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Décisions

CA Limoges, ch. civ., 12 juin 2024, n° 23/00348

LIMOGES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Collet (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Balian

Conseillers :

Mme Seguin, M. Soury

Avocats :

Me Bourra, Me Viennais

TJ Guéret, du 28 mars 2023, n° 23/00348

28 mars 2023

EXPOSE DU LITIGE:

Suivant acte sous-seing-privé signé le 5 mars 2020, la SCI COLLET a donné à bail commercial à Monsieur [F] [U] un local situé [Adresse 5] à [Localité 3] (23) moyennant un loyer mensuel de 840€ hors taxes, pour une durée de neuf ans.

À compter du mois de juillet 2020, le montant du loyer a été réduit à la somme de 700€ par mois par convention verbale.

Au motif que le locataire commercial avait cessé tout paiement à compter du mois de septembre 2020 et ne s'était pas acquitté de la taxe foncière s'élevant à la somme de 1400€ pour l'année 2020, la SCI COLLET a fait délivrer à Monsieur [F] [U], par acte huissier du 15 juin 2021, un commandement de payer visant la clause résolutoire prévue au contrat de bail, pour un montant de 8583,72€ représentant l'arriéré locatif arrêté au mois de juin 2021, la taxe foncière pour l'année 2020 et des frais.

Exposant que le commandement de payer étant resté sans suite, la SCI COLLET a fait assigner le 3 février 2023, par acte remis à étude, Monsieur [F] [U] devant le Juge des référés du Tribunal judiciaire de Guéret en résiliation de bail et en paiement des sommes impayées.

Sur cette assignation, Monsieur [F] [U] n'a pas comparu.

Par ordonnance de référé du 28 mars 2023 réputée contradictoire, le Juge des référés de Guéret a, au visa des articles 834 et 835 du code de procédure civile :

- constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 16 juillet 2021,

- ordonné à défaut de restitution volontaire des lieux dans les 15 jours de la signification de l'ordonnance,l'expulsion de Monsieur [F] [U] et de tout occupant de son chef du local commercial situé [Adresse 5] à [Localité 3] avec le concours en tant que de besoin de la force publique et d'un serrurier,

- rappelé que le sort des meubles trouvés sur place est régi par les dispositions des articles L433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

- fixé à titre provisionnel, l'indemnité d'occupation due par Monsieur [F] [U] à compter du 15 juillet 2021 jusqu'à libération effective des lieux par la remise des clés, à la somme de 700€ par mois,

- condamné par provision Monsieur [F] [U] à payer à la SCI COLLET la somme de 8400€ à valoir sur les loyers, charges, taxes et accessoires arrêtés au 30 juin 2021,

- condamné Monsieur [F] [U] aux entiers dépens en ce compris le coût du commandement,

- condamné Monsieur [F] [U] à payer à SCI COLLET, la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que la décision est exécutoire à titre provisoire.

*****

Appel de la décision a été relevé le 1er mai 2023 par Monsieur [F] [U], dans des conditions de forme et de délai non contestées du chef de toutes ses dispositions.

L'affaire a été fixée à bref délai en application des dispositions des articles 905 et suivants du code civil.

Par conclusions déposées et signifiées le 3 juin 2023, Monsieur [F] [U] conclut à voir :

- infirmer l'ordonnance rendue le 28 mars 2003 et statuant à nouveau :

à titre principal,

- dire et juger que la résiliation du bail commercial est acquise au 2 juillet 2021,

- débouter en conséquence la SCI COLLET de toute demande de paiement de loyer d'indemnité d'occupation pour la période postérieure au 2 juillet 2021,

- débouter la SCI COLLET de sa demande tendant à voir constater l'acquisition de la clause résolutoire,

- débouter la SCI COLLET sa demande en paiement de loyer, charge, taxes et accessoires,

à titre subsidiaire,

- lui accorder des délais de paiement pour une durée de deux ans,

en tout état de cause,

- condamner la SCI COLLET à lui verser une indemnité de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SCI COLLET aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel et la débouter de toutes ses demandes contraires.

*****

Par ordonnance du 7 septembre 2023, le Président de la Chambre civile a déclaré irrecevable les conclusions déposées par la SCI COLLET le 28 juillet 2003.

*****

Par ordonnance d'incident du 11 octobre 2023, le Président de la Chambre civile a dit que la demande de radiation présentée par la SCI COLLET relève des seuls pouvoirs du Premier Président, et s'est déclaré en conséquence incompétent pour en connaître, et a condamné la SCI COLLET aux dépens de l'incident.

*****

Par ordonnance de référé du 21 novembre 2023, le Premier Président de la Cour d'appel de Limoges a déclaré irrecevables les conclusions d'incident aux fins de radiation de la procédure d'appel prises par la SCI COLLET le 28 juillet 2023, déclaré irrecevable sa demande de radiation formée le 12 octobre 2023 et l'a condamnée aux entiers dépens de l'incident.

MOTIFS DE LA DECISION:

Selon les dispositions de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Il en va de même lorsque que les conclusions d'intimé ont été déclarées irrecevables, celui-ci est réputé s'être approprié les motifs du jugement (en ce sens, Chambre civile 2ème 10 janvier 2019, pourvoi n° 17 ' 20.018 P).

* Sur l'existence d'une résiliation amiable du bail commercial:

Monsieur [F] [U] soutient que d'un commun accord, le bail commercial aurait pris fin le 2 juillet 2021, et qu'il n'est redevable d'aucune somme postérieurement à cette date dès lors qu'il a libéré les lieux et remis les clés au nouveau locataire.

Il fait valoir que le commandement de payer visant la clause résolutoire signifié le 15 juin 2021 a été délivré de mauvaise foi par le bailleur.

Il incombe à Monsieur [F] [U] de prouver la résiliation amiable intervenue d'un commun accord entre les parties à la date du 30 juin 2021 ou du 2 juillet 2021.

S'il est établi que le bailleur lui a adressé une lettre datée du 1er juin 2021 lui indiquant que 'suivant la clause résolutoire du bail commercial, il n'avait jamais réglé les loyers à leurs échéances ni régler le dépôt de garantie, pas plus que les impôts fonciers ce qui conduisait la société à résilier le bail au 30 juin 2021 après règlement de la dette en cours soit la somme de 8400 €', il ressort des termes mêmes du courrier du bailleur que celui-ci subordonnait la résiliation anticipée du bail commercial au 30 juin 2021 au règlement d'une dette locative de 8400 €, qu'il s'agissait donc d'une résiliation amiable sous condition.

Or, dans un courrier recommandé daté du 15 juin 2021, Monsieur [F] [U] contestait la créance de 8400 € réclamée par le bailleur, évoquant des paiements en espèces non pris en compte par la SCI COLLET et n'ayant donné lieu à établissement de quittances, indiquant également qu'il ne verserait plus en numéraire les loyers mais par virement sur le compte de la SCI Collet.

Dans un courrier recommandé postérieur daté du 29 juin 2021, il informait la société bailleresse de sa décision de quitter le local commercial au 30 juin 2021 et indiquait que comme prévu, les clés seraient rendues à Monsieur [I] [V], le nouveau locataire.

Il n'évoquait pas la dette locative réclamée par le bailleur.

Dans ces conditions, au vu des échanges de courriers entre les parties, la cour ne peut considérer que les parties ont convenu amiablement de résilier le bail à compter du 2 juillet 2021(voire du 30 juin 2021) avec pour le locataire, dispense de règlement des loyers restant dus à cette date.

Au demeurant, il sera relevé que Monsieur [F] [U] ne démontre pas à ses pièces, avoir libéré les lieux à la date du 2 juillet 2021, ni remis les clés soit au bailleur soit au nouveau locataire.

Monsieur [F] [U] sera en conséquence débouté de sa demande aux fins de voir juger que les parties ont convenu amiablement d'une résiliation anticipée du bail au 30 juin 2021 voire au 2 juillet 2021.

* Sur le constat de la résiliation du bail commercial par le jeu de la clause résolutoire :

Selon les dispositions de l'article L 145 ' 41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux, le commandement devant, à peine de nullité, mentionner ce délai.

En l'espèce, le 15 juin 2021, un commandement de payer la somme de 8400 €

a été délivré au locataire par huissier de justice mandaté par le bailleur, à l'adresse des locaux commerciaux donnés à bail, l'exploit de signification a été remis à étude conformément aux exigences de l'article 656 du code de procédure civile,l' huissier ayant relevé la présence du nom du destinataire sur la boîte aux lettres. L'assignation délivrée le 3 février 2023 a été signifiée à étude dans les conditions de l'article 656 du code de procédure civile, le commissaire de justice ayant relevé que le nom de Monsieur [F] [U] était indiqué sur la boîte aux lettres. Monsieur [F] [U] ne produit aucune pièce établissant qu'il avait libéré les lieux et remis les clés à la date de l'assignation.

Il est établi également que le commandement reproduit la clause résolutoire insérée au contrat de bail, détaille le montant de la créance et rappelle au débiteur la nécessité de régler lesdites sommes dans le délai d'un mois.

Ainsi que l'a rappelé le premier juge dans sa décision, en faisant délivrer ce commandement, la société bailleresse n'a fait qu'exercer ses droits légitimes de bailleur face à un locataire qui ne respectait pas les clauses du bail, spécialement l'obligation de régler le loyer et les charges.

À cet égard, il sera observé que le commandement détaille la créance laquelle comprend la somme de 7000 € représentant les loyers et charges impayées entre septembre 2020 et juin 2021 (700€ X10 mois) ainsi que la somme de 1400 € au titre de la taxe foncière de l'année 2020, dont la charge incombe au locataire commercial en vertu du contrat de bail.

Il sera rappelé qu'il incombe à celui qui se prétend libéré de rapporter la preuve de son paiement (article 1353 du code civil).

Monsieur [F] [U] soutient avoir réglé en espèces les sommes réclamées et fait état du refus du bailleur de lui remettre les quittances correspondant à ses paiements ; cependant, il ne produit aucun début de preuve de nature à corroborer ses allégations, de sorte que la cour ne peut que confirmer la décision de première instance le condamnant à titre provisionnel à régler au bailleur la somme de 8400€ correspondant à l'arriéré locatif courant de septembre 2020 à juin 2021 et la taxe foncière pour l'année 2020.

Les causes du commandement (8400 €) n'ayant pas été réglées dans le délai d'un mois, les conditions d'acquisition de la clause résolutoire sont réunies, et le bail se trouve résilié de plein droit à compter du 16 juillet 2021.

La décision entreprise sera confirmée de ce chef.

Elle sera également confirmée en ce qu'elle a ordonné l'expulsion de Monsieur [F] [U] et de tout occupant de son chef en cas de non restitution volontaire des lieux, et fixé le montant de l'indemnité d'occupation due à compter du 16 juillet 2021 jusqu'à la libération effective des locaux par la remise des clés au montant du loyer contractuel outre les charges soit 700 € par mois.

* Sur la demande de délais de paiement formulée par Monsieur [F] [U]:

Vu les dispositions de l'article 1343-5 du code civil,

Monsieur [F] [U] expose dans ses écritures que ses difficultés financières ont pour origine la crise sanitaire qui est survenue, alors qu'il venait de commencer son activité commerciale de nettoyage et lavage de véhicules automobiles dans les locaux pris à bail.

Au regard de ses justificatifs de ressources et de charges, il est justifié de lui accorder des délais de paiement d'une durée de 24 mois avec un échéancier et une clause de déchéance selon les modalités prévues au dispositif de la présente décision.

* Sur les demandes accessoires :

Succombant en ses prétentions et en son recours, Monsieur [F] [U] supportera les dépens de première instance et d'appel, ce qui exclut par ailleurs qu'il puisse bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dispositions de l'ordonnance entreprise relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance seront confirmées.

PAR CES MOTIFS

La Cour d'appel statuant publiquement, par décision contradictoire rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

CONFIRME l'ordonnance déférée,

Y ajoutant,

AUTORISE Monsieur [F] [U] à apurer les sommes dues à la SCI COLLET par 24 mensualités de 350 €, le 15 de chaque mois et la première fois le 15 du mois suivant la signification du présent arrêt, les acomptes versés s'imputant par priorité sur le capital, et le dernier acompte étant égal au solde de la dette en principal, intérêts et frais,

DIT qu'en cas de non paiement d'un acompte à échéance, le solde dû redeviendra exigible,

REJETTE les demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE Monsieur [F] [U] à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.