Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 19 juin 2024, n° 22/00780

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Bio Service Antilles (SA)

Défendeur :

Diagnostica Stago (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Bodard-Hermant

Conseillers :

Mme Brun-Lallemand, M. Richaud

Avocats :

Me Jougla, Me Baechlin, Me Blouet

T. com. Paris, 13e ch., du 11 oct. 2021,…

11 octobre 2021

FAITS ET PROCÉDURE

La société Diagnostica Stago est un fabricant d’instruments et de produits médicaux.

La société Bio Service Antilles Perie Medical (ci-après « BSA ») est une société de distribution de produits médicaux en outre-mer.

Le 22 octobre 2002, les sociétés Diagnostica Stago et BSA, qui entretenaient une relation commerciale depuis 1999, ont conclu un contrat de distribution exclusive des produits Stago pour la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane, tacitement reconductible pour une durée d’un an, sauf dénonciation par les parties trois mois avant la fin de la période contractuelle. En contrepartie de l’exclusivité consentie à la société BSA, cette dernière a été soumise à une obligation d’approvisionnement exclusif, un engagement d’achats minimum et à une obligation de non-concurrence.

Les équipements distribués ainsi que les consommables dédiés à ces équipements ont représenté entre 5 et 10 % du chiffre d’affaires de BSA entre 2010 et 2013.

En 2010, la société Diagnostica Stago a engagé des négociations en vue du son référencement commercial auprès de la société Geslab, créée en France métropolitaine, dont l’activité est la négociation et l’obtention auprès des fournisseurs de conditions d’achat et d’approvisionnement optimisés au profit de ses adhérents.

Le contrat cadre conclu entre Diagnostica Stago et Geslab le 20 janvier 2011, qui couvre toute la France, a prévu s’agissant de la zone Antilles-Guyane la conclusion d’un contrat spécifique entre BSA et Gestlab. Les échanges initiés sur ce volet – quant à la marge accordée à BSA notamment – n’ont cependant pas abouti.

En 2012, le groupement CGN Biosanté réunissant cinq laboratoires situés en Martinique a adhéré à la centrale de référencement Geslab.

Un différend est né entre la société BSA et les sociétés Diagnostica Stago et Geslab s’agissant des conditions commerciales et tarifaires devant être consenties à ce groupement martiniquais de laboratoires.

Par LRAR du 16 juillet 2013 la société Diagnostica Stago a notifié à la société BSA le non renouvellement du contrat de distribution exclusive à l’échéance du 31 décembre 2013.

Par courrier du 10 octobre 2013, elle a proposé un allongement du préavis au 1er aout 2014, mais sans que le caractère exclusif de la relation puisse être maintenu.

Les consommables Stago pouvant toujours être commandés et vendus par BSA en application du contrat conclu entre les parties, les ventes de consommables aux clients publics de BSA se sont poursuivies jusqu’en 2016.

Par acte du 16 novembre 2017, la société Bio Service Antilles Perie Medical a assigné la société Diagnostica Stago devant le tribunal de commerce de Paris pour rupture abusive et brutale de la relation commerciale établie.

Par jugement du 11 octobre 2021, le tribunal de commerce de Paris a :

- Débouté la société Bio Service Antilles Perie Medical de sa demande en principal de paiement de la somme de 247 734 euros au titre de la rupture abusive des relations commerciales,

- Débouté la société Bio Service Antilles Perie Medical de sa demande en subsidiaire de paiement de la somme de 178 919 euros au titre de la rupture brutale des relations commerciales,

- Débouté la société Bio Service Antilles Perie Medical de sa demande en infiniment subsidiaire de paiement de la somme de 96 341 euros au titre des fautes commises durant la période de préavis,

- Débouté la société Bio Service Antilles Perie Medical de sa demande de reprise du stock de produits de la société Diagnostica Stago,

- Condamné la société Bio Service Antilles Perie Medical à payer à la société Diagnostica Stago la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraire,

- Ordonné l’exécution provisoire du jugement,

- Condamné la société Bio Service Antilles Perie Medical aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 135,95 euros dont 22,23 euros de TVA.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 5 janvier 2022 la société Bio Service Antilles Perie Medical a interjeté appel de ce jugement.

La société Bio Service Antilles Perie Medical aux termes de ses dernières conclusions, transmises par RPVA le 4 avril 2022 demande à la Cour de :

Vu les anciens articles 1134 et 1147 du code civil ;

Vu les articles L. 420-1, L. 420-2, L. 420-6 du code de commerce et les articles L. 442-5, et L. 442-6 I du code de commerce dans leur version applicable aux faits de l’espèce ;

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a

* Débouté la SA Bio Service Antilles de sa demande en principal de paiement de la somme de 247 734 euros au titre de la rupture abusive des relations commerciales,

* Débouté la SA Bio Service Antilles de sa demande subsidiaire de paiement de la somme de 178 919 euros au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies,

* Débouté la SA Bio Service Antilles de sa demande infiniment subsidiaire de paiement de la somme de 96341 euros au titre des fautes commises durant la période de préavis,

* Débouté la SA Bio Service Antilles de sa demande de reprise du stock de produits de la SAS Diagnostica Stago,

* Condamné la SA Bio Service Antilles à payer à la SAS Diagnostica Stago la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* Débouté la SA Bio Service Antilles de l'ensemble de ses demandes,

* Ordonné l'exécution provisoire du jugement et

* Condamné la SA Bio Service Antilles aux dépens.

Statuant à nouveau

A titre principal,

- Condamner la société Stago au paiement de la somme de 247 734 euros au titre de la rupture abusive des relations commerciales avec la société BSA ;

A titre subsidiaire,

- Condamner la société Stago au paiement de la somme de 178 919 euros au titre de la rupture brutale des relations commerciales avec la société BSA ;

A titre très subsidiaire,

- Condamner la société Stago au paiement de la somme de 96 341 euros au titre des fautes commises durant la période de préavis ;

En tout état de cause,

- Condamner la société Stago a reprendre le stock de produits de la société BSA contre paiement de la somme de 144 532,88 euros,

- Condamner la société Stago à payer à la société BSA la somme de 40 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société Stago aux entiers dépens, dont distraction en vertu de l’article 699 du code de procédure civile.

La société Diagnostica Stago aux termes de ses dernières conclusions, transmises par RPVA le 4 juillet 2022, demande à la Cour de :

Vu les articles 1194, 1240 et 1241 du code civil, et les articles L. 420-1, L.420-2-1, L.420-3 et L. 442-6 (ancien) du code de commerce,

- Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en toutes ses dispositions,

- Rejeter toutes les demandes de la société BSA,

- Condamner la société BSA à payer à la société Stago la somme de 50 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la société BSA aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 mars 2024.

La Cour renvoie à la décision attaquée et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

1. Sur la rupture abusive des relations commerciales

Moyen des parties

La société BSA soutient, en premier lieu, que sont caractérisées à l’encontre de la société Diagnostica Stago deux pratiques. Elle fait valoir tout d’abord qu’en adhérant à la centrale de référencement Geslab en fin d’année 2010, laquelle négociait un référencement global aux mêmes conditions pour l’ensemble de ses adhérents, la société Diagnostica Stago a voulu imposer à la société BSA la fixation de ses conditions commerciales et tarifaires pour la revente des instruments et produits associés Stago aux laboratoires de biologie médicale établis aux Antilles et adhérents au groupement Geslab, ce qui prohibé par les articles L. 420-1 et L. 442-5 du code de commerce. Il n’existait selon elle aucune marge de manoeuvre pour la société BSA qui se voyait fixer par son fournisseur ses prix de revente auprès du groupement Geslab contre la garantie d’effectuer une marge de 20 %.

BSA soutient ensuite que la société Diagnostica Stago lui a imposé à différentes reprises et sous peine de rompre leur relation commerciale des conditions visant à réduire les prix pratiqués et la marge réalisée, reniant les engagements qu’elle avait pris dans le contrat cadre aux termes desquels elle garantissait à la société BSA une marge de 30 % pour la réduire unilatéralement à 20 % à l’occasion du premier contrat d’application, en violation de l’article L. 442-6, I, 4° code de commerce qui prohibe l’imposition de conditions manifestement abusives obtenues sous la menace. La remise que devait faire la société Diagnostica Stago pour rétablir cette marge de 20 % ne devait être faite qu’en fin d’année et non plus mensuellement laissant à la société BSA le soin de supporter pendant douze mois les pertes occasionnées. En outre, confrontée au refus de la société BSA de signer le contrat d’application du contrat de référencement Geslab avec le client CGN Biosanté, la société Diagnostica Stago l’a selon BSA menacée de rompre leurs relations commerciales en exigeant la signature immédiate du contrat.

BSA fait en deuxième lieu valoir que la société Diagnostica Stago a abusivement rompu leurs relations commerciales en invoquant des motifs fallacieux pour justifier la rupture.

- S’agissant du motif tenant aux délais de paiement de la société BSA, elle soutient qu’il est surprenant que la société Diagnostica Stago en fasse état en 2013 alors qu’elle avait accepté ces retards pendant cinq années. Elle ajoute que si la société Diagnostica Stago s’est accommodée de ces retards en raison des dispositions spécifiques du code de commerce pour le calcul des délais de paiement en outre-mer (L. 441-6 et L. 443-1). Elle indique que la facture était éditée à compter de la mise à disposition des produits et non à partir du 21 jour de cette mise à disposition ème conformément aux dispositions légales.

Elle conclut que beaucoup des retards invoqués n’en sont pas en réalité ;

- S’agissant du motif tiré du refus de formation des collaborateurs de la société BSA, elle soutient que contrairement à ce que la société Diagnostica Stago affirme, elle ne finançait pas ces formations mais ne faisait que les dispenser à titre gracieux et que c’était la société BSA qui finançait le voyage, le clos et le couvert ainsi que les salaires de ses salariés qui devaient se rendre en métropole pour la formation ;

- S’agissant du motif relatif à la qualité du service après-vente de la société BSA, elle fait valoir que ses clients, dont ceux prétendument insatisfaits du service après-vente selon la société Diagnostica Stago, ont témoigné leur soutien à la société BSA après avoir appris la rupture de ses relations avec la société Diagnostica Stago (pièces n°75 à 80).

BSA prétend en troisième lieu que la rupture initiée par la société Diagnostica Stago est en réalité une mesure de rétorsion face à la résistance de la société BSA pour signer le premier contrat d’application Geslab avec le client CGN Biosanté.

La société Diagnostica Stago répond que :

- Il est constant qu’en présence d’un contrat à durée déterminée tacitement renouvelable, la décision de ne pas renouveler le contrat est libre. Le code civil en son article 1212 formule d’ailleurs désormais expressément ce principe selon lequel nul ne peut exiger le renouvellement d’un contrat. En l’espèce, contrairement aux allégations de la société BSA, la société Diagnostica Stago n’a pas rompu un contrat en cours mais a seulement stoppé le mécanisme de reconduction tacite, comme elle en avait le droit, dès lors qu’elle respectait la procédure définie contractuellement, n’ayant jamais laissé entendre que le contrat se poursuivait ;

- Les formalités de dénonciation prévues par le contrat ont été respectées. La société Diagnostica Stago a adressé une LRAR à la société BSA en date du 26 juillet 2013, soit plus de cinq mois avant l’expiration du contrat, lui notifiant sa volonté de ne pas reconduire le contrat dans les mêmes conditions après cette échéance ;

- Les motifs du non-renouvellement invoqués par la société Diagnostica Stago sont indifférents et ne peuvent caractériser une faute dans la décision de ne pas renouveler le contrat ;

- La loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique en outre-mer (ciaprès « loi Lurel ») a interdit, à compter de mars 2013, les accords de distribution exclusive pour les départements, territoires et autres collectivités d’outre-mer (article L. 420-1-2 du code de commerce).

Diagnostica Stago soutient à titre superfétatoire que les motifs justifiant la rupture sont réels :

- S’agissant des impayés, la société BSA ne les conteste pas sérieusement ;

- S’agissant des défaillances du service après-vente, les plaintes des clients sont éloquentes (pièces n°5 à 7) ;

- S’agissant du contrat Geslab, qui implique pour que le référencement soit obtenu que des tarifs préférentiels soient consentis aux adhérents, et est un simple système d’ »opt-in » très courant de ce type de configuration de marché – en ce qu’il permet au distributeur de participer au référencement négocié au niveau du fournisseur, le contrat conditionnant l’accès au client final -, il a été la source de tension entre les sociétés Diagnostica Stago et BSA cette dernière ayant, dans un premier temps, accepté les conditions du dossier CGN Biosanté pour, dans un second temps, revenir sur sa parole, discréditant la société Diagnostica Stago aux yeux d’un client important.

Elle fait enfin valoir que les allégations adverses sont totalement infondées :

- la pratique des prix imposés alléguée interdit, aux termes de l’article L. 442-5 du code de commerce, la fixation par le fournisseur du prix plancher, le droit de fixer un tarif maximum étant en revanche parfaitement admis. Diagnostica Stago affirme ne pas, en toute hypothèse, avoir négocié les conditions à la place de la société BSA mais pour ellemême sur le territoire de la métropole, prévoyant que pour les zones où les produits Stago étaient distribués par un distributeur agréé, un contrat spécifique serait directement conclu entre ce distributeur et la société Geslab (pièce n°9). Elle ajoute que les prix de revente n’ont pas été imposés par la société Diagnostica Stago mais réclamés par la société Geslab (le client final) et que la société BSA les a acceptés (pièces n°21 et 22, pièce BSA n°4).

- s’agissant de la supposée imposition de conditions manifestement abusives, la société Diagnostica Stago allègue que le 15 février 2013, la société BSA a accepté les conditions financières du dossier CGN Biosanté, après négociations (pièce n°10). Ainsi, dans son mail du 29 avril 2013 la société Diagnostica Stago n’a fait que demander à la société BSA de respecter l’engagement ainsi pris (pièce BSA n°12). Elle ajoute que les griefs formulés par la société BSA selon lesquels la société Geslab lui aurait imposé des marges manifestement insuffisantes impliquant des pertes sont démentis par les éléments produits par la société BSA elle-même selon lesquels cette dernière réalisait en 2012 des niveaux de marge particulièrement élevés (pièce BSA n°49). S’agissant de la remise de fin d’année (instaurant un système de compensation dit garantie de marge), la société Diagnostica Stago affirme qu’il s’agit plutôt d’un avantage qu’elle a accordé à la société BSA que d’une condition abusive obtenue. L’enjeu se limitait par ailleurs à la somme de 5 586 euros par an (pièce BSA n°9 – à comparer au chiffre d’affaires de BSA en 2011 : 11, 8 millions d’euros)

- La société Diagnostica Stago affirme enfin ne pas avoir menacé de rompre le contrat pour forcer la société BSA à accepter ces conditions. La théorie des représailles développée par la société BSA est erronée et ne repose sur une aucune preuve. Le regroupement des laboratoires et leur adhésion à Gestlab est, par ailleurs, une réalité de marché.

Réponse de la Cour

Un contrat conclu pour une période déterminée, renouvelable ensuite d'année en année par tacite reconduction, sauf dénonciation adressée par l'une des parties à l'autre, trois mois au moins avant la fin de la période annuelle en cours, et qui s'est effectivement poursuivi au-delà de la période initialement convenue, conserve le caractère de contrat à durée déterminée, ce dont il suit que, sauf abus, le refus de son renouvellement n'ouvre pas droit à indemnité (Cass. Com. 15 janvier 2008, n° 06-14.698)

Une partie qui y met fin dans le respect des modalités prévues n’a pas à justifier d’un quelconque motif. Le juge peut néanmoins, à partir de l’examen de circonstances établies, retenir une faute faisant dégénérer en abus l’exercice du droit de rompre.

Au cas présent, c’est à raison que le tribunal a retenu, dans la décision attaquée, après avoir constaté que les formalités de dénonciation prévues par le contrat avaient été respectées, que :

- BSA, sur lequel pèse la charge de la preuve ne démontre pas en quoi Stago aurait violé les dispositions des articles L. 420-1 et L. 442-5 du code de commerce ;

- les différents échanges de mails sur le contrat Geslab démontrent qu’une négociation a bien eu lieu, que le prix et la marge des produits concernant ce contrat ont été discutés en 2011 et 2012 et n’ont pas été imposés ;

- le message de BSA à Stago du 15 février 2013 indique l’accord de Stago « sur la base des éléments transmis », étant observé que le courriel du 28 décembre 2010 confirmait déjà « l’accord de principe s’agissant du contrat Geslab » (pièces BSA versées au dossier d’appel sous les n°6 et 12).

Y ajoutant, la Cour constate que les autres allégations de BSA manquent également en fait.

Le jugement est confirmé.

2. Sur la rupture brutale de la relation commerciale établie

L’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce applicable à l’époque des faits dispose :

“Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé par le fait, pour tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au registre des métiers :

(...) 5° de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. (…) Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure. »

Le caractère établi depuis 1999 de la relation commerciale, soit pendant 14 ans, n’est pas discuté par les parties.

2.1. Sur la brutalité de la rupture

Moyen des parties

La société BSA fait valoir tout d’abord que la rupture initiée par la société Diagnostica Stago visait l’ensemble de la relation contractuelle mais n’a été effective que partiellement puisque la société Diagnostica Stago n’a pas réussi à récupérer les contrats publics de la société BSA et a donc été contrainte d’honorer ses engagements vis-à-vis de ces clients publics après la date de rupture. Pour autant, BSA a subi une perte du flux d’affaires de 42% avec la société Diagnostica Stago. Entre 2013 et 2014 le chiffre d’affaires de la société Diagnostica Stago avec la société BSA a diminué de 373 662 euros, soit une baisse de 42% des commandes de la société BSA en 2014 qui s’explique par la fin des commandes de ses clients privés du fait des exactions commises par la société Diagnostica Stago (pièce Diagnostica Stago n°28). Le chiffre d’affaires de la société BSA avec ses clients privés sur les produits de la société Diagnostica Stago s’est élevé à 4 952,34 euros quand il s’élevait à 398 289,66 euros l’année précédente, soit une chute de 98,76 % (pièce n°89). La baisse des commandes de la société BSA auprès de la société Diagnostica Stago est la conséquence directe de la cessation des commandes de ses clients privés auprès d’elle, après que la société Diagnostica Stago leur ait présenté la société Biorel comme étant son nouveau distributeur exclusif à compter du 1er janvier 2014. Ainsi, c’est bien la société Diagnostica Stago qui est à l’origine de la rupture partielle alléguée.

BSA considère, ensuite, que le préavis effectivement octroyé par la société Diagnostica Stago à la société BSA a été de cinq mois. Durant cette période, la société Biorel, sur la demande de la société Diagnostica Stago, a commencé à approcher les clients de la société BSA pour se présenter comme étant le nouveau distributeur de la société Diagnostica Stago à compter du mois de janvier 2014. BSA a dans ces circonstances refusé la prorogation du préavis proposé par la société Diagnostica Stago qu’elle savait être parfaitement fictive puisque ses clients avaient déjà été approchés par la société Biorel. Or ce préavis de cinq mois est insuffisant compte tenu de la durée et des circonstances de leur relation commerciale. La société BSA qui a implanté et promu les produits de la marque Stago sur le marché des Antilles aurait dû bénéficier d’un délai de préavis plus important pour trouver un nouveau fournisseur et des produits de substitution et engager les investissements nécessaires pour en assurer le service après-vente. Pour déterminer la durée de préavis qui aurait dû lui être octroyée, et qui doit être selon elle d’un minimum de 18 mois, il convient selon elle de prendre en compte :

- Leur courant d’affaires en progression : + 70% en 2012/2013 par rapport à 2011/2012 ;

- Les investissements réalisés par la société BSA en termes de publicité, de prospection et de formation pour assurer le service après-vente ;

- L’existence d’une clause d’exclusivité au bénéfice de la société BSA en contrepartie d’un engagement d’approvisionnement exclusif ;

- Un secteur d’activité très particulier des produits de diagnostics médicaux qui nécessitent des connaissances propres à ce secteur impliquant des formations importantes ;

- La spécificité des produits de la marque Stago qui ne sont pas substituables dans la mesure où seuls les produits Stago sont compatibles avec les instruments vendus sous cette même marque.

La société BSA soutient enfin que le délai de préavis de trente-huit mois s’agissant des réactifs dont se prévaut la société Diagnostica Stago est factice. Elle fait valoir que la société Diagnostica Stago s’est trouvée contrainte de continuer à approvisionner la société BSA pour que cette dernière puisse exécuter les marchés publics dont elle était titulaire jusqu’à leur terme en 2016 et qu’à défaut elle aurait engagé sa responsabilité.

En réponse, la société Diagnostica Stago soutient avoir accordé un préavis de douze mois s’agissant des instruments et de trente-huit mois s’agissant des réactifs et consommables.

En juillet 2013, la société Diagnostica Stago a informé la société BSA de sa volonté de ne pas renouveler le contrat à son échéance, tout en invitant sa partenaire à une discussion quant aux modalités de la fin de leur partenariat, notamment s’agissant de l’article 16 du contrat qui prévoyait la poursuite des approvisionnements en réactifs, consommables et pièces détachées. Ce non-renouvellement n’impliquait pas la fin de toute relation au 31 décembre 2013 puisque le contrat prévoyait une poursuite de l’approvisionnement pendant deux ans s’agissant des réactifs et instruments après la fin du contrat. La société BSA avait demandé une poursuite du contrat et la société Diagnostica Stago a proposé de le prolonger jusqu’en août 2014 mais sans exclusivité. La relation commerciale s’est ainsi effectivement poursuivie après le 1er janvier 2014 si bien que la société BSA a effectivement profité d’un préavis d’un an sur les instruments et de trente-six mois sur les réactifs.

Diagnostica Stago ajoute que la levée de l’exclusivité après le mois de décembre 2013 est valable puisque dictée par la loi. Le retrait de l’exclusivité est prescrit par la loi Lurel interdisant les importations exclusives en outre-mer de sorte qu’il ne peut lui être reproché de s’être conformée à la règlementation, au demeurant en décalé puisqu’en décembre 2013 seulement, étant observé que l’Autorité de la concurrence a sanctionné un fournisseur et un distributeur en produits de biologie médicale en Guyane pour avoir conservé leur contrat de distribution exclusive jusqu’en 2016 (décision n°19-D-11).

Elle soutient que les préavis octroyés étaient largement suffisants compte tenu des éléments suivants :

- la diversité de la gamme de produits distribuée par la société BSA et de la présence d’autres fournisseurs avec lesquels la société BSA était en relation pendant le contrat ;

- la faible part de la relation dans le chiffre d’affaires de la société BSA ;

- les nombreux contacts noués par la société BSA avec la clientèle ;

- le fait que la marge de la société BSA est réalisée sur les réactifs, consommables et les pièces détachées ;

- l’absence d’investissements significatifs effectués par la société BSA et non amortis ;

- la durée très longue du préavis sur les consommables, réactifs et pièces détachées laissant toute latitude pour fournir ses clients équipés en instruments Stago, BSA étant mise en mesure de faire migrer petit à petit ses clients vers son nouveau fournisseur, Werfen.

Enfin, selon Diagnostica Stago, la société BSA n’a subi aucune rupture partielle en janvier 2014 car la baisse de commandes a été le fruit de sa propre décision, son partenaire pouvant librement commander des produits Stago. Elle souligne que la société Diagnostica Stago n’a refusé aucune commande. Elle ajoute que la société BSA ne démontre pas avoir subi une chute de chiffre d’affaires causée par la société Diagnostica Stago. Elle affirme, sur ce point, que du fait de la cessation de l’exclusivité, imposée par la loi, il était inéluctable qu’une partie de sa clientèle se tourne vers la société Biorel. Elle conteste, en outre, avoir présenté cette société tierce comme étant son distributeur exclusif.

Réponse de la Cour

L’article L. 442-6 I 5° du code de commerce sanctionne non la rupture, qui doit néanmoins être imputable à l’agent économique à qui elle est reprochée, mais sa brutalité qui résulte de l'absence de préavis écrit ou d'un préavis suffisant.

Le délai de préavis suffisant, qui s'apprécie au moment de la notification de la rupture, doit s'entendre du temps nécessaire à l'entreprise délaissée pour se réorganiser, soit pour préparer le redéploiement de son activité, trouver un autre partenaire ou une solution de remplacement. Les critères pertinents sont l'ancienneté des relations et les usages commerciaux, le degré de dépendance économique, le volume d'affaires réalisé, la progression du chiffre d'affaires, les investissements effectués, l’éventuelle exclusivité des relations et la spécificité du marché et des produits et services en cause ainsi que tout obstacle économique ou juridique à la reconversion.

L’existence d’une stipulation contractuelle de préavis ne dispense pas le juge, s’il en est requis, de vérifier si le délai contractuel tient compte de la durée des relations commerciales ayant existé entre les parties et des autres circonstances (Cass. Com., 20 mai 2014, n°13-16.398).

S’agissant en premier lieu du caractère suffisant du délai accordé, c’est à raison que le tribunal a au cas présent retenu, les paramètres de la relation suivants :

- une ancienneté de 14 ans ;

- la nécessaire prise en compte de la loi Lurel du 20 novembre 2012 qui a instauré l’article L. 420-1-2 du code de commerce, lequel ne permet plus l’exclusivité de la relation ;

- le fait que BSA pouvait continuer à vendre des consommables qui représentaient une part importante de son chiffre d’affaires et de sa marge avec les produits Stago ;

- les investissements réalisés par BSA, lesquels étaient standards et raisonnables pour l’activité réalisée.

Y aoutant, la Cour prend en complément en considération :

- la présence d’autres fournisseurs avec lesquels la société BSA était en relation pendant le contrat (Sysmex, filiale du groupe Siemens, notamment) ;

- la part de la relation dans le chiffre d’affaires de la société BSA, limitée à 10 % de son chiffre d’affaires en 2011 et moins de 6 % en 2013 (pièces Stago n°19) ;

- la circonstance que les investissements en termes de publicité, de prospection et de formation pour assurer le service après-vente ne présentaient aucun caractère significatif. BSA ne contredit pas utilement, notamment, avoir supporté un coût annuel se limitant sur l’ensemble de la période à la somme totale de 3 000 euros environ par an pour la formation de ses salariés.

Il s’ensuit que le préavis nécessaire et suffisant s’établit à 10 mois.

S’agissant, en second lieu, de la modification de la durée du préavis envisagée ultérieurement, la Cour constate que la proposition de Diagnostica Stago d’allongement du délai à 12 mois a été portée à la connaissance de BSA deux mois et demi seulement avant le terme fixé initialement.

La Cour observe en complément que :

- le courrier de Diagnostica Stago du 10 octobre 2013 qui contient cette proposition (pièce BSA n°20) évoque des négociations complexes, le « désir manifesté (par BSA) de prolonger cette période de transition » faisant l’objet d’échanges entre les parties les 16 et 26 septembre notamment ;

- BSA a critiqué en réponse le 23 octobre 2013 la proposition formulée et l’a rejetée en observant que l’arrêt des relations contractuelles « fixé unilatéralement par (Diagnostica Stago) au 31 décembre prochain, a d’ores et déjà été acté par le marché et les parties » (pièce BSA n°20).

La Cour retient, dans ces circonstances, d’une part, que la rupture totale de la relation établie est intervenue le 26 juillet 2013, et d’autre part, que la proposition de modification de la durée du préavis, formulée tardivement, peu de temps avant l’expiration du préavis insuffisant, n’a pas permis une réorganisation effective du fournisseur.

Cette proposition tout comme le refus qui lui a été opposé ne peuvent en conséquence être prises en compte.

Il se déduit de l’ensemble que la durée du préavis éludé s’élève à 5 mois.

2.2 Sur le préjudice subi par BSA

Moyens des parties

La société BSA soutient avoir subi un préjudice qu’elle évalue à hauteur de 178 919 euros.

Elle affirme que la moyenne pondérée de la marge annuelle de la société BSA sur les trois dernières années sur les marchés privés des Antilles est de 13 763 euros mensuels. Ainsi, selon la société BSA, sa perte de marge brute pendant la durée d’insuffisance de préavis est de : 13 763 x 13 = 178 919 euros pour un préavis nécessaire de dix-huit mois. Elle précise que la marge sur cout variable correspond de fait à la marge brute en l’absence d’économie de cout, l’arrêt de la commercialisation des produits Stago n’ayant généré aucune économie dès lors que les moyens humains et les moyens techniques sont des charges fixes.

La société Diagnostica Stago répond que malgré la sommation de communiquer faite par la société Diagnostica Stago, la société BSA omet de produire :

- Le détail du chiffre d’affaires réalisé grâce aux réactifs et consommables Stago ;

- Les documents comptables attestant des ventes et marges réalisées en produits homostases, toutes marques confondues à compter de 2014.

Elle fait valoir que la société BSA se contente de produire deux attestations distinctes de M. Lauhon intervenant non pas en sa qualité d’expert-comptable mais de « sapiteur » ; que les données attestées ne sont pas extraites de documents comptables audités ; que ces attestations ne décrivent aucunement la méthode utilisée et n’indiquent pas que la société BSA a subi une perte de clients ou de chiffre d’affaires en hémostase.

La société Diagnostica Stago ajoute qu’en tout état de cause, les données de marge brute ne peuvent être pertinentes pour mesurer le préjudice prétendument subi puisqu’elles ne tiennent pas compte des coûts évités. Or, dans l’hypothèse où la société BSA aurait été victime d’un préavis trop court, elle aurait également évité des coûts commerciaux qui doivent être déduits de l’évaluation du préjudice :

- Les frais liés à l’installation chez le client et au suivi des machines, au services après-vente et à la maintenance curative ;

- Les frais liés à l’acheminement des produits vers le client final et au transport entre les îles ;

- Les frais liés au stockage des produits ;

- Les dépenses liées à la prospection et au maintien de la clientèle ;

- Les frais de formation des personnels propre aux produits Stago ;

- Les frais d’approche (frais de douane et de transport depuis la métropole), lesquels représentent plus de 20% du prix d’achat des produits.

Réponse de la Cour

La régularité du préavis suppose, outre une durée suffisante, le maintien de la relation aux conditions antérieures.

Le préjudice principal résultant du caractère brutal de la rupture s'évalue en considération de la marge brute escomptée, c'est-à-dire la différence entre le chiffre d'affaires hors taxe escompteì et les coûts variables hors taxe non supportés durant la période d'insuffisance de préavis, différence dont pourra encore être déduite, le cas échéant, la part des coûts fixes non supportés du fait de la baisse d'activité résultant de la rupture, durant la même période (Com. 28 juin 2023, n°21-16.940).

Il ressort au cas présent des éléments du débat que :

- les prestations fournies aux clients publics de BSA se sont poursuivies, sur l’ensemble de la période du préavis, sans connaitre de variation ;

- le flux d’affaires entre BSA et Diagostica Stago a été lui aussi stable s’agissant des clients privés en 2012 et 2013 (393 429, 48 euros et 398 289, 66 euros), soit durant les 5 premiers mois du préavis accordé (pièce BSA n°89 : attestation, à la force probatoire que la Cour considère comme suffisante, du gérant du cabinet d’expertise comptable Auditex Antilles Guyane).

La Cour en déduit, d’une part, que le préavis a été correctement exécuté jusqu’au 31 décembre 2013 et qu’il convient, d’autre part, pour le calcul du gain manqué résultant de la non-exécution du préavis pendant les cinq mois éludés, de prendre en compte le flux d’affaires relatif aux prestations fournies aux clients privés durant les exercices 2012 et 2013, étant observé que ces données sont issues d’un système d’information comptable immodifiable à l’issue de l’achèvement des états financiers, ainsi qu’en atteste de façon adéquate la société SRA Antilles (pièce BSA n°92)

La marge brute telle qu’elle a été extraite du système d’information de la société BSA le 4 février 2020 s’élève à 168 996, 79 euros en 2012 et 157 775, 91 euros en 2013 (pièce BSA n°88), soit à 13 615,53 euros par mois.

La Cour relève que BSA observe sans être sérieusement contredite que :

- S’agissant de la revente des réactifs à des clients, il n’y a pas lieu de démarcher ces derniers puisqu’ils n’ont d’autre choix que de commander des produits Stago une fois l’instrument acquis et qu’il n’y a donc aucun frais lié à l’installation chez le client ni de dépenses liées à la prospection et au maintien de la clientèle que la société BSA n’aurait pas eu à supporter pendant la période de préavis ;

- la formation avait été effectuée peu de temps avant la rupture ;

- aucun transport inter-iles n’intervient puisque chaque île procède à ses propres commandes ;

- s’agissant du stockage et du transport jusqu’au client final, les personnes ou moyens techniques de l’entreprise sont affectés à l’ensemble des produits et pas spécifiquement aux produits Stago ;

- les frais de transport et d’approche sont déjà pris en compte dans le calcul de la marge brute puisqu’intégrés dans le prix d’achat des produits.

En l’état des éléments versés aux débats, la marge sur cout variable retenue s’élève à 70 %.

Il s’en déduit une indemnisation du préjudice au titre du gain manqué calculée ainsi qu’il suit : 13 615,53 x 5 x 70 %, soit un montant arrondi de 47 654 euros.

Le jugement attaqué sera infirmé et la société Diagnostica Stago condamné au paiement de cette somme au titre de la rupture brutale de la relation commerciale avec BSA.

3. Sur la reprise des stocks

Moyens des parties

La société BSA sollicite, en application de l’article 16 du contrat, la reprise de ses stocks par la société Diagnostica Stago qu’elle évalue à hauteur de 144 532,88 euros.

Selon la société BSA, malgré l’accord de la société Diagnostica Stago pour reprendre ellemême son stock de produits Stago, cette dernière n’est jamais revenue vers elle pour effectuer cette reprise. Elle n’a pu écouler son stock puisque ses clients privés ont arrêté de passer commande auprès d’elle dès le mois de janvier 2014 pour se diriger vers la société Biorel. BSA conteste également l’allégation selon laquelle elle aurait volontairement constitué un stock en décembre 2016 et fait valoir que celui-ci était inéluctable dans la mesure où un stock de pièces et de produits importants doit être conservé en permanence pour être sûr de ne jamais être en rupture. Elle ajoute que la société Diagnostica Stago a l’obligation de reprendre les stocks non seulement parce qu’elle s’y est contractuellement engagée mais également car elle a commis une faute au stade de la rupture de leur relation commerciale.

En réponse, la société Diagnostica Stago soutient que :

- La reprise des stocks n’est pas une obligation pour le fournisseur dès lors que le contrat ne la prévoit pas même en présence d’une rupture brutale ou abusive de la relation commerciale. Or, en l’espèce, le contrat ne prévoit aucune obligation de reprise de stock à la charge de la société Diagnostica Stago et prévoit même que la société BSA ne peut revendiquer aucun autre droit que celui d’écouler son stock durant six mois conformément à l’article 2.3.3 de leur contrat ;

- Contrairement aux affirmations de la société BSA, la société Diagnostica Stago ne s’est nullement engagée à une reprise des stocks dans le cadre des échanges intervenus avec la société BSA mais lui a proposé à titre amiable de lui racheter ses stocks à condition qu’elle abandonne ses griefs (pièce BSA n°23). Selon la société Diagnostica Stago, cet accord amiable n’a pas eu lieu dans la mesure où aucun échange de volonté n’est intervenu entre les parties pour la reprise des stocks de 2013 si bien qu’aucune obligation ne peut être mise à la charge de la société Diagnostica Stago à ce titre ;

- La société BSA a écoulé son stock de 2013 et le stock de 2016, au titre duquel est demandée une indemnisation, est différent. Il n’existe aucun lien de causalité entre la constitution de ce stock de 2016 et les prétendues fautes imputées à la société Diagnostica Stago. La société Diagnostica Stago ajoute que l’inventaire des stocks de 2016 ne correspond pas à celui de 2013 et fait apparaître de nombreux produits commandés postérieurement à la notification du non-renouvellement du contrat en 2013.

Réponse de la Cour

Les article 16 et 2.3.3 du contrat de distribution du 22 octobre 2002 stipulent :

« Article -16 Effets de la résiliation anticipée ou du non renouvellement :

En cas de non renouvellement tel que prévu à l’article -3, ou de résiliation anticipée telle que prévue à l’article 15 les dispositions suivantes s’appliqueront :

16.2 Tous les droits concédés au distributeur s’éteindront à l’exception des dispositions prévues à l’article 2.3.3 permettant au distributeur d’écouler son stock de produits, étant entendu que le distributeur ne pourra revendiquer aucun droit relatif au stock de produits pour quelque cause que ce soit. (…)

16.5 Nonobstant ce qui précède, Stago s’efforcera de faciliter la conclusion d’un accord entre le distributeur et son successeur désigné par Stago dans le but de permettre au distributeur de transférer son stock de réactifs et de Consommables et de permettre à son successeur de reprendre les obligations en cours contractées auprès des clients finaux relatives à des instruments placés. »

« Article 2.3.3 (…) : Le distributeur bénéficiera (…) d’un délai de six (6) mois maximum à compter de la date officielle de fin de contrat pour écouler son stock de produits, et ce, sans que le distributeur puisse prétendre à de quelconques dommages intérêts. »

C’est à raison que le tribunal, dans la décision attaquée, a retenu :

- qu’il ressort des pièces versées par BSA (n°24 et 50 de la procédure d’appel) que le stock, que cette société évalue à un montant de 192 334 euros en 2014, a évolué après la rupture, les nombreuses lignes de stocks ayant comme date de dernière entrée des dates de 2014 à 2018 ; que dans ces circonstances, BSA échoue à démontrer que le stock dont elle demande la reprise a un lien avec la rupture de 2013 ;

- qu’il n’existait pas d’obligation contractuelle de reprise ;

- qu’après le non-renouvellement du contrat, Stago a proposé à BSA de reprendre le stock, sous certaines conditions, ce à quoi BSA n’a pas donné suite (pièces BSA n°23 et 24 de la procédure d’appel).

Le jugement est confirmé.

4. Sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société BSA les frais irrépétibles qu’elle a été contrainte d’exposer pour faire valoir ses droits.

La société Dignostica Stago sera condamnée à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dignostica Stago, qui succombe, sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu’il :

- Déboute la société Bio Service Antilles Perie Medical de sa demande de paiement de la somme de 178 919 euros au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies,

- Condamne la société Bio Service Antilles Perie Medical à payer à la société Diagnostica Stago la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la société Bio Service Antilles Perie Medical aux dépens ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne la société Diagnostica Stago à verser à la société Bio Service Antilles Perie Medical la somme de 47 654 euros en réparation du préjudice causé par la rupture brutale de leurs relations commerciales établies ;

Condamne la société Diagnostica Stago aux dépens de première instance et d’appel ;

Condamne la société Diagnostica Stago à payer à la société Bio Service Antilles Perie Medical la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.