CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 20 juin 2024, n° 21/02061
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Entreprise (SAS)
Défendeur :
Baelz Automatic (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme. Renard
Conseiller :
Mme Ranoux-Julien
Avocats :
Me Vaillant, Me Meynard
La société Baelz Automatic exerce une activité de commerce de gros de fournitures et équipements industriels divers.
La société Entreprise [F] (la société [F]) exerce une activité de travaux d'installation d'équipements thermiques et de climatisation.
Dans le cadre de travaux confiés pour le compte du magasin Printemps [Adresse 5] situé à [Localité 6], la société [F] a commandé, le 31 mai 2016, auprès de la société Baelz Automatic divers équipements pour un montant de 77 000 euros HT soit 92 400 euros TTC.
La société [F], évoquant une livraison tardive et un défaut de conformité du matériel, a effectué un versement partiel de 75 600 euros, laissant un solde de 16 800 euros dont la société Baelz Automatic réclame le paiement.
La société Baelz Automatic a mis en demeure la société [F] le 2 avril 2019 et le 10 octobre 2019, de régler cette somme, en vain.
Par acte en date du 27 décembre 2019 la société Baelz Automatic a assigné la société Entreprise [F] devant le tribunal de commerce de Paris en paiement.
Par jugement en date du 21 décembre 2020, le tribunal de commerce de Paris a :
Condamné la société [F] à payer à la société Baelz Automatic la somme de 16 800 euros au titre du solde de la facture du 21 août 2016 augmentée des pénalités de retard égales à 1,3% par mois à compter du 31 octobre 2016 et l'a déboutée pour le surplus ;
Condamné la société [F] à payer à la société Baelz Automatic la somme de 40 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement ;
Débouté la société [F] de sa demande que la société Baelz Automatic soit condamnée à lui payer les sommes de 6 000 euros et 4 000 euros au titre de ses préjudices matériels et de 5 000 euros au titre de son préjudice moral ;
Condamné la société [F] à payer à la société Baelz Automatic la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et débouté la société [F] de sa propre demande de ce chef ;
Condamné la société [F] aux entiers dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 74,50 euros dont 12,20 euros de TVA ;
Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement, nonobstant appel et sans condition de garantie ;
Débouté les parties de toute demande autre, plus ample ou contraire.
Par déclaration du 29 janvier 2021, la société [F] a interjeté appel du jugement en toutes ses dispositions.
Par ses dernières conclusions, notifiées par RPVA le 24 avril 2021, la société [F], demande, au visa des articles 1103, 1217 et 1315 et suivants du code civil, de l'article 9 du code de procédure civile, de :
- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 21 décembre 2020 en toutes ses dispositions, en ce qu'il a :
- Condamné la société [F] à payer à la société Baelz Automatic la somme de 16 800 euros au titre du solde de la facture du 21 août 2016 augmentée des pénalités de retard égales à 1,3% par mois à compter du 31 octobre 2016 et l'a déboutée pour le surplus ;
- Condamné la société [F] à payer à la société Baelz Automatic la somme de 40 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement ;
- Débouté la société [F] de sa demande que la société Baelz Automatic soit condamnée à lui payer les sommes de 6 000 euros et 4 000 euros au titre de ses préjudices matériels et de 5 000 euros au titre de son préjudice moral ;
- Condamné la société [F] à payer à la société Baelz Automatic la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et débouté la société [F] de sa propre demande de ce chef ;
- Condamné la société [F] aux entiers dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 74,50 euros dont 12,20 euros de TVA ;
Et, statuant de nouveau,
- Débouter la société Baelz Automatic de l'intégralité de ses demandes ;
- Condamner la société Baelz Automatic à verser à la société [F] la somme de 6.000 euros au titre de son préjudice matériel causé par les retards de livraison et la non-conformité du matériel livré ;
- Condamner la société Baelz Automatic à verser à la société [F] la somme de 4 000 euros au titre de son préjudice matériel causé par les investigations et opérations de dépannages mises à la charge de la société [F] en raison du mauvais usinage des échangeurs livrés ;
- Condamner la société Baelz Automatic à verser à la société [F] la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral résultant de l'atteinte à l'image de la société du fait des manquements contractuels commis par la société Baelz Automatic ;
- condamner la société Baelz Automatic à payer à la société [F] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par ses dernières conclusions, notifiées par RPVA le 20 juillet 2021, la société Baelz Automatic, demande, au visa des articles 46 du code de procédure civile, des article 1103, 1104, 1193 et 1582 du code civil, des articles L. 441-10 et D. 441-5 du code de commerce, de :
- Confirmer le jugement rendu le 21 décembre 2020 rendu par le tribunal de commerce de Paris en toutes ses dispositions ;
- Débouter la société [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- Condamner la société [F] à payer à la société Baelz Automatic la somme complémentaire de 3 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
- Condamner la société [F] aux entiers dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 15 février 2024.
La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
Motivation
MOTIFS
Sur les demandes de la société [F]
Les dispositions de l'ordonnance du 10 février 2016, sont entrées en vigueur le 1er octobre 2016. Les contrats conclus avant cette date demeurent soumis à la loi ancienne. Le litige porte sur le paiement du solde d'une commande en date du 31 mai 2016, la facture ayant été émise le 31 août 2016. En conséquence, la loi antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 s'applique.
En application de l'article 1134 code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable à la cause, 'les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.'
En application de l'article 1315 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. Par ailleurs selon les articles 6 et 9 du code de procédure civile, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à fonder leurs prétentions et il leur incombe de prouver conformément à la loi les faits nécessaires à leur succès. L'article L.110-3 du code de commerce consacre le principe de la liberté de la preuve des actes de commerce à l'égard des commerçants.
Aux termes de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable à la cause, 'le débiteur est condamné, s'il y a lieu au paiement de dommages-intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation soit à raison du retard dans l'exécution''
La société [F] soutient que :
- La société Baelz Automatic aurait manqué à ses obligations contractuelles tenant au délai de livraison maximal de 8 semaines, en livrant le matériel au-delà dudit délai,
- Le matériel livré par la société Baelz Automatic n'aurait pas été conforme au bon de commande.
La société Baelz Automatic conteste ces allégations.
Le bon de commande en date du 31 mai 2016 prévoit une livraison le 30/07/2016 ce qui constitue un délai de deux mois sans précision cependant du caractère impératif de la date.
La société Baelz Automatic indique avoir procédé à la livraison des marchandises commandées par la société [F] le 9 août 2016, date indiquée sur la facture.
Il est versé un courrier recommandé de protestation en date du 3 octobre 2016 de la société [F] qui se plaint d'un retard de livraison de trois ou quatre semaines pour une partie de la commande et indique qu'elle va appliquer 'une réfaction sur la facture'.
Sur la facture, il est mentionné 'bon de livraison n°4445' du 09/08/2016', celui-ci n'étant pas produit. Seule la date de livraison est contestée. Sur la seconde page de la facture en fin de colonne 'désignation' il est mentionné 'livraison en direct de notre usine le 29/08/2016' suivie de la facture en date du 31 août 2016. En l'absence de bon de livraison, cette date de livraison sera retenue.
Contrairement à ce qu'invoque la société [F], la preuve n'est pas rapportée que la livraison a eu lieu en plusieurs fois. La société [F] précise que si la société Printemps, son donneur d'ordre, lui a appliqué des pénalités liées au retard de livraison, celles-ci ont été supprimées. Le retard de livraison d'un mois correspondant au mois de fermeture des entreprises est donc insuffisant pour justifier une réduction du montant de la facture. La société [F] ne démontre pas non plus qu'elle a été contrainte du fait d'un retard de livraison de jeter une part importante de tuyauteries préfabriquées ni de modifier celles-ci.
La société [F] se plaint d'un défaut d'usinage des échangeurs. Il est versé aux débats un constat d'avaries en date du 18 janvier 2017 établi à la suite de l'intervention de la société Baelz Automatic dans les locaux de la société [F] le 18 novembre 2016.
Il en résulte les constatations suivantes : 'les échangeurs horizontaux ne peuvent pas évacuer les condensats en gravitaire par rapport à la tuyauterie condensat générale et donc reste noyé.
Les sorties condensats sont surélevées les échangeurs restent noyés (le principe de vase communiquant).
Le montage des purgeurs est non conforme par rapport au repère et doit être monté correctement en respectant la documentation du fournisseur.'
La société [F] a fait valoir que l'échangeur en cause est celui qui a été signalé par la société Le Printemps le 29 juillet 2016 et décrit 'arrivée sur site abîmé'.
La société Baelz Automatic a proposé à la société [F] de réparer cet échangeur lors d'une intervention réalisée le 12 décembre 2016 puis le 5 janvier 2017.
Lors de ces interventions, la société Baelz Automatic a conclu : « le faisceau est bien passant, un dudgeonnage de quatre tubes est réalisé. Nous constatons que les tubes du dessus sont déformés et percés. Ceci est bien lié à un choc thermique (contact eau /vapeur).'
La société Baelz Automatic poursuit : « lors de la réparation, nous apprenons que l'autre échangeur aussi connait une avarie identique. Nous constatons aussi qu'une bâche est installée, permettant ainsi d'isoler le réseau condensat général de celui de l'installation mais malheureusement ne supprime pas le plan d'eau cause des chocs thermiques. Les purgeurs sont toujours mal installés.
Aucune modification hydraulique réalisée, la station est en peril.
Lors de la réparation, nous apprenons que l'autre échangeur aussi connaît une avarie. En date du 18 janvier 2017, nous apprenons que les deux échangeurs ne sont plus fonctionnels.'
La société Baelz Automatic est intervenue à la demande de la société [F] afin de tenter de remédier au dysfonctionnement des échangeurs mais fait valoir que l'installation n'a pas été réalisée correctement et que sa prestation s'est limitée à la fourniture du matériel.
La société [F] précise avoir dû pallier les carences constatées par des opérations de dépannage et des investigations qui ne sont justifiées par aucune pièce.
Au vu de ces éléments, la société [F] ne démontre pas que les dysfonctionnements constatés sur les échangeurs résultent d'un défaut de conformité de ceux-ci ni ne justifie de dépenses engagées pour y remédier. En conséquence, le jugement sera confirmé ce qu'il a rejeté ses demandes en réparation des préjudices matériels et moral.
Sur la demande de la société Baelz Automatic en paiement de la facture
La société Baelz Automatic verse aux débats une facture du 31 août 2016 d'un montant de 92 400 euros relative au matériel livré. Sur cette facture, un solde de 16 800 euros est demeuré impayé.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société [F] à payer à la société Baelz Automatic la somme 16 800 euros augmentée des pénalités de retard égales à 1,3 % par mois à compter du 31 octobre 2016, date d'exigibilité de la facture, ainsi que la somme de 40 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement.
Sur les demandes accessoires
Les dispositions de première instance relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.
La société [F] qui succombe sera condamnée aux dépens d'appel et devra verser à la société Baelz Automatic la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code deprocédure civile.
Dispositif
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Condamne la société Entreprise [F] à verser à la société Baelz Automatic la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Entreprise [F] aux dépens d'appel.