Cass. com., 4 octobre 2023, n° 22-14.040
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vigneau
Rapporteur :
Mme Vallansan
Avocat général :
Mme Henry
Avocats :
SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, SCP Spinosi
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 18 janvier 2022) et les productions, le 21 avril 2015, la société Larzul a bénéficié d'une procédure de sauvegarde, puis a bénéficié d'un plan de sauvegarde. La société EP & associés a été désignée mandataire judiciaire et la société AJ UP administrateur puis commissaire à l'exécution du plan.
2. Le 21 mai 2015, la société Camargo, qui a été absorbée le 11 octobre 2015 par la société Groupe française de gastronomie (la société FDG), sa société mère, a déclaré des créances au titre de factures d'approvisionnement. La société Larzul a contesté les créances aux motifs, d'une part, que l'une des sommes était remboursée et, d'autre part, qu'elle était créancière de dommages et intérêts à l'égard de la société FDG. Par un arrêt irrévocable du 5 février 2019 infirmatif de l'ordonnance du juge-commissaire, la cour d'appel de Rennes a constaté l'existence d'une contestation sérieuse et renvoyé la société FDG à saisir la juridiction compétente.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. La société Larzul fait grief à l'arrêt de fixer au passif de son plan de sauvegarde au profit de la société FDG les sommes de 1 417 778,72 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 2008 et 15 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 avril 2015, et de dire que la société Larzul est fondée à opérer compensation à concurrence de 27 956,16 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 mai 2018, 10 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 avril 2015 et 48 480,65 euros, alors « que sauf constat de l'existence d'une instance en cours, le juge-commissaire a une compétence exclusive pour décider de l'admission ou du rejet des créances déclarées, cependant que les pouvoirs du juge compétent pour trancher une contestation à l'égard de laquelle le juge-commissaire s'était déclaré incompétent se limitent à l'examen de cette contestation ; qu'en fixant les sommes susvisées au passif du plan de sauvegarde de la société Larzul, quand ses pouvoirs se limitaient à trancher la contestation à l'égard de laquelle le juge-commissaire s'était déclaré incompétent, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé l'article L. 624-2 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 624-2 et R. 624-5 du code de commerce :
4. Il résulte de ces textes que sauf constat de l'existence d'une instance en cours, le juge-commissaire a une compétence exclusive pour décider de l'admission ou du rejet des créances déclarées et qu'après une décision d'incompétence du juge-commissaire pour trancher une contestation, les pouvoirs du juge compétent régulièrement saisi se limitent à l'examen de cette contestation.
5. Saisie par la société FDG, venant aux droits de la société Camargo, de la contestation jugée sérieuse par l'arrêt du 5 février 2018 qui en avait renvoyé l'examen à la juridiction compétente, la cour d'appel fixe plusieurs créances de la société FDG au passif du plan de sauvegarde de la société Larzul.
6. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la demande de la société Larzul tendant à l'annulation du jugement, l'arrêt rendu le 18 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée.