Décisions
CA Limoges, ch. civ., 26 juin 2024, n° 23/00303
LIMOGES
Arrêt
Autre
ARRET N°
N° RG 23/00303 - N° Portalis DBV6-V-B7H-BIN6P
AFFAIRE :
Mme [N] [J]
C/
M. [M] [K], Mme [T] [Z]
GS/LLS
Autres demandes relatives à un contrat de prestation de services
Grosse délivrée aux avocats
COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
---==oOo==---
ARRÊT DU 26 JUIN 2024
---==oOo==---
Le VINGT SIX JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE la Chambre civile de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :
ENTRE
Madame [N] [J]
née le 23 Avril 1988 à [Localité 3] ([Localité 3]),
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Michel LABROUSSE de la SCP D'AVOCATS MICHEL LABROUSSE - CELINE REGY - FRANCOIS ARMA ND & ASSOCIES, avocat au barreau de TULLE
APPELANTE d'une décision rendue le 06 MARS 2023 par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE TULLE
ET
Monsieur [M] [K]
né le 13 Janvier 1997 à [Localité 6],
demeurant [Adresse 1]
comparant, assisté de Me Emmanuel RAYNAL de la SELARL RAYNAL-DASSE, avocat postulant au barreau de LIMOGES et de Me Laura BARON, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE
Madame [T] [Z]
née le 30 Janvier 1989 à [Localité 7],
demeurant [Adresse 1]
comparante, assistée de Me Emmanuel RAYNAL de la SELARL RAYNAL-DASSE, avocat postulant au barreau de LIMOGES et de Me Laura BARON, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE
INTIMÉS
---==oO§Oo==---
Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 15 Mai 2024. L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 avril 2024.
Conformément aux dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile, Monsieur Gérard SOURY, Conseiller, magistrat rapporteur, assisté de Madame Laetitia LUZIO SIMOES, Greffier, a tenu seul l'audience au cours de laquelle il a été entendu en son rapport. Les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Après quoi, Monsieur Gérard SOURY, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 26 Juin 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
Au cours de ce délibéré, Monsieur Gérard SOURY, Conseiller, a rendu compte à la Cour, composée de Mme Corinne BALIAN, Présidente de chambre,de Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller et de Monsieur Gérard SOURY, Conseiller. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
---==oO§Oo==---
LA COUR
FAITS ET PROCÉDURE
Le 11 juillet 2021, Mme [N] [J] a vendu à M. [M] [K] et à Mme [T] [Z] (les acheteurs) un véhicule d'occasion Audi Q5 n° [Immatriculation 5] totalisant 135 501 km, pour un prix de 14 900 euros.
Les acheteurs se plaignant d'un dysfonctionnement de la boîte à vitesses du véhicule survenu trois jours après la vente, une expertise amiable a été organisée et l'expert a déposé son rapport le 6 octobre 2021.
Le 28 janvier 2022, les acheteurs ont assigné la venderesse devant le tribunal judiciaire de Tulle en résolution de la vente pour vice caché, avec les restitutions réciproques, et en paiement de dommages-intérêts en réparation de leurs préjudices.
Par jugement du 6 mars 2023, le tribunal judiciaire a accueilli les demandes des acheteurs, sauf à réduire l'indemnisation de certains postes de préjudice, après avoir retenu que le véhicule était affecté, au jour de sa vente, d'un vice caché et que la venderesse en avait connaissance pour y avoir été elle-même confrontée.
Mme [J] a relevé appel de ce jugement.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Mme [J] conclut au rejet des demandes des acheteurs qui ne rapportent pas la preuve que le véhicule était affecté d'un vice caché à la date de sa vente. Subsidiairement, elle demande que le remboursement du prix soit subordonné à la restitution du véhicule que les acheteurs devront ramener à son domicile, et s'oppose à l'octroi de dommages-intérêts en soutenant n'avoir pas eu connaissance du vice affectant ce véhicule.
Les acheteurs concluent à la confirmation du jugement, sauf à majorer la réparation de leurs préjudices.
MOTIFS
Au soutien de leur action rédhibitoire fondée sur la garantie des vices cachés, les acheteurs se prévalent essentiellement de l'expertise amiable effectuée le 6 octobre 2021 par M. [P] [S], expert mandaté par leur assureur de protection juridique, en présence de Mme [J] qui était représentée par M. [F] (rapport d'expertise amiable p. 5).
Il sera ici préalablement rappelé qu'en application de l'article 16 du code de procédure civile, hormis les cas où la loi en dispose autrement, le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties par un technicien de son choix, peu important qu'elle l'ait été en présence de la partie adverse.
Dans son rapport d'expertise amiable, M. [S] se réfère à un diagnostic réalisé le 15 juillet 2021 par la société MB Diag à [Localité 4] (64) qui a décelé un 'défaut de la vanne EGR et une température de l'embrayage trop forte' (rapport p. 3). Cet expert amiable a ensuite procédé à un essai routier du véhicule sur une distance de 6 km qui s'est déroulé sans aucun incident de fonctionnement (rapport p. 5). Sans préciser formellement l'origine de ses constatations, l'expert amiable indique (rapport p. 6) avoir diagnostiqué 'une hausse anormale de la température de la boîte de vitesses mettant l'auto en mode dégradé', ce phénomène apparaissant principalement en ville lors de phases de conduite à vitesse très lente. Il explique que la boîte de vitesses automatique qui équipe le véhicule comporte deux disques d'embrayage qui peuvent être amenés à surchauffer lors de 'patinages', tout en reconnaissant ne pas être en mesure d'identifier la cause de ce phénomène.
Le seul constat d'une anomalie dans le fonctionnement de la boîte de vitesse automatique du véhicule ne suffit pas à caractériser l'existence d'un défaut technique constitutif d'un vice inhérent à la chose au sens de l'article 1641 du code civil, l'expert admettant lui-même n'avoir pu déceler la cause du dysfonctionnement de la boîte. Or, ce défaut de fonctionnement peut trouver son origine dans des causes exclusives de tout vice, telle que par exemple, une usure des disques d'embrayage (qui sont des pièces en friction étant ici rappelé que le véhicule vendu totalisait 135 501 km à la date de sa vente), un mauvais réglage de l'embrayage, le choix d'une huile d'un coefficient de viscosité inadapté lors d'une vidange... Quant à la vanne EGR, qui correspond à un dispositif de recyclage des gazs d'échappement, sa défaillance, qui n'est pas techniquement explicitée, peut résulter de son encrassement nécessitant son nettoyage ou son remplacement dans le cadre de l'entretien courant du véhicule.
Les autres documents techniques produits par les acheteurs ne sont pas davantage de nature à faire la preuve d'un vice caché. Ainsi, les procès-verbaux des contrôles techniques des 1er et 15 juillet 2021 se bornent à faire état de défauts mineurs étrangers à la boîte de vitesses. De même, la facture établie le 23 juillet 2020 par le garage turc 'Gara Stanbul' d'Istanbul se limite à mentionner la vidange et le réglage de la boîte de vitesse, c'est à dire des opérations d'entretien courant, outre une 'recherche panne' sans plus de précision.
Enfin, si, dans un courrier du 19 juillet 2021, Mme [J] confirme aux acheteurs leur avoir proposé de payer les frais de réparation du véhicule, cette proposition n'a été faite qu'à titre transactionnel, sans reconnaissance d'une garantie au titre d'un vice caché dont l'existence est expressément déniée par l'intéressée.
La preuve d'un vice caché affectant le véhicule à la date de sa vente n'étant pas rapportée, les acheteurs ne peuvent qu'être déboutés de leur action.
PAR CES MOTIFS
La Cour d'appel statuant publiquement, par décision contradictoire rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
INFIRME le jugement rendu le 6 mars 2023 par le tribunal judiciaire de Tulle ;
Statuant à nouveau,
DÉBOUTE M. [M] [K] et Mme [T] [Z] de leur action;
Vu l'équité,
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE M. [M] [K] et Mme [T] [Z] aux dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Laetitia LUZIO SIMOS. Corinne BALIAN.
N° RG 23/00303 - N° Portalis DBV6-V-B7H-BIN6P
AFFAIRE :
Mme [N] [J]
C/
M. [M] [K], Mme [T] [Z]
GS/LLS
Autres demandes relatives à un contrat de prestation de services
Grosse délivrée aux avocats
COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU 26 JUIN 2024
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Le VINGT SIX JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE la Chambre civile de la cour d'appel de LIMOGES a rendu l'arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :
ENTRE
Madame [N] [J]
née le 23 Avril 1988 à [Localité 3] ([Localité 3]),
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Michel LABROUSSE de la SCP D'AVOCATS MICHEL LABROUSSE - CELINE REGY - FRANCOIS ARMA ND & ASSOCIES, avocat au barreau de TULLE
APPELANTE d'une décision rendue le 06 MARS 2023 par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE TULLE
ET
Monsieur [M] [K]
né le 13 Janvier 1997 à [Localité 6],
demeurant [Adresse 1]
comparant, assisté de Me Emmanuel RAYNAL de la SELARL RAYNAL-DASSE, avocat postulant au barreau de LIMOGES et de Me Laura BARON, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE
Madame [T] [Z]
née le 30 Janvier 1989 à [Localité 7],
demeurant [Adresse 1]
comparante, assistée de Me Emmanuel RAYNAL de la SELARL RAYNAL-DASSE, avocat postulant au barreau de LIMOGES et de Me Laura BARON, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE
INTIMÉS
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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l'affaire a été fixée à l'audience du 15 Mai 2024. L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 avril 2024.
Conformément aux dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile, Monsieur Gérard SOURY, Conseiller, magistrat rapporteur, assisté de Madame Laetitia LUZIO SIMOES, Greffier, a tenu seul l'audience au cours de laquelle il a été entendu en son rapport. Les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Après quoi, Monsieur Gérard SOURY, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 26 Juin 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
Au cours de ce délibéré, Monsieur Gérard SOURY, Conseiller, a rendu compte à la Cour, composée de Mme Corinne BALIAN, Présidente de chambre,de Madame Marie-Christine SEGUIN, Conseiller et de Monsieur Gérard SOURY, Conseiller. A l'issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l'arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.
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LA COUR
FAITS ET PROCÉDURE
Le 11 juillet 2021, Mme [N] [J] a vendu à M. [M] [K] et à Mme [T] [Z] (les acheteurs) un véhicule d'occasion Audi Q5 n° [Immatriculation 5] totalisant 135 501 km, pour un prix de 14 900 euros.
Les acheteurs se plaignant d'un dysfonctionnement de la boîte à vitesses du véhicule survenu trois jours après la vente, une expertise amiable a été organisée et l'expert a déposé son rapport le 6 octobre 2021.
Le 28 janvier 2022, les acheteurs ont assigné la venderesse devant le tribunal judiciaire de Tulle en résolution de la vente pour vice caché, avec les restitutions réciproques, et en paiement de dommages-intérêts en réparation de leurs préjudices.
Par jugement du 6 mars 2023, le tribunal judiciaire a accueilli les demandes des acheteurs, sauf à réduire l'indemnisation de certains postes de préjudice, après avoir retenu que le véhicule était affecté, au jour de sa vente, d'un vice caché et que la venderesse en avait connaissance pour y avoir été elle-même confrontée.
Mme [J] a relevé appel de ce jugement.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Mme [J] conclut au rejet des demandes des acheteurs qui ne rapportent pas la preuve que le véhicule était affecté d'un vice caché à la date de sa vente. Subsidiairement, elle demande que le remboursement du prix soit subordonné à la restitution du véhicule que les acheteurs devront ramener à son domicile, et s'oppose à l'octroi de dommages-intérêts en soutenant n'avoir pas eu connaissance du vice affectant ce véhicule.
Les acheteurs concluent à la confirmation du jugement, sauf à majorer la réparation de leurs préjudices.
MOTIFS
Au soutien de leur action rédhibitoire fondée sur la garantie des vices cachés, les acheteurs se prévalent essentiellement de l'expertise amiable effectuée le 6 octobre 2021 par M. [P] [S], expert mandaté par leur assureur de protection juridique, en présence de Mme [J] qui était représentée par M. [F] (rapport d'expertise amiable p. 5).
Il sera ici préalablement rappelé qu'en application de l'article 16 du code de procédure civile, hormis les cas où la loi en dispose autrement, le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties par un technicien de son choix, peu important qu'elle l'ait été en présence de la partie adverse.
Dans son rapport d'expertise amiable, M. [S] se réfère à un diagnostic réalisé le 15 juillet 2021 par la société MB Diag à [Localité 4] (64) qui a décelé un 'défaut de la vanne EGR et une température de l'embrayage trop forte' (rapport p. 3). Cet expert amiable a ensuite procédé à un essai routier du véhicule sur une distance de 6 km qui s'est déroulé sans aucun incident de fonctionnement (rapport p. 5). Sans préciser formellement l'origine de ses constatations, l'expert amiable indique (rapport p. 6) avoir diagnostiqué 'une hausse anormale de la température de la boîte de vitesses mettant l'auto en mode dégradé', ce phénomène apparaissant principalement en ville lors de phases de conduite à vitesse très lente. Il explique que la boîte de vitesses automatique qui équipe le véhicule comporte deux disques d'embrayage qui peuvent être amenés à surchauffer lors de 'patinages', tout en reconnaissant ne pas être en mesure d'identifier la cause de ce phénomène.
Le seul constat d'une anomalie dans le fonctionnement de la boîte de vitesse automatique du véhicule ne suffit pas à caractériser l'existence d'un défaut technique constitutif d'un vice inhérent à la chose au sens de l'article 1641 du code civil, l'expert admettant lui-même n'avoir pu déceler la cause du dysfonctionnement de la boîte. Or, ce défaut de fonctionnement peut trouver son origine dans des causes exclusives de tout vice, telle que par exemple, une usure des disques d'embrayage (qui sont des pièces en friction étant ici rappelé que le véhicule vendu totalisait 135 501 km à la date de sa vente), un mauvais réglage de l'embrayage, le choix d'une huile d'un coefficient de viscosité inadapté lors d'une vidange... Quant à la vanne EGR, qui correspond à un dispositif de recyclage des gazs d'échappement, sa défaillance, qui n'est pas techniquement explicitée, peut résulter de son encrassement nécessitant son nettoyage ou son remplacement dans le cadre de l'entretien courant du véhicule.
Les autres documents techniques produits par les acheteurs ne sont pas davantage de nature à faire la preuve d'un vice caché. Ainsi, les procès-verbaux des contrôles techniques des 1er et 15 juillet 2021 se bornent à faire état de défauts mineurs étrangers à la boîte de vitesses. De même, la facture établie le 23 juillet 2020 par le garage turc 'Gara Stanbul' d'Istanbul se limite à mentionner la vidange et le réglage de la boîte de vitesse, c'est à dire des opérations d'entretien courant, outre une 'recherche panne' sans plus de précision.
Enfin, si, dans un courrier du 19 juillet 2021, Mme [J] confirme aux acheteurs leur avoir proposé de payer les frais de réparation du véhicule, cette proposition n'a été faite qu'à titre transactionnel, sans reconnaissance d'une garantie au titre d'un vice caché dont l'existence est expressément déniée par l'intéressée.
La preuve d'un vice caché affectant le véhicule à la date de sa vente n'étant pas rapportée, les acheteurs ne peuvent qu'être déboutés de leur action.
PAR CES MOTIFS
La Cour d'appel statuant publiquement, par décision contradictoire rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
INFIRME le jugement rendu le 6 mars 2023 par le tribunal judiciaire de Tulle ;
Statuant à nouveau,
DÉBOUTE M. [M] [K] et Mme [T] [Z] de leur action;
Vu l'équité,
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE M. [M] [K] et Mme [T] [Z] aux dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Laetitia LUZIO SIMOS. Corinne BALIAN.