Décisions
CA Caen, 1re ch. civ., 25 juin 2024, n° 21/01761
CAEN
Arrêt
Autre
AFFAIRE : N° RG 21/01761 -
N° Portalis DBVC-V-B7F-GYYF
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : DÉCISION du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CAEN du 25 Mai 2021
RG n° 19/00435
COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 25 JUIN 2024
APPELANTS :
Monsieur [Y] [Z]
né le 02 Novembre 1939 à [Localité 7] ([Localité 7])
[Adresse 5]
[Localité 10]
Madame [J] [W] épouse [Z]
née le 09 Août 1947 à [Localité 9] ([Localité 9])
[Adresse 5]
[Localité 10]
représentés et assistés de Me Dorian SAINT-LÉGER, avocat au barreau de CAEN
INTIMÉS :
Monsieur [K] [R]
[Adresse 3]
[Localité 10]
représenté par Me Gaël BALAVOINE, avocat au barreau de CAEN
assisté de Me Thomas CARRERA, avocat au barreau de CAEN,
La SARL [V] [X]
N° SIRET : 397 676 164
[Adresse 2]
[Localité 10]
prise en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de Me Olivier FERRETTI, substitué par Me DESMOULINS, avocats au barreau de CAEN
La S.A.S. ISB FRANCE
N° SIRET : 323 995 357
[Adresse 1]
[Localité 4]
prise en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de Me Marie BOURREL, substitué par Me VALERY, avocats au barreau de CAEN
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. GUIGUESSON, Président de chambre,
Mme VELMANS, Conseillère,
Mme DELAUBIER, Conseillère,
DÉBATS : A l'audience publique du 19 mars 2024
GREFFIER : Mme COLLET
ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 25 Juin 2024 par prorogation du délibéré initialement fixé au 4 Juin 2024 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier
* * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [Y] [Z] et son épouse Mme [J] [W] ont fait construire une maison d'habitation à ossature en bois sur la commune de [Localité 10].
La maîtrise d'oeuvre des travaux a été confiée à M. [K] [R] et le lot n°3 'charpente bois' à la société à responsabilité limitée (sarl) [V] [X].
Le matériau de bardage en bois (clins) posé par la sarl [V] [X] a été acquis auprès d'un grossiste en matériaux de construction, la société Bois & Matériaux exerçant sous l'enseigne 'Réseau Pro [Localité 6]', qui s'est lui-même approvisionné auprès de la société Pbm Import exerçant sous l'enseigne 'Silverwood'. Ce fabricant offre une garantie de dix ans (à compter de la date d'achat du bardage fini par le poseur ou le client final) au titre du bon aspect et de la bonne tenue du système de finition préconisé et appliqué par Silverwood en usine (peinture acrylique microporeuse).
Les travaux ont été réceptionnés le 7 novembre 2008 sans réserve.
Suite à l'apparition de défauts sur les clins constatés par les époux [Z] début 2010, la société [V] [X] s'est adressée à son fournisseur par courrier du 21 février 2010. La société Pbm Import s'est rendue sur place le 23 mars 2011 confirmant aux époux [Z] 'la dégradation prématurée du bardage Extrawood natur ton sable' par lettre du 1er avril 2011.
Du 16 au 31 juillet 2012, la société Pbm Import a fait intervenir la société Emeraude Peinture chez M. et Mme [Z] à l'effet d'exécuter des travaux de reprise.
Par courrier du 22 mars 2014, M. et Mme [Z] ont avisé M. [R] de la réapparition des désordres.
La société Bois & Matériaux (réseau Pro [Localité 6]) a adressé une réclamation à la société Pbm Import qui lui a répondu le 25 mars 2014 en faisant état d'une 'non-conformité dans la mise en oeuvre à l'origine de la nouvelle dégradation anormale du bardage'.
Une mesure d'expertise amiable a été diligentée par l'assureur protection juridique de M. et Mme [Z]. Le Cabinet Sde Expertises mandaté à cette fin a rendu son rapport le 12 novembre 2014, complété par trois autres rapports établis les 21 mai et 6 août 2015, et 8 janvier 2016.
A défaut d'accord amiable, les époux [Z] ont sollicité et obtenu du juge des référés du tribunal de grande instance de Caen une expertise judiciaire confiée à M. [I] [M] au contradictoire de M. [R], la Sarl [V] [X], la société par actions simplifiée (sas) Isb France intervenant au lieu et place de la société Pbm Import Silverwood, la sarl Pépinières Conseil et la société Groupama Centre Manche en qualité d'assureur en responsabilité civile de cette dernière (ordonnance du 7 juillet 2016).
Le 8 juin 2017, à la demande de la société Isb France, les opérations d'expertise confiées à M. [M] ont été déclarées communes et opposables à la société Emeraude Peinture.
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 19 décembre 2017.
Par actes des 12 et 18 décembre 2018, M. et Mme [Z] ont assigné M. [R], la société [V] [X] et la société Isb France devant le tribunal de grande instance de Caen aux fins d'être indemnisés du préjudice subi.
Par jugement du 25 mai 2021 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal judiciaire de Caen a :
- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la société Isb France ;
- débouté M. et Mme [Z] de toutes leurs prétentions dirigées contre la société Isb France, M. [R] et la société [V] [X] ;
- débouté la société Isb France, M. [R] et la société [V] [X] de leur demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné solidairement M. et Mme [Z] aux entiers dépens, lesquels comprendront les frais d'instance en référé ayant donné lieu à l'ordonnance de référé du 7 juillet 2016 et de l'instance aux fond, outre les frais de l'expertise judiciaire effectuée par M. [M] ;
- dit que la société Isb France conservera en revanche à sa charge les frais de l'instance en référé
ayant donné lieu à l'ordonnance de référé du 8 juin 2017 ;
- accordé à la Scp Ferretti Hurel et à la Selas Fidal intervenant par Me Carrera le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
- débouté M. [R] de sa demande tendant à la condamnation de M. et Mme [Z] à lui payer le montant des sommes retenues par huissier chargé de l'exécution forcée au titre de l'article 10 du décret du 12 décembre 1996 portant fixation du tarif des huissiers de justice en matière civile et commerciale ;
- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire ;
- débouté les parties leurs demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration du 14 juin 2021, M. et Mme [Z] ont formé appel de ce jugement.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 24 août 2022, M. et Mme [Z] demandent à la cour de :
A titre principal,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Caen en date du 25 mai 2021 en ce qu'il :
* les a déboutés de toutes leurs prétentions dirigées contre la société Isb France, M. [R] et la société [V] [X] ;
* les a condamnés solidairement aux entiers dépens, lesquels comprendront les frais de l'instance en référé ayant donné lieu à l'ordonnance de référé du 7 juillet 2016 et de la présente instance au fond, outre les frais de l'expertise judiciaire effectuée par M. [M] ;
* a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
- déclarer qu'ils sont recevables et bien fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions ;
- juger que la clause d'exclusion de garantie ne leur est pas opposable ;
- juger que la société Isb France est tenue à son obligation contractuelle de garantie envers eux ;
- juger que la société Isb France a manqué à son obligation de délivrance conforme ;
En conséquence,
- condamner la société Isb France, la société [X] et M. [R] à leur verser la somme de 47 370 euros HT au titre du coût des travaux de reprise ;
- rejeter toutes les demandes, fins et conclusions contraires aux présentes ;
Subsidiairement,
- juger que la société [X] et M. [R] ont manqué à leurs obligations à leur égard ;
En conséquence,
- condamner la société [X] et M. [R] à leur verser la somme de 47 370 euros HT au titre du coût des travaux de reprise ;
En toute hypothèse,
- condamner solidairement la société Isb France, la société [X] et M. [R] à leur verser la somme de 3 000 euros au titre de leur préjudice moral ;
- condamner solidairement la société Isb France, la société [X] et M. [R] à leur verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner solidairement la société Isb France, la société [X] et M. [R] aux entiers dépens, dont les frais d'expertise judiciaire taxés à hauteur de 8 269,94 euros et de référé dont distraction au profit de Me Chanut selon application de l'article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de leur appel, les époux [Z] font valoir qu'ils sont recevables et bien fondés en leur action engagée à l'encontre du fabricant des clins, la société Isb France, tenue à leur égard de la garantie contractuelle de dix ans au titre de la bonne tenue du bardage.
Ils prétendent à cet effet que :
- leur action n'est pas prescrite en application de l'article L110-4 du code de commerce dans sa rédaction postérieure au 17 juin 2008, alors que les travaux comportant la pose du bardage ont été réceptionnés le 7 novembre 2008, que société Isb France, dans le respect de son obligation de garantie, est intervenue sur le bardage en juillet 2012 et qu'à la suite de nouveaux désordres apparus en 2014, celle-ci a été assignée en référé-expertise en mai 2016, soit dans le délai de 5 ans prévu à l'article précité ;
- il n'y a pas lieu de réduire le délai de garantie de dix ans à deux ans, ni de retenir une quelconque clause limitative de garantie alors que le fabricant a toujours admis sans réserve sa garantie à leur égard, que les non-conformités au DTU visées dans la clause exclusive de garantie n'ont pas de lien avec le dommage dont le bardage est affecté, que le contrat de garantie applicable au litige n'est pas communiqué de sorte qu'aucune clause d'exclusion existante ne saurait être appliquée et qu'enfin, les exclusions dont se prévaut la société Isb France ne leur sont pas opposables à défaut d'avoir été portées à leur connaissance.
M. et Mme [Z] prétendent encore que la société Isb France a manqué à son obligation de délivrance conforme sur le fondement de l'article 1604 du code civil, alors que l'absence de conformité du bardage livré avec celui commandé ne fait aucun doute au regard des anomalies qui ont été constatées par l'expert judiciaire.
Subsidiairement, si la cour confirmait le jugement en ce qu'il a jugé que les exclusions de garantie devaient s'appliquer, les appelants considèrent que la responsabilité du maître d'oeuvre et du poseur doit être retenue dès lors que la pose du bardage par la société [V] [X] sous la maîtrise d'oeuvre de M. [R] n'a pas été réalisée conformément au DTU applicable et que ces non-conformités sont précisément à l'origine de l'exclusion de garantie qui serait appliquée.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 2 mai 2022, la société Isb France demande à la cour de :
A titre principal,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
A titre subsidiaire, si la cour réformait le jugement du fait de l'inapplication de la clause
d'exclusion de garantie pour les non-conformités au DTU, réformer le jugement,
Statuant à nouveau,
à titre principal,
- dire que l'action de M. et Mme [Z] est prescrite ;
à titre subsidiaire,
- débouter M. et Mme [Z] de leurs demandes ;
- débouter la société [V] [X] et M. [R] de leurs demandes à son encontre ;
- débouter M. [R] de ses demandes à son encontre ;
à titre infiniment subsidiaire,
- désigner tel expert qu'il plaira au tribunal de désigner ;
- dire que la mission de l'expert sera la suivante :
* examiner les désordres,
* en déterminer la date d'apparition et les causes de toutes nature,
* s'expliquer sur les fautes de conception ou d'exécution commises et les responsabilités encourues,
* dire si le bardage présente un défaut ou une non conformité,
* dire si les désordres étaient visibles à la réception et s'ils ont fait l'objet de réserves,
* dire s'ils affectent l'ouvrage ou l'un de ses éléments d'équipement,
* dire si les désordres sont de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ou à porter atteinte à sa solidité,
* décrire les travaux nécessaires à leur réparation, les chiffrer à l'aide de devis et chiffrer le cas échéant la moins-value causée par les désordres à l'immeuble,
* fournir les éléments au tribunal permettant d'établir les responsabilités,
* s'expliquer sur toutes causes de préjudice,
* recueillir les observations des parties et y répondre,
* établir un pré-rapport,
* le cas échéant permettre au demandeur la prise de mesures conservatoires,
* le cas échéant permettre aux parties de se rapprocher si elles souhaitent mettre un terme au litige par la voie d'un protocole transactionnel ;
en toute hypothèse,
- dire que la société [V] [X] devra la garantir de toutes les condamnations qui seront prononcées à son encontre ;
- dire que les sommes qui pourraient être mises à sa charge ne sauraient excéder 10 350 euros hors-taxes ;
- condamner tout succombant à lui verser la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner tout succombant aux entiers dépens.
La société Isb France critique le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir qu'elle avait soulevée alors que les demandes formées par les époux [Z] formées au titre de la garantie contractuelle de bonne tenue comme de l'obligation de délivrance conforme sont prescrites.
S'agissant de la première, elle fait valoir que suite à la reprise effectuée, une garantie de deux ans s'est substituée à celle de 10 ans accordée initialement et qu'il convient de distinguer les désordres survenus chronologiquement lesquels sont indépendants les uns des autres.
S'agissant de la seconde, elle relève que les époux [Z] n'ont aucun lien contractuel avec le fabricant, que le délai de cinq ans de l'article L110-4 du code de commerce a pour point de départ la vente intervenue courant 2008 et qu'en conséquence, les appelants étaient prescrits en engageant leur action en mai 2016.
En tout état de cause, l'intimée se prévaut de la clause exclusive de garantie contractuelle relative aux défauts de ventilation constatés en l'occurrence par l'expert judiciaire, peu important l'absence de tout lien avec le dommage survenu. Elle conteste avoir toujours assuré aux époux [Z] qu'ils bénéficiaient de la garantie contractuelle de 10 ans et affirme que la clause d'exclusion litigieuse leur est opposable, le contrat de garantie existant et applicable au moment de la réalisation de la garantie commerciale offerte à l'acheteur ayant été mis à disposition de son cocontractant, la société Bois & Matériaux ayant pour enseigne Réseau pro, tel que prévu au contrat.
Enfin, à titre infiniment subsidiaire, elle souligne la faute prépondérante commise par la société [V] [X] qui n'a pas posé de ventilations conformément aux normes DTU 41.2 alors que la déformation des lames révèle sans équivoque que ce défaut d'exécution est la cause de l'apparition de l'humidité anormale derrière les lames et que plus généralement, la cause des désordres sur ce type de bardage relève systématiquement d'un défaut de ventilation. Estimant que l'expert a failli dans sa mission en écartant cette cause évidente des désordres, elle sollicite une nouvelle expertise afin de pouvoir déterminer avec certitude la nature et les causes exactes des désordres.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 1er mars 2022, M. [R] demande à la cour de :
A titre principal,
- confirmer le jugement dont appel sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
statuant à nouveau,
- sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, condamner M. et Mme [Z] et la société Isb France à lui payer la somme de 3 000 euros ;
- débouter M. et Mme [Z], la société Isb France et la société [V] [X] de leurs demandes à son encontre ;
A titre subsidiaire,
- limiter sa part de responsabilité éventuelle à hauteur de 8% des désordres en cause, soit à la somme de 3 690 euros au titre des travaux réparatoires ;
- lui accorder recours et garantie intégrale à l'encontre des sociétés [V] [X] et Isb France;
- débouter les sociétés Isb France et [V] [X] de leurs appels en garantie à son encontre ;
- débouter la société Isb France de sa demande d'expertise judiciaire ;
En tout état de cause,
- sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile, condamner solidairement
M. et Mme [Z] et la société Isb France aux entiers dépens ;
- sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, condamner M. et Mme [Z] et la société Isb France à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles qu'il s'est trouvé contraint d'exposer en cause d'appel.
M. [R] fait valoir que la société Isb France, seule responsable des désordres, est débitrice d'une garantie contractuelle à l'égard des époux [Z] alors que la société [V] [X], pour sa part, est débitrice à l'égard des maîtres d'ouvrage d'une obligation de résultat en matière de non-conformité de la mise en oeuvre du bardage au regard des prescriptions du DTU 41.2. Il rappelle en outre qu'il n'est pas intervenu dans le cadre des travaux de reprise de sorte qu'aucune condamnation in solidum ne peut être prononcée à son encontre.
Subsidiairement, dans l'hypothèse où sa responsabilité serait retenue, il demande à ce que sa part soit limitée à 8% tel que conclu par l'expert judiciaire.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 5 janvier 2022, la société [V] [X] demande à la cour, à titre principal, de confirmer le jugement dont appel sauf en ce qu'elle a été déboutée de sa demande indemnitaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau, de condamner M. et Mme [Z] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, à titre subsidiaire, de :
- dire n'y avoir lieu à condamnation solidaire entre elle et les autres intervenants concernés ;
- dire que les condamnations prononcées à son encontre ne pourront excéder la somme de 2 460,40 euros au titre du coût de réfection des désordres ;
- débouter M. et Mme [Z] du surplus de leurs demandes à son encontre au titre des travaux de reprise ;
- débouter M. et Mme [Z] de leurs réclamations au titre du préjudice moral ;
- juger que toute condamnation prononcée à son encontre pour les préjudices complémentaires, frais et accessoires, devra l'être dans la limite de 5 % et sans condamnation solidaire ;
- condamner la société Isb France et M. [R] à la garantir de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre ;
- débouter la société Isb France de son recours en garantie à son encontre et de son appel incident ;
- débouter la société Isb France de sa demande d'expertise judiciaire ;
- débouter M. [R] de son recours en garantie subsidiaire à son encontre ;
En toute hypothèse,
- condamner M. et Mme [Z] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles en appel ;
- condamner M. et Mme [Z] aux dépens.
La société [V] [X] affirme que sa responsabilité ne saurait être retenue dès lors que l'expert judiciaire a établi que les non-conformités au DTU n'avaient aucun lien avec les dommages affectant le bardage. Au surplus, elle relève que lors des travaux de reprise, la société Isb France a accepté sans réserve les supports pour mettre en application le film protecteur selon une solution réparatoire définie par ses seuls soins sans concertation avec les autres intervenants.
L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 21 février 2024.
Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
- Sur le rapport d'expertise et les désordres :
Au regard des divers éléments recueillis et constatations opérées, l'expert judiciaire a relevé que :
- les travaux réceptionnés par les époux [Z] le 7 novembre 2008 sans réserve portaient sur un bardage en clins en sapin du nord recevant une finition par peinture acrylique microporeuse dont la bonne tenue était garantie 10 ans par le fabricant, soit la société Pbm Import, devenue société Isb France ;
- suite à des désordres par apparition d'un phénomène fongique dans et à l'arrière de la peinture des lames originelles en 2011, la société Pbm Import a fait réaliser en juillet 2012 ce, de façon unilatérale, sans participation des constructeurs, une campagne de réparation par ponçage généralisé des lames et application d'une lasure in situ ;
- en mars 2014, de nouveaux désordres par décollement et disparition de la lasure des clins sont constatés au droit des nouvelles réparations notamment en façade ouest.
L'expert a conclu que :
- la lasure alléguée mise en oeuvre en 2012 suite à l'opération de ponçage généralisée au grain fin des clins s'apparentait plus à un vernis qu'à une lasure (laquelle par définition pénètre le bois pour le protéger contre l'humidité) : la réalisation en 2012 sur des clins poncés et époussetés d'une peinture d'apprêt dite 'bouche-pores' à la qualité d'un 'fond dur' a permis d'égaliser les surfaces et de minimiser la quantité de vernis mais a empêché aussi l'apprêt final d'être absorbé par le support bois ; l'apprêt de finition a la qualité d'un vernis et non d'une lasure puisque l'apprêt est filmogène et ne pénètre pas le bois ;
- la couche protectrice filmogène se décolle puis se détache des clins au droit de l'arrête arrondie ainsi que parfois en partie courante et lorsqu'elle a été appliquée sur d'autres bois (charpente en lamellé collé et sur les habillages verticaux) ;
- c'est l'action des pluies et du rayonnement UV qui détériore le film protecteur (ce qui est courant pour les films de type vernis ou si la lasure a été appliquée sur un support non dépoussiéré), d'où les atteintes principales localisées en pans sud et ouest non abrités ;
- les non-conformités de ventilation constatées en pied et en tête de bardage commises lors de l'opération de travaux courant 2008 ne sont pas à l'origine du phénomène de détérioration du film protecteur appliqué en 2012 ;
- ces non-conformités n'étaient pas davantage à l'origine des premiers phénomènes fongiques au droit des clins puisqu'au droit du cabanon, il est mis en évidence que les clins silverwood natur provenant d'autres colis que ceux mis en oeuvre sur la maison, sans ventilation en pied comme en tête, ne sont pas altérés par le phénomène fongique ; il s'agissait donc d'un défaut originel quant à la qualité du bois mis en oeuvre et qui a insuffisamment fait l'objet d'un traitement fongicide approprié avant sortie d'usine ;
- la société Pbm Import est intervenue hors les autres constructeurs en toute connaissance des supports et de leurs insuffisances en terme de ventilation (non-conformité appréciée comme n'étant pas à l'origine des désordres).
M. [M] considère en définitive que la prestation résultant des travaux réparatoires n'est pas conforme à la qualité du bardage en sortie d'usine garantie 10 ans, mais s'apparente à un travail de peinture filmogène à renouveler tous les 2 ou 3 ans en fonction de la détérioration du film. Il ajoute que selon lui, ce n'est pas cette qualité de prestation qui a été retenue au contractuel par le maître d'oeuvre et le maître d'ouvrage, non sachant, lequel n'a pas été informé de la qualité inférieure de finition des bardages induite par les travaux préparatoires.
Il estime que la seule solution réparatoire consiste dans le remplacement à neuf des clins au profit de nouveaux sortis d'usine sous les mêmes garanties et précise qu'il convenait de 'faire ressortir du quantum la prise en charge des ventilations basses et hautes manquantes actuellement'.
Il retient en conséquence que la société Isb France doit prendre en charge la totalité des travaux réparatoires diminuée des prestations de tôlerie (ventilations) qu'il impute pour 60% à l'architecte concepteur et pour 40% à la société [V] [X].
Au vu de ces éléments, il convient d'examiner les demandes formées par les époux [Z] à l'encontre des différents intervenants selon le fondement juridique invoqué au soutien de leurs demandes.
- Sur les demandes formées par les époux [Z] à l'encontre de société Isb France venant aux droits de la société Pbm Import :
Il est acquis aux débats que le bardage en clins en sapin du nord posé par la société [V] [X] et réceptionné le 7 novembre 2008 par les époux [Z] était assorti d'une garantie contractuelle de 10 ans offerte par le fabricant des clins au titre d'un 'contrat de garantie bardage couleur Silverwood' ayant pour objet de garantir le bon aspect et la bonne tenue du système de finition préconisé et appliqué par Silverwood, la société Isb France refusant sa garantie aux appelants en invoquant l'application d'une clause exclusive insérée au contrat de garantie.
Toutes les parties sollicitent à titre principal la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré que l'action engagée par les époux [Z] n'était pas prescrite, la fin de non-recevoir tirée de la prescription étant soulevée en cause d'appel à titre subsidiaire par la société Isb France 'si la cour réformait le jugement du fait de l'inapplication de la clause d'exclusion de garantie pour les non-conformités au DTU'.
Liminairement sur la clause d'exclusion de garantie :
Vu l'article 1353 alinéa 2 du code civil,
Le premier juge a considéré à la lecture du contrat de garantie produit par le fabricant prévoyant une exclusion de garantie en cas de non-respect des normes en vigueur et notamment du DTU 41.2, et à l'examen des rapports d'expertise amiable et judiciaire ayant constaté le non-respect du DTU 41.2 de juillet 1996 et l'existence de non-conformités de ventilation en partie basse et en partie haute du bardage, que l'exclusion de garantie devait s'appliquer, après avoir relevé que son opposabilité n'avait pas été contestée.
En cause d'appel, les époux [Z] entendent contester tant l'existence d'une clause d'exclusion de garantie applicable alors que le contrat de garantie produit par la société Isb France n'est valable que 'à compter du 1er novembre 2016 et jusqu'à la date de la nouvelle version', que son opposabilité à leur égard dès lors qu'elle n'a pas été portée à leur connaissance.
Le marché de travaux conclu par les époux [Z] avec la société [V] [X] qui a posé le bardage a été signé le 15 février 2008 sur la base d'un devis signé le même jour et établi le 13 décembre 2007. La facture correspondante de la société [V] [X], comme la facture d'achat des clins par le poseur à la société Bois & Matériaux (Réseau pro [Localité 6]), et enfin la facture d'achat établie par la société Ibm Import au nom du fournisseur ne sont pas produites aux débats par les parties.
Dans son courrier adressé le 21 février 2010 à 'réseau Pro [Localité 6]', la société [V] [X] s'est référé à la facture 'réseau Pro' correspondante F N° 00135293 du 30 juin 2008.
Les travaux ont été accomplis courant 2008 pour être réceptionnés le 7 novembre 2008.
Il résulte de ces éléments que les clins litigieux avaient été acquis par la société Bois & Matériaux 'réseau Pro [Localité 6]' auprès de la société Imp Import antérieurement à la date du 30 juin 2008.
Or, la société Isb France, qui se prévaut d'une clause d'exclusion de garantie en cas de non-conformités au DTU, ne rapporte pas la preuve de sa prévision contractuelle à la date du 30 juin 2008 opposable aux époux [Z] au regard des éléments qu'elle communique en ce que :
- le premier document intitulé 'contrat de garantie bardage couleur silverwood' (sa pièce n°6) qui stipule en qualité de bénéficiaires 'toute personne physique ou morale, cliente de Silverwwod' n'est pas nominatif et comporte en bas de page l'indication suivante : 'attestation de garantie bardage massif couleur silverwood, valable à compter du 1er novembre 2016 et jusqu'à la date de sa nouvelle version'.
Ce contrat de garantie 'type' sur lequel se fonde la société Isb France pour se prévaloir de la clause d'exclusion de garantie est donc postérieur à l'achat et la pose des clins d'origine et ne peut dès lors être retenu pour attester d'une clause d'exclusion de garantie susceptible de s'appliquer au cas d'espèce ;
- le second intitulé 'certificat de garantie de la lasure de finition opaque des clins Extrawood et de finition semi transparente sur les lins natur' établi par la société Ibm Import avec pour bénéficiaire 'Réseau Pro [Localité 8]' vise un bon de livraison du 8 février 2010 et une facture n°317906 du 9 février 2010. Au vu de ces mentions, il est manifeste que ce certificat ne peut concerner les clins acquis et posés précédemment, en 2008, chez les époux [Z] ni s'appliquer pour la période ayant suivi les travaux de reprise, lesquels ont été effectués sur les clins en juillet 2012, sans remplacement des clins d'origine ce, alors que la société [V] [X] ne s'est rapprochée de la société Bois & Matériaux (réseau Pro [Localité 6]) pour informer son fournisseur des premiers désordres survenus qu'à compter du 21 février 2010. Aucun élément n'atteste en conséquence que ce certificat de garantie concerne le présent litige.
Enfin, si la société Isb France produit les conditions particulières du 'contrat d'assurance 'garanties contractuelles' bonne tenue' du 9 février 2005 conclu avec son assureur la compagnie Axa, renouvelable par tacite reconduction, et dont les bénéficiaires de la garantie indiqués sont : 'l'assuré, le maître d'ouvrage ou le propriétaire des ouvrages dans lesquels sont incorporés les éléments garantie', l'article VI point 6.13 énonce l'exclusion suivante : 'les dommages dus à un non-respect des règles de l'art dans la pose du produit fini (prescriptions particulières de montage émanant de l'assuré et / ou recommandations techniques du DTU 41.2)'.
Il en résulte que l'exclusion de garantie visée par ce contrat d'assurance exige pour être appliquée que le non-respect des règles de l'art et normes énoncées (recommandations techniques du DTU 41.2) soit la cause des dommages survenus.
Or, le rapport d'expertise dont les conclusions ont été rappelées établit que les non-conformités de ventilation constatées en pied et en tête de bardage réalisées lors de l'opération de travaux courant 2008 ne sont pas à l'origine du phénomène de détérioration du film protecteur appliqué en 2012 ni la cause des premiers phénomènes fongiques survenus début 2010.
Contrairement à ce que soutient la société Isb France, l'expert judiciaire ne s'est pas limité à procéder par affirmation sans expliquer les causes des désordres successifs alors que la simple comparaison des clins affectés avec ceux non altérés provenant d'autres colis, posés au droit du cabanon ce, dans les mêmes conditions, à savoir sans ventilation en pied comme en tête, permettait de confirmer le défaut originel quant à la qualité du bois mis en oeuvre et l'insuffisance du traitement fongicide approprié avant sortie d'usine.
En réponse au dire n°6 de la société Isb France faisant état d'une aggravation des désordres marquée par la déformation des larmes en forme concave et révélant l'humidité anormale derrière les lames résultant du défaut de ventilation, l'expert a confirmé que l'origine des désordres par altération de l'apprêt de finition résidait dans l'application d'un vernis sur fond dur longuement expliquée, et non la non-conformité alléguée.
Ainsi, les rapports d'expertise amiables concluant à un défaut de conception non corrigé en cours de chantier à l'origine des désordres ne sont pas de nature à remettre en cause utilement l'avis de l'expert judiciaire sur ce point.
De surcroît, pour remettre en cause le rapport d'expertise judiciaire et solliciter une nouvelle expertise, la société Isb France ne saurait utilement se reporter à des généralités non documentées en affirmant qu'en cas de désordres sur ce type de bardage, l'élément en cause est toujours le défaut de ventilation, ni invoquer un autre cas d'espèce qui par hypothèse ne concerne pas les mêmes clins, ni même critiquer l'absence d'analyse en laboratoire des clins altérés alors que l'expert a pu déterminer la cause des désordres sans y recourir et qu'une telle analyse ne lui a pas été demandée au cours des opérations d'expertise.
Il en résulte que la société Isb France ne rapporte pas la preuve d'une clause d'exclusion de garantie stipulée l'égard de la société Bois & Matériaux 'réseau Pro [Localité 6]' en cas de non-respect des règles de l'art dans la pose du produit fini même en l'absence de lien avec les dommages survenus, ni a fortiori celle de son opposabilité alors que le fabricant n'établit pas sa connaissance par le fournisseur par 'mise à disposition du contrat de garantie' telle qu'alléguée.
Enfin, et en tout état de cause, les époux [Z], qui ne sont pas contractuellement engagés avec le fournisseur, n'ont pas été destinataires d'un quelconque document les informant de la clause d'exclusion alléguée, de sorte que même à retenir l'existence d'une clause d'exclusion stipulée au contrat de garantie, celle-ci ne leur serait pas opposable.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
- Sur la prescription :
Selon l'article 2224 du même code, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
L'article L. 110-4 du code de commerce dispose que les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.
La garantie contractuelle de 10 ans offerte par leur fabricant, la société Pbm Import, constitue un accessoire aux clins vendus par la société Pbm Import à la société Bois & Matériaux ayant pour enseigne Réseau pro, revendus à la société [V] [X].
Le sous-acquéreur jouit de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à son auteur.
Les époux [Z] font valoir à titre principal que la société Pbm Import devait appliquer sa garantie contractuelle de 10 ans dont ils bénéficiaient, qu'à ce titre, celle-ci est intervenue sur le bardage en juillet 2012 dans les conditions de mise en oeuvre de sa garantie, mais qu'à la suite de nouveaux désordres apparus en 2014 et de son refus de prise en charge, celle-ci a été assignée en référé-expertise en mai 2016, soit dans le délai de 5 ans prévu à l'article précité.
De fait, par courrier du 1er avril 2011, la société Pbm Import a informé les époux [Z] que suite à son passage du 23 mars 2011 avec l'entreprise [X], elle confirmait 'le constat d'une dégradation prématurée de leur bardage' et que 'ce type de dégradations étant prise en charge dans le cadre de notre garantie 10 ans, la société Silverwood s'engage à reprendre en peinture votre bardage'.
Les travaux réparatoires ont été réalisés du 16 au 31 juillet 2012 par la société Emeraude Peinture à la demande de la société Ibm Import et selon les prescriptions du fabricant.
La société Ibm Import prétend qu'au regard de ces travaux ayant emporté une modification de finition opérée, une garantie de deux ans se serait substituée à la garantie de 10 ans.
Le tribunal avait relevé toutefois que selon le contrat de garantie de bon aspect et de bonne tenue de finition communiqué par la société Isb France elle-même, 'pour que la garantie continue à s'appliquer aux parties rénovées pour la durée restante, la rénovation devra être faite par un peintre agréé et selon le procédé Silverwood au cas par cas' de sorte que le fabricant n'était pas fondé à se prévaloir d'un prétendu basculement d'une garantie de 10 à 2 ans.
De fait, la substitution de garantie alléguée ne résulte d'aucun document contractuel. Au surplus, il n'est pas contesté que les époux [Z] n'ont pas même été informés du changement de garantie invoqué et le document par lequel ces derniers ont accepté les travaux réparatoires ne contient aucune indication sur ce point.
Au demeurant, dans son dire n°1, la société Ibm Import affirmait que 'la lasure qui devait être appliquée sur les façades de M. et Mme [Z] était garantie 10 ans, tout comme les clins usinés. Il s'agit d'une garantie de bonne tenue concernant les finitions du bardage et notamment les lasures.'
Il en résulte que la société Isb France n'est pas plus fondée en cause d'appel qu'en première instance à se prévaloir d'une substitution d'une garantie de 2 ans à sa garantie de 10 ans du fait de son intervention, laquelle devait être maintenue jusqu'en 2018, nonobstant les travaux exécutés par la société Emeraude peinture en 2012, ainsi que l'a parfaitement considéré le tribunal.
Il est constant qu'après réalisation des travaux de reprise du 16 au 31 juillet 2012, de nouveaux dommages sont apparus en mars 2014, soit dans le délai de garantie de 10 ans.
Or, l'action engagée par les époux [Z] à l'encontre du fabricant tend principalement à sa condamnation au paiement des travaux de reprise du bardage dont les dégradations apparues en mars 2014 font suite aux travaux réparatoires exécutés en juillet 2012 et dont la prestation a été considérée par l'expert non conforme à la qualité du bardage en sortie d'usine garantie 10 ans.
Dès lors, il doit être constaté que l'assignation en référé expertise délivrée par les époux [Z] le 4 mais 2016, soit dans les cinq ans du fait dommageable survenu en mars 2014, a interrompu le délai de prescription de l'article L. 110-4 précité en application des articles 2241 et 2231 du code civil de sorte que l'action engagée au fond par acte du 12 décembre 2018, soit dans le délai quinquennal susvisé, n'est pas prescrite.
Le jugement sera en conséquence confirmé de ce chef.
- Sur l'indemnisation des époux [Z] :
En l'absence de toute cause d'exclusion applicable et opposable aux époux [Z], la société Isb France devait sa garantie de bon aspect et de bonne tenue du système de finition qu'elle avait appliqué en usine.
Il ressort des conclusions du rapport d'expertise judiciaire retenues par la cour, que si celle-ci est intervenue en 2012 dans le cadre de sa garantie alors que M. [M] a mis en exergue le défaut originel des clins fournis, elle a fait procéder à des travaux de reprise dont la prestation (peinture filmogène à renouveler tous les 2 ou 3 ans en fonction de la détérioration du film) correspondait à une qualité inférieure de finition à celle prévue initialement et garantie, à l'origine des nouveaux désordres constatés (décollement et disparition de la lasure des clins constatés au droit des nouvelles réparations), étant ajouté que l'intervention a eu lieu sur un support non-conforme aux règles de l'art qui a été accepté.
Il sera rappelé que l'expertise a révélé que le film de protection des clins mis en oeuvre en 2012 ne résistait pas sur les parties de façades soumises aux intempéries et aux UV alors que le process
de réparation (pose d'une peinture d'apprêt à la qualité d'un 'fond dur' ayant empêché l'apprêt final -qualifié de vernis- d'être absorbé par le support bois) n'avait pas permis la pénétration effective de la lasure dans le bois.
L'expert a considéré que la dégradation du film de protection actuelle ne pouvait ainsi assurer la préservation du bois garantie par la finition originelle sortie d'usine de sorte que le remplacement à neuf des clins au profit de nouveaux sortis d'usine sous même garantie s'imposait.
Il en résulte que la société Isb France doit indemniser les époux [Z] des préjudices subis au titre de la garantie de 10 ans dont elle est redevable et portant sur la bonne tenue et le bon aspect de la finition des clins assurée en usine, alors que travaux réparatoires accomplis en 2012 sont à l'origine d'une finition de qualité inférieure à celle réalisée en usine (objet de la garantie) et la cause des désordres survenus en 2014 dont elle doit être considérée responsable.
Le montant des travaux réparatoires correspondant à la seule fourniture et pose d'un nouveau bardage a été chiffré par l'expert à la somme de 41 220 euros HT. Ce montant exclut le coût des travaux de mise en conformité au DTU 41.2. (6 150 euros) et il n'y a pas lieu d'exclure les postes contestés par la société Isb France dont l'expert a considéré qu'ils se rattachaient au nécessaire remplacement des clins garantis.
En revanche, aucun motif ne justifie la condamnation du fabricant au paiement des travaux propres à remédier à la non-conformité au DTU 41.2 (ventilations) à laquelle celui-ci est étranger et qui n'a pas été considérée à l'origine des désordres par l'expert judiciaire.
Les époux [Z] seront en conséquence déboutés du surplus de leur demande (6 150 euros) formée à son encontre.
Enfin, le préjudice moral des époux [Z] qui subissent les dégradations de leur bardage depuis 2010, et ont supporté, après reconnaissance du fabricant de sa garantie, l'exécution de travaux de réparatoires leur assurant une prestation de qualité inférieure non conforme à la garantie offerte et suivie de l'apparition de nouveaux désordres, des années d'expertise amiable puis judiciaire sans qu'une solution amiable ne puisse aboutir, doit être indemnisé par l'allocation d'une somme de 2000 euros à titre de dommages et intérêts.
- Sur les demandes formées à l'encontre de M. [R] et de la société [V] [X] :
Il a été mis en évidence que les non-conformités de ventilation constatées en pied et en tête de bardage réalisées lors de l'opération de travaux courant 2008 ne sont pas à l'origine du phénomène de détérioration du film protecteur appliqué en 2012, ni la cause des premiers phénomènes fongiques.
En conséquence, en l'absence de désordres imputables à la non-conformité de la pose du bardage, M. et Mme [Z] seront déboutés de leurs demandes de condamnation formées à l'encontre du poseur, la société [V] [X], et du maître d'oeuvre, M. [R], au titre du coût des travaux de reprise et de leur préjudice moral, étant précisé que ces derniers ne sont pas intervenus aux travaux de réparation à l'origine des désordres.
Il s'en suit que les recours en garantie formés d'une part, par la société [V] [X] à l'encontre de la société Isb France et M. [R] et d'autre part, par M. [R] à l'encontre des sociétés Isb France et [V] [X], sans objet, seront rejetés.
- Sur les demandes accessoires :
Le jugement doit être infirmé en ses dispositions relatives aux dépens.
La société Isb France, partie qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens de première instance en ce compris ceux de l'instance en référé et le coût de l'expertise judiciaire, et de la procédure d'appel.
La décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a débouté la société Isb France, la société [V] [X] et M. [R] de leur demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et infirmé en ce qu'elle a rejeté la demande présentée par les époux [Z] sur le même fondement.
Il est justifié de faire partiellement droit à la demande présentée par M. et Mme [Z] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner la société Isb France au paiement de la somme de 3 000 euros sur ce fondement, laquelle vaudra pour les frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel.
La société Isb France, qui succombe en appel, sera déboutée de sa demande formée sur ce même fondement. L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la société [V] [X] et de M. [R].
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement en ce qu'il a débouté M. [Y] [Z] et Mme [J] [Z] née [W] de toutes leurs prétentions dirigées contre la société Isb France en ce compris celle formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et les a condamnés aux entiers dépens ;
Le confirme pour le surplus des dispositions soumises à la cour ;
Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés et y ajoutant :
Rejette la demande d'expertise judiciaire présentée par la société Isb France ;
Condamne la société Isb France à payer à M. [Y] [Z] et Mme [J] [Z] née [W] la somme de 41 220 euros HT au titre du coût des travaux de reprise du bardage garanti ;
Condamne la société Isb France à payer à M. [Y] [Z] et Mme [J] [Z] née [W] la somme de 2000 euros au titre de leur préjudice moral ;
Déboute M. [Y] [Z] et Mme [J] [Z] née [W] du surplus de leurs demandes ;
Rejette la demande en garantie formée par la société Isb France à l'encontre de la société [V] [X] et M. [K] [R] ;
Condamne la société Isb France à payer à M. [Y] [Z] et Mme [J] [Z] née [W] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette les autres demandes formées sur le même fondement ;
Condamne la société Isb France aux entiers dépens de la procédure de première instance en ce compris ceux de l'instance en référé et le coût de l'expertise judiciaire, et de la procédure d'appel et autorise le conseil de M. [Y] [Z] et Mme [J] [Z] née [W] à les recouvrer directement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Rejette toutes les autres demandes des parties.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
M. COLLET G. GUIGUESSON
N° Portalis DBVC-V-B7F-GYYF
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : DÉCISION du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CAEN du 25 Mai 2021
RG n° 19/00435
COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 25 JUIN 2024
APPELANTS :
Monsieur [Y] [Z]
né le 02 Novembre 1939 à [Localité 7] ([Localité 7])
[Adresse 5]
[Localité 10]
Madame [J] [W] épouse [Z]
née le 09 Août 1947 à [Localité 9] ([Localité 9])
[Adresse 5]
[Localité 10]
représentés et assistés de Me Dorian SAINT-LÉGER, avocat au barreau de CAEN
INTIMÉS :
Monsieur [K] [R]
[Adresse 3]
[Localité 10]
représenté par Me Gaël BALAVOINE, avocat au barreau de CAEN
assisté de Me Thomas CARRERA, avocat au barreau de CAEN,
La SARL [V] [X]
N° SIRET : 397 676 164
[Adresse 2]
[Localité 10]
prise en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de Me Olivier FERRETTI, substitué par Me DESMOULINS, avocats au barreau de CAEN
La S.A.S. ISB FRANCE
N° SIRET : 323 995 357
[Adresse 1]
[Localité 4]
prise en la personne de son représentant légal
représentée et assistée de Me Marie BOURREL, substitué par Me VALERY, avocats au barreau de CAEN
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. GUIGUESSON, Président de chambre,
Mme VELMANS, Conseillère,
Mme DELAUBIER, Conseillère,
DÉBATS : A l'audience publique du 19 mars 2024
GREFFIER : Mme COLLET
ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 25 Juin 2024 par prorogation du délibéré initialement fixé au 4 Juin 2024 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier
* * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [Y] [Z] et son épouse Mme [J] [W] ont fait construire une maison d'habitation à ossature en bois sur la commune de [Localité 10].
La maîtrise d'oeuvre des travaux a été confiée à M. [K] [R] et le lot n°3 'charpente bois' à la société à responsabilité limitée (sarl) [V] [X].
Le matériau de bardage en bois (clins) posé par la sarl [V] [X] a été acquis auprès d'un grossiste en matériaux de construction, la société Bois & Matériaux exerçant sous l'enseigne 'Réseau Pro [Localité 6]', qui s'est lui-même approvisionné auprès de la société Pbm Import exerçant sous l'enseigne 'Silverwood'. Ce fabricant offre une garantie de dix ans (à compter de la date d'achat du bardage fini par le poseur ou le client final) au titre du bon aspect et de la bonne tenue du système de finition préconisé et appliqué par Silverwood en usine (peinture acrylique microporeuse).
Les travaux ont été réceptionnés le 7 novembre 2008 sans réserve.
Suite à l'apparition de défauts sur les clins constatés par les époux [Z] début 2010, la société [V] [X] s'est adressée à son fournisseur par courrier du 21 février 2010. La société Pbm Import s'est rendue sur place le 23 mars 2011 confirmant aux époux [Z] 'la dégradation prématurée du bardage Extrawood natur ton sable' par lettre du 1er avril 2011.
Du 16 au 31 juillet 2012, la société Pbm Import a fait intervenir la société Emeraude Peinture chez M. et Mme [Z] à l'effet d'exécuter des travaux de reprise.
Par courrier du 22 mars 2014, M. et Mme [Z] ont avisé M. [R] de la réapparition des désordres.
La société Bois & Matériaux (réseau Pro [Localité 6]) a adressé une réclamation à la société Pbm Import qui lui a répondu le 25 mars 2014 en faisant état d'une 'non-conformité dans la mise en oeuvre à l'origine de la nouvelle dégradation anormale du bardage'.
Une mesure d'expertise amiable a été diligentée par l'assureur protection juridique de M. et Mme [Z]. Le Cabinet Sde Expertises mandaté à cette fin a rendu son rapport le 12 novembre 2014, complété par trois autres rapports établis les 21 mai et 6 août 2015, et 8 janvier 2016.
A défaut d'accord amiable, les époux [Z] ont sollicité et obtenu du juge des référés du tribunal de grande instance de Caen une expertise judiciaire confiée à M. [I] [M] au contradictoire de M. [R], la Sarl [V] [X], la société par actions simplifiée (sas) Isb France intervenant au lieu et place de la société Pbm Import Silverwood, la sarl Pépinières Conseil et la société Groupama Centre Manche en qualité d'assureur en responsabilité civile de cette dernière (ordonnance du 7 juillet 2016).
Le 8 juin 2017, à la demande de la société Isb France, les opérations d'expertise confiées à M. [M] ont été déclarées communes et opposables à la société Emeraude Peinture.
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 19 décembre 2017.
Par actes des 12 et 18 décembre 2018, M. et Mme [Z] ont assigné M. [R], la société [V] [X] et la société Isb France devant le tribunal de grande instance de Caen aux fins d'être indemnisés du préjudice subi.
Par jugement du 25 mai 2021 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal judiciaire de Caen a :
- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la société Isb France ;
- débouté M. et Mme [Z] de toutes leurs prétentions dirigées contre la société Isb France, M. [R] et la société [V] [X] ;
- débouté la société Isb France, M. [R] et la société [V] [X] de leur demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné solidairement M. et Mme [Z] aux entiers dépens, lesquels comprendront les frais d'instance en référé ayant donné lieu à l'ordonnance de référé du 7 juillet 2016 et de l'instance aux fond, outre les frais de l'expertise judiciaire effectuée par M. [M] ;
- dit que la société Isb France conservera en revanche à sa charge les frais de l'instance en référé
ayant donné lieu à l'ordonnance de référé du 8 juin 2017 ;
- accordé à la Scp Ferretti Hurel et à la Selas Fidal intervenant par Me Carrera le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
- débouté M. [R] de sa demande tendant à la condamnation de M. et Mme [Z] à lui payer le montant des sommes retenues par huissier chargé de l'exécution forcée au titre de l'article 10 du décret du 12 décembre 1996 portant fixation du tarif des huissiers de justice en matière civile et commerciale ;
- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire ;
- débouté les parties leurs demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration du 14 juin 2021, M. et Mme [Z] ont formé appel de ce jugement.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 24 août 2022, M. et Mme [Z] demandent à la cour de :
A titre principal,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Caen en date du 25 mai 2021 en ce qu'il :
* les a déboutés de toutes leurs prétentions dirigées contre la société Isb France, M. [R] et la société [V] [X] ;
* les a condamnés solidairement aux entiers dépens, lesquels comprendront les frais de l'instance en référé ayant donné lieu à l'ordonnance de référé du 7 juillet 2016 et de la présente instance au fond, outre les frais de l'expertise judiciaire effectuée par M. [M] ;
* a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
- déclarer qu'ils sont recevables et bien fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions ;
- juger que la clause d'exclusion de garantie ne leur est pas opposable ;
- juger que la société Isb France est tenue à son obligation contractuelle de garantie envers eux ;
- juger que la société Isb France a manqué à son obligation de délivrance conforme ;
En conséquence,
- condamner la société Isb France, la société [X] et M. [R] à leur verser la somme de 47 370 euros HT au titre du coût des travaux de reprise ;
- rejeter toutes les demandes, fins et conclusions contraires aux présentes ;
Subsidiairement,
- juger que la société [X] et M. [R] ont manqué à leurs obligations à leur égard ;
En conséquence,
- condamner la société [X] et M. [R] à leur verser la somme de 47 370 euros HT au titre du coût des travaux de reprise ;
En toute hypothèse,
- condamner solidairement la société Isb France, la société [X] et M. [R] à leur verser la somme de 3 000 euros au titre de leur préjudice moral ;
- condamner solidairement la société Isb France, la société [X] et M. [R] à leur verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner solidairement la société Isb France, la société [X] et M. [R] aux entiers dépens, dont les frais d'expertise judiciaire taxés à hauteur de 8 269,94 euros et de référé dont distraction au profit de Me Chanut selon application de l'article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de leur appel, les époux [Z] font valoir qu'ils sont recevables et bien fondés en leur action engagée à l'encontre du fabricant des clins, la société Isb France, tenue à leur égard de la garantie contractuelle de dix ans au titre de la bonne tenue du bardage.
Ils prétendent à cet effet que :
- leur action n'est pas prescrite en application de l'article L110-4 du code de commerce dans sa rédaction postérieure au 17 juin 2008, alors que les travaux comportant la pose du bardage ont été réceptionnés le 7 novembre 2008, que société Isb France, dans le respect de son obligation de garantie, est intervenue sur le bardage en juillet 2012 et qu'à la suite de nouveaux désordres apparus en 2014, celle-ci a été assignée en référé-expertise en mai 2016, soit dans le délai de 5 ans prévu à l'article précité ;
- il n'y a pas lieu de réduire le délai de garantie de dix ans à deux ans, ni de retenir une quelconque clause limitative de garantie alors que le fabricant a toujours admis sans réserve sa garantie à leur égard, que les non-conformités au DTU visées dans la clause exclusive de garantie n'ont pas de lien avec le dommage dont le bardage est affecté, que le contrat de garantie applicable au litige n'est pas communiqué de sorte qu'aucune clause d'exclusion existante ne saurait être appliquée et qu'enfin, les exclusions dont se prévaut la société Isb France ne leur sont pas opposables à défaut d'avoir été portées à leur connaissance.
M. et Mme [Z] prétendent encore que la société Isb France a manqué à son obligation de délivrance conforme sur le fondement de l'article 1604 du code civil, alors que l'absence de conformité du bardage livré avec celui commandé ne fait aucun doute au regard des anomalies qui ont été constatées par l'expert judiciaire.
Subsidiairement, si la cour confirmait le jugement en ce qu'il a jugé que les exclusions de garantie devaient s'appliquer, les appelants considèrent que la responsabilité du maître d'oeuvre et du poseur doit être retenue dès lors que la pose du bardage par la société [V] [X] sous la maîtrise d'oeuvre de M. [R] n'a pas été réalisée conformément au DTU applicable et que ces non-conformités sont précisément à l'origine de l'exclusion de garantie qui serait appliquée.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 2 mai 2022, la société Isb France demande à la cour de :
A titre principal,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
A titre subsidiaire, si la cour réformait le jugement du fait de l'inapplication de la clause
d'exclusion de garantie pour les non-conformités au DTU, réformer le jugement,
Statuant à nouveau,
à titre principal,
- dire que l'action de M. et Mme [Z] est prescrite ;
à titre subsidiaire,
- débouter M. et Mme [Z] de leurs demandes ;
- débouter la société [V] [X] et M. [R] de leurs demandes à son encontre ;
- débouter M. [R] de ses demandes à son encontre ;
à titre infiniment subsidiaire,
- désigner tel expert qu'il plaira au tribunal de désigner ;
- dire que la mission de l'expert sera la suivante :
* examiner les désordres,
* en déterminer la date d'apparition et les causes de toutes nature,
* s'expliquer sur les fautes de conception ou d'exécution commises et les responsabilités encourues,
* dire si le bardage présente un défaut ou une non conformité,
* dire si les désordres étaient visibles à la réception et s'ils ont fait l'objet de réserves,
* dire s'ils affectent l'ouvrage ou l'un de ses éléments d'équipement,
* dire si les désordres sont de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ou à porter atteinte à sa solidité,
* décrire les travaux nécessaires à leur réparation, les chiffrer à l'aide de devis et chiffrer le cas échéant la moins-value causée par les désordres à l'immeuble,
* fournir les éléments au tribunal permettant d'établir les responsabilités,
* s'expliquer sur toutes causes de préjudice,
* recueillir les observations des parties et y répondre,
* établir un pré-rapport,
* le cas échéant permettre au demandeur la prise de mesures conservatoires,
* le cas échéant permettre aux parties de se rapprocher si elles souhaitent mettre un terme au litige par la voie d'un protocole transactionnel ;
en toute hypothèse,
- dire que la société [V] [X] devra la garantir de toutes les condamnations qui seront prononcées à son encontre ;
- dire que les sommes qui pourraient être mises à sa charge ne sauraient excéder 10 350 euros hors-taxes ;
- condamner tout succombant à lui verser la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner tout succombant aux entiers dépens.
La société Isb France critique le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir qu'elle avait soulevée alors que les demandes formées par les époux [Z] formées au titre de la garantie contractuelle de bonne tenue comme de l'obligation de délivrance conforme sont prescrites.
S'agissant de la première, elle fait valoir que suite à la reprise effectuée, une garantie de deux ans s'est substituée à celle de 10 ans accordée initialement et qu'il convient de distinguer les désordres survenus chronologiquement lesquels sont indépendants les uns des autres.
S'agissant de la seconde, elle relève que les époux [Z] n'ont aucun lien contractuel avec le fabricant, que le délai de cinq ans de l'article L110-4 du code de commerce a pour point de départ la vente intervenue courant 2008 et qu'en conséquence, les appelants étaient prescrits en engageant leur action en mai 2016.
En tout état de cause, l'intimée se prévaut de la clause exclusive de garantie contractuelle relative aux défauts de ventilation constatés en l'occurrence par l'expert judiciaire, peu important l'absence de tout lien avec le dommage survenu. Elle conteste avoir toujours assuré aux époux [Z] qu'ils bénéficiaient de la garantie contractuelle de 10 ans et affirme que la clause d'exclusion litigieuse leur est opposable, le contrat de garantie existant et applicable au moment de la réalisation de la garantie commerciale offerte à l'acheteur ayant été mis à disposition de son cocontractant, la société Bois & Matériaux ayant pour enseigne Réseau pro, tel que prévu au contrat.
Enfin, à titre infiniment subsidiaire, elle souligne la faute prépondérante commise par la société [V] [X] qui n'a pas posé de ventilations conformément aux normes DTU 41.2 alors que la déformation des lames révèle sans équivoque que ce défaut d'exécution est la cause de l'apparition de l'humidité anormale derrière les lames et que plus généralement, la cause des désordres sur ce type de bardage relève systématiquement d'un défaut de ventilation. Estimant que l'expert a failli dans sa mission en écartant cette cause évidente des désordres, elle sollicite une nouvelle expertise afin de pouvoir déterminer avec certitude la nature et les causes exactes des désordres.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 1er mars 2022, M. [R] demande à la cour de :
A titre principal,
- confirmer le jugement dont appel sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
statuant à nouveau,
- sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, condamner M. et Mme [Z] et la société Isb France à lui payer la somme de 3 000 euros ;
- débouter M. et Mme [Z], la société Isb France et la société [V] [X] de leurs demandes à son encontre ;
A titre subsidiaire,
- limiter sa part de responsabilité éventuelle à hauteur de 8% des désordres en cause, soit à la somme de 3 690 euros au titre des travaux réparatoires ;
- lui accorder recours et garantie intégrale à l'encontre des sociétés [V] [X] et Isb France;
- débouter les sociétés Isb France et [V] [X] de leurs appels en garantie à son encontre ;
- débouter la société Isb France de sa demande d'expertise judiciaire ;
En tout état de cause,
- sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile, condamner solidairement
M. et Mme [Z] et la société Isb France aux entiers dépens ;
- sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, condamner M. et Mme [Z] et la société Isb France à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles qu'il s'est trouvé contraint d'exposer en cause d'appel.
M. [R] fait valoir que la société Isb France, seule responsable des désordres, est débitrice d'une garantie contractuelle à l'égard des époux [Z] alors que la société [V] [X], pour sa part, est débitrice à l'égard des maîtres d'ouvrage d'une obligation de résultat en matière de non-conformité de la mise en oeuvre du bardage au regard des prescriptions du DTU 41.2. Il rappelle en outre qu'il n'est pas intervenu dans le cadre des travaux de reprise de sorte qu'aucune condamnation in solidum ne peut être prononcée à son encontre.
Subsidiairement, dans l'hypothèse où sa responsabilité serait retenue, il demande à ce que sa part soit limitée à 8% tel que conclu par l'expert judiciaire.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 5 janvier 2022, la société [V] [X] demande à la cour, à titre principal, de confirmer le jugement dont appel sauf en ce qu'elle a été déboutée de sa demande indemnitaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau, de condamner M. et Mme [Z] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, à titre subsidiaire, de :
- dire n'y avoir lieu à condamnation solidaire entre elle et les autres intervenants concernés ;
- dire que les condamnations prononcées à son encontre ne pourront excéder la somme de 2 460,40 euros au titre du coût de réfection des désordres ;
- débouter M. et Mme [Z] du surplus de leurs demandes à son encontre au titre des travaux de reprise ;
- débouter M. et Mme [Z] de leurs réclamations au titre du préjudice moral ;
- juger que toute condamnation prononcée à son encontre pour les préjudices complémentaires, frais et accessoires, devra l'être dans la limite de 5 % et sans condamnation solidaire ;
- condamner la société Isb France et M. [R] à la garantir de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre ;
- débouter la société Isb France de son recours en garantie à son encontre et de son appel incident ;
- débouter la société Isb France de sa demande d'expertise judiciaire ;
- débouter M. [R] de son recours en garantie subsidiaire à son encontre ;
En toute hypothèse,
- condamner M. et Mme [Z] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles en appel ;
- condamner M. et Mme [Z] aux dépens.
La société [V] [X] affirme que sa responsabilité ne saurait être retenue dès lors que l'expert judiciaire a établi que les non-conformités au DTU n'avaient aucun lien avec les dommages affectant le bardage. Au surplus, elle relève que lors des travaux de reprise, la société Isb France a accepté sans réserve les supports pour mettre en application le film protecteur selon une solution réparatoire définie par ses seuls soins sans concertation avec les autres intervenants.
L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 21 février 2024.
Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
- Sur le rapport d'expertise et les désordres :
Au regard des divers éléments recueillis et constatations opérées, l'expert judiciaire a relevé que :
- les travaux réceptionnés par les époux [Z] le 7 novembre 2008 sans réserve portaient sur un bardage en clins en sapin du nord recevant une finition par peinture acrylique microporeuse dont la bonne tenue était garantie 10 ans par le fabricant, soit la société Pbm Import, devenue société Isb France ;
- suite à des désordres par apparition d'un phénomène fongique dans et à l'arrière de la peinture des lames originelles en 2011, la société Pbm Import a fait réaliser en juillet 2012 ce, de façon unilatérale, sans participation des constructeurs, une campagne de réparation par ponçage généralisé des lames et application d'une lasure in situ ;
- en mars 2014, de nouveaux désordres par décollement et disparition de la lasure des clins sont constatés au droit des nouvelles réparations notamment en façade ouest.
L'expert a conclu que :
- la lasure alléguée mise en oeuvre en 2012 suite à l'opération de ponçage généralisée au grain fin des clins s'apparentait plus à un vernis qu'à une lasure (laquelle par définition pénètre le bois pour le protéger contre l'humidité) : la réalisation en 2012 sur des clins poncés et époussetés d'une peinture d'apprêt dite 'bouche-pores' à la qualité d'un 'fond dur' a permis d'égaliser les surfaces et de minimiser la quantité de vernis mais a empêché aussi l'apprêt final d'être absorbé par le support bois ; l'apprêt de finition a la qualité d'un vernis et non d'une lasure puisque l'apprêt est filmogène et ne pénètre pas le bois ;
- la couche protectrice filmogène se décolle puis se détache des clins au droit de l'arrête arrondie ainsi que parfois en partie courante et lorsqu'elle a été appliquée sur d'autres bois (charpente en lamellé collé et sur les habillages verticaux) ;
- c'est l'action des pluies et du rayonnement UV qui détériore le film protecteur (ce qui est courant pour les films de type vernis ou si la lasure a été appliquée sur un support non dépoussiéré), d'où les atteintes principales localisées en pans sud et ouest non abrités ;
- les non-conformités de ventilation constatées en pied et en tête de bardage commises lors de l'opération de travaux courant 2008 ne sont pas à l'origine du phénomène de détérioration du film protecteur appliqué en 2012 ;
- ces non-conformités n'étaient pas davantage à l'origine des premiers phénomènes fongiques au droit des clins puisqu'au droit du cabanon, il est mis en évidence que les clins silverwood natur provenant d'autres colis que ceux mis en oeuvre sur la maison, sans ventilation en pied comme en tête, ne sont pas altérés par le phénomène fongique ; il s'agissait donc d'un défaut originel quant à la qualité du bois mis en oeuvre et qui a insuffisamment fait l'objet d'un traitement fongicide approprié avant sortie d'usine ;
- la société Pbm Import est intervenue hors les autres constructeurs en toute connaissance des supports et de leurs insuffisances en terme de ventilation (non-conformité appréciée comme n'étant pas à l'origine des désordres).
M. [M] considère en définitive que la prestation résultant des travaux réparatoires n'est pas conforme à la qualité du bardage en sortie d'usine garantie 10 ans, mais s'apparente à un travail de peinture filmogène à renouveler tous les 2 ou 3 ans en fonction de la détérioration du film. Il ajoute que selon lui, ce n'est pas cette qualité de prestation qui a été retenue au contractuel par le maître d'oeuvre et le maître d'ouvrage, non sachant, lequel n'a pas été informé de la qualité inférieure de finition des bardages induite par les travaux préparatoires.
Il estime que la seule solution réparatoire consiste dans le remplacement à neuf des clins au profit de nouveaux sortis d'usine sous les mêmes garanties et précise qu'il convenait de 'faire ressortir du quantum la prise en charge des ventilations basses et hautes manquantes actuellement'.
Il retient en conséquence que la société Isb France doit prendre en charge la totalité des travaux réparatoires diminuée des prestations de tôlerie (ventilations) qu'il impute pour 60% à l'architecte concepteur et pour 40% à la société [V] [X].
Au vu de ces éléments, il convient d'examiner les demandes formées par les époux [Z] à l'encontre des différents intervenants selon le fondement juridique invoqué au soutien de leurs demandes.
- Sur les demandes formées par les époux [Z] à l'encontre de société Isb France venant aux droits de la société Pbm Import :
Il est acquis aux débats que le bardage en clins en sapin du nord posé par la société [V] [X] et réceptionné le 7 novembre 2008 par les époux [Z] était assorti d'une garantie contractuelle de 10 ans offerte par le fabricant des clins au titre d'un 'contrat de garantie bardage couleur Silverwood' ayant pour objet de garantir le bon aspect et la bonne tenue du système de finition préconisé et appliqué par Silverwood, la société Isb France refusant sa garantie aux appelants en invoquant l'application d'une clause exclusive insérée au contrat de garantie.
Toutes les parties sollicitent à titre principal la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré que l'action engagée par les époux [Z] n'était pas prescrite, la fin de non-recevoir tirée de la prescription étant soulevée en cause d'appel à titre subsidiaire par la société Isb France 'si la cour réformait le jugement du fait de l'inapplication de la clause d'exclusion de garantie pour les non-conformités au DTU'.
Liminairement sur la clause d'exclusion de garantie :
Vu l'article 1353 alinéa 2 du code civil,
Le premier juge a considéré à la lecture du contrat de garantie produit par le fabricant prévoyant une exclusion de garantie en cas de non-respect des normes en vigueur et notamment du DTU 41.2, et à l'examen des rapports d'expertise amiable et judiciaire ayant constaté le non-respect du DTU 41.2 de juillet 1996 et l'existence de non-conformités de ventilation en partie basse et en partie haute du bardage, que l'exclusion de garantie devait s'appliquer, après avoir relevé que son opposabilité n'avait pas été contestée.
En cause d'appel, les époux [Z] entendent contester tant l'existence d'une clause d'exclusion de garantie applicable alors que le contrat de garantie produit par la société Isb France n'est valable que 'à compter du 1er novembre 2016 et jusqu'à la date de la nouvelle version', que son opposabilité à leur égard dès lors qu'elle n'a pas été portée à leur connaissance.
Le marché de travaux conclu par les époux [Z] avec la société [V] [X] qui a posé le bardage a été signé le 15 février 2008 sur la base d'un devis signé le même jour et établi le 13 décembre 2007. La facture correspondante de la société [V] [X], comme la facture d'achat des clins par le poseur à la société Bois & Matériaux (Réseau pro [Localité 6]), et enfin la facture d'achat établie par la société Ibm Import au nom du fournisseur ne sont pas produites aux débats par les parties.
Dans son courrier adressé le 21 février 2010 à 'réseau Pro [Localité 6]', la société [V] [X] s'est référé à la facture 'réseau Pro' correspondante F N° 00135293 du 30 juin 2008.
Les travaux ont été accomplis courant 2008 pour être réceptionnés le 7 novembre 2008.
Il résulte de ces éléments que les clins litigieux avaient été acquis par la société Bois & Matériaux 'réseau Pro [Localité 6]' auprès de la société Imp Import antérieurement à la date du 30 juin 2008.
Or, la société Isb France, qui se prévaut d'une clause d'exclusion de garantie en cas de non-conformités au DTU, ne rapporte pas la preuve de sa prévision contractuelle à la date du 30 juin 2008 opposable aux époux [Z] au regard des éléments qu'elle communique en ce que :
- le premier document intitulé 'contrat de garantie bardage couleur silverwood' (sa pièce n°6) qui stipule en qualité de bénéficiaires 'toute personne physique ou morale, cliente de Silverwwod' n'est pas nominatif et comporte en bas de page l'indication suivante : 'attestation de garantie bardage massif couleur silverwood, valable à compter du 1er novembre 2016 et jusqu'à la date de sa nouvelle version'.
Ce contrat de garantie 'type' sur lequel se fonde la société Isb France pour se prévaloir de la clause d'exclusion de garantie est donc postérieur à l'achat et la pose des clins d'origine et ne peut dès lors être retenu pour attester d'une clause d'exclusion de garantie susceptible de s'appliquer au cas d'espèce ;
- le second intitulé 'certificat de garantie de la lasure de finition opaque des clins Extrawood et de finition semi transparente sur les lins natur' établi par la société Ibm Import avec pour bénéficiaire 'Réseau Pro [Localité 8]' vise un bon de livraison du 8 février 2010 et une facture n°317906 du 9 février 2010. Au vu de ces mentions, il est manifeste que ce certificat ne peut concerner les clins acquis et posés précédemment, en 2008, chez les époux [Z] ni s'appliquer pour la période ayant suivi les travaux de reprise, lesquels ont été effectués sur les clins en juillet 2012, sans remplacement des clins d'origine ce, alors que la société [V] [X] ne s'est rapprochée de la société Bois & Matériaux (réseau Pro [Localité 6]) pour informer son fournisseur des premiers désordres survenus qu'à compter du 21 février 2010. Aucun élément n'atteste en conséquence que ce certificat de garantie concerne le présent litige.
Enfin, si la société Isb France produit les conditions particulières du 'contrat d'assurance 'garanties contractuelles' bonne tenue' du 9 février 2005 conclu avec son assureur la compagnie Axa, renouvelable par tacite reconduction, et dont les bénéficiaires de la garantie indiqués sont : 'l'assuré, le maître d'ouvrage ou le propriétaire des ouvrages dans lesquels sont incorporés les éléments garantie', l'article VI point 6.13 énonce l'exclusion suivante : 'les dommages dus à un non-respect des règles de l'art dans la pose du produit fini (prescriptions particulières de montage émanant de l'assuré et / ou recommandations techniques du DTU 41.2)'.
Il en résulte que l'exclusion de garantie visée par ce contrat d'assurance exige pour être appliquée que le non-respect des règles de l'art et normes énoncées (recommandations techniques du DTU 41.2) soit la cause des dommages survenus.
Or, le rapport d'expertise dont les conclusions ont été rappelées établit que les non-conformités de ventilation constatées en pied et en tête de bardage réalisées lors de l'opération de travaux courant 2008 ne sont pas à l'origine du phénomène de détérioration du film protecteur appliqué en 2012 ni la cause des premiers phénomènes fongiques survenus début 2010.
Contrairement à ce que soutient la société Isb France, l'expert judiciaire ne s'est pas limité à procéder par affirmation sans expliquer les causes des désordres successifs alors que la simple comparaison des clins affectés avec ceux non altérés provenant d'autres colis, posés au droit du cabanon ce, dans les mêmes conditions, à savoir sans ventilation en pied comme en tête, permettait de confirmer le défaut originel quant à la qualité du bois mis en oeuvre et l'insuffisance du traitement fongicide approprié avant sortie d'usine.
En réponse au dire n°6 de la société Isb France faisant état d'une aggravation des désordres marquée par la déformation des larmes en forme concave et révélant l'humidité anormale derrière les lames résultant du défaut de ventilation, l'expert a confirmé que l'origine des désordres par altération de l'apprêt de finition résidait dans l'application d'un vernis sur fond dur longuement expliquée, et non la non-conformité alléguée.
Ainsi, les rapports d'expertise amiables concluant à un défaut de conception non corrigé en cours de chantier à l'origine des désordres ne sont pas de nature à remettre en cause utilement l'avis de l'expert judiciaire sur ce point.
De surcroît, pour remettre en cause le rapport d'expertise judiciaire et solliciter une nouvelle expertise, la société Isb France ne saurait utilement se reporter à des généralités non documentées en affirmant qu'en cas de désordres sur ce type de bardage, l'élément en cause est toujours le défaut de ventilation, ni invoquer un autre cas d'espèce qui par hypothèse ne concerne pas les mêmes clins, ni même critiquer l'absence d'analyse en laboratoire des clins altérés alors que l'expert a pu déterminer la cause des désordres sans y recourir et qu'une telle analyse ne lui a pas été demandée au cours des opérations d'expertise.
Il en résulte que la société Isb France ne rapporte pas la preuve d'une clause d'exclusion de garantie stipulée l'égard de la société Bois & Matériaux 'réseau Pro [Localité 6]' en cas de non-respect des règles de l'art dans la pose du produit fini même en l'absence de lien avec les dommages survenus, ni a fortiori celle de son opposabilité alors que le fabricant n'établit pas sa connaissance par le fournisseur par 'mise à disposition du contrat de garantie' telle qu'alléguée.
Enfin, et en tout état de cause, les époux [Z], qui ne sont pas contractuellement engagés avec le fournisseur, n'ont pas été destinataires d'un quelconque document les informant de la clause d'exclusion alléguée, de sorte que même à retenir l'existence d'une clause d'exclusion stipulée au contrat de garantie, celle-ci ne leur serait pas opposable.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
- Sur la prescription :
Selon l'article 2224 du même code, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
L'article L. 110-4 du code de commerce dispose que les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.
La garantie contractuelle de 10 ans offerte par leur fabricant, la société Pbm Import, constitue un accessoire aux clins vendus par la société Pbm Import à la société Bois & Matériaux ayant pour enseigne Réseau pro, revendus à la société [V] [X].
Le sous-acquéreur jouit de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à son auteur.
Les époux [Z] font valoir à titre principal que la société Pbm Import devait appliquer sa garantie contractuelle de 10 ans dont ils bénéficiaient, qu'à ce titre, celle-ci est intervenue sur le bardage en juillet 2012 dans les conditions de mise en oeuvre de sa garantie, mais qu'à la suite de nouveaux désordres apparus en 2014 et de son refus de prise en charge, celle-ci a été assignée en référé-expertise en mai 2016, soit dans le délai de 5 ans prévu à l'article précité.
De fait, par courrier du 1er avril 2011, la société Pbm Import a informé les époux [Z] que suite à son passage du 23 mars 2011 avec l'entreprise [X], elle confirmait 'le constat d'une dégradation prématurée de leur bardage' et que 'ce type de dégradations étant prise en charge dans le cadre de notre garantie 10 ans, la société Silverwood s'engage à reprendre en peinture votre bardage'.
Les travaux réparatoires ont été réalisés du 16 au 31 juillet 2012 par la société Emeraude Peinture à la demande de la société Ibm Import et selon les prescriptions du fabricant.
La société Ibm Import prétend qu'au regard de ces travaux ayant emporté une modification de finition opérée, une garantie de deux ans se serait substituée à la garantie de 10 ans.
Le tribunal avait relevé toutefois que selon le contrat de garantie de bon aspect et de bonne tenue de finition communiqué par la société Isb France elle-même, 'pour que la garantie continue à s'appliquer aux parties rénovées pour la durée restante, la rénovation devra être faite par un peintre agréé et selon le procédé Silverwood au cas par cas' de sorte que le fabricant n'était pas fondé à se prévaloir d'un prétendu basculement d'une garantie de 10 à 2 ans.
De fait, la substitution de garantie alléguée ne résulte d'aucun document contractuel. Au surplus, il n'est pas contesté que les époux [Z] n'ont pas même été informés du changement de garantie invoqué et le document par lequel ces derniers ont accepté les travaux réparatoires ne contient aucune indication sur ce point.
Au demeurant, dans son dire n°1, la société Ibm Import affirmait que 'la lasure qui devait être appliquée sur les façades de M. et Mme [Z] était garantie 10 ans, tout comme les clins usinés. Il s'agit d'une garantie de bonne tenue concernant les finitions du bardage et notamment les lasures.'
Il en résulte que la société Isb France n'est pas plus fondée en cause d'appel qu'en première instance à se prévaloir d'une substitution d'une garantie de 2 ans à sa garantie de 10 ans du fait de son intervention, laquelle devait être maintenue jusqu'en 2018, nonobstant les travaux exécutés par la société Emeraude peinture en 2012, ainsi que l'a parfaitement considéré le tribunal.
Il est constant qu'après réalisation des travaux de reprise du 16 au 31 juillet 2012, de nouveaux dommages sont apparus en mars 2014, soit dans le délai de garantie de 10 ans.
Or, l'action engagée par les époux [Z] à l'encontre du fabricant tend principalement à sa condamnation au paiement des travaux de reprise du bardage dont les dégradations apparues en mars 2014 font suite aux travaux réparatoires exécutés en juillet 2012 et dont la prestation a été considérée par l'expert non conforme à la qualité du bardage en sortie d'usine garantie 10 ans.
Dès lors, il doit être constaté que l'assignation en référé expertise délivrée par les époux [Z] le 4 mais 2016, soit dans les cinq ans du fait dommageable survenu en mars 2014, a interrompu le délai de prescription de l'article L. 110-4 précité en application des articles 2241 et 2231 du code civil de sorte que l'action engagée au fond par acte du 12 décembre 2018, soit dans le délai quinquennal susvisé, n'est pas prescrite.
Le jugement sera en conséquence confirmé de ce chef.
- Sur l'indemnisation des époux [Z] :
En l'absence de toute cause d'exclusion applicable et opposable aux époux [Z], la société Isb France devait sa garantie de bon aspect et de bonne tenue du système de finition qu'elle avait appliqué en usine.
Il ressort des conclusions du rapport d'expertise judiciaire retenues par la cour, que si celle-ci est intervenue en 2012 dans le cadre de sa garantie alors que M. [M] a mis en exergue le défaut originel des clins fournis, elle a fait procéder à des travaux de reprise dont la prestation (peinture filmogène à renouveler tous les 2 ou 3 ans en fonction de la détérioration du film) correspondait à une qualité inférieure de finition à celle prévue initialement et garantie, à l'origine des nouveaux désordres constatés (décollement et disparition de la lasure des clins constatés au droit des nouvelles réparations), étant ajouté que l'intervention a eu lieu sur un support non-conforme aux règles de l'art qui a été accepté.
Il sera rappelé que l'expertise a révélé que le film de protection des clins mis en oeuvre en 2012 ne résistait pas sur les parties de façades soumises aux intempéries et aux UV alors que le process
de réparation (pose d'une peinture d'apprêt à la qualité d'un 'fond dur' ayant empêché l'apprêt final -qualifié de vernis- d'être absorbé par le support bois) n'avait pas permis la pénétration effective de la lasure dans le bois.
L'expert a considéré que la dégradation du film de protection actuelle ne pouvait ainsi assurer la préservation du bois garantie par la finition originelle sortie d'usine de sorte que le remplacement à neuf des clins au profit de nouveaux sortis d'usine sous même garantie s'imposait.
Il en résulte que la société Isb France doit indemniser les époux [Z] des préjudices subis au titre de la garantie de 10 ans dont elle est redevable et portant sur la bonne tenue et le bon aspect de la finition des clins assurée en usine, alors que travaux réparatoires accomplis en 2012 sont à l'origine d'une finition de qualité inférieure à celle réalisée en usine (objet de la garantie) et la cause des désordres survenus en 2014 dont elle doit être considérée responsable.
Le montant des travaux réparatoires correspondant à la seule fourniture et pose d'un nouveau bardage a été chiffré par l'expert à la somme de 41 220 euros HT. Ce montant exclut le coût des travaux de mise en conformité au DTU 41.2. (6 150 euros) et il n'y a pas lieu d'exclure les postes contestés par la société Isb France dont l'expert a considéré qu'ils se rattachaient au nécessaire remplacement des clins garantis.
En revanche, aucun motif ne justifie la condamnation du fabricant au paiement des travaux propres à remédier à la non-conformité au DTU 41.2 (ventilations) à laquelle celui-ci est étranger et qui n'a pas été considérée à l'origine des désordres par l'expert judiciaire.
Les époux [Z] seront en conséquence déboutés du surplus de leur demande (6 150 euros) formée à son encontre.
Enfin, le préjudice moral des époux [Z] qui subissent les dégradations de leur bardage depuis 2010, et ont supporté, après reconnaissance du fabricant de sa garantie, l'exécution de travaux de réparatoires leur assurant une prestation de qualité inférieure non conforme à la garantie offerte et suivie de l'apparition de nouveaux désordres, des années d'expertise amiable puis judiciaire sans qu'une solution amiable ne puisse aboutir, doit être indemnisé par l'allocation d'une somme de 2000 euros à titre de dommages et intérêts.
- Sur les demandes formées à l'encontre de M. [R] et de la société [V] [X] :
Il a été mis en évidence que les non-conformités de ventilation constatées en pied et en tête de bardage réalisées lors de l'opération de travaux courant 2008 ne sont pas à l'origine du phénomène de détérioration du film protecteur appliqué en 2012, ni la cause des premiers phénomènes fongiques.
En conséquence, en l'absence de désordres imputables à la non-conformité de la pose du bardage, M. et Mme [Z] seront déboutés de leurs demandes de condamnation formées à l'encontre du poseur, la société [V] [X], et du maître d'oeuvre, M. [R], au titre du coût des travaux de reprise et de leur préjudice moral, étant précisé que ces derniers ne sont pas intervenus aux travaux de réparation à l'origine des désordres.
Il s'en suit que les recours en garantie formés d'une part, par la société [V] [X] à l'encontre de la société Isb France et M. [R] et d'autre part, par M. [R] à l'encontre des sociétés Isb France et [V] [X], sans objet, seront rejetés.
- Sur les demandes accessoires :
Le jugement doit être infirmé en ses dispositions relatives aux dépens.
La société Isb France, partie qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens de première instance en ce compris ceux de l'instance en référé et le coût de l'expertise judiciaire, et de la procédure d'appel.
La décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a débouté la société Isb France, la société [V] [X] et M. [R] de leur demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et infirmé en ce qu'elle a rejeté la demande présentée par les époux [Z] sur le même fondement.
Il est justifié de faire partiellement droit à la demande présentée par M. et Mme [Z] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner la société Isb France au paiement de la somme de 3 000 euros sur ce fondement, laquelle vaudra pour les frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel.
La société Isb France, qui succombe en appel, sera déboutée de sa demande formée sur ce même fondement. L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la société [V] [X] et de M. [R].
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement en ce qu'il a débouté M. [Y] [Z] et Mme [J] [Z] née [W] de toutes leurs prétentions dirigées contre la société Isb France en ce compris celle formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et les a condamnés aux entiers dépens ;
Le confirme pour le surplus des dispositions soumises à la cour ;
Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés et y ajoutant :
Rejette la demande d'expertise judiciaire présentée par la société Isb France ;
Condamne la société Isb France à payer à M. [Y] [Z] et Mme [J] [Z] née [W] la somme de 41 220 euros HT au titre du coût des travaux de reprise du bardage garanti ;
Condamne la société Isb France à payer à M. [Y] [Z] et Mme [J] [Z] née [W] la somme de 2000 euros au titre de leur préjudice moral ;
Déboute M. [Y] [Z] et Mme [J] [Z] née [W] du surplus de leurs demandes ;
Rejette la demande en garantie formée par la société Isb France à l'encontre de la société [V] [X] et M. [K] [R] ;
Condamne la société Isb France à payer à M. [Y] [Z] et Mme [J] [Z] née [W] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette les autres demandes formées sur le même fondement ;
Condamne la société Isb France aux entiers dépens de la procédure de première instance en ce compris ceux de l'instance en référé et le coût de l'expertise judiciaire, et de la procédure d'appel et autorise le conseil de M. [Y] [Z] et Mme [J] [Z] née [W] à les recouvrer directement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Rejette toutes les autres demandes des parties.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
M. COLLET G. GUIGUESSON