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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 28 juin 2024, n° 22/01211

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Intellectual Ventures II LLC

Défendeur :

Société Française du Radiotéléphone (SA), Broadcom Products Unlimited Company (Sté), Huawei Technologies France (SASU)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Renard

Conseillers :

Mme Lehmann, Mme Marcade

Avocats :

Me Freneaux, Me Abello, Me Dubos, Me Cheviller, Me Le Bihan, Me Desrousseaux

TJ Paris, 3e ch. 1re sect., du 23 sept. …

23 septembre 2021

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement contradictoire rendu le 23 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Paris.

Vu les déclarations d'appel du 11 janvier 2022 et du 1er février 2022 de la société Intellectual Ventures II jointes par une ordonnance du 10 et 14 mars 2022, la procédure se poursuivant sous le numéro RG 22/01211.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 28 février 2024 par la société Intellectual Ventures II, appelante à titre principal.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 16 février 2024 par la société Société Française du Radiotéléphone (SFR), intimée à titre principal.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 14 février 2024 par la société Broadcom Products Unlimited Company, venant aux droits de la société Broadcom Distribution Limited, intimée à titre principal.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 21 décembre 2023 par la société Huawei Technologies France, intimée à titre principal.

Vu l'ordonnance sur incident devant le magistrat chargé de la mise en état rendue le 11 mai 2023.

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 14 mars 2024.

Vu les conclusions de procédure aux fins de rejet de pièces remises au greffe et notifiées par voie électronique le 16 mars 2024 par la société Intellectual Ventures II.

Vu les conclusions de procédure en réponse à la demande de rejet de pièces remises au greffe et notifiées par voie électronique le 18 mars 2024 par la société Française du Radiotéléphone.

SUR CE, LA COUR

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

La société de droit américain Intellectual Ventures II appartient au groupe Intellectual Ventures spécialisé dans la création, le développement, l'acquisition et l'exploitation d'inventions, notamment dans le domaine des réseaux de communication.

Le groupe se présente comme un "Portfolio Patent Assertion Entity" (par opposition au "Litigation Patent Assertion Entity") selon la classification de la Federal Trade Commission (organisme américain en charge de la protection des consommateurs et du contrôle du respect des règles de la concurrence).

Elle expose ainsi être titulaire de brevets relatifs à des technologies mises en 'uvre dans les réseaux de télécommunications permettant l'accès à haut débit à internet sur les lignes téléphoniques, en particulier les technologies dites « xDSL » (ADSL et VDSL).

Elle est en particulier la titulaire inscrite du brevet européen EP l 694 020 (EP 020) dont l'inventeur est M. [N], ayant pour titre « Système et méthode de modulation multi-porteuse », issu d'une demande européenne divisionnaire déposée le 18 avril 2006 par la société Aware Inc. sur la base d'une demande de brevet européen EP 1 161 820 elle-même issue d'une demande internationale PCT WO 2000/054473 du 10 mars 2000 revendiquant la priorité de trois demandes américaines : US 124222 P du 12 mars 1999, US 161115 P du 22 octobre 1999 et US 177081 P du 19 janvier 2000.

Ce brevet a expiré le 10 mars 2020.

Il avait fait l`objet d'une déclaration, par la société Aware Inc., à l'Union Internationale des Télécommunications (UIT), organisme en charge de l'élaboration des normes d'exploitation et d'interfonctionnement des réseaux de télécommunication sous la forme de recommandations garantissant l'interopérabilité de ces réseaux.

L'invention concerne les systèmes et procédés de communication à porteuses multiples utilisant une modulation à porteuses multiples à adaptation de débit.

La société SFR est, avec les sociétés Bouygues Telecom et Orange, un des principaux opérateurs français de télécommunications fournissant à ce titre a ses clients des offres haut débit, mobiles et fixes, au moyen, dans ce dernier cas, de « box » DSL (Digital subscriber Line) permettant le transport numérique de données sur une ligne de raccordement filaire (en cuivre) téléphonique ou par d'autres liaisons spécialisées, reliées, côté opérateur, à des multiplexeurs d'accès à la ligne d'abonné numérique (ou sous leur acronyme anglais DSLAM pour « Digital suscriber line access multiplixer »), tous éléments de réseaux qui lui sont fournis par les sociétés Huawei Technologies France et Broadcom Distribution Limited, actives dans l'industrie des télécommunications.

La technologie utilisée est celle de l'ADSL (Assymetrical Digital Subscriber Line, ou ligne d'abonné numérique asymétrique, car la transmission de données est plus importante dans le sens DSLAM/ DSL que dans le sens DSL/DSLAM) qui met en 'uvre la modulation DMT (Discrete Multi Tone), et a fait l'objet d'une normalisation par l'UIT.

La société Intellectual Ventures II expose avoir acquis la conviction que plusieurs des inventions protégées par ses brevets étaient exploitées par les principaux opérateurs de télécommunications européens, en France et en Allemagne, dont la société SFR.

Aussi, a-t-elle pris contact avec cette dernière afin de lui proposer de régulariser sa situation, par le biais d'un contrat de licence d'exploitation non exclusive des inventions protégées par les brevets, aux conditions FRAND (Fair, Reasonnable And Non Discriminatory).

Faute de réponse positive et constatant que la société SFR poursuivait ce qu'elle considère être des actes de contrefaçon de la partie française du brevet EP 020, la société Intellectual Ventures II l'a fait assigner par acte du 10 octobre 2017 devant le tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire, de Paris.

La société SFR a assigné en intervention forcée notamment la société Broadcom Distribution Ltd. La société Huawei Technologies France (Huawei) est intervenue volontairement à l'instance devant le tribunal.

Par ordonnances du juge de la mise en état des 16 janvier 2020, 23 mars 2021 et 29 avril 2021, la procédure a été séquencée en trois phases :

- phase 1 : validité du brevet EP 020 (revendications 1, 7, 13 et 19) et contrefaçon,

- phase 2 : licences opposables et épuisement du droit,

- phase 3 : réparation du préjudice.

Le juge de la mise en état a alors procédé à des disjonctions, enrôlé les phases 2 et 3 sous un numéro de RG distinct, clôturé la phase 1 et ordonné le 3 mars 2022, soit postérieurement au jugement dont appel, un sursis à statuer pour les deux autres phases dans l'attente de l'arrêt à intervenir.

Le jugement dont appel a :

- dit que les revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020 sont nulles pour extension du brevet au-delà de la demande antérieure telle que déposée,

- ordonné, à 1'initiative de la partie la plus diligente, la transmission de la présente décision, une fois passée en force jugée, à l'INPI aux fins d'inscription au Registre National des Brevets,

- rejeté par conséquent toutes les demandes fondées sur la contrefaçon de ce brevet,

- rejeté les demandes de publication de la présente décision,

- condamné la société Intellectual Ventures II aux dépens et autorisé Mes [C], [G], et [Z], à recouvrer directement ceux dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- condamné la société Intellectual Ventures II à payer aux sociétés SFR et Broadband Distribution, chacune, la somme de 100 000 euros, ainsi que la somme de 200 000 euros à la société Huawei Technologies France, par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonne l'exécution provisoire de la présente décision, sauf en ce qui concerne sa transcription au Registre National des Brevets.

La société Intellectual Ventures II a interjeté appel de cette décision par deux déclarations d'appel du 11 janvier 2022 et des 1er et 14 février 2022 jointes par une ordonnance du 10 mars 2022.

Saisie par des conclusions d'incident par la société Intellectual Ventures II, le conseiller de la mise en état de la présente cour a rendu une ordonnance le 11 mai 2023 selon laquelle l'audience de plaidoiries devant la formation collégiale devra porter sur les seuls points suivants : (i) l'étendue de la saisine de la cour, (ii) la validité des revendications opposées de la partie française du brevet EP'020 et (iii) la contrefaçon desdites revendications, à l'exception des questions relatives aux licences opposables et à l'épuisement des droits.

La société Intellectual Ventures II demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 23 septembre 2021 dans l'affaire enrôlée sous le numéro de RG n° 17/13839, en ce qu'il a :

- dit que les revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020 sont nulles pour extension du brevet au-delà de la demande antérieure telle que déposée,

- ordonné, à l'initiative de la partie la plus diligente, la transmission de la présente décision, une fois passée en fore jugée, à l'INPI aux fins d'inscription au Registre National des Brevets,

- rejeté par conséquent toutes les demandes fondées sur la contrefaçon de ce brevet,

- condamné la société Intellectual Ventures II LLC aux dépens et autorisé Mes [C], [G] et [Z], à recouvrer directement ceux dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- condamné la société Intellectual Ventures II LLC à payer aux sociétés SFR et Broadband Distribution [NDA : Broadcom Distribution Limited], chacune, la somme de 100.000 euros, ainsi que la somme de 200.000 euros à la société Huawei Technologies France, par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement, sauf en ce qui concerne sa transcription au Registre National des Brevets.

Statuant à nouveau :

- débouter les sociétés Société Française du Radiotéléphone ' SFR, Huawei Technologies France et Broadcom Products Unlimited Company venant aux droits de Broadcom Distribution Limited, de l'ensemble de leurs demandes,

- dire et juger qu'en exploitant dans ses réseaux en France, entre le 10 octobre 2012 et le 10 mars 2020, des multiplexeurs d'accès à la ligne d'abonné numérique (DSLAM) fonctionnant conformément à la norme UIT G.992.3 (ADSL2) et/ou à la norme UIT G.992.5 (ADSL2+) et/ou à la norme UIT G.993.2 (VDSL2), la société Société Française du Radiotéléphone - SFR a commis des actes de contrefaçon par utilisation des procédés objets des revendications 1 et 7 de la partie française du brevet européen EP 1 694 020 appartenant à la société Intellectual Ventures II LLC,

- dire et juger qu'en exploitant dans ses réseaux en France, entre le 10 octobre 2012 et le 10 mars 2020, des boîtiers DSL fonctionnant conformément à la norme UIT G.992.3 (ADSL2) et/ou à la norme UIT G.992.5 (ADSL2+) et/ou à la norme UIT G.993.2 (VDSL2), la société Société Française du Radiotéléphone - SFR a commis des actes de contrefaçon par utilisation des procédés objets des revendications 1 et 7 de la partie française du brevet européen EP 1 694 020 appartenant à la société Intellectual Ventures II LLC,

- dire et juger qu'en offrant de livrer et en livrant en France à ses abonnés, entre le 10 octobre 2012 et le 10 mars 2020, des boîtiers DSL fonctionnant conformément à la norme UIT G.992.3 (ADSL2) et/ou à la norme UIT G.992.5 (ADSL2+) et/ou à la norme UIT G.993.2 (VDSL2), la société Société Française du Radiotéléphone - SFR a commis des actes de contrefaçon par fourniture des moyens aptes et destinés à la mise en 'uvre des procédés objets des revendications 1 et 7 de la partie française du brevet européen EP 1 694 020 appartenant à la société Intellectual Ventures II LLC,

- dire et juger qu'en important, en utilisant et en détenant à cette fin en France, entre le 10 octobre 2012 et le 10 mars 2020, des multiplexeurs d'accès à la ligne d'abonné numérique (DSLAM) fonctionnant conformément à la norme UIT G.992.3 (ADSL2) et/ou à la norme UIT G.992.5 (ADSL2+) et/ou à la norme UIT G.993.2 (VDSL2), la société Société Française du Radiotéléphone - SFR a commis des actes de contrefaçon des revendications 13 et 19 de la partie française du brevet européen EP 1 694 020 appartenant à la société Intellectual Ventures II LLC,

- dire et juger qu'en offrant, en mettant dans le commerce, en utilisant, en important et en détenant à ces fins en France, entre le 10 octobre 2012 et le 10 mars 2020, des boîtiers DSL fonctionnant conformément à la norme UIT G.992.3 (ADSL2) et/ou à la norme UIT G.992.5 (ADSL2+) et/ou à la norme UIT G.993.2 (VDSL2), la société Société Française du Radiotéléphone - SFR a commis des actes de contrefaçon des revendications 13 et 19 de la partie française du brevet européen EP 1 694 020 appartenant à la société Intellectual Ventures II LLC

- condamner la société Société Française du Radiotéléphone - SFR à payer des dommages et intérêts à la société Intellectual Ventures II LLC au titre de la commission de l'ensemble des actes de contrefaçon précités,

- donner acte à la société Intellectual Ventures II LLC de ce qu'elle demande, conformément aux dispositions de l'article L. 615-7, alinéa 2, du code de la propriété intellectuelle, l'allocation à titre de dommages et intérêts d'une somme forfaitaire supérieure au montant des redevances qui lui auraient été dues si la société Société Française du Radiotéléphone - SFR lui avait demandé l'autorisation d'exploiter le brevet EP 1 694 020,

- dire et juger que le montant des redevances qui auraient été dues par la société Société Française du Radiotéléphone - SFR doit être défini par rapport aux conditions équitables, raisonnables et non discriminatoires ("FRAND") du contrat de licence proposé par la société Intellectual Ventures II LLC pour l'exploitation du portefeuille de brevets dont fait partie le brevet EP 1 694 020, à savoir des redevances trimestrielles égales à 0,1 % du Revenu Total par Abonné, lequel s'entend du chiffre d'affaires net réalisé par la société Société Française du Radiotéléphone - SFR entre le 10 octobre 2012 et le 10 mars 2020 via la fourniture d'accès à des réseaux fonctionnant conformément à la norme UIT G.992.3 (ADSL2) et/ou conformément à la norme UIT G.992.5 (ADSL2+) et/ou conformément à la norme UIT G.993.2 (VDSL2), hors revenus issus du commerce de gros,

- donner acte à la société Intellectual Ventures II LLC de ce que ses demandes à l'encontre de la société Société Française du Radiotéléphone - SFR pour contrefaçon des revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020 ne s'étendent pas à des équipements de communication (à l'exclusion des Terminaux Cellulaires), logiciels ou services de la société Nokia Corporation et de ses filiales, y compris la société Alcatel-Lucent International, (ci-après collectivement désignées "Nokia"), considérés seuls ou dans toute éventuelle combinaison arguée de contrefaçon dans laquelle ils reproduisent l'un quelconque des éléments de l'une quelconque des revendications invoquées (y compris dans le cas où ils réalisent une étape d'une revendication de procédé), dans la mesure où lesdits équipements de communication, logiciels ou services ont été fabriqués, utilisés, vendus, offerts à la vente, loués, importés ou distribués par Nokia, ou dans la mesure où Nokia les a fait fabriquer,

- donner acte à la société Intellectual Ventures II LLC de ce que ses demandes à l'encontre de la société Société Française du Radiotéléphone - SFR pour contrefaçon de la partie française du brevet EP 1 694 020 ne s'étendent pas à des produits, technologies, procédés ou services de la société Huawei Technologies Co. LTD. et de ses filiales, y compris la société Huawei Technologies France, (ci-après collectivement désignées "Huawei"), considérés seuls ou dans toute éventuelle combinaison arguée de contrefaçon dans laquelle ils reproduisent l'un quelconque des éléments de l'une quelconque des revendications invoquées (y compris dans le cas où ils réalisent une étape d'une revendication de procédé), dans la mesure où lesdits produits, technologies, procédés ou services ont été fabriqués, utilisés, vendus, offerts à la vente, loués, importés ou distribués par Huawei, ou dans la mesure où Huawei les a fait fabriquer,

- donner acte à la société Intellectual Ventures II LLC de ce que les limitations de l'étendue de ses demandes à l'encontre de la société Société Française du Radiotéléphone - SFR, telles que formulées ci-dessus, ne bénéficient en aucun cas aux produits, technologies, procédés ou services d'autres fournisseurs que Nokia et Huawei et/ou à l'utilisation de tels produits, technologies, procédés ou services,

- donner acte à la société Intellectual Ventures II LLC de ce qu'elle se désiste de ses demandes à l'encontre de la société Huawei Technologies France au titre des articles 696 et 700 du code de procédure civile,

- donner acte à la société Intellectual Ventures II LLC de ce qu'elle accepte le désistement de la société Huawei Technologies France de l'ensemble de ses demandes à son encontre,

- donner acte à la société Intellectual Ventures II LLC de ce que la limitation de l'étendue de ses demandes à l'encontre de la société Société Française du Radiotéléphone - SFR et le désistement de sa demande à l'encontre de la société Huawei Technologies France au titre des articles 696 et 700 du code de procédure civile, tels que formulés ci-dessus, n'emportent acquiescement à aucun chef du jugement entrepris ni aux appels incidents de la société Société Française du Radiotéléphone - SFR, de la société Huawei Technologies France et de la société Broadcom Products Unlimited Company venant aux droits de Broadcom Distribution Limited, ni aux demandes qu'elles ont formées à son encontre, y compris notamment leur demande d'annulation du brevet EP 1 694 020,

Avant dire droit sur la fixation des dommages et intérêts :

- ordonner à la société Société Française du Radiotéléphone - SFR de communiquer à la société Intellectual Ventures II LLC, sous astreinte de 50.000 euros (cinquante mille euros) par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir :

- le nombre d'abonnés aux services de fourniture d'accès aux réseaux fonctionnant conformément à la norme UIT G.992.3 (ADSL2) et/ou conformément à la norme UIT G.992.5 (ADSL2+) et/ou conformément à la norme UIT G.993.2 (VDSL2) proposés en France par la société Société Française du Radiotéléphone - SFR au cours de la période du 10 octobre 2012 au 10 mars 2020,

- le chiffre d'affaires net réalisé par la société Société Française du Radiotéléphone - SFR via la fourniture d'accès à des réseaux fonctionnant conformément à la norme UIT G.992.3 (ADSL2) et/ou conformément à la norme UIT G.992.5 (ADSL2+) et/ou conformément à la norme UIT G.993.2 (VDSL2) au cours de la période du 10 octobre 2012 au 10 mars 2020,

- le nombre de multiplexeurs d'accès à la ligne d'abonné numérique (DSLAM) fonctionnant conformément à la norme UIT G.992.3 (ADSL2) et/ou conformément à la norme UIT G.992.5 (ADSL2+) et/ou conformément à la norme UIT G.993.2 (VDSL2) de fournisseurs autres que Nokia et Huawei, importés et/ou utilisés et/ou détenus en France par la société Société Française du Radiotéléphone - SFR au cours de la période du 10 octobre 2012 au 10 mars 2020,

- le nombre de boîtiers DSL fonctionnant conformément à la norme UIT G.992.3 (ADSL2) et/ou conformément à la norme UIT G.992.5 (ADSL2+) et/ou conformément à la norme UIT G.993.2 (VDSL2), importés, offerts, mis dans le commerce, utilisés et/ou détenus en France par la société Société Française du Radiotéléphone - SFR au cours de la période du 10 octobre 2012 au 10 mars 2020,

- commettre tel expert qu'il plaira à la cour de désigner, aux frais avancés de la société Société Française du Radiotéléphone - SFR, avec pour mission de vérifier l'exactitude et l'exhaustivité des informations communiquées par cette dernière en exécution de l'arrêt à intervenir ;

- ordonner les mesures suivantes pour la protection du secret des affaires couvrant les pièces dont la société Intellectual Ventures II LLC entend faire état pour justifier du caractère FRAND de son offre de licence à la société Société Française du Radiotéléphone - SFR :

- fixer un délai pour la remise à la cour ou le cas échéant au conseiller de la mise en état, par la société Intellectual Ventures II LLC, de :

- la version confidentielle intégrale des deux contrats de licence que cette société a conclus avec les opérateurs de réseaux DSL américains Centurylink, Inc. et Windstream Services LLC, et du rapport d'expertise comparant le taux de redevances desdites licences avec celui de la licence FRAND offerte par la société Intellectual Ventures II LLC à la société SFR,

- une version non-confidentielle desdites pièces, dans laquelle chaque information ou partie considérée comme couverte par le secret des affaires aura été biffée,

- un mémoire précisant pour chaque information ou partie de la pièce en cause, les motifs qui lui confèrent le caractère d'un secret des affaires,

- statuant ensuite sans audience :

- dire que chaque information ou partie biffée dans la version non confidentielle des pièces en cause doit être considérée comme couverte ou susceptible d'être couverte par le secret des affaires,

- ordonner que la communication par la société Intellectual Ventures II LLC de la version confidentielle des pièces en cause soit restreinte, pour chaque partie intimée, à:

- son avocat constitué dans la présente procédure,

- un avocat plaidant dans la présente procédure s'il n'est pas l'avocat constitué,

- un expert économique indépendant,

- et au plus une personne physique salariée de la partie intimée,

qui pourront consulter la version confidentielle des pièces en cause au cabinet de l'avocat de la société Intellectual Ventures II LLC, sans en prendre copie.

- ordonner que les audiences ultérieures devant la cour ou le conseiller de la mise en état au cours desquelles seront évoquées les pièces en cause soient tenues en chambre du conseil, en présence des seules personnes auxquelles la communication desdites pièces aura été restreinte par l'arrêt à intervenir,

- ordonner aux parties de signifier deux versions de leurs conclusions, à savoir une version confidentielle dans laquelle chaque information considérée comme couverte par le secret des affaires sera visible, et une version non-confidentielle dans laquelle elle sera au contraire biffée,

- interdire aux parties intimées d'utiliser les informations considérées comme couvertes par le secret des affaires à toute autre fin que leur défense dans le cadre de l'instance au fond,

- ordonner que la motivation des décisions du conseiller de la mise en état et de la cour, ainsi que les modalités de leur publication, aux nécessités de la protection du secret des affaires,

- rappeler que conformément aux dispositions de l'article L.153-2 du code de commerce :

"Toute personne ayant accès à une pièce ou au contenu d'une pièce considérée par le juge comme étant couverte ou susceptible d'être couverte par le secret des affaires est tenue à une obligation de confidentialité lui interdisant toute utilisation ou divulgation des informations qu'elle contient.

Dans le cas d'une personne morale, l'obligation prévue au premier alinéa du présent article s'applique à ses représentants légaux ou statutaires et aux personnes qui la représentent devant la juridiction.

Les personnes ayant accès à la pièce ou à son contenu ne sont liées par cette obligation ni dans leurs rapports entre elles ni à l'égard des représentants légaux ou statutaires de la personne morale partie à la procédure.

Les personnes habilitées à assister ou représenter les parties ne sont pas liées par cette obligation de confidentialité à l'égard de celles-ci, sauf dans le cas prévu au 1° de l'article L. 153-1.

L'obligation de confidentialité perdure à l'issue de la procédure. Toutefois, elle prend fin si une juridiction décide, par une décision non susceptible de recours, qu'il n'existe pas de secret des affaires ou si les informations en cause ont entre-temps cessé de constituer un secret des affaires ou sont devenues aisément accessibles".

Dans l'attente de l'issue des mesures de communication d'informations, d'expertise et de protection du secret des affaires ordonnées par l'arrêt à intervenir :

- condamner d'ores et déjà la société Société Française du Radiotéléphone - SFR à payer à la société Intellectual Ventures II LLC la somme de 27 824 000 euros (vingt-sept millions huit cent vingt-quatre mille euros) à titre de provision à valoir sur les dommages et intérêts,

- ordonner la publication du dispositif de l'arrêt à intervenir dans cinq journaux ou magazines au choix de la société Intellectual Ventures II LLC, et aux frais la société Société Française du Radiotéléphone - SFR, dans la limite de 15 000 euros HT (quinze mille euros hors taxes) par insertion,

- ordonner à la société Société Française du Radiotéléphone - SFR d'afficher en page d'accueil du site internet www.sfr.fr un encart occupant au moins 10% de la surface de la page d'accueil au-dessus de la ligne de flottaison et contenant le lien hypertexte suivant : "Publication Judiciaire : condamnation de la société SFR pour contrefaçon du brevet EP 1 694 020 appartenant à la société Intellectual Ventures II LLC", lequel lien devra renvoyer vers une copie intégrale de la minute de l'arrêt à intervenir, et ce pendant une durée de deux mois sous astreinte de 50 000 euros (cinquante mille Euros) par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- condamner la société Société Française du Radiotéléphone - SFR à payer à la société Intellectual Ventures II LLC la somme de 500 000 euros (cinq cent mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance, et la somme de 100 000 euros (cent mille euros) sur le même fondement au titre de la procédure d'appel,

- condamner la société Broadcom Products Unlimited Company venant aux droits de Broadcom Distribution Limited, à payer à la société Intellectual Ventures II LLC la somme de 100 000 euros (cent mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance et la somme de 50 000 euros (cinquante mille euros) sur le même fondement au titre de la procédure d'appel,

- condamner les sociétés Société Française du Radiotéléphone ' SFR et Broadcom Products Unlimited Company venant aux droits de Broadcom Distribution Limited aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui pourront être directement recouvrés par Me Fréneaux, avocat associé de la SAS Bardehle Pagenberg, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La société Société Française du Radiotéléphone ' SFR demande à la cour de :

- juger que la société Société Française du Radiotéléphone - SFR est recevable et bien fondée en sa demande, et y faisant droit :

- juger la société Intellectual Ventures II LLC si ce n'est irrecevable, à tout le moins mal fondée en son appel du jugement du tribunal judiciaire de Paris du 23 septembre 2021 (RG 17/13839) et ses demandes, fins, appel et conclusions et l'en débouter,

En conséquence :

A titre principal :

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 23 septembre 2021 (RG 17/13839) en toutes ses dispositions,

A titre subsidiaire, si la cour devait ne pas retenir le motif d'annulation du brevet adopté par le tribunal tenant à l'extension du brevet au-delà du contenu de la demande antérieure telle que déposée :

- juger que les revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020 sont nulles pour défaut de nouveauté et d'activité inventive,

- confirmer le jugement par ajout ou substitution de motifs,

- ordonner, à l'initiative de la partie la plus diligente, la transmission de la décision, une fois passée en force de chose jugée, à l'INPI aux fins d'inscription au Registre National des Brevets,

A titre très subsidiaire, si par extraordinaire la cour venait à infirmer le jugement et rejeter la demande reconventionnelle en nullité du brevet,

- juger que l'action en contrefaçon fondée sur la partie française du brevet EP 1 694 020 est irrecevable pour les faits antérieurs à l'inscription de la transmission du brevet au registre national des brevets, soit le 24 décembre 2015,

- juger que l'action en contrefaçon fondée sur la partie française du brevet EP 1 694 020 est irrecevable à l'égard de tout produit ayant été fourni à la société Société Française du Radiotéléphone ' SFR par la société Alcatel Lucent International ou toute autre société appartenant au groupe Nokia ; ainsi qu'à l'égard de tout produit ayant été fourni à la société Société Française du Radiotéléphone ' SFR par la société Huawei ou toute autre société appartenant au groupe Huawei,

- juger que les rapports de M. [A] [F] (pièces 17 et 18) doivent être rejetées des débats dès lors qu'ils ont été établis en violation des principes applicables en matière d'administration de la preuve,

- juger que la société Intellectual Ventures II LLC ne démontre pas la contrefaçon des revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020,

A titre plus subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour venait à infirmer le jugement et considérer qu'il y a contrefaçon des revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020 :

- juger que la cour n'est pas saisie des demandes et prétentions en appel relevant de la Phase 3 (concernant la réparation du préjudice), procédures disjointe et suspendue par ordonnances définitives devant le tribunal et enrôlées sous le numéro de RG 21/05847, faute d'effet dévolutif,

- juger la société Intellectual Ventures II LLC irrecevable en toutes ses demandes, prétentions et moyens relevant de la Phase 3,

A titre encore plus subsidiaire, si par extraordinaire, la cour viendrait à infirmer le jugement et considérer qu'il y a contrefaçon des revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020 et qu'il y aurait eu un effet dévolutif au-delà de l'instance enrôlée sous le numéro de RG 17/13839 :

- retrancher du jugement dont appel, la disposition selon laquelle le tribunal « Rejette en conséquence toutes les demandes fondées sur la contrefaçon de ce brevet » et en lieu et place, dire et juger « Rejette en conséquence toutes les demandes fondées sur la contrefaçon de ce brevet, objet de la présente instance RG 17/13839 »,

- juger que la cour n'est pas saisie des demandes et prétentions en appel, relevant de la Phase 3, procédure disjointe et suspendue par ordonnances définitives devant le tribunal et enrôlée sous le numéro de RG 21/05847,

- juger la société Intellectual Ventures II LLC irrecevable en toutes ses demandes, prétentions et moyens relevant de la Phase 3,

A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la société Intellectual Ventures II devait maintenir ses demandes relevant de la Phase 3, et si par extraordinaire la cour devait considérer en être saisie :

- rejeter la demande de mesure de protection du secret des affaires sollicitée par la société Intellectual Ventures II LLC comme étant mal fondée,

- réserver l'examen des demandes de droit d'information, d'expertise, de condamnation au paiement de dommages et intérêts et de paiement d'une provision formées par la société Intellectual Ventures II à une prochaine audience,

- prendre acte de ce que la société Société Française du Radiotéléphone ' SFR se réserve de conclure sur le fond de la Phase 3,

- renvoyer l'affaire devant le Conseiller de la mise en état pour fixation d'un nouveau calendrier de procédure sur la Phase 3,

A titre encore plus infiniment subsidiaire, si la cour se considérait saisie de la phase 3 et considérait que la demande de protection du secret des affaires de la société Intellectual Ventures II LLC est recevable et bien fondée, sur les modalités de communication requises :

- ordonner que la communication par la société Intellectual Ventures II LLEC de la version confidentielle des pièces en cause soit restreinte, pour la société Société Française du Radiotéléphone ' SFR, à :

- les avocats plaidants,

- quatre employés de la société SFR,

- ses conseils en propriété industrielle,

- un tiers expert de la loi applicable à chaque contrat,

- un expert économique indépendant, choisi par la société Société Française du Radiotéléphone ' SFR,

- trois avocats admis respectivement aux barreaux d'Allemagne, du Royaume-Uni et des Etats-Unis

Etant précisé que s'agissant des avocats plaidants, des conseils en propriété industrielle, des avocats étrangers et de l'expert autorisés à avoir accès à la version confidentielle des pièces en cause, les associés, collaborateurs et salariés de leurs cabinets respectifs pourront aussi avoir accès à la version confidentielle de ces pièces. Les avocats plaidants, les conseils en propriété industrielle, les avocats étrangers et l'expert économique indépendant devront s'assurer que les associés, collaborateurs et salariés de leurs cabinets respectifs sont informés des termes de l'arrêt à intervenir, et des obligations découlant des dispositions de l'article L.153-2 du code de commerce auxquelles est soumise toute personne ayant accès à la version confidentielle des pièces en cause et aux informations confidentielles protégées par le secret des affaires.

En tout état de cause,

- débouter la société Intellectual Ventures II LLC de l'ensemble de ses demandes, comme étant irrecevables et à tout le moins mal fondées,

- condamner la société Intellectual Ventures II LLC à payer à la société Société Française du Radiotéléphone ' SFR la somme de 140.000 euros (cent quarante mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Intellectual Ventures II LLC aux entiers dépens dont distraction au profit de Me [C] en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Broadcom Products Unlimited Company demande à la cour de :

- juger que la société Broadcom Products Unlimited Company est recevable et bien fondée en ses demandes, et y faisant droit :

- juger la société Intellectual Ventures II LLC irrecevable et à tout le moins mal fondée en son appel du jugement du tribunal judiciaire de Paris du 23 septembre 2021 (RG n°17/13839) et ses demandes, fins, appel et conclusions et l'en débouter,

En conséquence :

A titre principal :

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 23 septembre 2021 (RG n°17/13839) en toutes ses dispositions,

A titre subsidiaire, si la cour devait ne pas retenir le motif d'annulation du brevet adopté par le tribunal tenant à l'extension du brevet au-delà du contenu de la demande antérieure telle que déposée :

- juger que les revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020 sont nulles pour défaut de nouveauté et d'activité inventive,

- confirmer le jugement par ajout ou substitution de motifs,

- confirmer, à l'initiative de la partie la plus diligente, la transmission de la décision, une fois passée en force de chose jugée, à l'INPI aux fins d'inscription au Registre National des Brevets,

A titre très subsidiaire, si la cour venait à infirmer le jugement et rejeter la demande reconventionnelle en nullité du brevet :

- juger l'action en contrefaçon de la société Intellectual Ventures II LLC irrecevable en ce qu'elle porte sur des faits antérieurs au 24 décembre 2015,

- juger que les rapports de M. [A] [F] (pièces 17 et 18) doivent être rejetés des débats dès lors qu'ils ont été établis en violation des principes applicables en matière d'administration de la preuve,

- juger que la société Intellectual Ventures II LLC ne démontre pas la contrefaçon des revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020,

- juger que les droits de la société Intellectual Ventures II LLC sur le brevet EP 1 694 020 sont épuisés s'agissant des boitiers DSL argués de contrefaçon alimentés par des DSLAMs fournis par la société Alcatel Lucent International à la société Société Française du Radiotéléphone ' SFR,

A titre plus subsidiaire, si la cour infirmait le jugement et considérait qu'il y a contrefaçon des revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020 :

- juger que la cour n'est pas saisie des demandes, prétentions et moyens relevant de la réparation du préjudice allégué de la société Intellectual Ventures II LLC, objet d'une instance disjointe et suspendue pendante devant le tribunal et enrôlée devant le tribunal sous le numéro de RG n° 21/05847, faute d'effet dévolutif,

- juger la société Intellectual Ventures II LLC irrecevable en toutes ses demandes, prétentions et moyens relatifs à la réparation du préjudice allégué et à la publication de l'arrêt à intervenir,

A titre encore plus subsidiaire, si la cour infirmait le jugement et considérait qu'il y a contrefaçon des revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020 et qu'il y aurait eu un effet dévolutif au-delà de l'instance enrôlée sous le numéro de RG n°17/13839 :

- retrancher du jugement dont appel, le chef selon lequel le tribunal « Rejette en conséquence toutes les demandes fondées sur la contrefaçon de ce brevet » et en lieu et place, juger « Rejette en conséquence toutes les demandes fondées sur la contrefaçon de ce brevet, objet de la présente instance RG 17/13839 »,

- juger que la cour n'est pas saisie des demandes, prétentions et moyens relevant de la réparation du préjudice allégué de la société Intellectual Ventures II LLC, objet d'une instance disjointe et suspendue pendante devant le tribunal et enrôlée devant le tribunal sous le numéro de RG 21/05847,

- juger la société Intellectual Ventures II LLC irrecevable en toutes ses demandes, prétentions et moyens relatifs à la réparation du préjudice allégué,

A titre infiniment subsidiaire, si la cour infirmait le jugement et considérait qu'il y a contrefaçon des revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020 et qu'il y aurait eu un effet dévolutif au-delà de l'instance enrôlée sous le numéro de RG n°17/13839, et si la cour devait considérer en être saisie :

- prendre acte de ce que la société Broadcom Products Unlimited Company se réserve de conclure sur le fond des demandes en réparation du préjudice ainsi que sur les mesures accessoires formées par la société Intellectual Ventures II LLC,

- renvoyer l'affaire devant le Conseiller de la mise en état pour fixation d'un nouveau calendrier de procédure sur les demandes en réparation du préjudice,

- renvoyer l'examen des demandes de droit d'information, d'expertise, de condamnation au paiement de dommages et intérêts, et de paiement d'une provision et de publication judiciaire, formées par la société Intellectual Ventures II LLC à une prochaine audience,

En tout état de cause :

- débouter la société Intellectual Ventures II LLC de l'ensemble de ses demandes, comme étant irrecevables et à tout le moins mal fondées,

- condamner la société Intellectual Ventures II LLC à payer à la société Broadcom Products Unlimited Company la somme de 200 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Intellectual Ventures II LLC aux entiers dépens dont distraction au profit de Me [Z] en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Huawei Technologies France demande à la cour de :

- donner acte à la société Huawei Technologies France de ce qu'elle se désiste de l'ensemble de ses demandes formées (i) devant le tribunal judiciaire dans l'instance RG 17/13839 ayant conduit au jugement frappé d'appel ou (ii) devant la cour d'appel à l'encontre de la société Intellectual Ventures II, et notamment de sa demande en nullité des revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020,

- donner acte à la société Huawei Technologies France de ce qu'elle accepte le désistement de la société Intellectual Ventures II de ses demandes à son encontre sur le fondement des articles 696 et 700 du code de procédure civile,

- juger que la société Huawei Technologies France conservera à sa charge les frais et dépens exposés dans le présent litige.

- Sur l'incident

La société SFR a retiré les pièces dont le rejet était sollicité par la société Intellectual Ventures II LLC (IVII) à l'exclusion de la pièce PLA0015.

Cette pièce a été communiquée le 6 mars 2024 comme visée au bordereau déposé et notifié par RPVA.

L'obligation prévue à l'article 906 du code de procédure civile de communiquer simultanément au dépôt et à la notification des conclusions les pièces produites à leur soutien n'impose pas à la cour d'écarter une pièce communiquée en contravention à ces dispositions alors que la société IVII a été mise en mesure entre le 6 mars 2024, date de la communication, et le 19 mars 2024, date de l'ordonnance de clôture, de prendre connaissance et de discuter la pièce PLA0015 constituée par une attestation d'honoraires d'avocat.

Il n'a donc pas lieu d'écarter cette pièce des débats.

- Sur le désistement partiel

La société IVII indique dans ses dernières écritures modifier l'étendue de ses demandes en contrefaçon de la partie française de son brevet EP 020 contre la société SFR s'agissant des produits, technologies, procédés ou services de la société Huawei Technologies France, se désister de ses demandes formées contre cette société au titre des frais irrépétibles et des dépens et accepter le désistement de la société Huawei Technologies France de ses demandes formées à son encontre.

Par ses dernières conclusions, la société Huawei Technologies France se désiste quant à elle de toutes ses demandes à l'encontre de la société IVII et accepte le désistement de cette dernière de ses demandes vis-à-vis d'elle. Elle précise conserver à sa charge les frais et dépens qu'elle a exposés en cause d'appel.

Les désistements sont en conséquence parfaits en ce qu'ils concernent l'instance opposant les sociétés IVII et Huawei Technologies France et seront constatés au dispositif.

- Sur le périmètre de saisine de la cour

En suite de l'ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 11 mai 2023, qui a considéré qu'il ne ressortait pas de sa compétence de statuer sur l'étendue de la saisine de la cour en raison de la césure de la procédure en trois temps décidée par le juge de la mise en état du tribunal et partant sur la demande de protection du secret des affaires de la société IVII, renvoyant cette question devant la cour, les parties s'opposent alors sur la question de savoir si la question du périmètre de saisine de la cour doit être abordée ou non en premier lieu par celle-ci. La société IVII tire argument du dispositif de l'ordonnance précitée selon lequel le conseiller de la mise en état a dit que l'audience de plaidoiries devant la formation collégiale portera sur les seuls points suivants : (i) l'étendue de la saisine de la cour, (ii) la validité des revendications opposées de la partie française du brevet EP'020 et (iii) la contrefaçon desdites revendications, à l'exception des questions relatives aux licences opposables et à l'épuisement des droits.

Pour autant, il n'est pas discuté par les parties que la cour est saisie des questions de la validité des revendications de la partie française du brevet EP 020 opposées dans le cadre de la présente instance ainsi que de la question de la contrefaçon.

Aussi, il y a lieu de statuer en premier lieu sur la validité du brevet et l'éventuelle contrefaçon de celui-ci par les sociétés SFR et Broadcom Products Unlimited Company avant de s'interroger sur l'étendue de la saisine de la cour et de savoir si celle-ci s'estime saisie des questions de licences opposables et d'épuisement du droit puis de la réparation du préjudice en lien avec la contrefaçon et à cette occasion sur la question de protection du secret des affaires, la société IVII souhaitant communiquer des licences comparables qu'elle a préalablement conclues et qu'elle estime couvertes par le secret des affaires.

- Sur la présentation du brevet EP 020

Le brevet européen EP 020 a pour titre « Système et méthode de modulation multi-porteuse ».

Il est issu d'une demande européenne divisionnaire déposée le 18 avril 2006 par la société Aware Inc. sur la base d'une demande de brevet européen EP 1 161 820, elle-même issue d'une demande internationale PCT WO 20007054473 du 10 mars 2000 ayant pour titre « Seamless rare adaptative multicarrier modulation system and protocols » (Système et protocoles de modulation multiporteuse à débit adaptatif sans coupure).

Le paragraphe [0001] de la traduction en langue française du brevet EP 020 rappelle que l'invention concerne de façon générale des systèmes et des procédés de communication utilisant une modulation à ondes porteuses multiples, dont l'objet est de diviser la bande de fréquence d'émission en plusieurs sous-canaux (porteuses), chaque sous-canal transportant les données à transmettre après leur transformation en signal analogique de forme sinusoïdale (paragraphe [0002] de la description « Arrière-plan de l'invention »).

Ainsi, un émetteur module un flux de données d'entrée contenant des bits d'information à travers plusieurs porteuses et émet l'information modulée (sous forme sinusoïdale), tandis qu'à l'extrémité de la bande, un récepteur démodule toutes les porteuses afin de récupérer les bits d'information ensuite émis sous la forme de flux de données de sortie.

Le paragraphe [0003] précise que la modulation à ondes porteuses multiples présente de nombreux avantages et en particulier une immunité supérieure au bruit et une plus grande flexibilité sur le débit de données et la largeur de bande, de sorte qu'elle est utilisée dans de nombreuses applications, qui incluent les systèmes de ligne d'abonné numérique asymétrique (ADSL), lesquelles font l'objet des normes UIT G.992.l et G.992.2.

Selon les dessins et les paragraphes [0004], [0005], [0008] et [0009] de la traduction française du fascicule du brevet EP 020, le schéma fonctionnel d'un émetteur ADSL à modulation DMT conforme à la norme et connu de l'art antérieur est représenté sur la figure 1 (ci-dessous), laquelle montre trois couches : la couche ATM TC (142), qui transforme les bits en trames, la couche Trameur/FEC (120), qui, notamment, segmente les trames en mois de code en vue de leur insertion dans un repère orthonormé, en phase et en quadrature (diagramme de constellation), et la couche Modulation (110), mise en 'uvre à l'aide d'une transformation de Fourier discrète inverse (IDFT) (112), qui module les bits provenant de l'encodeur à modulation d'amplitude en quadrature (QAM) (114) :

Le paragraphe [0006] du brevet précise ainsi que le symbole DMT se définit comme un ensemble d'échantillons analogiques générés à la sortie de la phase de transformation de Fourier discrète inverse et modulés sur les différentes porteuses en fonction de la table d'attribution des bits (BAT pour Bits Allocation Table), laquelle spécifie le nombre de bits attribué à chaque sous-canal.

Selon le paragraphe [0007], la BAT dépend du rapport signal / bruit (SNR) de chaque sous-canal. Ainsi, un canal présentant un faible bruit (SNR élevé) aura beaucoup de bits modulés sur chaque porteuse et aura donc un débit binaire élevé. Si les conditions du canal sont médiocres, le rapport signal / bruit sera faible et les bits modulés sur chaque porteuse seront peu nombreux, ce qui se traduira par un faible débit binaire du système.

Le paragraphe [0010] enseigne que, dans les normes ADSL DMT actuelles, il existe une relation spécifique entre tous ces paramètres et, en particulier, il existe une relation entre le nombre d'octets dans une trame et la taille des mots de code FEC (Forward Error Coding), lesquels sont des codes d'erreur contenant des données redondantes et donc non utiles pour l'utilisateur, dans le but de permettre au récepteur de détecter et corriger les erreurs (paragraphe [0012]).

Il en résulte (paragraphe [0013]) qu'un modem ADSL ne peut pas modifier le nombre de bits d'un symbole DMT sans apporter les modifications appropriées au nombre d'octets dans un mot de code FEC et d'une trame, ce qui entraîne des limitations de performance.

En outre (paragraphe [0019]), la norme UIT G.992.1 spécifie un mécanisme pour produire une adaptation de débit en ligne (Dynamic Rate Adaptation ou DRA), mais il est clairement stipulé dans ces normes que les modifications du débit de données ne sera pas transparente. Le transfert de bits (« Bit Swapping » ) est une méthode également spécifiée dans les normes UIT pour modifier le nombre de bits à un canal particulier. Le Bit Swapping est transparent, c'est-à-dire qu'il n'entraîne pas d'interruption de l'émission et de la réception de données, mais il permet de modifier le débit de données.

Aussi, il est précisé au paragraphe [0023] qu'il existe un besoin d'un système de transmission DMT amélioré qui « s'affranchit des problèmes posés ci-avant » ou selon la version anglaise « It is therefore a principle object of the invention to provide an improved DMT transmission system that overcomes the problems discussed above ».

Selon le paragraphe [0026], la présente invention a pour objet de fournir une transmission DMT améliorée dans laquelle les paramètres de transmission peuvent être modifiés de manière simple et/ou fiable.

Le paragraphe [056] du brevet EP'020 précise ainsi que « Pour permettre à un système de transmission ADSL DMT de modifier le débit de données de façon transparente, l'invention propose ce qui suit :

1. un procédé plus efficace de tramage et d'encodage de données, qui se traduit par une réduction du nombre de bits de données de surdébit par symbole DMT, et donc par une augmentation du débit binaire utilisateur ;

2. un nouveau système ADSL ayant la capacité d'adapter de façon dynamique le débit de données en ligne (par exemple en cours de fonctionnement) d'une manière transparente, et

3, un nouveau protocole robuste et rapide pour réaliser une telle adaptation de débit transparente, de façon qu'une modification de débit de données puisse se produire correctement même en présence de niveaux de bruit élevés. »

Le paragraphe [0057] enseigne ainsi un mode de réalisation décrivant un procédé de tramage qui réduit la quantité de données de surdébit (données autres que celles utiles pour l'utilisateur). En particulier, ce procédé de tramage attribue un pourcentage fixe de données de surdébit au flux de données, plutôt qu'un nombre fixe d'octets de surdébit. Ce pourcentage n'évolue pas quand le débit de données du modem varie.

Un autre avantage du procédé de tramage décrit dans l'invention (paragraphe [0065]) est qu'il permet une adaptation du débit transparente en ligne. L'adaptation de débit transparente (SRA) est réalisée en modifiant la BAT des symboles DMT, c'est-à-dire, le nombre de bits attribués à chaque sous-canal du système à ondes porteuses multiples. Comme illustré plus haut, une modification de la BAT modifie le nombre de bits par symbole DMT et entraîne une modification du débit de données du système. Dans un mode de réalisation, la taille des symboles DMT est modifiée sans modifier aucun des paramètres d'encodage R-S (FEC), d'entrelacement et de tramage. Ceci est possible parce que le procédé de tramage avec surdébit à pourcentage constant décrit, supprime les restrictions imposées par l'art antérieur sur la relation entre les symboles DMT et les mots de code R-S (FEC) ou les trames ADSL. Puisque les paramètres d'encodage R-S et d'entrelacement ne varient pas, les problèmes de vidage de l'entrelaceur et d'autres problèmes liés à la modification des paramètres associés à ces fonctions ne se présentent pas. L'émetteur-récepteur peut adapter le débit de données sans produire d'erreurs ou une interruption de service. Le seul paramètre qui doit être adapté, est la BAT (soit dernière phrase de ce paragraphe en langue anglaise : 'The only parameter that needs to be adapted is the BAT').

Le paragraphe [066] précise que la BAT doit être modifiée au niveau de l'émetteur et du récepteur exactement au même moment, c'est-à-dire exactement sur le même symbole DMT, de sorte que, dans un mode de réalisation, les principes de l'invention proposent un protocole qui permet la transition synchronisée vers l'utilisation de la nouvelle BAT.

Il est également très important selon les paragraphes [0067] et [0068] que ce protocole soit très robuste en présence de bruit sur le canal et que la transition entre les tables BAT se déroule très rapidement.

Aussi, l'invention propose deux protocoles qui satisfont aux exigences de l'adaptation de débit transparente, appelés protocole de SRA (pour « seamless rate adaptation ») normale et protocole de SRA rapide [0070]. (« The principles of the invention provide two protocols that satisfy these requirements for seamless rate adaptation. The protocols are called the Normal SRA protocol and the Fast SRA protocol. »)

Le protocole de SRA normale (Normal SRA ou NSRA) peut être initié par l'émetteur ou par le récepteur [0071] et le protocole de NSRA initié par l'émetteur comprend les 9 étapes suivantes [0074] :

1. Pendant l'initialisation, l'émetteur et le récepteur échangent des informations décrivant leurs capacités maximum et minimum en matière de débit de données. Ceci correspond au nombre maximum et au nombre minimum de bits par symbole DMT.

2. L'émetteur détermine que le débit de données doit être augmenté ou diminué.

3. Si le nouveau débit de données souhaité est dans les limites des capacités de débit du récepteur, l'émetteur passe à l'étape 4.

4. L'émetteur envoie au récepteur le nouveau débit de données souhaité en utilisant le canal AOC ou EOC. Ceci correspond à un message de « Demande de NSRA ».

5. Le récepteur reçoit le message de « Demande de NSRA ». Si le canal peut supporter le nouveau débit de données, le récepteur passe à l'étape 6. Si le canal ne peut pas supporter le nouveau débit de données, le récepteur renvoie à l'émetteur un message « Refus de SRA » en utilisant le canal EOC ou AOC.

6. Le récepteur envoie la nouvelle BAT à l'émetteur en utilisant le canal AOC ou EOC sur la base du nouveau débit de données. Ceci correspond à un message « Admission de NSRA » par le récepteur.

7. L'émetteur reçoit le message « Admission de NSRA ».

8. L'émetteur reçoit un symbole « sync » inverse comme fanion pour signaler au récepteur que la nouvelle BAT va être utilisée. La nouvelle table BAT est utilisée en émission sur la première trame, ou un nombre fini de trames, suivant le symbole « sync » inverse. Le symbole « sync » inversé sert de message « Passage au SRA » pour adaptation de débit envoyé par l'émetteur.

9. Le récepteur détecte le symbole « sync » inverse (« Passage au SRA ») et la nouvelle table BAT est utilisée en réception sur la première trame, ou un nombre fini de trames, suivant le symbole « sync » inverse.

Enfin, selon le paragraphe [0079] du brevet EP 020, le protocole de l'invention est robuste car contrairement aux techniques conventionnelles d'adaptation de débit, le message « Passage au SRA » n'est pas envoyé via un message EOC ou AOC qui peut facilement être corrompu. Au lieu de cela, l'admission de la demande d'adaptation de débit est communiquée via un symbole sync inverse. Le symbole sync est défini dans les normes UIT comme un symbole DMT fixe non porteur de données qui est transmis tous les 69 symboles. Le symbole sync est construit en modulant toutes les porteuses DMT avec une séquence PN prédéfinie au moyen d'une modulation QPSK de base (QAM à 2 bits). Ce signal, qui est utilisé pendant tout le processus d'initialisation du modem, a des propriétés d'autocorrélation particulières qui permettent la détection du symbole sync et du symbole sync inverse même dans des environnements présentant un bruit élevé. Un symbole sync inverse est un symbole sync dans lequel l'information de phase dans le signal QAM est décalée de l80 degrés. D'autres décalages de phase (différents de 180 degrés) du symbole sync peuvent également être utilisés pour le message « Passage au SRA ». Exploitant le symbole sync pour le message « Passage au SRA », le protocole d'adaptation de débit s'avère très robuste, même dans les environnements les plus bruyants.

Le brevet se compose de 24 revendications dont seules sont opposées les revendications 1, 7, 13 et 19, suivantes :

1. Procédé de modification de paramètres de transmission dans un émetteur à ondes porteuses multiples, qui est configuré pour transmettre des symboles DMT du type à transmission de données et des symboles DMT non du type à transmission de données, un symbole DMT non du type à transmission de données étant transmis après respectivement N symboles DMT du type à transmission de données, caractérisé par le fait de signaler un changement de paramètres de transmission lors d'un décalage de phase des symboles DMT non du type à transmission de données.

7. Procédé de modification de paramètres de réception dans un émetteur à ondes porteuses multiples, qui est configuré pour recevoir des symboles DMT du type à transmission de données et des symboles DMT non du type à transmission de données, un symbole DMT non du type à transmission de données étant reçu après respectivement N symboles DMT du type à transmission de données, caractérisé par le fait de détecter un décalage de phase que manifestent les symboles DMT non du type à transmission de données.

13. Emetteur à ondes porteuses multiples configuré pour transmettre des symboles DMT du type à transmission de données et des symboles DMT non du type à transmission de données, un symbole DMT non du type à transmission de données étant transmis après respectivement N symboles DMT du type à transmission de données, comprenant un moyen pour modifier les paramètres de transmission, caractérisé par la signalisation de changement de paramètres de transmission lors d'un décalage de phase que manifestent les symboles DMT non du type à transmission de données.

19. Récepteur à ondes porteuses multiples configuré pour recevoir des symboles DMT de réception de données et des symboles DMT non de réception de données, un symbole DMT non de réception de données étant reçu après respectivement N symboles DMT de réception de données, comprenant un moyen pour modifier les paramètres de réception, caractérisé par la détection d'un décalage de phase que manifestent les symboles DMT non de réception de données.

Les revendications 1 et 7 sont des revendications de procédé, les revendications 13 et 19 des revendications de dispositif. Les revendications 1 et 13 définissent l'invention du côté de l'émetteur alors que les revendications 7 et 19 la définissent du côté du récepteur.

A titre liminaire, la cour relève que la société IVII n'a pas relevé appel du chef du jugement déféré qui a rejeté les demandes de publication de la décision. Ce chef de jugement est irrévocable.

- Sur la validité des revendications 1, 7, 13 et 19 du brevet EP 020

L'article L. 614-12, premier alinéa, du code de la propriété intellectuelle dispose que :

« La nullité du brevet européen est prononcée en ce qui concerne la France par décision de justice pour l'un quelconque des motifs visés à l'article 138, paragraphe 1, de la Convention de Munich. »

Selon l'article 138 de la Convention de Munich sur le brevet européen (CBE) :

(1) Sous réserve de l'article 139, le brevet européen ne peut être déclaré nul, avec effet pour un Etat contractant, que si : (')

c) l'objet du brevet européen s'étend au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée ou, lorsque le brevet a été délivré sur la base d'une demande divisionnaire ou d'une nouvelle demande déposée en vertu de l'article 61, si l'objet du brevet s'étend au-delà du contenu de la demande antérieure telle qu'elle a été déposée (') »

L'article 76 (1) de cette Convention prévoit que :

« [Toute demande divisionnaire de brevet européen] ne peut être déposée que pour des éléments qui ne s'étendent pas au-delà du contenu de la demande antérieure telle qu'elle a été déposée ; dans la mesure où il est satisfait à cette exigence, la demande divisionnaire est réputée déposée à la date de dépôt de la demande antérieure et bénéficie du droit de priorité. »

L'article 123 (2) de cette même Convention prévoit que :

« La demande de brevet européen ou le brevet européen ne peut être modifié de manière que son objet s'étende au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée. »

La société IVII critique le jugement déféré qui a annulé les revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 020 pour extension du brevet au-delà de la demande antérieure telle que déposée. Elle reproche au tribunal d'avoir fait une appréciation erronée en droit et une analyse inexacte du contenu de la demande antérieure. Elle considère qu'il ne peut y avoir d'extension indue, l'objet du brevet se déduisant du contenu global de la demande antérieure dans laquelle il est indiqué que l'un des problèmes techniques qui se pose dans les systèmes DMT résulte du besoin d'une signalisation du changement de paramètres de transmission qui ne soit pas sensible au bruit.

Ainsi qu'il a été rappelé, le brevet EP 020 est issu d'une demande européenne divisionnaire déposée le 18 avril 2006 par la société Aware Inc. sur la base d'une demande de brevet européen EP 1 161 820 elle-même issue d'une demande internationale PCT WO 20007054473 du 10 mars 2000 (WO 473) ayant pour titre « Seamless rare adaptative multicarrier modulation system and protocols » (Système et protocoles de modulation multiporteuse à débit adaptatif sans coupure).

L'objectif d'une demande divisionnaire est de reprendre un élément objet de l'invention de la demande antérieure pour le développer. Il convient de vérifier si cette demande divisionnaire telle que délivrée est bien couverte par la demande de brevet antérieure telle que déposée.

A peine de nullité du brevet, l'objet d'une demande de brevet ne peut être étendu au-delà de la demande initiale et sont interdites les généralisations intermédiaires indues comme la suppression des caractéristiques essentielles.

L'extension de l'objet est caractérisée si l'objet des revendications délivrées ne peut pas être déduit directement et sans ambiguïté par la personne du métier de la demande antérieure telle que déposée (incluant l'ensemble de la demande à savoir description, revendications et dessins).

La définition de la personne du métier retenue par les premiers juges, à savoir un : « ingénieur spécialiste des technologies de communication mises en 'uvre dans les réseaux de communication haut débit, et qui, à ce titre, a connaissance des normes en vigueur » sera retenue par la cour, les parties s'accordant sur cette définition tout en lui donnant une portée différente s'agissant des termes « connaissance des normes en vigueur », la société IVII considérant que cette personne du métier aura connaissance de ces normes en tant qu'utilisateur, alors que les intimées le qualifient de sachant ayant connaissance des propositions de ses pairs dans les organismes de normalisation.

Selon la société IVII, la demande antérieure indique que l'un des problèmes techniques qui se pose dans le système DMT résulte du besoin d'une signalisation du changement de paramètres de transmission qui ne soit pas sensible au bruit. Elle considère que pour une personne du métier, la solution à ce problème, telle qu'elle est revendiquée par le brevet EP 020 se déduit directement et sans ambiguïté, sans aucun doute possible, du contenu global de la demande antérieure qui décrit comme étant particulièrement robuste (c'est-à-dire résistante au bruit) une méthode de modification de paramètres de transmission dans un système DMT de type ADSL, dans laquelle un changement de paramètres de transmission est signalé par l'émetteur au récepteur par un décalage de phase de 180° ("inverted") d'un symbole de synchronisation ("sync symbol"), lequel est défini dans les normes ADSL comme un symbole DMT non du type à transmission de données fixe transmis périodiquement tous les 69 symboles, ou autrement dit après chaque transmission de 68 symboles du type à transmission de données (demande antérieure, page 24, lignes 11-15).

Elle considère alors que la demande antérieure décrivant en détail cette solution robuste du changement des paramètres de transmission, la personne du métier comprend du contenu global de cette demande que la solution de signalisation robuste du changement de paramètres de transmission exposée ci-dessus n'est pas limitée au cas d'un système DMT de type ADSL, où le symbole DMT non du type à transmission de données est transmis après chaque transmission de 68 symboles DMT du type à transmission de données, et que ce qui importe est que ce symbole DMT non du type à transmission de données soit transmis avec une périodicité N qui dépend du type de système DMT mis en 'uvre (ADSL ou autre). Elle ajoute que l'homme du métier comprend que ce n'est pas la valeur du décalage de phase du symbole DMT non du type à transmission de données qui importe, mais bien plutôt le décalage de phase en soi. Elle considère en effet qu'indépendamment de sa valeur, c'est ce décalage de phase en soi qui sera détecté par le récepteur comme signal du changement de paramètres de réception. Elle précise que la demande antérieure indique d'ailleurs expressément à la personne du métier que le décalage de phase peut prendre une valeur autre que 180.

Selon les intimées, le brevet EP 020 résout un problème technique qui a été ajouté en cours de délivrance, qui ne figurait ni dans la demande telle que déposée, ni dans la demande antérieure telle que déposée et qui ne peut être déduit directement et sans ambiguïté par l'homme du métier de la demande antérieure.

Ainsi que le rappelle la société IVII, si l'abandon de caractéristique figurant dans la demande antérieure n'est pas en soi interdite, il résulte des décisions des chambres de recours de l'office européen des brevets (OEB) que : « Une telle restriction ou généralisation intermédiaire n'est autorisée au titre de l'article 123(2) CBE que si l'homme du métier reconnaît sans aucun doute à partir de la demande telle que déposée que les caractéristiques tirées d'un mode de réalisation détaillé n'étaient pas étroitement liées aux autres caractéristiques de ce mode de réalisation et appliquées. directement et sans ambiguïté au contexte plus général (T 962/98, point 2.5, souligné dans l'original)».

L'objet de l'invention définie au paragraphe [0026] du brevet EP 020 est de fournir une transmission DMT améliorée dans laquelle les paramètres de transmission peuvent être modifiés de manière simple et/ou fiable. Il est complété d'un paragraphe [0027] selon lequel, l'objet susmentionné est atteint par un procédé selon la revendication 1 ou 7, par un émetteur à ondes porteuses multiples selon la revendication 13 ou par un récepteur à ondes porteuses multiples selon la revendication 19. Des modes de réalisation préférés sont l'objet de sous-revendications.

Ces deux paragraphes de la description du brevet EP 020 ont été ajoutés en cours de procédure de délivrance par rapport à la description de la demande antérieure.

Les revendications 1, 7, 13 et 19 du brevet EP 020 invoquées par la société IVII comportent des éléments nouveaux ainsi que relevé par le tribunal. De nombreuses caractéristiques ont en effet été abandonnées ce qui n'est pas en soi interdit.

Pour autant, l'objet des revendications délivrées doit pouvoir être déduit directement et sans ambigüité de la demande antérieure telle que déposée.

Les intimées reprochent l'extension de l'objet du brevet pour plusieurs raisons dont la généralisation du problème technique à résoudre, la généralisation du symbole de synchronisation à tout symbole DMT ne véhiculant pas de données, l'abandon des caractéristiques relatives aux mots de code et à l'entrelaceur, la prise en compte de façon isolée d'une étape inextricablement liée aux autres étapes, l'absence de caractère transparent de la modification de débit, la généralisation du changement de débit à tout paramètre.

Il ressort de la lecture de la demande antérieure WO 473 dont le titre est « Seamless rate adaptative multicarrier modulations system and protocols » et notamment de la page 17 ligne 8 et 9, page 18, lignes 7 et 8, page 20 lignes 28 à 30, page 21 lignes 14 à 16, que la notion de robustesse est associée à l'adaptation « transparente » du débit, à savoir qui n'entraîne pas d'interruption de l'émission et de la réception des données. Il est également question dans les revendications de cette demande antérieure d'une modification transparente de débits de données (« seamlessly changing a transmission bit rate »).

En outre, il est précisé dans cette demande ainsi que le relèvent les intimées :

- que les normes UIT G.992.1 et TI.413 spécifient un mécanisme d'adaptation de débit en ligne appelé DRA, mais qu'il est clairement précisé dans ces normes que la modification du débit de données ne sera pas transparent (seamless) (page 6 ligne 30- page 7 ligne 1 de la demande antérieure) ;

- qu'en général les modems ADSL DMT utilisent le transfert de bits ou « bit swapping » et le DRA pour une adaptation en ligne des modifications de canal (page 7 lignes 1 et 2) ;

- que le « bit swapping » est transparent mais ne permet pas la modification du débit de données (page 7 lignes 4 et 5) ;

- que le DRA permet une modification du débit de données mais n'est pas transparent (page 7 ligne 9).

De même il est indiqué en page 8 lignes 10 et 11 de la demande antérieure que « selon les principes de l'invention, des systèmes et procédés ADSL DMT sont tels qu'ils modifient les débits binaires de transmission d'une manière transparente pendant le fonctionnement ».

Page 18, lignes 1 à 8, de le demande antérieure, il est mentionné que : « pour permettre à un système ADSL DMT de modifier le débit de données de façon transparente, l'invention propose ce qui suit :

- un procédé plus efficace de tramage et d'encodage des données, qui se traduit par une réduction du nombre de bits de données par symbole DMT, et donc à une augmentation du débit binaire utilisateur,

- un nouveau système ADSL ayant la capacité d'adapter de façon dynamique le débit de données en ligne d'une manière transparente,

et

- un nouveau protocole robuste et rapide pour réaliser une telle adaptation de débit transparente, de façon qu'une modification de débit de données puisse se produire correctement même en présence de bruits élevés.

L'objectif de l'invention, tel que décrit dans ces paragraphes est donc de modifier de façon transparente un débit de données comme l'indiquent les intimées.

Aussi c'est à juste raison que le tribunal a considéré qu'il résulte des revendications, de la description et des dessins et même du titre, que l'objet de la demande antérieure WO 473 était de proposer un procédé transparent sans coupure d'adaptation du débit dans un système ADSL et non comme le soutient l'appelante en faisant une lecture extensive de la demande antérieure que l'un des problèmes techniques qui se pose dans le système DMT résulte du besoin d'une signalisation du changement de paramètres de transmission qui ne soit pas sensible au bruit (ou robuste).

Comme le soutiennent à juste titre les intimées, aucun élément de la demande antérieure ne permet donc de généraliser le problème initial de savoir comment modifier de façon transparente un débit de données à une modification englobant tous paramètres de transmission quelle que soit leur nature et toute modification non transparente.

La séparation de la caractéristique de la robustesse de celle de l'adaptation transparente de débit formule un nouveau problème technique qui ne correspond pas au problème technique initialement décrit dans la demande antérieure WO 473 qui était de savoir comment changer de débit de données de manière transparente dans un système ADSL. La société IVII n'invoque pas utilement la référence dans la demande antérieure au document de priorité 1 selon laquelle l'invention peut s'appliquer à des systèmes DMT autre que l'ADSL car il ne constitue pas une caractéristique qui concourt à résoudre le problème technique qui sous-tend l'invention. De même est inopérante la formule très générale figurant en page 33 lignes 25 à 28 de la demande antérieure selon laquelle l'invention peut être appliquée « à tout système dans lequel différents nombre de bits sont modulés sur les porteuse », ce type de formulation vague qui vise à élargir l'étendue de la protection de manière non précisément définie n'étant pas admise ainsi que le font valoir les intimées par les directives d'examen de l'OEB. La personne du métier ne se fondera donc pas sur cette formulation vague pour en déduire que l'invention objet de la demande antérieure s'applique à d'autres systèmes DMT que l'ADSL.

Aussi, il résulte de ce qui précède que la personne du métier ne peut déduire directement et sans ambigüité du contenu de la demande antérieure que l'objet de l'invention serait de fournir une transmission DMT améliorée, dans lesquelles les paramètres de transmission et pas seulement le débit des données peuvent être modifiés de façon simple et fiable. La personne du métier ne peut pas non plus déduire directement et sans ambigüité du contenu de la demande antérieure que l'objet de l'invention serait de permettre une signalisation robuste du changement de tout paramètre de transmission indépendamment du protocole d'adaptation transparent.

Il s'agit donc d'un élargissement inadmissible de l'objet du brevet au sens des articles 138 (1) et 76 (1) de la CBE.

En outre dans les revendications 1, 7, 13 et 19 du brevet EP 020, « le symbole DMT ne véhiculant pas de données dont on va détecter le changement de phase », n'est pas nécessairement un symbole de synchronisation inversé. Or, le contenu de la demande antérieure ne divulgue (page 14 ligne 25 et page 31 lignes 14-15) que l'utilisation, pour signaler un changement de paramètre, d'un symbole de synchronisation construit par changement de phase d'un symbole DMT particulier et envoyé tous les 69 symboles, ce qui confère à ce signal de propriétés d'autocorrélation spéciales qui rendent possible la détection de ce symbole et du symbole inversé même dans des milieux bruyants (page 24 lignes 14-23).

Il apparaît en outre de la demande antérieure (page 20 lignes 28-30 notamment), comme le soutiennent les intimées, que l'utilisation d'un symbole de synchronisation qui est particulièrement robuste pour signaler le changement de paramètres apparait comme essentielle pour résoudre le problème de la transition transparente entre un ancien et un nouveau débit de données dans un environnement bruyant. Le fait que la demande antérieure indique en page 24 que pour signaler le changement de paramètres de transmission est utilisé un décalage de phase de symbole DMT non de type à transmission de données qui a transmis périodiquement, ce décalage de phase pouvant être à 180° mais également d'une valeur autre que 180° est indifférent, la personne du métier ne pouvant déduire directement et sans ambigüité de cette incise qu'il est possible d'obtenir le même avantage avec n'importe quel symbole DMT non porteur de données en se fondant sur ses connaissances générales dans ce domaine.

Il s'ensuit que le brevet EP 020 couvre des réalisations non divulguées dans la demande antérieure.

Il ressort également et ainsi que le font à juste titre valoir les intimées que dans la demande antérieure le protocole de changement de débit du système est décrit sous différentes formes NSRA et FSRA (pages 21-23 et 25-26). Les différentes formes de ce protocole comportent toutes une étape de signalisation du changement de débit du système par un symbole de synchronisation « inversé » (étape 6 en page 22, étape 8 en page 23, étape 5 en page 25, étape 7 en page 26). Cette étape de signalisation suit toujours un processus de décision de changement de débit en fonction des conditions de transmission (du bruit par exemple) sur les canaux de communication et un échange de table BAT. Cette étape n'est jamais décrite seule, en dehors de ce contexte.

Les revendications 1, 7, 13 et 19 du brevet EP 020 isolent l'étape de signalisation et la généralisent en mentionnant un symbole DMT non porteur de données au lieu d'un symbole de synchronisation et en changeant l'inversion du signal en un changement de phase.

Or, la personne du métier ne pouvait pas déduire directement et sans ambiguïté de la demande antérieure telle que déposée qu'il serait possible de signaler un changement de débit sans passer par l'ensemble des étapes des protocoles complets NSRA et FSRA de la demande antérieure qui n'en décrit aucun autre. En outre, la signalisation d'un changement de débit est liée au préalable à l'échange d'une table BAT ou l'échange d'indication désignant une nouvelle table BAT. A cet égard, la société IVII ne peut utilement invoquer la formule très générale figurant en page 33 lignes 25 à 28 de la demande antérieure ainsi qu'il a été dit ci-avant.

Les revendications 1, 7, 13 et 19 qui ne reprennent pas ce protocole complet et parlent de changement de phase d'un symbole DMT non porteur de données au lieu d'une inversion de bits du symbole de synchronisation opèrent une généralisation inadmissible, l'homme du métier ne pouvant la déduire directement et sans ambiguïté du contenu de la demande antérieure telle que déposée.

Les revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 020 doivent en conséquence, pour l'ensemble de ces motifs, être annulées pour extension du brevet au-delà de la demande antérieure telle que déposée.

Le jugement mérite confirmation de ce chef comme de celui ordonnant la transmission de la décision à l'Institut national de la propriété industrielle pour inscription au registre national des brevets.

- Sur l'étendue de la saisine de la cour

Ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, le juge de la mise en état a « séquencé » l'examen de l'affaire devant le tribunal en trois phases : phase 1 : validité du brevet EP 020 (revendications 1, 7, 13 et 19) et contrefaçon, phase 2 : licences opposables et épuisement du droit, phase 3 : réparation du préjudice , a procédé à des disjonctions, enrôlé les phases 2 et 3 sous un numéro de RG distinct, clôturé la phase 1 et ordonné le 3 mars 2022, soit postérieurement au jugement, un sursis à statuer pour les deux autres phases dans l'attente de l'arrêt à intervenir.

Le jugement entrepris a, en conséquence du prononcé de la nullité des revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 020, rejeté toutes les demandes formées sur la contrefaçon de ce brevet ainsi que les demandes de publication judiciaire, condamné la société IVII à payer les dépens et des frais irrépétibles.

Les parties s'opposent sur l'étendue de la saisine de la cour, la société IVII considérant qu'elle est saisie de l'entier litige alors que les intimées soutiennent que la césure et la clôture partielle ordonnée par le juge de la mise en état, font que le jugement a été partiel et que l'appel ne porte que sur les prétentions tranchées.

En suite de la clôture partielle de l'instruction de l'affaire devant le tribunal par ordonnance du 29 avril 2021, celui-ci était saisi de la validité du brevet EP 020 et de la contrefaçon de ce brevet et non de la réparation du préjudice en lien avec la contrefaçon si celle-ci est retenue.

En rejetant les demandes de la société IVII au titre de la contrefaçon, le tribunal a vidé sa saisine sans pour autant statuer sur les questions des licences opposables, de l'épuisement du droit et sur le préjudice dont il n'était pas saisi.

Les déclarations d'appel de la société IVII des 11 janvier et 1er février 2022 qui ont porté sur l'ensemble des chefs du jugement à l'exception du rejet des demandes de publication, a donc saisi la cour des seules questions de la validité du brevet et de la contrefaçon, le tribunal étant toujours saisi des questions objets des phases 2 et 3 et partant de la réparation du préjudice.

Les revendications de la partie française du brevet EP 020 ayant été annulées, le chef du jugement ayant rejeté les demandes de la société IVII au titre de la contrefaçon est confirmé.

Le sens de l'arrêt conduit à rejeter les demandes de publication judiciaire de la société IVII formées à hauteur d'appel.

- Sur les autres demandes

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer les dispositions du jugement concernant les dépens et les frais irrépétibles.

Partie perdante, la société IVII est condamnée aux dépens d'appel sauf s'agissant de ceux de l'instance l'opposant à la société Huwei et à payer à la société SFR et à la société Broadcom Products Unlimited Company, en application de l'article 700 du code de procédure civile, une indemnité complémentaire qui sera, en équité, fixée à la somme de 100 000 euros pour chacune.

La société Huwei conservera à sa charge les dépens qu'elle a exposés au cours de l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, dans les limites de l'appel,

Constate le désistement de la société Intellectual Ventures II de ses demandes à l'encontre de la société Huawei Technologies France au titre des articles 696 et 700 du code de procédure civile,

Constate le désistement de la société Huawei Technologies France de l'ensemble de ses demandes qu'il s'agisse de celles formées devant le tribunal judiciaire dans l'instance RG 17/13839 ayant conduit au jugement frappé d'appel ou devant la cour d'appel à l'encontre de la société Intellectual Ventures II, et notamment de sa demande en nullité des revendications 1, 7, 13 et 19 de la partie française du brevet EP 1 694 020,

Dit les désistements parfaits,

Constate l'extinction de l'instance en ce qu'elle oppose les sociétés Intellectual Ventures II et Huawei Technologies France et le dessaisissement de la cour,

Dit que la société Huawei Technologies France conservera à sa charge les dépens qu'elle a exposés au cours de l'instance d'appel,

Dit que l'instance se poursuit entre la société Intellectual Ventures II, d'une part, et la société SFR et la société Broadcom Products Unlimited Company, d'autre part,

Rejette la demande de la société Intellectual Ventures II de rejet de la pièce PLA0015,

Confirme le jugement entrepris,

Y ajoutant,

Rejette les demandes de publication judiciaire de la société Intellectual Ventures II,

Condamne la société Intellectual Ventures II à payer à la société SFR la somme de 100 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

Condamne la société Intellectual Ventures II à payer à la société Broadcom Products Unlimited Company la somme de 100 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

Déboute la société Intellectual Ventures II de sa demande au titre des frais irrépétibles,

Condamne la société Intellectual Ventures II aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.