vente du navire intervenue entre M. [T] [H] et M. [L] [H], d'une part, et M. [W] [I] et Mme [F] [M], d'autre part,
déclaré M. [W] [I], Mme [F] [M] et Mme [R] [B] épouse [Z] responsables in solidum au titre de la garantie des vices cachés,
condamné in solidum M. [W] [I], Mme [F] [M] et Mme [R] [B] épouse [Z] à la restitution de la somme de 120 000 euros au profit de MM. [L] et [T] [H],
condamné la société SAS JPB (Caribbean Yachts) au paiement de la somme de 5 000 euros au profit de MM. [L] et [T] [H] en réparation de leur préjudice lié à la perte de chance de ne pas conclure la vente,
débouté MM. [L] et [T] [H] du surplus de leur demande au titre de l'indemnisation de leurs préjudices,
débouté MM. [L] et [T] [H] de toutes les demandes aux fins de condamnation de M. [G] [C],
condamné M. [W] [I], Mme [F] [M], Mme [R] [B] épouse [Z] et la société JPB (Caribbean Yachts) aux entiers dépens,
condamné in solidum M. [W] [I], Mme [F] [M], Mme [R] [B] épouse [Z] et la société JPB (Caribbean Yachts) au paiement de la somme de 5 000 euros à MM. [L] et [T] [H], pris indivisément, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné in solidum M. [W] [I], Mme [F] [M], Mme [R] [B] épouse [Z] et la société JPB (Caribbean Yachts), à M. [T] [H] et M. [L] [H] au paiement de la somme de 4 000 euros à M. [G] [C] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
débouté les parties pour le surplus de leurs demandes.
Par déclaration du 28 mars 2023, Mme [R] [B] épouse [Z] a interjeté appel de ce jugement, en intimant toutes les autres parties. Cette affaire a été enrôlée sous le n° R.G. 23/00530.
Par déclaration du 14 avril 2023, M. [T] [H] et M. [L] [H] ont interjeté appel de ce jugement en intimant M. [G] [C] seul. Cette affaire a été enrôlée sous le n° R.G. 23/00618.
M. [G] [C] a fait délivrer aux autres parties des assignations en appel provoqué de sorte que le deuxième appel fait désormais intervenir toutes les parties présentes en première instance.
Par ordonnance rendue le 11 janvier 2024, le conseiller de la mise en état a notamment ordonné la jonction des deux appels.
Par conclusions déposées le 13 mars 2024, MM. [L] et [T] [H] ont saisi le conseiller de la mise en état aux fins d'expertise du navire litigieux. Aux termes de leurs conclusions du 15 mai 2024 ils demandent au conseiller de la mise en état de :
Vu les dispositions combinées des articles 563, 789 et 907 du code de procédure civile,
désigner un expert de métropole de son choix avec pour mission :
- d'examiner le navire de marque Fountaine Pajot type Lavezzi 40 millésime 2006 dénommé Ohana,
- entendre tous sachants et se faire délivrer tous documents utiles à sa mission,
- décrire l'état actuel du navire,
- déterminer l'avarie du navire et ses conséquences structurelles,
- déterminer les coûts de la réparation si elle est possible,
- se faire communiquer le livre de bord, le carnet d'entretien et les justificatifs de toutes les opérations de maintenance d'entre et/ou de réparation qui ont été réalisées,
- si des réparations ont été réalisées, dire si elles sont conformes aux règles de l'art,
- dire si ce navire est en état d'effectuer des croisières hauturières conformément à sa classification (A) ou s'il est impropre à sa destination,
- fournir tous élément techniques et de fait de manière à permettre à la cour d'apprécier les responsabilités encourues et les préjudices subis,
réserver les frais irrépétibles et les dépens de l'instance.
Par conclusions déposées le 14 mai 2024, la société JPB (Caribbean Yachts), demande au conseiller de la mise en état de :
lui donner acte de ses plus expresses réserves de droit sur la mesure d'instruction sollicitée,
statuer ce que de droit sur la demande d'expertise formée par les consorts [H],
le cas échéant,
dire que tous les frais d'expertise seront avancés par les demandeurs à la mesure d'instruction,
condamner les consorts [H] à payer à la société JPB (Caribbean Yachts) la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions déposées le 15 mai 2024, M. [G] [C] demande au conseiller de la mise en état de :
Vu les dispositions combinées des articles 146 et 907 du code de procédure civile,
à titre principal, débouter les consorts [H] de leur demande d'expertise,
à titre subsidiaire, dès lors qu'il serait fait droit à la demande des consorts [H],
recevoir M. [C] dans sa demande de voir compléter la mission des chefs suivants :
- se faire communiquer l'historique de l'utilisation du navire par les consorts [H] depuis l'achat de celui-ci,
- se faire préciser les conditions d'entreposage à flot ou à terre du navire depuis juin 2018,
- se faire communiquer le rapport de mer, suite aux désordres constatés et l'éventuelle déclaration de sinistre à l'assureur,
- examiner les conditions de navigation au jour déclaré de la survenance des dommages et la corrélation entre la voilure déclarée portée et celle figurant à la table de réduction du manuel du propriétaire,
- recueillir toute information utile quant au réglage du gréement dormant,
- examiner les oeuvre vives du navire et recueillir les informations utiles sur leur état apparent lors de la visite de M. [C],
- recueillir toute information utile quant aux conditions de chargement du navire,
vu l'article 700 du code de procédure civile, condamner les demandeurs à l'incident à payer au concluant la somme de 2 000 euros,
mettre les frais d'expertise si elle devait être ordonnée, à la charge des demandeurs à l'incident,
condamner les demandeurs à l'incident aux dépens.
Par conclusions déposées le 2 avril 2024, Mme [R] [B], épouse [Z], demande au conseiller de la mise en état de :
Vu les dispositions combinées des articles 146 et 907 du code de procédure civile,
débouter les consorts [H] de leur demande d'expertise,
à titre subsidiaire, dès lors qu'il serait fait droit à la demande des consorts [H],
ordonner que la mission de l'expert sera complétée ainsi :
- se faire communiquer l'historique de l'utilisation du navire par les consorts [H] et [I] et [M] depuis leurs achats respectifs,
- se faire communiquer le rapport de mer, suite aux désordres constatés et l'éventuelle déclaration de sinistre à l'assureur par les consorts [H],
- examiner les conditions de navigation au jour déclaré de la survenance des dommages et la corrélation entre la voilure déclarée portée et celle figurant à la table de réduction du manuel du propriétaire,
- recueillir toute information utile quant au réglage du gréement dormant,
- examiner les oeuvre vives du navire et recueillir les informations utiles sur leur état apparent lors de la visite de M. [C],
- recueillir toute information utile quant aux conditions de chargement et de navigation du navire durant les 6 années écoulées,
ordonner que les frais d'expertise à intervenir seront à la charge exclusive des demandeurs à l'incident,
réserver les dépens.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application de l'article 146 du code de procédure civile, une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver. En aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve.
En l'espèce, le navire litigieux a fait l'objet de cinq expertises successives qui sont toutes produites aux débats, à savoir :
- l'expertise de M. [U] du 20 septembre 2009, réalisée ensuite du naufrage subi le 25 juillet 2009,
- l'expertise préalable à l'assurance de M. [E], réalisée le 4 mai 2012 avant la vente du navire à Mme [B], dans laquelle l'avarie majeure subie est rappelée, ainsi que les réparations effectuées,
- les deux rapports successifs établis par M. [C], pour le premier le 15 décembre 2017 à l'occasion de la vente à M. [I], pour le second le 10 avril 2018, à l'occasion de la vente aux consorts [H],
- le constat d'état établi par M. [S] le 25 juillet 2018 à la demande des consorts [H].
Les parties disposent donc de nombreux éléments sur l'état du navire et son historique jusqu'en 2018.
Depuis juillet 2018, il résulte des indications des consorts [H] que le navire est resté au mouillage, sans préciser s'il a fait l'objet d'une protection particulière ou d'un entretien.
Compte tenu du délai écoulé depuis son immobilisation, durant laquelle il a pu subir des dommages ne serait-ce que par l'effet du temps, et les éléments déjà produits, l'expertise sollicitée n'apparaît pas utile à la solution du litige, étant souligné que les consorts [H] n'ont jamais sollicité une telle mesure en première instance.
En conséquence la demande sera rejetée.
Aucune considération d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties.
Les dépens de l'incident suivront ceux de l'instance au fond.
PAR CES MOTIFS
Nous, Conseillère de la mise en état, statuant publiquement et contradictoirement,
Déboutons M. [L] [H] et M. [T] [H] de leur demande d'expertise,
Disons n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties,
Disons que les dépens de l'incident suivront ceux de l'instance au fond.
Ainsi prononcé le 13 Juin 2024 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signée par Alyette FOUCHARD, Conseillère chargée de la Mise en Etat et Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Conseillère de la Mise en Etat
2ème Chambre
ORDONNANCE DU CONSEILLER DE LA MISE EN ETAT
du 13 Juin 2024
N° RG 23/00530 - N° Portalis DBVY-V-B7H-HGXF
Appelante
Mme [R] [A] [K] [B] épouse [Z]
née le 03 Juillet 1976 à [Localité 9], demeurant [Adresse 5]
Représentée par Me Vianney LEBRUN, avocat postulant au barreau d'ANNECY et Me Florence ROMEO, avocat plaidant au barreau de NICE
contre
Intimés et appelants
M. [T] [H]
né le 01 Juillet 1942 à [Localité 6], demeurant [Adresse 1]
M. [L] [H]
né le 27 Juin 1973 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]
Représentés par Me Delphine OTTONE, avocat postulant au barreau d'ANNECY et la SCP LAGRAVE - JOUTEUX, avocat plaidant au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
Intimés
M. [G] [C], demeurant [Adresse 8]
Représenté par Me Carole MORLON-RUFFINI, avocat postulant au barreau d'ANNECY et Me Alain VOISARD, avocat plaidant au barreau de NANTES
S.A.R.L. JPB 'CARIBBEAN YACHT' dont le siège social est [Adresse 7] prise en la personne de son représentant légal
Représentée par la SCP VISIER PHILIPPE - OLLAGNON DELROISE & ASSOCIES, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et Me Christophe CUARTERO, avocat plaidant au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART
Mme [F] [M], demeurant [Adresse 3]
sans avocat constitué
M. [W] [I], demeurant [Adresse 3]
sans avocat constitué
*********
Nous, Alyette FOUCHARD, Conseillère chargée de la mise en état de la 2ème Chambre de la Cour d'appel de Chambéry, assistée de Sylvie DURAND, Greffière, avons rendu l'ordonnance suivante le 13 Juin 2024 après examen de l'affaire à notre audience du 16 Mai 2024 et mise en délibéré :
Le 23 janvier 2018, Mme [R] [B], épouse [Z], a vendu un navire de marque Fountaine Pajot, type Lavezzi 40, millésime 2006 dénommé Mare, à M. [W] [I]. Ce navire avait, préalablement à la vente, fait l'objet d'une expertise le 15 décembre 2017 par M. [G] [C], expert maritime, laquelle n'a mis en évidence aucune anomalie majeure.
Dès le 29 janvier 2018, M. [W] [I] a donné mandat de vendre ce navire à la société Caribbean Yachts. Le 19 mars 2018, MM. [T] et [L] [H] ont signé avec la société Caribbean Yachts une promesse d'achat de ce navire pour le prix de 120 000 euros, sous diverses conditions suspensives habituelles. Une nouvelle expertise du navire sera réalisée à cette occasion par M. [C], à la demande des acquéreurs, le 29 mars 2018. Aucune anomalie n'a été relevée.
Le 3 avril 2018, le navire a fait l'objet de deux ventes successives : M. [I] l'a d'abord vendu à Mme [F] [M] (sa compagne), laquelle l'a immédiatement revendu aux consorts [H] pour le prix de 120 000 euros.
L'acte de francisation a été établi le 10 avril 2018, et le navire a été rebaptisé Ohana.
Courant juin 2018, lors d'une sortie en mer, les acquéreurs ont constaté l'existence d'une fissure et un éclatement de section du plancher de la cabine avant tribord, proche de la cloison placée sous la ligne du mât.
Après investigations, ils ont ainsi découvert que le navire avait subi une grave avarie le 25 juillet 2009, à la suite de laquelle des réparations avaient été réalisées, masquées par une couche de peinture sous le plancher.
Un nouvel expert maritime était mandaté par les consorts [H], lequel a établi un rapport le 25 juillet 2018 aux termes duquel M. [P] [S] conclut à l'existence d'un dommage structurel qui n'a pas été réparé dans les règles de l'art et qu'il est vivement déconseillé de naviguer avec ce navire dans son état actuel, hormis pour des petites navigations côtières au moteur ou par temps calme.
C'est dans ces conditions que, par actes délivrés les 4 octobre, 8 novembre et 6 décembre 2018, les consorts [H] ont fait assigner Mme [M], M. [I], la société Caribbean Yachts et M. [C] devant le tribunal de grande instance d'Annecy aux fins d'annulation et, subsidiairement, de résolution de la vente du navire sur le fondement de la garantie des vices cachés, et paiement de la somme de 120 000 euros en restitution du prix, outre 25 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Par acte délivré le 9 décembre 2019, les consorts [H] ont fait assigner Mme [B] en intervention forcée.
Mme [M] et M. [I] n'ont pas comparu devant le tribunal. Les autres défendeurs ont comparu et ont fait valoir leurs observations.
Par jugement réputé contradictoire rendu le 9 mars 2023, le tribunal judiciaire d'Annecy a :
rejeté la demande aux fins de nullité du contrat de vente du navire entre M. [T] [H] et M. [L] [H] et M. [W] [I] et Mme [F] [M],
ordonné la résolution de la vente du navire intervenue entre M. [T] [H] et M. [L] [H], d'une part, et M. [W] [I] et Mme [F] [M], d'autre part,
déclaré M. [W] [I], Mme [F] [M] et Mme [R] [B] épouse [Z] responsables in solidum au titre de la garantie des vices cachés,
condamné in solidum M. [W] [I], Mme [F] [M] et Mme [R] [B] épouse [Z] à la restitution de la somme de 120 000 euros au profit de MM. [L] et [T] [H],
condamné la société SAS JPB (Caribbean Yachts) au paiement de la somme de 5 000 euros au profit de MM. [L] et [T] [H] en réparation de leur préjudice lié à la perte de chance de ne pas conclure la vente,
débouté MM. [L] et [T] [H] du surplus de leur demande au titre de l'indemnisation de leurs préjudices,
débouté MM. [L] et [T] [H] de toutes les demandes aux fins de condamnation de M. [G] [C],
condamné M. [W] [I], Mme [F] [M], Mme [R] [B] épouse [Z] et la société JPB (Caribbean Yachts) aux entiers dépens,
condamné in solidum M. [W] [I], Mme [F] [M], Mme [R] [B] épouse [Z] et la société JPB (Caribbean Yachts) au paiement de la somme de 5 000 euros à MM. [L] et [T] [H], pris indivisément, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné in solidum M. [W] [I], Mme [F] [M], Mme [R] [B] épouse [Z] et la société JPB (Caribbean Yachts), à M. [T] [H] et M. [L] [H] au paiement de la somme de 4 000 euros à M. [G] [C] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
débouté les parties pour le surplus de leurs demandes.
Par déclaration du 28 mars 2023, Mme [R] [B] épouse [Z] a interjeté appel de ce jugement, en intimant toutes les autres parties. Cette affaire a été enrôlée sous le n° R.G. 23/00530.
Par déclaration du 14 avril 2023, M. [T] [H] et M. [L] [H] ont interjeté appel de ce jugement en intimant M. [G] [C] seul. Cette affaire a été enrôlée sous le n° R.G. 23/00618.
M. [G] [C] a fait délivrer aux autres parties des assignations en appel provoqué de sorte que le deuxième appel fait désormais intervenir toutes les parties présentes en première instance.
Par ordonnance rendue le 11 janvier 2024, le conseiller de la mise en état a notamment ordonné la jonction des deux appels.
Par conclusions déposées le 13 mars 2024, MM. [L] et [T] [H] ont saisi le conseiller de la mise en état aux fins d'expertise du navire litigieux. Aux termes de leurs conclusions du 15 mai 2024 ils demandent au conseiller de la mise en état de :
Vu les dispositions combinées des articles 563, 789 et 907 du code de procédure civile,
désigner un expert de métropole de son choix avec pour mission :
- d'examiner le navire de marque Fountaine Pajot type Lavezzi 40 millésime 2006 dénommé Ohana,
- entendre tous sachants et se faire délivrer tous documents utiles à sa mission,
- décrire l'état actuel du navire,
- déterminer l'avarie du navire et ses conséquences structurelles,
- déterminer les coûts de la réparation si elle est possible,
- se faire communiquer le livre de bord, le carnet d'entretien et les justificatifs de toutes les opérations de maintenance d'entre et/ou de réparation qui ont été réalisées,
- si des réparations ont été réalisées, dire si elles sont conformes aux règles de l'art,
- dire si ce navire est en état d'effectuer des croisières hauturières conformément à sa classification (A) ou s'il est impropre à sa destination,
- fournir tous élément techniques et de fait de manière à permettre à la cour d'apprécier les responsabilités encourues et les préjudices subis,
réserver les frais irrépétibles et les dépens de l'instance.
Par conclusions déposées le 14 mai 2024, la société JPB (Caribbean Yachts), demande au conseiller de la mise en état de :
lui donner acte de ses plus expresses réserves de droit sur la mesure d'instruction sollicitée,
statuer ce que de droit sur la demande d'expertise formée par les consorts [H],
le cas échéant,
dire que tous les frais d'expertise seront avancés par les demandeurs à la mesure d'instruction,
condamner les consorts [H] à payer à la société JPB (Caribbean Yachts) la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions déposées le 15 mai 2024, M. [G] [C] demande au conseiller de la mise en état de :
Vu les dispositions combinées des articles 146 et 907 du code de procédure civile,
à titre principal, débouter les consorts [H] de leur demande d'expertise,
à titre subsidiaire, dès lors qu'il serait fait droit à la demande des consorts [H],
recevoir M. [C] dans sa demande de voir compléter la mission des chefs suivants :
- se faire communiquer l'historique de l'utilisation du navire par les consorts [H] depuis l'achat de celui-ci,
- se faire préciser les conditions d'entreposage à flot ou à terre du navire depuis juin 2018,
- se faire communiquer le rapport de mer, suite aux désordres constatés et l'éventuelle déclaration de sinistre à l'assureur,
- examiner les conditions de navigation au jour déclaré de la survenance des dommages et la corrélation entre la voilure déclarée portée et celle figurant à la table de réduction du manuel du propriétaire,
- recueillir toute information utile quant au réglage du gréement dormant,
- examiner les oeuvre vives du navire et recueillir les informations utiles sur leur état apparent lors de la visite de M. [C],
- recueillir toute information utile quant aux conditions de chargement du navire,
vu l'article 700 du code de procédure civile, condamner les demandeurs à l'incident à payer au concluant la somme de 2 000 euros,
mettre les frais d'expertise si elle devait être ordonnée, à la charge des demandeurs à l'incident,
condamner les demandeurs à l'incident aux dépens.
Par conclusions déposées le 2 avril 2024, Mme [R] [B], épouse [Z], demande au conseiller de la mise en état de :
Vu les dispositions combinées des articles 146 et 907 du code de procédure civile,
débouter les consorts [H] de leur demande d'expertise,
à titre subsidiaire, dès lors qu'il serait fait droit à la demande des consorts [H],
ordonner que la mission de l'expert sera complétée ainsi :
- se faire communiquer l'historique de l'utilisation du navire par les consorts [H] et [I] et [M] depuis leurs achats respectifs,
- se faire communiquer le rapport de mer, suite aux désordres constatés et l'éventuelle déclaration de sinistre à l'assureur par les consorts [H],
- examiner les conditions de navigation au jour déclaré de la survenance des dommages et la corrélation entre la voilure déclarée portée et celle figurant à la table de réduction du manuel du propriétaire,
- recueillir toute information utile quant au réglage du gréement dormant,
- examiner les oeuvre vives du navire et recueillir les informations utiles sur leur état apparent lors de la visite de M. [C],
- recueillir toute information utile quant aux conditions de chargement et de navigation du navire durant les 6 années écoulées,
ordonner que les frais d'expertise à intervenir seront à la charge exclusive des demandeurs à l'incident,
réserver les dépens.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application de l'article 146 du code de procédure civile, une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver. En aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve.
En l'espèce, le navire litigieux a fait l'objet de cinq expertises successives qui sont toutes produites aux débats, à savoir :
- l'expertise de M. [U] du 20 septembre 2009, réalisée ensuite du naufrage subi le 25 juillet 2009,
- l'expertise préalable à l'assurance de M. [E], réalisée le 4 mai 2012 avant la vente du navire à Mme [B], dans laquelle l'avarie majeure subie est rappelée, ainsi que les réparations effectuées,
- les deux rapports successifs établis par M. [C], pour le premier le 15 décembre 2017 à l'occasion de la vente à M. [I], pour le second le 10 avril 2018, à l'occasion de la vente aux consorts [H],
- le constat d'état établi par M. [S] le 25 juillet 2018 à la demande des consorts [H].
Les parties disposent donc de nombreux éléments sur l'état du navire et son historique jusqu'en 2018.
Depuis juillet 2018, il résulte des indications des consorts [H] que le navire est resté au mouillage, sans préciser s'il a fait l'objet d'une protection particulière ou d'un entretien.
Compte tenu du délai écoulé depuis son immobilisation, durant laquelle il a pu subir des dommages ne serait-ce que par l'effet du temps, et les éléments déjà produits, l'expertise sollicitée n'apparaît pas utile à la solution du litige, étant souligné que les consorts [H] n'ont jamais sollicité une telle mesure en première instance.
En conséquence la demande sera rejetée.
Aucune considération d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties.
Les dépens de l'incident suivront ceux de l'instance au fond.
PAR CES MOTIFS
Nous, Conseillère de la mise en état, statuant publiquement et contradictoirement,
Déboutons M. [L] [H] et M. [T] [H] de leur demande d'expertise,
Disons n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties,
Disons que les dépens de l'incident suivront ceux de l'instance au fond.
Ainsi prononcé le 13 Juin 2024 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signée par Alyette FOUCHARD, Conseillère chargée de la Mise en Etat et Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Conseillère de la Mise en Etat