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Décisions

CA Amiens, 1re ch. civ., 13 juin 2024, n° 22/02160

AMIENS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Sarecom (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Berthe

Conseillers :

Mme Hauduin, Mme Jacqueline

Avocats :

Me Bibard, Me Malingue

T. prox. Abbeville, du 3 mars 2022

3 mars 2022

DECISION

M. [H] [X] était artisan inscrit au répertoire des métiers.

Il s'est rapproché d'une société d'expertise comptable, la SARL Sarecom, pour réaliser sa comptabilité et les déclarations fiscales afférentes. Une lettre de mission à cet effet a été régularisée le 29 mars 2017.

Deux factures d'un montant total de 6 300 euros, correspondant aux exercices 2017 et 2018, sont demeurées impayées et la SARL Sarecom a saisi le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Abbeville aux fins de voir condamner M. [X] au règlement de ces factures.

Suivant ordonnance d'injonction de payer du 15 février 2021 du tribunal de proximité d'Abbeville, M. [X] a été condamné à régler à la SARL Sarecom la somme principale de 6 300 euros en principal, outre les dépens.

L'ordonnance d'injonction de payer a été signifiée à M. [X] le 25 février 2021.

Le 19 mars 2021, M. [X] a formé opposition à l'injonction de payer.

Par jugement contradictoire en date du 3 mars 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Abbeville a :

- mis à néant l'ordonnance d'injonction de payer du 15 février 2021 ;

Statuant à nouveau,

- déclaré recevables les demandes de la SARL Sarecom ;

- condamné M. [X] à payer à la SARL Sarecom la somme de 6 300 euros ;

- débouté la SARL Sarecom de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

- débouté M. [X] de sa demande de dommages-intérêts ;

- condamné M. [X] aux dépens qui comprendront les frais de la procédure d'injonction de payer ;

- condamné M. [X] à payer à la SARL Sarecom la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 29 avril 2022, M. [X] a interjeté appel de cette décision.

Dans le dernier état de ses conclusions notifiées par voie électronique le 23 juin 2023, M. [X] demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y faisant droit, et statuant à nouveau,

- constater que la créance litigieuse n'est aucunement fondée en son principe, ni en son montant, et ainsi débouter la société intimée de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner la SARL Sarecom à payer à M. [X] la somme de 6 300 euros à titre de dommages-intérêts aux fins de réparer son préjudice, du fait que la société Sarecom n'a pas respecté son obligation de loyauté et de bonne foi contractuelle ;

le cas échéant,

- ordonner la compensation judiciaire entre les condamnations réciproques des parties ;

- condamner la SARL Sarecom à payer une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 11 avril 2023, la SARL Sarecom demande à la cour de :

- débouter M. [X] de l'intégralité de ses demandes fins et conclusions ;

- confirmer le jugement rendu le 3 mars 2022 par le tribunal de proximité d'Abbeville en ce qu'il a :

- déclaré recevables les demandes de la SARL Sarecom ;

- condamné M. [X] à payer à la SARL Sarecom la somme de 6 300 euros ;

- débouté M. [X] de sa demande de dommages-intérêts ;

- condamné M. [X] aux dépens qui comprendront les frais de la procédure d'injonction de payer ;

- condamné M. [X] à payer à la SARL Sarecom la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.'»

Y ajoutant,

- condamner M. [X] à payer à la SARL Sarecom la somme de 2 500 euros au visa des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés à hauteur de cour ;

- le condamner aux entiers dépens de l'instance d'appel.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 octobre 2023 et l'affaire a été renvoyée pour être plaidée à l'audience du 11 janvier 2024. L'affaire a été mise en délibéré au 14 mars 2024.

À raison du paiement tardif du timbre par M. [X] le 13 mai 2024, la mise à disposition a été prorogée au 13 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

À titre liminaire, il convient de constater que la mise à néant de l'ordonnance d'injonction de payer du 15 février 2021 et que les questions de l'irrecevabilité des demandes de la SARL Sarecom ne sont pas contestés à hauteur d'appel.

Par application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur les demandes tendant à voir « constater », qui ne constituent pas des prétentions mais ne sont en réalité que le rappel de moyens invoqués.

Sur la demande en paiement de la SARL Sarecom :

Il résulte des articles 1101, 1134 et 1315 dans leurs rédactions applicable au litige que le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose. Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En outre, en qualité d'artisan inscrit au répertoire des métiers, M. [X] était obligatoirement soumis au règlement n° 2014-03 du 5 juin 2014 homologué par arrêté du 8 septembre 2014.

Il s'en infère qu'il était astreint à répertorier, enregistrer et comptabiliser l'ensemble des engagements juridiques qu'il avait donnés et reçus au titre de chacune de ses années d'activité et ne pouvait se soustraire à cette obligation de comptabilisation des créances et dettes reconnues par lui et affectant son patrimoine.

Il n'est pas contesté que par lettre de mission du 29 mars 2017. M. [H] [X], en sa qualité d'artisan, a confié à la société d'expertise comptable Sarecom la tenue de ses opérations comptables et fiscales.

M. [X] ne conteste pas que la SARL Sarecom a bien réalisé ses comptes de résultats et bilans pour les exercices 2016, 2017 et 2018, ainsi que ses grands livres correspondant à ces exercices puis les déclarations de TVA et les déclarations fiscales au service des impôts des entreprises sur ces trois exercices.

Il ne remet par ailleurs pas en cause la sincérité des comptes de son entreprise artisanale.

Il produit aux débats un courrier de sa main daté du 17 janvier 2020 adressé à la SARL Sarecom au terme duquel il expose que cette dernière a exercé ses prestations à son profit jusqu'au 20 août 2018, date de sa radiation.

Il produit l'extrait de sa radiation du répertoire des métiers qui fait état d'un début d'activité le 2 mai 2016 et d'une fin d'activité le 20 août 2018.

Il est produit aux débats la comptabilité, les liasses fiscales et les déclarations fiscales correspondant aux trois exercices concernés, soit du 2 mai au 31 décembre 2016, du 1er janvier au 31 décembre 2017 et du 1er janvier au 20 août 2018.

Les trois notes d'honoraires adressées à son client par la SARL Sarecom reprennent ces périodes d'exercice et les deux dernières factures impayées s'élèvent à 3 000 euros HT au titre de l'exercice 2017et 2 250 euros HT au titre du dernier exercice 2018.

Le contrat avait fixé les premiers honoraires pour une période de huit mois d'exercice en 2016, honoraires qui ont été réglés.

À ce jour, M. [X] fait grief à la SARL Sarecom que ses honoraires n'ont pas été modifiés ni convenus par un avenant écrit alors que le contrat stipule qu'en cas de modification de volume d'opérations traitées ou de modifications des missions effectuées, ces honoraires seront révisés.

M. [X] n'apporte cependant pas d'explication ni de justification d'une modification des missions effectuées par son comptable ni sur l'absence de prise en compte tarifaire du volume des opérations traitées.

Il convient au contraire de constater que le volume des opérations traitées a été prise en compte par le comptable en ce que seul l'exercice 2017, portant sur douze mois a été pleinement facturé par la SARL Sarecom à hauteur de 3 000 euros HT tandis que le dernier exercice comprenant huit mois n'a été facturé que 2 250 euros.

En tout état de cause, la simple lecture du détail du compte de résultat annuel de M. [X] pour les exercices 2017 et 2018 atteste que ce dernier s'est engagé pour une dette de 3 000 euros HT à l'égard de la SARL Sarecom en 2017 et de 2 250 euros HT en 2018.

Il a fait valoir ses engagements vis-à-vis des tiers et notamment de l'administration fiscale qui ont eu pour effet de d'affecter en le réduisant à proportion son résultat d'exploitation sur ces exercices.

Enfin, la sincérité des comptes de résultat annuel, qui doivent obligatoirement répertorier les engagements juridiques contractés par de M. [X] sur chacun des exercices considéré n'est remise en cause par aucune des parties et ces pièces juridiques et comptables, qui ont valeur probante, sont produites aux débats.

La créance de la SARL Sarecom ne peut donc être remise en cause ni dans son principe ni dans son quantum et M. [X] sera donc condamné à payer à la SARL Sarecom la somme de 6 300 euros TTC au titre des deux factures impayées, soit celle de 3 600 euros TTC correspondant à l'exercice 2017 et celle de 2 700 euros TTC correspondant à l'exercice 2019.

La décision entreprise sera donc confirmée sur ce point.

Sur le manquement de la SARL Sarecom à ses obligations de bonne foi et de loyauté et de compensation judiciaire :

En l'espèce M. [X] ne démontre pas en quoi la SARL Sarecom aurait manqué à ses obligations de bonne foi dans l'exécution du contrat, celle-ci s'étant loyalement et sans retard acquitté de l'ensemble des missions confiées.

Il n'est pas non plus démontré que l'exercice de droits et recours la SARL Sarecom, qui est garantit par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qui s'est avéré parfaitement fondé, ait présenté un caractère de malice, de mauvaise foi, ou d'erreur grossière équipollente au dol.

Dès lors, les demandes de dommages-intérêts et de compensation judiciaire qui en découle formées par M. [X] seront rejetées.

La décision entreprise sera ainsi confirmée sur le rejet de la demande de dommages-intérêts et il y sera ajouté sur la demande de compensation qui n'avait pas été formée en première instance.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

M. [H] [X] qui succombe sera condamné aux dépens de l'appel et la décision de première instance sera confirmée en ses dispositions afférentes aux frais irrépétibles et aux dépens.

L'équité commande de condamner M. [H] [X] à payer à la SARL Sarecom la somme de 1 500 euros au titre des dispositions prévues par l'article 700 du code de procédure civile.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions la décision entreprise,

Y ajoutant,

Rejette la demande de compensation judiciaire formée par M. [H] [X],

Condamne M. [H] [X] aux dépens de l'appel,

Condamne M. [H] [X] à payer à la SARL Sarecom la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés par cette dernière à hauteur d'appel.