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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-2, 20 juin 2024, n° 23/10329

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

S.C.I. Nicolet (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pacaud

Conseillers :

Mme Neto, Mme Perraut

Avocats :

Me Veleva-Reinaud, Me Latapie, Me Plantard

TJ Aix-en-Provence, du 18 juill. 2023, n…

18 juillet 2023

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte sous seing privé en date du 1er octobre 2023, la société civile immobilière (SCI) [B] a donné à bail commercial à M. [P] [X] [N] des locaux situés [Adresse 1] à [Localité 6] afin d'y exercer une activité de pharmacien sous l'enseigne '[4]' moyennant un loyer annuel de 12 000 euros payable par 12 mensualités de 1 000 euros chacune.

Par acte d'huissier en date du 29 mars 2022, la société [B] a délivré à M. [X] [N] un congé avec offre de renouvellement.

Par acte d'huissier en date su 27 février 2023, la société [B] a délivré à M. [X] [N] un commandement d'avoir à payer la somme principale de 5 931,44 euros en visant la clause résolutoire insérée au bail.

Soutenant que ledit acte est resté infructueux, la société [B] a fait assigner M. [X] [N] devant le juge des référés du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence aux fins de voir constater la résiliation du bail, d'ordonner son expulsion et de le condamner à lui verser diverses sommes à titre provisionnel.

Par ordonnance réputée contradictoire en date du 18 juillet 2023, ce magistrat a :

- constaté l'acquisition de la clause résolutoire à la date du 28 mars 2023 ;

- dit que, faute pour M. [P] [X] [N] de libérer les locaux sis [Adresse 1] à [Localité 5], objets du bail commercial du 1er octobre 2013 liant les parties, dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision, il serait procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef avec, si besoin, le concours de la force publique ;

- condamné M. [P] [X] [N] à payer à la société civile immobilière (SCI) [B] la somme provisionnelle de 5 626,44 euros au titre des loyers, charges, accessoires échus et impayés au 25 avril 2023 ;

- condamné M. [P] [X] [N] à payer à la SCI [B] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté la SCI [B] du surplus de ses demandes ;

- condamné M. [P] [X] [N] aux dépens ;

Suivant déclaration transmise au greffe le 2 août 2023, M. [X] [N] a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions dûment reprises.

Par ordonnance d'incident en date du 18 janvier 2024, la conseillère de la chambre 1-2 statuant sur délégation a :

- débouté la société [B] de sa demande de radiation du rôle des affaires en cours du dossier pour défaut d'exécution de l'ordonnance entreprise ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que les dépens de la procédure afférente à une demande de radiation de l'affaire suivraient le sort de ceux de la procédure au fond.

Aux termes de ses dernières écritures transmises le 6 septembre 2023, auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus ample des prétentions et moyens, M. [X] [N] demande à la cour de réformer l'ordonnance entreprise et statuant à nouveau de :

- débouter la société [B] de ses demandes ;

- la condamner à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il affirme avoir réglé l'intégralité des loyers et charges réclamés. Il souligne que la procédure initiée par la société [B] s'inscrit dans le contentieux familial l'opposant à son ex-épouse, Mme [K] [B], précision faite qu'ils sont tous les deux associés de la société [B], Mme [B] détenant 99 parts sociales et lui-même une part sociale. Il relève qu'un pourvoi en cassation a été formé à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes en date du 25 août 2022 afin d'établir les comptes entre les parties.

Aux termes de ses dernières écritures transmises le 10 mai 2024, qui seront accueillies pour les raisons exposées dans les motifs de la décision, auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus ample des prétentions et moyens, la société [B] sollicite de la cour qu'elle :

- ordonne la révocation de l'ordonnance de clôture du 16 avril 2024 ;

- confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

- condamne M. [X] [N] à lui verser la somme de 17 730 euros au titre de la dette locative provisoirement arrêtée au 6 mai 2024 ;

- condamne M. [X] [N] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- le condamne aux dépens.

Elle affirme que l'appelant ne règle pas ses loyers courants et n'a pas exécuté l'ordonnance entreprise. Par ailleurs, elle indique qu'alors même que le commandement, délivré le 27 février 2023, lui demandait de justifier de tous ses quittancements d'assurance depuis le 1er janvier 2022 dans un délai d'un mois, aucun justificatif n'a été versé en ce sens. Enfin, elle souligne que le pourvoi interjeté par M. [X] [N] à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes, en date du 25 août 2022, a été rejeté, par arrêt en date du 2 mai 2024.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 16 avril 2024.

Par soit-transmis en date du 16 mai 2024, la cour a informé les conseils des parties qu'elle s'interrogeait sur l'étendue de la saisine de la cour au regard de l'appel incident formé par l'intimée, en application des dispositions des articles 542 et 562 alinéa 1 et 954 alinéa 3 et 4 du code de procédure civile, dès lors que, dans le dispositif de ses dernières conclusions, elle formulait qu'une demande de confirmation de l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, en ce compris la somme provisionnelle à laquelle l'appelant a été condamné et en ce qu'elle a été déboutée du surplus de ses demandes et, dès lors, aucune demande d'infirmation, alors qu'elle sollicite, par suite d'une actualisation de sa créance locative, une somme provisionnelle de 17 730 euros arrêtée au 6 mai 2024. S'agissant d'un point de procédure qu'elle entendait soulever d'office, elle lui a imparti un délai expirant le vendredi 24 mai 2024 à midi pour faire valoir leurs éventuelles observations sur ce point précis par une note en délibéré.

Par une note en délibéré transmise le 21 mai 2024, la société [B] a indiqué à la cour que le dispositif de ses conclusions devait s'entendre comme une demande de réformation partielle de l'ordonnance entreprise en ce qui concerne le montant de la provision qui a été allouée dès lors que la dette locative a continué de croître depuis que l'ordonnance entreprise a été rendue pour s'élever, à la date du 6 mai 2024, à la somme de 17 730 euros.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le rabat de l'ordonnance de clôture

Il résulte de l'article 802 du code de procédure civile, qu'après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office : sont cependant recevables les demandes en intervention volontaire, les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et accessoires échus, aux débours faits jusqu'à l'ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l'objet d'aucune contestation sérieuse, ainsi que les demandes en révocation de l'ordonnance de clôture.

L'article 803 du code de procédure civile dispose que l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue. Elle peut être révoquée, d'office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après l'ouverture des débats sur décision du tribunal.

Par ailleurs, l'article 15 du code de procédure civile énonce que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacun soit à même d'organiser sa défense.

Enfin, aux termes de l'article 16 du même code, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.

Il est admis que le juge dispose d'un pouvoir souverain pour apprécier si des conclusions et/ou des pièces ont été déposées en temps utile. Ainsi, s'il estime qu'elles ont été déposées peu de temps avant le moment prévu pour l'ordonnance de clôture, il doit veiller au respect des droits de la défense et, éventuellement, les écarter des débats en caractérisant les circonstances particulières qui l'ont conduit à se prononcer en ce sens.

En outre, par application des dispositions de ce texte, doivent également être considérées comme tardives les conclusions déposées le jour ou la veille de la clôture de la procédure dont la date a été communiquée à l'avance.

En l'espèce, l'intimée a transmis ses dernières conclusions et nouvelles pièces le 10 mai 2024, soit postérieurement à l'ordonnance de clôture qui a été rendue le 16 avril 2024.

Il reste, qu'à l'audience, avant le déroulement des débats, l'avocat de l'appelant a indiqué qu'il ne s'opposait pas à la révocation de l'ordonnance de clôture afin d'admettre le dernier jeu de conclusions de l'intimée, ainsi que les nouvelles pièces qui y sont annexées.

La cour a donc, de l'accord général, révoqué ladite ordonnance puis clôturé à nouveau l'instruction de l'affaire, celle-ci étant en état d'être jugée.

Sur la saisine de la cour concernant l'actualisation de la dette locative

Aux termes de l'article 542 du code de procédure civile, l'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel.

Par application des dispositions de l'article 562 alinéa 1 du même code, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

Les alinéas 3 et 4 de l'article 954 du même code disposent que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

Par application des dispositions de ces textes, l'intimé doit former un appel incident pour que ses prétentions soit reconsidérées en appel. Il doit donc solliciter l'infirmation des chefs de l'ordonnance entreprise qui ne lui donnent pas satisfaction. Il doit ensuite expressément reformuler ses prétentions initiales dans le cadre d'un 'statuant à nouveau'. Une seule demande de confirmation est donc incompatible avec la réformation de l'ordonnance entreprise en ce qu'elle ne peut lier un appel incident total ou partiel.

En l'espèce, alors même que le dispositif des conclusions de l'intimée ne comporte qu'une demande de confirmation de l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions dûment reprises, en ce compris la somme provisionnelle à laquelle l'appelant a été condamnée et en ce qu'elle a été déboutée du surplus de ses demandes, elle demande à la cour de condamner l'appelant à lui verser la somme de 17 730 euros au titre de la dette locative provisoirement arrêtée au 6 mai 2024 à valoir sur l'arriéré de loyers, charges et indemnités d'occupation.

Or, il s'avère que le premier juge a statué sur cette demande en condamnant M. [P] [X] [N] à payer à la société [B] la somme provisionnelle de 5 626,44 euros au titre des loyers, charges, accessoires échus et impayés au 25 avril 2023. Il convient de relever que le bail ayant été résilié à effet au 28 mars 2023, la somme de 5 626,44 euros comprend, à la fois, des loyers proprement dits et l'indemnité d'occupation du mois d'avril 2023. S'il apparaît que le premier juge n'a pas condamné M. [X] [N] à verser à la société [B], à titre provisionnel, une indemnité d'occupation mensuelle à compter du mois de mai 2023, et ce, jusqu'à la libération des lieux, il n'en demeure pas moins que la société [B] ne forme qu'une demande de confirmation de l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions et, dès lors, aucune demande d'infirmation du chef de l'ordonnance l'ayant déboutée du surplus de ses demandes.

La prétention formulée en cause d'appel par l'intimée du chef de la provision devait donc être formulée sous forme d'appel incident et, à ce titre, précédée d'une demande d'infirmation ou réformation des dispositions de l'ordonnance entreprise la concernant.

Faute de l'avoir fait, il y a lieu de considérer que la cour n'est saisie d'aucun appel incident concernant tant le montant de la provision qui a été allouée à valoir sur l'arriéré locatif que sur l'indemnité d'occupation à compter du mois d'avril 2023.

En effet, dès lors que la cour est saisie des prétentions des parties formulées par voie de conclusions, régulièrement transmises et notifiées, dans le cas où la partie a constitué avocat, antérieurement à l'ordonnance de clôture, une note en délibéré adressée à la demande de la cour afin de permettre aux parties de répondre à une question de procédure d'office ne peut les régulariser.

Sur la constatation de la résiliation du bail et l'expulsion en résultant

Il résulte de l'article 834 du code de procédure civile que, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

L'article 835 du même code dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Aux termes de l'article L 145-41 alinéa 1 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

En application de ces textes, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d'un contrat de bail en application d'une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en 'uvre régulièrement.

En l'espèce, le contrat de bail signé par les parties stipule, dans un article 7, qu'à défaut d'exécution parfaite par le preneur de l'une quelconque de ses obligations issues du contrat, comme à défaut de paiement à son échéance d'un seul terme de loyer, charges, taxes et/ou accessoires, ainsi que des frais de commandement et autres frais de poursuite, celui-ci sera résilié de plein droit un mois après la délivrance d'un commandement d'exécuter resté infructueux.

En outre, l'article 4.13 stipule que le preneur assurera les risques propres à son exploitation avec des polices d'assurance prenant effet à compter de la date d'entrée en jouissance et devant être maintenues de manière continue pendant toute la durée du bail et jusqu'au départ effectif du locataire, quand bien même il occuperait les locaux sans droit ni titre. Il devra justifier de l'ensemble de ses contrats dans le mois de son entrée en jouissance et devra adresser au bailleur, chaque année, les justificatifs de ses quittancements d'assurance.

Ainsi, la clause résolutoire sanctionne le défaut d'assurance du preneur et non le défaut de justification de l'assurance. Le preneur est en effet tenu d'être assuré de manière continue, pendant toute la durée du bail, de s'acquitter régulièrement des primes à leur échéance et d'en justifier à la demande du bailleur, y compris pour la période postérieure au délai d'un mois imparti par le commandement.

Aux termes du commandement d'exécuter et de payer visant la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail délivré le 27 février 2023, la société [B] demande à M. [X] [N], d'une part, de régler la somme de 5 931,44 euros correspondant à une partie du loyer du mois de décembre 2022 (698 euros, aux loyers des mois de janvier et février 2023 (2 500 euros X 2 mois) et à la quote-part de la taxe des ordures ménagères de 2023 (233,44 euros) et, d'autre part, de communiquer les justificatifs des quittancements d'assurance des locaux pour l'année 2022.

A l'examen des décomptes produits par la société [B], il apparaît que M. [X] [N] ne s'est pas acquitté de la somme résultant du commandement de payer, pas plus que l'échéance du mois de mars 2023, à la date de l'expiration du commandement de payer, le 27 mars 2023, l'arriéré locatif étant alors de 8 431,44 euros. En effet, ces décomptes mentionnent des versements pour un montant total de 18 334,36 euros effectués les 13 et 16 mai 2023, outre la somme de 2 122 euros réglée en août 2023. Il en résulte un solde créditeur de 456,36 euros au profit de l'appelant, en août 2023.

Il reste que M. [X] [N] qui affirme être à jour du paiement de ses loyers et charges verse aux débats, afin d'en rapporter la preuve, des relevés d'un compte bancaire ouvert dans les livres de la Banque Postale.

S'il entend justifier du règlement de ses loyers et charges depuis le mois de juillet 2022, il convient de relever que seules les échéances échues entre les mois de décembre 2022 et avril 2023 sont en litige, la cour n'étant saisie d'aucun appel incident.

Concernant cette période, M. [X] [N] entend démontrer qu'il a réglé 1 061 euros par mois en deux versements, le premier de 4 680 euros, réglé le 13 janvier 2023, correspondant aux échéances des mois de décembre 2022 à mars 2023 (soit 1 061 euros X 4 mois, outre un trop versé de 436 euros) et le deuxième de 5 305 euros, réglé le 14 avril 2023, correspondant aux échéances des mois d'avril à août 2023 (soit 1 061 euros X 5 mois).

Or, dès lors que M. [X] [N] ne conteste pas la validité, pas plus qu'il ne discute son acceptation tacite, en étant resté dans les lieux après sa prise d'effet, du congé avec offre de renouvellement pour un loyer mensuel de 2 500 euros, signifié par la société [B] le 29 mars 2022, à effet au 30 septembre 2022, il n'explique pas les raisons pour lesquelles il a continué à régler un loyer correspondant à celui du bail échu. Dans ces conditions, le montant de l'échéance mensuelle de 2 500 euros réclamée par la société [B] dans le commandement de payer ne se heurte à aucune contestation sérieuse.

De plus, si M. [X] [N] insiste sur le contexte dans lequel le commandement de payer a été délivré, en l'état d'un litige l'opposant à la société [B] concernant son occupation à titre gratuit des premier et deuxième étages de l'immeuble, par suite d'un prêt à usage, depuis sa séparation d'avec Mme [B], également associée de la sociétés [B], en septembre 2013, il n'en demeure pas moins que le présent litige ne concerne que les locaux commerciaux situés au rez-de-chaussée donnés à bail par la société [B] à M. [X] [N]. Dans ces conditions, la validité du commandement de payer ne se heurte à aucune contestation sérieuse.

En l'état de ces éléments, il apparaît qu'alors même que le commandement de payer mentionne un arriéré locatif de 5 931,44 euros, comprenant une partie du loyer de décembre 2022, les loyers de janvier et février 2023 ainsi que la taxe d'ordures ménagères de 2022, auquel il convient d'ajouter le loyer du mois de mars 2023 à hauteur de 2 500 euros, soit un total de 8 431,44 euros, M. [X] [N] justifie avoir réglé le 13 janvier 2023 la somme de 4 680 euros en paiement des loyers des mois de décembre 2022, janvier, février et mars 2023. Ce faisant, à la date du 28 mars 2023, date d'acquisition des effets de la clause résolutoire insérée au bail, M. [X] [N] était encore redevable de la somme de 3 751,44 euros. Si le versement de 5 305 euros effectué le 13 avril 2023 a permis d'apurer cet arriéré locatif et de régler partiellement le loyer du mois d'avril 2023 à hauteur de 1 553,56 euros, ce paiement est intervenu postérieurement au 28 mars 2023.

Il s'ensuit que les causes du commandement de payer n'ont pas été réglés avant la date d'acquisition des effets de la clause résolutoire insérée au bail.

Au surplus, alors même que la société [B] se prévaut également de la constatation de la résiliation du bail faute pour M. [X] [N] de justifier des quittancements d'assurance des locaux pour l'année 2022, ce dernier, qui ne répond aucunement sur ce point, ne verse aux débats aucun élément en ce sens.

L'ordonnance entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a constaté la résiliation du bail commercial liant les parties par suite de l'acquisition de la clause résolutoire contenue dans le contrat de bail à effet au 28 mars 2023. Elle sera également confirmée en ce qu'elle a ordonné l'expulsion de M. [X] [N], qui ne sollicite aucun délai de paiement susceptible d'entraîner la suspension des effets de la clause résolutoire, des lieux.

Sur la demande de provision à valoir sur l'arriéré locatif

Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas ou l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Il appartient au demandeur d'établir l'existence de l'obligation qui fonde sa demande de provision tant en son principe qu'en son montant et la condamnation provisionnelle, que peut prononcer le juge des référés sans excéder ses pouvoirs, n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.

Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Enfin c'est au moment où la cour statue qu'elle doit apprécier l'existence d'une contestation sérieuse, le litige n'étant pas figé par les positions initiale ou antérieures des parties dans l'articulation de ce moyen.

En l'espèce, il résulte de ce qui précède, qu'après le versement de 5 305 euros effectué par M. [X] [N] le 13 avril 2023, l'arrière locatif, à la date du 25 avril 2023, était encore de la somme de 946,44 euros (3 751,44 euros arrêté au 28 mars 2023 + 2 500 euros au titre de l'indemnité d'occupation d'avril 2023 - 5 305 euros).

Or, compte tenu des paiements effectués par M. [X] [N] en mai et août 2023 pour un montant total de 20 456,36 euros, tel que cela résulte des décomptes produits par la société [B], cette somme (946,44 euros) apparaît, avec l'évidence requise en référé, avoir été réglée.

Dans ces conditions, l'obligation pour M. [X] [N] de régler une provision à valoir sur l'arriéré de loyers, charges et indemnités d'occupation arrêté au 25 avril 2023 se heurte à une contestation sérieuse.

Il y a donc lieu d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné M. [P] [X] [N] à payer à la société civile immobilière [B] la somme provisionnelle de 5 626,44 euros au titre des loyers, charges, accessoires échus et impayés au 25 avril 2023.

La société [B] sera déboutée de sa demande de provision.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Dès lors que la procédure d'expulsion initiée par la société [B] était justifiée, c'est à bon droit que le premier juge a condamnée M. [X] [N] aux dépens et à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens.

En revanche, étant donné que M. [X] [N] obtient partiellement gain de cause en appel, en ce qui concerne la provision à laquelle il a été condamnée, il y a lieu de condamner chacune des parties à prendre en charge les frais de la procédure d'appel par elle exposés.

L'équité ne commande donc pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Rappelle qu'à l'audience, avant l'ouverture des débats, la cour a révoqué l'ordonnance de clôture puis clôturé à nouveau l'instruction de l'affaire, celle-ci étant en état d'être jugée ;

Dit que que la cour n'est saisie d'aucun appel incident ;

Statuant en conséquence dans les limites de sa saisine,

Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné M. [P] [X] [N] à payer à la société civile immobilière [B] la somme provisionnelle de 5 626,44 euros au titre des loyers, charges, accessoires échus et impayés au 25 avril 2023 ;

La confirme en ses autres dispositions critiquées ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

Déboute la société civile immobilière [B] de sa demande de provision formée à l'encontre de M. [P] [X] [N] ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens ;

Condamne chaque partie à prendre en charge les frais de la procédure d'appel par elle exposés.