CA Rennes, 2e ch., 18 juin 2024, n° 23/05333
RENNES
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Almatys (SARL)
Défendeur :
Ca Consumer Finance Venant aux Droits (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Jobard
Conseillers :
M. Pothier, Mme Barthe-Nari
Avocats :
Me Lhermitte, Me Cormier, Me Castres
EXPOSÉ DU LITIGE :
Selon bon de commande en date du 15 juin 2016, M. [H] [N] a passé commande auprès de la société Almatys d'une pompe à chaleur pour un prix de 20 000 euros.
L'opération a été financée entièrement par l'octroi d'un prêt du même montant par la société Sofinco, enseigne commerciale de la société Consumer Finance, remboursable en 180 mensualités. Un second crédit était signé le 16 juin 2016 par M. [N] à la demande du commercial de la société Almatys au prétexte d'une erreur.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 juin 2016, M. [N] s'est rétracté du contrat souscrit avec la société Sofinco. Cette dernière se prévalant du second contrat de prêt, a toutefois mis en place le mandat de prélèvement auquel M. [N] a fait opposition.
Se plaignant de ne pas obtenir la prise en compte de sa rétractation, M. [N] a fait assigner, par acte d'huissier en date des 4 et 19 avril 2018, la société Almatys et la société CA Consumer Finance, venant aux droits de la société Sofinco, en résolution du contrat de vente et du contrat de prêt devant le tribunal d'instance de Vannes.
Par jugement en date du 5 septembre 2019, le tribunal a :
- constaté en conséquence de l'exercice régulier du droit de rétractation de [H] [N] :
la mise à néant du contrat de crédit souscrit auprès de la société CA Consumer Finance,
la résolution de plein droit sans indemnité du contrat de vente et de prestation de service conclu avec la société Almatys,
- condamné la société Almatys à procéder à la remise en état des lieux dans le délai de 90 jours à compter de la date de signification du jugement, à peine d'astreinte de 30 euros par jour de retard,
- condamné la société Almatys à payer à [H] [N] la somme de 20 000 euros au titre de la restitution du prix et une indemnité de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts,
- condamné [H] [N] à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 15 000 euros au titre de la restitution du capital emprunté,
- débouté la société CA Consumer Finance de sa demande en paiement des causes du crédit formée contre [H] [N],
- débouté la société CA Consumer Finance de sa demande en garantie formée contre la société Almatys,
- débouté la société Almatys de ses demandes en dommages-intérêts,
- condamné in solidum la société Almatys et la société CA Consumer Finance à payer à [H] [N] une indemnité de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société Almatys et la société CA Consumer Finance aux dépens.
Par déclaration en date du 30 septembre 2019, la société Almatys a relevé appel de cette décision.
Par ses dernières conclusions signifiées le 3 septembre 2020, elle a demandé à la cour de :
- réformer et annuler le jugement du tribunal d'instance de Vannes en date du 5 septembre 2019,
à titre principal,
- constater que le bon de commande n°CM20160048 en date du 15 juin 2016 n'a fait l'objet d'aucune résiliation de la part de M. [H] [N],
- constater que l'installation a fait l'objet d'un procès-verbal de réception sans réserve,
- débouter M. [H] [N] de l'ensemble de ses demandes,
- débouter la société CA consumer Finance de l'ensemble de ses demandes,
reconventionnellement,
à titre subsidiaire,
Vu l'article 1184 du code civil,
- condamner M. [N] à verser à la société Almatys la somme de 34 210,80 euros à titre de dommages-intérêts outre les intérêts à compter du 15 juin 2016 conformément au bon de commande,
à titre éminemment subsidiaire,
- condamner la société CA Consumer Finance à relever et garantir la société Almatys de toute condamnation prononcée à son encontre,
- dire et juger que la société CA Consumer Finance a commis une faute excluant son droit à restitution du capital prêté et la débouter de ses demandes en remboursement,
En tout état de cause,
- condamner M. [H] [N] et la société CA Consumer Finance à verser à la société Almatys la somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- condamner M. [H] [N] et la société CA Consumer Finance au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [H] [N] et la société CA Consumer Finance aux entiers dépens.
Par jugement du Tribunal de commerce en date du 10 février 2022, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'encontre de la société Almatys et la SCP BTSG désignée comme mandataire liquidateur.
Par ordonnance en date du 2 septembre 2022, la cour d'appel a prononcé la radiation de l'affaire dans l'attente de l'appel à la cause du mandataire judiciaire.
Par jugement du 22 mars 2023, le tribunal de commerce de [Localité 8] a prononcé la liquidation judiciaire de la société Almatys. M. [N] a déclaré sa créance le 15 juin 2023 entre les mains du mandataire liquidateur.
Par acte d'huissier du 16 août 2023, il a assigné en intervention forcée la SCP BTSG représentée par Maître [D] [Z] en sa qualité de mandataire judiciaire et sollicité par conclusions notifiées le 24 août 2023 la reprise d'instance.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 30 novembre 2023, M. [N] demande à la cour de :
- confirmer le jugement du tribunal d'instance de Vannes en date du 5 septembre 2019 en ce qu'il a :
constaté, en conséquence de l'exercice régulier du droit de rétractation de [H] [N], la mise à néant du contrat de crédit souscrit auprès de la société CA Consumer Finance et la résolution de plein droit sans indemnité du contrat de vente et de prestation de service conclu avec la société Almatys,
condamné la société Almatys à procéder à la remise en état des lieux dans le délai de 90 jours à compter de la date de signification du jugement, à peine d'astreinte de 30 euros par jour de retard,
condamné la société Almatys à payer à [H] [N] la somme de 20 000 euros au titre de la restitution du prix et une indemnité de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts,
condamné [H] [N] à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 15 000 euros au titre de la restitution du capital emprunté,
débouté la société CA Consumer Finance de sa demande en paiement des causes du crédit formée contre [H] [N],
débouté la société CA Consumer Finance de sa demande en garantie formée contre la société Almatys,
débouté la société Almatys de ses demandes en dommages-intérêts,
condamné in solidum la société Almatys et la société CA Consumer Finance à payer à [H] [N] une indemnité de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné in solidum la société Almatys et la société CA Consumer Finance aux dépens,
- réformer le jugement en ce qu'il a condamné [H] [N] à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 15 000 euros au titre de la restitution du capital emprunté,
Et statuant à nouveau,
- fixer la créance de M. [H] [N] au passif de la société Almatys à la somme de 23 171,02 euros,
- débouter la société CA Consumer Finance de sa demande en condamnation de M. [H] [N] à lui verser tout ou partie du capital emprunté,
En tout état de cause,
- débouter la société Almatys représentée par Maître [D] [Z] , sis [Adresse 5] à [Localité 8], désigné en qualité de mandataire liquidateur de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions
- débouter la société CA Consumer Finance de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- condamner solidairement les sociétés Almatys représentée par Maître [D] [Z] , sis [Adresse 5], désigné en qualité de mandataire liquidateur et CA Consumer Finance à verser à M. [H] [N] la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les mêmes aux entiers dépens d'instance, y compris les frais de première instance.
Par ses dernières conclusions notifiées le 7 décembre 2023, la société CA Consumer Finance demande à la cour de :
- réformer le jugement dont appel,
- débouter M. [H] [N] et la société Almatys de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- condamner M. [N] à payer à la société CA Consumer Finance en application de l'article L. 311-24 (devenu L. 312-39) du code de la consommation, la somme de 23 466,09 euros avec intérêts au taux de 5,755 % l'an à compter du 4 décembre 2017 jusqu'à parfait paiement,
subsidiairement, si le contrat de vente était annulé ou résolu, et par voie de conséquence, le prêt du 16 juin 2016,
- ordonner la remise des parties en l'état antérieur aux conventions annulées ou résolues,
- condamner M. [N] au remboursement du capital prêté de 20 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement sauf à déduire les éventuelles échéances réglées,
très subsidiairement, en cas de faute du prêteur er de préjudice subi par l'emprunteur,
- condamner M. [H] [N] au remboursement du capital prêté de 20 000 euros avec intérêts au taux légal à compter des conclusions,
- juger que le préjudice subi par M. [N] s'analyse en une perte de chance de ne pas contracter dont la probabilité est de l'ordre de 5 % soit une somme maximale de 1 000 euros au titre de l'offre de prêt souscrite le 16 juin 2016,
- ordonner la compensation entre les sommes mises à la charge des parties,
- débouter M. [H] [N] et la société Almatys de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions,
- En tout cas, condamner in solidum M. [H] [N] et la société Almatys ou l'un à défaut de l'autre au paiement d'une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
M. [Z], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Almatys, n'a pas constitué avocat devant la cour.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions des parties, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 14 décembre 2023.
EXPOSÉ DES MOTIFS :
A titre liminaire, il sera rappelé que nonobstant le prononcé de la liquidation judiciaire de la société Almatys et bien que le liquidateur n'ait pas constitué avocat, la cour demeure tenue par les conclusions valablement déposées par la société à une époque où elle était encore apte à se défendre seule, étant observé toutefois que M. [N] ne formule plus aucune demande à l'encontre de celle-ci dans ses dernières conclusions.
Sur la rétractation de M. [N] :
Il est constant que pour financer entièrement la fourniture et la pose d'une pompe à chaleur commandée auprès de la société Almatys, M. [N] a signé, par son intermédiaire, une offre de prêt de la société Sofinco d'un montant de 20 000 euros, le 15 juin 2016.
La société Almatys et M. [N] s'accordent pour indiquer qu'à la suite d'une erreur matérielle affectant ce contrat de prêt, une seconde offre de prêt du même montant et pour financer l'achat de la même pompe à chaleur, a été présentée à M.[N] qui l'a signée le 16 juin 2016. L'organisme de crédit soutient de son côté, que l'offre du 16 juin reprenant à l'identique les modalités de l'offre du 15 juin, aurait été formalisée à la suite d'un appel au service client de M. [N] souhaitant finalement revenir sur sa rétractation. Il souligne que le courrier de rétractation était accompagné du bordereau de rétractation figurant sur le contrat et mentionnant le crédit du 15 juin 2016.
Mais, il est établi par le document produit aux débats par la société CA Consumer Finance, que la rétractation du contrat de crédit de M. [N] a été faite par courrier daté du 18 juin 2016. Il s'en déduit que l'offre du 16 juin 2016 n'a pu être formalisée après un prétendu renoncement de l'emprunteur à une rétractation qu'il n'a formée que deux jours plus tard.
En conséquence, c'est à juste titre que le premier juge a considéré que ce second contrat de prêt annule et remplace nécessairement le premier en date du 15 juin 2016, de sorte que la rétractation de M. [N], par courrier daté du 18 juin 2016, par lequel il indique 'se rétracter pour le crédit de 20 000 euros pour l'acquisition de la pompe à chaleur Pireau par l'intermédiaire de Sarl Alamtys' ne peut concerner que le contrat de crédit du 16 juin 2016 et ce bien qu'il soit accompagné d'un bordereau rétractation visant le contrat du 15 juin 2016. Cette rétractation étant intervenue dans les formes et délai légaux, le premier juge sera approuvé pour avoir jugé que M. [N] a légitimement exercé son droit de rétractation pour le crédit signé le 16 juin 2016, celui du 15 juin ayant été annulé.
En revanche, si aux termes de l'article L.312-23 du code de la consommation, 'en cas d'exercice de son droit de rétractation, l'emprunteur n'est plus tenu par le contrat de service accessoire au contrat de crédit', il en va différemment lorsque l'emprunteur a laissé se poursuivre le contrat de vente.
En l'espèce, M. [N] a accepté la livraison du matériel commandé et l'installation de la pompe à chaleur comme en témoignent le procès-verbal de fin de chantier qu'il a signé le 21 juin 2016 et l'attestation de livraison signée le 29 juin 2016. Il n'est absolument pas établi qu'il ait signé ces deux documents, à plusieurs jours d'intervalle, sous la contrainte des ouvriers de la société Almatys, comme il le prétend alors qu'il a pu exercer sans aucune difficulté son droit de rétractation quant au contrat de prêt.
Par contre, la demande de financement en date du 21 juin 2016 est sans objet du fait de la rétractation intervenue le 18 juin 2016 . L'attestation de livraison du 29 janvier 2016 par laquelle M. [N] indique valider le nouveau dossier et confirmer son règlement, n'est pas suffisamment explicite, contrairement à ce que soutient la société Ca Consumer Finance, pour valoir rétractation de la rétractation.
En conséquence, le premier juge ne pouvait constater la résolution de plein droit du contrat de vente conclu avec la société Almatys. Son jugement sera infirmé sur ce point.
Sur la nullité du contrat de vente :
M. [N] fait valoir que le bon de commande du 15 juin 2016 n'était accompagné d'aucun
bordereau de rétractation et que le commercial de la société Almatys lui a fait signer un mandat de prélèvement Sepa le 15 juin 2016 pendant le délai de rétractation. Il souligne également l'installation du matériel dans le délai de rétractation.
Aux termes des articles L 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l'occasion d'une commercialisation hors établissement doivent faire l'objet d'un contrat dont un un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
le nom du professionnel, ou la dénomination sociale et la forme juridique de l'entreprise, l'adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique,
le cas échéant, son numéro d'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
les informations relatives à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte,
son éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, ainsi que les coordonnées de l'assureur ou du garant,
les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné,
le prix du bien ou du service,
les modalités de paiement,
en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service,
les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations,
s'il y a lieu, les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale et au service après-vente,
la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,
lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation,
le numéro d'inscription du professionnel au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
s'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et identifié par un numéro individuel en application de l'article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d'identification,
l'éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l'assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l'engagement.
En l'occurrence, la société Almatys soutient dans ses conclusions que le formulaire de rétractation est annexé à l'extension de la garantie contractuelle pour une durée de dix ans et qu'il indique que le consommateur peut compléter et renvoyer le formulaire par courrier recommandé avec accusé de réception s'il souhaite se rétracter ou par une déclaration exprimant sans ambiguïté sa volonté de se rétracter par lettre recommandée avec accusé de réception au vendeur dans le délai légal de 14 jours, précisant que ce délai commence à courir au lendemain de la conclusion du contrat.
Mais d'une part, il ne résulte pas du bon de commande produit par M. [N] ou par la société CA Consumer Finance la preuve que celui-ci était accompagné d'un formulaire de rétractation. D'autre part, aux termes de l'article L. 221-18 du code de la consommation applicable à la cause, le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, courant à compter du jour de la conclusion du contrat pour les contrats de prestation de services, et de la réception du bien par le consommateur ou un tiers désigné par lui pour les contrats de vente.
Le contrat principal qui portait sur la livraison d'une pompe à chaleur, ainsi que sur une prestation de service d'installation et de mise en service de cet équipement, doit être assimilé à un contrat de vente en application de l'article L. 221-1, II, du code de la consommation, de sorte que le droit de rétractation du consommateur courait pour quatorze jours à compter de la réception du bien par le consommateur ou le tiers désigné par lui, et non du jour de la signature du bon de commande. Les informations relatives aux conditions et modalités d'exercice du droit de rétractation telles qu'indiquées par la société Almatys sont erronées.
Or, il résulte de l'article L. 121-18-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la cause, que, lorsque les informations relatives à l'exercice du droit de rétractation mentionnées à l'article L. 121-17, I , 2° dudit code ne figurent pas dans un contrat conclu hors établissement, la nullité de ce contrat est encourue, de sorte qu'une telle sanction peut être invoquée par le souscripteur du contrat, au même titre que la prolongation du délai de rétractation prévu par l'article L. 121-21-1 du même code.
Le contrat principal est donc irrégulier.
Contrairement à ce que soutient la société CA Consumer Finance, le simple fait que M. [N] ait déclaré avoir pris connaissance de la faculté de renonciation prévue par le code de la consommation ne suffit pas à démontrer qu'il avait connaissance, au moment où il a exécuté le contrat, de la violation du formalisme imposé par le code de la consommation relativement à son droit de rétractation.
Il convient donc d'écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier et de prononcer l'annulation du contrat conclu le 15 juin 2016 avec la société Almatys.
Cette annulation a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu'elle doit entraîner la restitution des prestations reçues de part et d'autre.
Mais la liquidation judiciaire interdit de confirmer la condamnation de la société Almatys qui a cessé son activité, à reprendre à ses frais l'ensemble des matériels posés au domicile de M. [N] et à remettre en état les lieux.
M. [N] qui a déclaré sa créance entre les mains du créancier liquidateur, sollicite la fixation de celle-ci au passif de la société Almatys. Il n'a toutefois effectué aucun versement au titre du contrat de prêt au motif qu'il avait exercé son droit de rétractation. Il convient donc d'examiner la demande de restitution des fonds formée par la banque avant de statuer sur cette demande.
Sur la restitution du capital versé entre les mains du fournisseur :
Il est constant que nonobstant le droit de rétractation exercé par M. [N] relativement au contrat de prêt par courrier du 18 juin 2016, l'établissement de crédit a débloqué les fonds à réception de la demande de financement. M. [N] indique avoir fait opposition aux éventuels prélèvements de la société Sofinco de sorte qu'il n'a honoré aucune mensualité. Il a cependant laissé un tiers payer, à sa place, la fourniture et l'installation de la pompe à chaleur.
Il est de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu'il libère la totalité des fonds, alors qu'à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile.
Or, il a été précédemment relevé que le bon de commande conclu avec la société Almatys par l'intermédiaire de laquelle la société CA Consumer Finance sous l'enseigne Sofinco faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes relativement aux modalités d'exercice de la faculté de rétractation, qui auraient dû conduire le prêteur, professionnel des opérations de crédit affecté faisant distribuer ses crédits à l'occasion d'opérations de démarchage à domicile, à ne pas libérer les fonds entre les mains du fournisseur avant d'avoir à tout le moins vérifié auprès de M. [N] qu'il entendait confirmer l'acte irrégulier.
Le prêteur n'avait certes pas à assister l'emprunteur lors de la conclusion du contrat principal, mais il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande, ce dont il résulte qu'en versant les fonds entre les mains du fournisseur, sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle de ce bon de commande, la société CA Consumer Finance a commis une faute.
Toutefois, la dispense de remboursement du capital versé entre les mains du fournisseur est subordonnée à la démonstration par l'emprunteur de l'existence d'un préjudice en lien causal avec la faute du prêteur.
Or, en l'espèce, M. [N] prétend que la pompe à chaleur ne fonctionne pas parfaitement et produit pour en attester un écrit émanant d'une société qu'il a mandatée pour des problèmes de dysfonctionnements. Toutefois le document intitulé 'entretien le 4 novembre 2023", qui aurait été établi par la société ACV, ne comporte aucune indication du matériel examiné par ce professionnel, ne mentionne pas le numéro de siret de cette société et se contente d'énumérer des dysfonctionnements tels que ' filtre encrassé , reparamérage régulateur, mauvaise implantation unité extérieur, vase d'expansion à plat' sans autre précision. Ce document est insuffisant à démontrer que le matériel installé par la société Almatys n'est pas en état de fonctionner ni même à prouver que le matériel n'a jamais fonctionné.
De surcroît, même à les supposer établis, ces dysfonctionnements apparus postérieurement à la libération des fonds entre les mains du fournisseur, sont sans lien causal avec la faute du prêteur qui n'a pas su déceler à ce moment là des irrégularités du bon de commande relativement aux modalités d'exercice du droit de rétractation.
En conséquence, M. [N] sera condamné à restituer la somme de 20 000 euros à la société CA Consumer Finance avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.
Il convient de fixer la créance de M. [N] au passif de la société Almatys à la somme de 20 000 euros.
Sur les demandes accessoires :
Le jugement attaqué a, par d'exactes considérations d'équité, pertinemment alloué une indemnité de 2 000 euros à M. [N] en application de l'article 700 du code de procédure civile et condamné in solidum la société Almatys et la société CA Consumer Finance, parties alors principalement succombantes, aux dépens de première instance.
En revanche, partie principalement succombante devant la cour, M. [N] supportera les dépens d'appel.
Et, il n'y a pas matière à en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au bénéfice de quiconque.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Infirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Vannes le 5 septembre 2019 sauf en ce qu'il a constaté en conséquence de l'exercice régulier du droit de rétraction de [H] [N] la mise à néant du contrat de crédit souscrit auprès de la société CA Consumer Finance, condamné in solidum la société Almatys et la société CA Consumer Finance aux dépens de première instance et à payer à M. [H] [N] une indemnité de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés :
Prononce l'annulation du contrat de vente en date du 15 juin 2016 entre M. [H] [N] et la société Almatys,
Condamne M. [H] [N] à verser à la société CA Consumer Finance la somme de 20 000 euros au titre des fonds versés au fournisseur de la pompe à chaleur avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la présente décision,
Fixe la créance de M. [H] [N] au passif de la société Almatys à 20 000 euros,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [H] [N] aux dépens d'appel,
Rejette toute demande plus ample ou contraire.