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Décisions

CA Colmar, 2e ch. A, 27 juin 2024, n° 21/04982

COLMAR

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Vegan Franchise (SARL), Egh Mandataire Judiciaire (SAS), Serenite (SCI)

Défendeur :

Cabinet Immobilier Boujan (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Diepenbroek

Conseillers :

Mme Denort, Mme Hery

Avocats :

Me Harnist, Me Harter, Me Polidori, Me Litou-Wolff, Me Hecker, Me Martin, Me Wechter, Me Zimmermann

TJ Strasbourg, du 7 oct. 2021, n° 21/049…

7 octobre 2021

FAITS ET PROCEDURE

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La SCI Sérénité est propriétaire des lots n°2, 25 et 26 situés au rez-de-chaussée de l'immeuble en copropriété situé [...] à [Localité 10] acquis auprès de la SCI [T] VI le 9 octobre 2012.

Selon acte notarié du 20 octobre 2015, le droit au bail commercial conclu le 18 juillet 2014 entre la SCI Sérénité propriétaire des locaux et la SARL Polo portant sur ces lots a fait l'objet d'une cession à la SARL Velicious qui y exploite une activité de restauration.

Par requête signifiée le 19 février 2016, le syndicat des copropriétaires du [...] à [Localité 10] (dit le syndicat des copropriétaires) a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Strasbourg afin que la SCI Sérénité et la SARL Velicious soient solidairement condamnées à supprimer le raccordement de la hotte du restaurant au conduit de fumée de l'immeuble et à remettre'le conduit à l'état initial.

Par ordonnance en date du 3 mai 2016, rectifiée le 25 mai 2016, le juge des référés a condamné in solidum la SCI Sérénité et la SARL Velicious à supprimer le raccordement de la hotte du restaurant au conduit de cheminée de l'immeuble et à remettre ce dernier en état.

Le 29 juin 2016, l'assemblée générale des copropriétaires du [...] à [Localité 10] a refusé d'accorder son autorisation aux travaux d'installation d'un conduit d'extraction indépendant pour le restaurant sur la façade arrière de l'immeuble sollicités par la SCI Sérénité

Le 17 octobre 2016, la SCI Sérénité a fait assigner le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic, le cabinet Omnium Financier et Immobilier et la SCI [T] VI devant le tribunal de grande instance de Strasbourg aux fins d'obtenir l'autorisation judiciaire de réaliser lesdits travaux et de voir déclarer le jugement commun et opposable à la SCI [T] VI.

Le 14 novembre 2016, le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic le cabinet Omnium Financier et Immobilier a fait assigner la SCI Sérénité et la SARL Velicious devant le tribunal de grande instance de Strasbourg aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire du bail commercial liant la SCI Sérénité à la SARL Velicious et d'obtenir l'expulsion de cette dernière.

Les deux procédures ont été jointes sous le n° RG 16-5536.

Par jugement du 7 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Strasbourg remplaçant le tribunal de grande instance a':

-''''''' débouté la SCI Sérénité et la SARL Vegan Union, venant aux droits de la SARL Velicious de leur demande d'autorisation de réaliser à leurs frais les travaux de pose d'une gaine d'extraction extérieure pour évacuer les vapeurs de cuisine';

-''''''' débouté la SCI Sérénité de ses demandes à l'encontre de la SCI [T] VI au titre de la garantie des vices cachés';

-''''''' débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] à [Localité 10] de ses demandes relatives à la cessation de l'emprise illicite sur le conduit de cheminée de l'immeuble [...] à [Localité 10] ;

-''''''' prononcé la résiliation judiciaire du bail commercial conclu le 18 juillet 2014 entre la SCI Sérénité d'une part, et, par suite de la cession de droit au bail intervenue le 20 octobre 2015, la SARL Vegan Union, venant aux droits de la SARL Velicious d'autre part ;

-''''''' ordonné l'expulsion de la SARL Vegan Union, venant aux droits de la SARL Velicious et de tous occupants de son chef des lieux qu'elle occupe [...] à [Localité 10], si besoin est, avec le concours de la force publique;

-''''''' débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] à [Localité 10] de sa demande indemnitaire à l'encontre de la SCI Sérénité, de la SARL Vegan Union, venant aux droits de la SARL Velicious ;

-''''''' débouté la SARL Vegan Union, venant aux droits de la SARL Velicious de sa demande indemnitaire à l'égard de la SCI Sérénité au titre du manquement à l'obligation de délivrance conforme du bailleur';

-''''''' débouté la SARL Vegan Union, venant aux droits de la SARL Velicious de sa demande indemnitaire à l'égard du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] à [Localité 10] ;

-''''''' débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-''''''' dit que la SCI Sérénité sera dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure et des frais irrépétibles, dont la charge sera répartie entre les copropriétaires ;

-''''''' dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire ;

-''''''' débouté les parties de l'ensemble de leurs autres fins, moyens, demandes et prétentions.

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Sur la demande d'autorisation de travaux, après avoir rappelé les dispositions des articles 25 b), 30 alinéa 4 et 9 de la loi du 10 juillet 1965, le tribunal a considéré que l'installation d'un conduit de cheminée d'extraction constituait relevait des travaux d'amélioration au sens de l'article 30 de la loi du 10 juillet 1965, d'une part, au regard de l'activité de restaurant pratiquée par la société Velicious, ce conduit était même une condition indispensable à l'exercice de ce commerce, d'autre part, dans la mesure où elle devait permettre une meilleure ventilation des locaux concernés mais également des parties communes et contribuait ainsi à de meilleures conditions de jouissance pour l'ensemble des copropriétaires.

Le tribunal a, ensuite, indiqué que, dans le règlement de copropriété, le lot n°2 appartenant à la SCI Sérénité et loué par la SARL Velicious devenue la SARL Vegan Union était décrit comme «'au rez-de-chaussée : une entrée, une cuisine, trois chambres, un magasin, une salle de bain avec WC et un dégagement'», qu'en sa page 16, le règlement prévoyait au paragraphe intitulé «'occupation ' destination'» que: «'Les locaux sont destinés à être occupés bourgeoisement par des personnes de bonne vie et moeurs de façon à ne pas nuire par leur fait direct ou indirect à la bonne tenue et à la tranquillité de l'immeuble collectif. Les appartements pourront également être utilisés pour partie à l'habitation et pour partie à l'exploitation de profession commerciale ou libérale, comme bureaux ou comme locaux administratifs, c'est-à-dire à usage mixte'» Il en a déduit que ledit règlement n'autorisait pas toute activité commerciale puisqu'il la restreignait en prévoyant la possibilité de bureaux ou de locaux administratifs mais seulement dans une partie des appartements.

Il a précisé qu'un bureau constitue un local dans lequel ne sont exercées que des activités administratives ou intellectuelles, qui peuvent être commerciales où il est possible de recevoir une clientèle mais où ne sont ni stockées, ni manipulées, ni vendues des marchandises et qu'au contraire, un restaurant était un établissement commercial où l'on sert des repas contre paiement, ces deux activités étant différentes, de sorte que si le règlement de copropriété autorisait l'exploitation d'une activité commerciale, il ne permettait pas de faire usage du lot n°2 pour y exercer une activité de restauration, même de petite restauration, qui plus est, dans l'intégralité du local, peu important que la copropriété ait préalablement toléré une activité de restauration depuis au moins 2006.

Il en a déduit que la demande d'installation d'une hotte d'extraction devait être rejetée.

Sur la demande de la SCI Sérénité à l'encontre de la SCI [T] VI sur le fondement de la garantie des vices cachés, le tribunal, après l'avoir déclarée recevable, avoir rappelé les dispositions de l'article 1641 du code civil, que pour engager cette garantie, le vice devait être non apparent, antérieur à la vente, atteindre la chose dans une de ses qualités principales et être d'une gravité suffisante et qu'il appartenait au demandeur de rapporter la preuve de l'existence d'un vice caché présentant l'ensemble de ces caractéristiques, le tribunal a retenu qu' il résultait, tant du rapport d'intervention établi par la SARL Hérisson 67 en date du 20 novembre 2015 que des courriers adressés par le service hygiène et santé environnementale de la direction de la réglementation urbaine de l'Eurométropole, le 22 décembre 2015, que la hotte de cuisine professionnelle du restaurant Velicious situé au rez-de-chaussée du [...] à [Localité 10] était raccordée à un conduit de cheminée de l'immeuble, lequel était, au surplus, vétuste, non nettoyé et non dégraissé alors qu'un tel raccordement était interdit notamment par l'article 130.3 du règlement sanitaire départemental du Bas-Rhin, ce qui caractérisait une non-conformité constitutive d'un désordre d'une particulière gravité et qui rendait le lot n°2 impropre à sa destination, que ce soit comme lieu d'habitation ou comme lieu d'exercice d'une activité commerciale, dès lors qu'elle mettait en danger la sécurité des occupants de l'immeuble en permettant ou facilitant les dépôts de résidus de graisse le long du conduit de cheminée susceptibles de provoquer un départ de feu.

Il a souligné que ni l'existence, ni le caractère caché de ce désordre n'était débattu par les parties puisque tant les demandeurs que les défendeurs assuraient ne rien avoir constaté avant la vente survenue le 9 octobre 2012 et, qu'en tout état de cause, il avait été nécessaire que la SARL Hérisson procède à une vidéoscopie du conduit de cheminée litigieux pour établir la réalité du raccordement et donc du désordre.

Il a considéré qu'il était démontré que le raccordement de la hotte du restaurant au conduit de cheminée de l'immeuble avait été effectif avant le 9 octobre 2012, date de la vente entre la SCI [T] VI et la SCI Sérénité au regard':

-''''''' du bail commercial conclu le 18 juillet 2014 entre SCI Sérénité et la SASU Polo précisant en sa page 2, sur la désignation du bien loué, que « par suite des travaux d'agencement intérieurs qui ont été réalisés par le précédent locataire les biens objet des présentes comprennent actuellement': une salle d'accueil, un bureau, un double WC et deux salles surélevées'»,

-''''''' du devis n°DE02791 émis le 10 mai 2011 ainsi que de la facture n0FS017157 émise le 20 décembre 2011 à l'attention de Mme [V] [I], gérante de la société Sérénitude, locataire de la SCI [T] VI, portant sur l'installation, le raccordement et la mise en route d'un capteur de hotte motorisé.

Au regard de ces éléments, le tribunal a retenu que la SCI Sérénité ne rapportait pas la preuve que le lot n°2 de l'immeuble en copropriété était affecté au jour de la vente d'un vice non apparent l'ayant rendu impropre à sa destination ou ayant tellement diminué son usage qu'elle ne l'aurait pas acquis si elle avait connu ce vice ou bien en aurait donné un moindre prix.'

Sur la clause d'exonération, après avoir rappelé les dispositions de l'article 1643 du code civil et rappelé qu'une telle clause devait être écartée lorsque le vendeur était un professionnel et l'acheteur un profane et qu'en cas de vente entre professionnels de la même spécialité, la garantie du vendeur ne pouvait être invoquée lorsqu'une clause de non garantie des vices-cachés était insérée à l'acte, le tribunal a indiqué que l'acte authentique de vente entre 'la SCI [T] VI et la SCI Sérénité prévoyait 'que le vendeur n'était pas tenu à la garantie des vices cachés pouvant affecter le sol, le sous-sol ou les bâtiments à raison notamment des vices de construction, qu'ils soient apparents ou cachés.

Il a fait état de ce qu'aucune pièce versée aux débats ne permettait d'établir que la SCI [T] VI avait connaissance du raccordement effectué par la société Sérénitude lequel n'avait été révélé que par les investigations de la SARL Hérisson 67 par vidéoscopie.

Considérant que l'extrait Kbis et les statuts de la SCI Sérénité permettaient d'établir que son activité était identique à celle de la SCI [T] VI, il a considéré que l'acte authentique de vente du 9 octobre 2012 avait été conclu entre deux professionnels de la même spécialité et que, par suite, la garantie du vendeur ne pouvait être invoquée.

Le tribunal a rejeté la demande du syndicat des copropriétaires tendant à la cessation de l'emprise illicite.

Sur l'action oblique du syndicat des copropriétaires tendant la résiliation du bail commercial conclu entre la SCI Sérénité et la SARL Velicious devenue la SARL Vegan Union, après l'avoir considérée recevable, le tribunal a rappelé les dispositions de l'article 1166 du code civil devenu 1341-1 aux termes desquelles il est admis qu'un syndicat de copropriétaires, en cas de carence du copropriétaire-bailleur, a le droit d'exercer l'action oblique en résiliation du bail dès lors que le locataire contrevient aux obligations découlant de celui-ci et au règlement de copropriété et que ses agissements causent un préjudice aux copropriétaires. Il a également indiqué que le règlement de copropriété ayant la nature d'un contrat, chaque copropriétaire avait le droit d'en exiger le respect par les autres, de sorte que tout copropriétaire titulaire de cette créance pouvait à l'instar du syndicat des copropriétaires exercer les droits et actions du copropriétaire-bailleur pour obtenir la résiliation d'un bail lorsque le preneur méconnaissait les stipulations du règlement de copropriété et du bail.

Il a retenu que la société Sérénité, en sa qualité de bailleur, n'avait pas procédé aux diligences susceptibles de mettre fin aux manquements de la société Velicious devenue Vegan Union aux dispositions de règlement de copropriété puisqu'elle ne s'était pas assurée que les mesures adoptées par son locataire étaient efficaces et de la cessation des troubles.

Il a ajouté que la carence du bailleur à poursuivre la résiliation du bail était établie dès lors que la société Sérénité avait consenti à la société Velicious un bail contraire à la destination de l'immeuble telle que prévue au règlement de copropriété.

Il a déclaré l'action non prescrite au regard des dispositions de l'article 2224 du code civil prévoyant une prescription quinquennale. Pour ce faire, il a rappelé que le syndicat des copropriétaires sollicitait la résiliation judiciaire du contrat de bail commercial liant la SCI Sérénité et la SARL Velicious devenue Vegan Union en raison des violations du règlement de copropriété que constituaient les nuisances olfactives et sonores générées par l'activité de restauration de la SARL Velicious et son occupation exclusivement commerciale du lot n°2 de la copropriété'; il a considéré que cette dernière ayant acquis par acte authentique en date du 20 octobre 2015 le droit au bail de la SARL Polo issu du contrat de bail conclu le 18 juillet 2014, le point de départ de la prescription ne pouvait se situer avant cette date'; il a retenu que le délai quinquennal de prescription expirait le 23 décembre 2020, faisant état de ce que les premières plaintes des copropriétaires relatives à de fortes odeurs de cuisine étaient mentionnées dans le procès-verbal de l'assemblée générale du 10 juin 2015 et que l'origine de ces nuisances, à savoir le raccordement de la hotte de la cuisine du restaurant au conduit de cheminée avait été établi et porté à la connaissance du syndicat des copropriétaires et de la SCI Sérénité notamment par le courrier du service de l'hygiène de l'Eurométropole de [Localité 10] le 22 décembre 2015.

Il a ajouté que l'assignation du 19 février 2016 délivrée par le syndicat des copropriétaires à la SCI Sérénité et la SARL Velicious notamment aux fins de faire cesser l'activité de restauration exercée par cette dernière au regard de sa non-conformité avec le règlement de copropriété et des nuisances qu'elle engendrait avait eu pour effet, conformément à l'article 2241 du code civil d'interrompre le délai de prescription et d'en faire courir un nouveau à compter de la décision du 3 mai 2016.

Il en a déduit que la présente instance ayant été introduite par assignation en date du 17 octobre 2016 et la demande de résiliation du bail par le syndicat des copropriétaires ayant été présentée par conclusions en date du 29 mai 2017, soit moins de cinq ans après le 3 mai 2016, la demande du syndicat des copropriétaires était recevable.

Sur les nuisances et la non-conformité à la destination de l'immeuble, le tribunal a indiqué qu'il résultait':

-''''''' du contrat de cession de droit au bail conclu le 20 octobre 2015 et du contrat de bail conclu le 18 juillet 2014 que les locaux avaient été loués par la SARL Velicious à destination exclusive de «'l'exploitation de son fonds de commerce de petite restauration pour lequel il est régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés à l'exclusion de toute autre activité commerciale, même temporairement, sous réserve de la mise en oeuvre des dispositions de l'article L.145-47 du code de commerce relatives à la déspécialisation, ouvrant au preneur la possibilité d'adjoindre à l'activité ci-dessus prévue des activités connexes ou complémentaires'»,

-''''''' du bail que la société locataire s'était engagée à jouir des lieux en bon père de famille suivant leur destination et à se conformer au règlement de copropriété dont elle a reconnu avoir reçu un exemplaire,

-''''''' de l'acte de cession du droit au bail que le cessionnaire reconnaissait avoir reçu préalablement à la signature une expédition du bail conclu le 18 juillet 2014,

-''''''' le règlement de copropriété prévoyait en page 16 au paragraphe intitulé «'occupation-destination'» que : «'Les locaux sont destinés à être occupés bourgeoisement par des personnes de bonne vie et moeurs de façon à ne pas nuire par leur fait direct ou indirect à la bonne tenue et à la tranquillité de l'immeuble collectif Les appartements pourront également être utilisés pour partie à l'habitation et pour partie à l'exploitation de profession commerciale ou libérale, comme bureaux ou comme locaux administratifs, c'est-à-dire à usage mixte'»,

-''''''' le même document mentionnait en page 9 que : «'Les copropriétaires ne pourront faire ou laisser faire aucun travail habituel avec ou sans machine-outil qui serait de nature à nuire à la solidité de l'immeuble ou à gêner les voisins par le bruit, les odeurs persistantes ou les trépidations'».

Rappelant que le règlement de copropriété restreignait les activités commerciales autorisées à celles de bureaux ou de locaux administratifs et sur une partie seulement du local, le tribunal a retenu que l'activité de restauration exercée par la société Velicious devenue Vegan Union n'était pas tolérée par le règlement de copropriété.

Il a fait état de ce que de nombreuses attestations de plusieurs copropriétaires, résidents et amis de ces derniers que les occupants et visiteurs de l'immeuble se plaignaient des nuisances causées par l'occupation du local en particulier d'odeurs de cuisine persistantes tant dans les parties privatives que communes ainsi que des bruits émanant de la terrasse et de l'activité du restaurant.

Il a souligné que les plaintes des copropriétaires étaient corroborées par les constats des services d'hygiène et santé environnemental de l'Eurométropole de [Localité 10], par les fiches d'intervention de la SARL Hérisson 67 des 23 novembre 2018 et 12 juillet 2019.

Il en a déduit que l'existence des troubles était caractérisée, lesquels, par leur répétition et leur durée excédaient les inconvénients normaux du voisinage et que ces

manquements étaient suffisamment graves pour justifier la résiliation du contrat de bail conclu entre la SCI Sérénité et la SARL Velicious devenue la SARL Vegan Union et ordonner l'expulsion de cette dernière et de tous occupants de son chef des locaux qu'elle occupe dans l'immeuble [...] à [Localité 10].

Le tribunal a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes indemnitaires formulées au titre de l'emprise irrégulière.

Le tribunal a rejeté la demande de la SARL Vegan Union à l'encontre la SCI Sérénité pour défaut de délivrance conforme ainsi que celle de dommages et intérêts formulée à l'encontre du syndicat des copropriétaires.

La SARL Vegan Union a formé appel à l'encontre de ce jugement par voie électronique le 6 décembre 2021. (n° RG21/4982).

La SCI Sérénité a formé appel à l'encontre de ce jugement par voie électronique le 9 décembre 2021. (n° RG21/4983).

Par ordonnance du 6 décembre 2022, cette dernière affaire a été jointe à celle portant le n° RG 21/4982.

Par jugement du 3 avril 2023, le tribunal judiciaire de Strasbourg a placé la société Vegan Union devenue Vegan Franchise en redressement judiciaire.

Par ordonnance du 6 juin 2023, le magistrat chargé de la mise en état a prononcé l'interruption de l'instance.

Par conclusions transmises par voie électronique le 17 juillet 2023, le syndicat des copropriétaires a repris l'instance en appelant en la cause les organes de la procédure nommés par le tribunal judiciaire.

L'instruction a été clôturée le 5 décembre 2023.

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PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

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Aux termes de leurs conclusions transmises par voie électronique le 17 novembre 2023, la SARL Vegan Franchise anciennement dénommée Vegan Union, la SAS EGH Mandataire Judiciaire prise en la personne de Me [Z] [K]-[O], ès-qualités de mandataire judiciaire de la société Vegan Franchise et la SAS [R]-[F]-[A] prise en la personne de Me [J] [F], ès-qualités d'administrateur judiciaire de la SARL Vegan Franchise demandent à la cour de':

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-''''''' donner acte aux mises en cause de leur intervention forcée aux côtés de la société Vegan Franchise';

-''''''' faire intégralement droit aux conclusions de la société Vegan Franchise';

-''''''' condamner le syndicat des copropriétaires aux entiers frais et dépens de la mise en cause des 'sociétés EGH mandataire judiciaire et [R]-[F]-[A]';

-''''''' statuer ce que de droit quant à l'appel principal de la SCI Sérénité';

-''''''' déclarer l'appel incident du' syndicat' des' copropriétaires' de' l'immeuble' [Adresse 3] A [Localité 10] mal fondé, l'en débouter ainsi que de l'intégralité de leurs fins, moyens et conclusions';

-''''''' recevoir la société Vegan Union devenue Vegan Franchise en son appel';

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y faisant droit et statuant à nouveau':

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-''''''' déclarer l'appel interjeté par la société Vegan Union devenue Vegan Franchise bien fondé';

-''''''' infirmer le' jugement' entrepris' en' tant' qu'il' a' prononcé' la' résiliation' judiciaire' du' bail commercial conclu le 18 juillet 2014 entre la SCI Sérénité et la société Velicious et ordonné l'expulsion de la société Vegan Union';

statuant à nouveau':

-''''''' déclarer l'action en résiliation judiciaire du bail commercial engagée par le syndicat des copropriétaires tardive et prescrite';

subsidiairement':

-''''''' déclarer le' syndicat' des' copropriétaires' irrecevable' en' tout' cas' mal' fondé' en' ses demandes, fins et conclusions';

-''''''' infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SARL Vegan Union de sa demande d'autorisation de réaliser à ses frais les travaux de pose d'une gaine d'extraction extérieure pour évacuer les vapeurs de cuisine';

'et statuant à nouveau':

-''''''' déclarer la demande d'autorisation judicaire de travaux recevable et bien fondée';

'en conséquence':

-''''''' autoriser 'la' SCI' Sérénité' et' la' SARL' Vegan' Union' devenue' Vegan Franchise à réaliser à leurs frais les travaux de pose d'une gaine d'extraction extérieure pour évacuer les vapeurs de cuisine';

'''' très subsidiairement':

-''''''' condamner la SCI Sérénité à payer à titre provisionnel à la SARL Vegan Union devenue Vegan Franchise une somme de 10 064,95 euros en réparation de son préjudice d'exploitation';

-''''''' condamner la SCI Sérénité à garantir la société Vegan Union devenue Vegan Franchise' de' l'intégralité' de' son' préjudice' financier' et' matériel' en' cas' d'évacuation forcée';

-''''''' condamner' le' syndicat' des' copropriétaires' à' payer' à' titre' provisionnel' à' la' SARL Vegan Union devenue Vegan Franchise une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice occasionné';

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en tout état de' cause':

-''''''' condamner le' syndicat' des' copropriétaires' à' verser' à' la' SARL' Vegan' Union devenue Vegan Franchise la somme de 7 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

-''''''' condamner toute' partie' succombante' à' supporter' les' entiers' dépens' de' première instance et d'appel.

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S'agissant de la résiliation judiciaire du bail et l'évacuation, l'appelante expose que deux conditions sont nécessaires pour l'exercice de l'action oblique à savoir le non-respect du règlement de copropriété par le preneur et la carence du copropriétaire bailleur.

Elle soutient que l'action oblique en résiliation du bail exercée par le syndic est prescrite en vertu de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, le point de départ du délai de la prescription courant du jour où l'infraction a été commise et n'étant pas interrompu par les ventes successives.

Elle considère que le syndic a eu connaissance, au moins depuis 2006, de la destination réelle à savoir du lot n°2 à des fins exclusivement commerciales sans avoir

agi dans le délai de dix ans imparti tel que cela résulte de deux procès-verbaux des assemblées générales ordinaires du 26 juin 2006 et du 11 juin 2007, de la clause « DESTINATION » figurant dans le bail notarié conclu entre la SCI [T] VI et la SASU Sérénitude en date du 23 novembre 2011, la dirigeante de cette dernière ayant transformé le local, rendant définitivement impossible un usage mixte du local.

Elle ajoute que M.' [P] [Y], juge consulaire désigné dans le cadre de la procédure collective, a confirmé que le local litigieux était déjà, il y a plus de vingt ans un local à usage commercial.

L'appelante expose que l'action oblique est mal fondée car il n'y a aucune violation du règlement de copropriété, le lot litigieux étant affecté de très longue date à l'exploitation d'un restaurant, étant rappelé que lorsqu'un local est à usage mixte, l'usage mixte autorise une utilisation soit exclusivement d'habitation, soit uniquement commerciale.

Sur les nuisances olfactives, l'appelante fait valoir que le véritable problème réside dans la vétusté du conduit de cheminée utilisé par les exploitants successifs, le syndic devant entretenir cette partie commune.

Elle conteste être à l'origine de nouvelles nuisances olfactives ainsi que les prétendues nuisances sonores liées à la terrasse.

Sur la demande d'autorisation de pose d'une gaine d'extraction extérieure, l'appelante entend rappeler l'obligation pesant sur la bailleresse de mettre en place une gaine d'extraction extérieure conformément au règlement sanitaire du Bas-Rhin ainsi que les dispositions de l'article 1719 du code civil qui lui impose une obligation de délivrance conforme du local qu'il donne en location.

Sur les demandes subsidiaires à l'encontre de la SCI Sérénité, l'appelante fait valoir que, s'agissant du préjudice subi, en l'absence d'installation d'extraction d'air conforme au Règlement sanitaire, la SARL Velicious a dû cesser de cuisiner son plat « phare » à savoir «'le veggie burger'» accompagné de frites et d'utiliser un certain nombre d'accessoires se trouvant dans la cuisine puisque la préparation des plats se fait principalement dans le laboratoire qui se trouve au sous-sol du local commercial particulièrement exigu par rapport à la cuisine du premier étage'; elle a vu son chiffre d'affaires diminuer car une partie de sa clientèle était attirée par l'offre globale et non uniquement par les plats froids, son expert-comptable ayant 'constaté' une' baisse' de' fréquentation' de' 14,86' %' entre' 2016' et' 2017,' malgré' une stabilité de son chiffre d'affaires lequel 'a tout de même baissé de 2,37 %, ce qui correspond à une perte de chiffre d'affaires d'un montant de 10'064,95 euros.

Elle demande également à être garantie du préjudice matériel et financier qui résulterait d'une évacuation forcée.

Sur la demande de dommages et intérêts à l'encontre du syndicat des copropriétaires, l'appelante indique que c'est manifestement à tort et en violation du règlement de copropriété et de la loi que le syndicat des copropriétaires s'est opposé à la pose d'une gaine d'extraction.

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 6 mars 2023, la SCI Sérénité demande à la cour de':

sur son appel principal :'

-''''''' infirmer le jugement rendu le 7 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Strasbourg en ce qu'il :'

·'''''' la déboute et déboute la SARL Vegan Union, venant aux droits de la SARL Velicious, de leur demande d'autorisation de réaliser à leurs frais les travaux de pose d'une gaine d'extraction extérieure pour évacuer les vapeurs de cuisine,

·'''''' la déboute de ses demandes à l'encontre de la SCI [T] VI au titre de la garantie des vices cachés,

·'''''' prononce la résiliation judiciaire du bail commercial conclu le 18 juillet 2014 entre la SCI Sérénité d'une part, et, par suite de la cession de droit au bail intervenue le 20 octobre 2015, la SARL Vegan Union, venant aux droits de la SARL Velicious d'autre part,

·'''''' ordonne l'expulsion' de la SARL Vegan Union, venant' aux droits' de la SARL Velicious et de tous occupants de son chef des lieux qu'elle occupe [...] à [Localité 10], si besoin avec le concours de la force publique;

'et, statuant à nouveau :'

-''''''' l'autoriser à réaliser à ses frais, les travaux refusés par l'AGO du 29 juin 2016 (résolution n°11) et du 14 novembre 2017 (résolution n°8), sous les conditions expressément imposées par la cour':

·'''''' de ne pas être à l'origine de nuisances,

·'''''' de respecter l'article 63-1 du règlement sanitaire départemental,

·'''''' de prévoir un dispositif de piège à sons et plots anti-vibratiles'; '

-''''''' condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 5'000' euros sur' le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers frais et dépens de la présente instance ;

-''''''' la dispenser de sa quote-part au titre de la dépense commune relative à la présente action en justice, conformément aux dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 ;'

-''''''' condamner la SCI [T] VI à la garantir du vice caché que constitue la découverte après la vente du raccordement illicite aux parties communes de l'extraction de la cuisine du commerce ;

-''''''' condamner la SCI [T] VI à lui payer :

·'''''' à titre' principal' la' somme' de' 14 565, 60' euros 'correspondant' au' coût' des travaux ;

·'''''' 'à titre subsidiaire la somme de 25 000 euros 'à titre de réduction du prix de cession';'

-''''''' condamner la SCI [T] VI à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers frais et dépens de la présente instance ;

'sur l'appel de la SARL Velicious à son encontre :'

-''''''' déclarer irrecevable l'appel de la SARL Vegan Union en ce qu'il tend à solliciter l'infirmation du jugement entrepris l'ayant déboutée de sa demande indemnitaire formulée à son encontre au titre de l'obligation de délivrance conforme du bailleur et en tout cas mal fondé';'

'par conséquent':

-''''''' le rejeter';

-''''''' confirmer le jugement entrepris en ce qu'il déboute la SARL Vegan Union, venant aux droits de la SARL Velicious de sa demande indemnitaire à son égard au titre du manquement à l'obligation de délivrance conforme du bailleur';'

Sur l'appel incident du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [...] à [Localité 10]':

-''''''' déclarer irrecevable, en tout cas mal fondé, l'appel incident du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [...] à [Localité 10], représenté par son syndic ;'

'par conséquent,'

-''''''' le rejeter';

-''''''' confirmer le jugement entrepris en ce qu'il déboute le syndicat des copropriétaires de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,'

-''''''' confirmer le jugement entrepris en ce qu'il dit qu'elle sera dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure et des frais irrépétibles, dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires ;

en tout état de cause':

-''''''' rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions dirigées à son encontre,'

-''''''' condamner 'toutes' parties' succombantes' à' supporter' les' entiers' dépens' de' première instance et d'appel.

Sur son appel principal, la SCI Sérénité expose qu'en sa qualité de copropriétaire bailleur, il lui incombait de solliciter du syndic la tenue d'une assemblée générale appelée à statuer sur la demande d'autorisation des travaux nécessaires, ce qu'elle a fait à plusieurs reprises'; compte tenu du refus du syndicat des copropriétaires, elle a alors sollicité judiciairement cette autorisation sur le fondement de l'article 30 alinéa 4 de la loi du 10 juillet 1965.

Rappelant les dispositions des articles 25 b) 'et 30 alinéa 4 dans leur version applicable aux faits de l'espèce de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâti, la SCI Sérénité indique que saisi d'une demande d'autorisation judiciaire de travaux, le juge ne peut refuser d'y faire droit s'il constate qu'ils' sont' conformes' à' la' destination' de' l'immeuble,' qu'ils' ne' modifient' pas l'usage des parties communes et qu'ils améliorent l'usage d'une partie privative.

Elle précise que les travaux projetés constituent une amélioration laquelle peut ne concerner qu'un seul des copropriétaires et qu'elle avait transmis au syndicat des copropriétaires un rapport établi par M. [U] et qui définissait précisément l'implantation et la consistance des travaux envisagés.''

La SCI Sérénité soutient que l'installation est conforme au règlement de copropriété et à la destination de l'immeuble.

Rappelant les dispositions des articles 8 alinéa 1er et 9 de la loi du 10 juillet 1965, la SCI Sérénité indique que les termes du règlement de copropriété autorisent l'exercice' d'activités' commerciales, ce qui induit que tous' les' commerces' sont admissibles, notamment la restauration, sans restriction c'est-à-dire que la cuisson est autorisée pour ne pas être interdite, l'usage commercial ne heurtant pas la clause d'habitation bourgeoise.'

Elle ajoute que le règlement de copropriété autorise également un usage mixte pour chaque appartement, la notion d'usage mixte signifiant que l'on peut alternativement exercer dans les appartements une activité totalement d'habitation ou totalement professionnelle, ou les deux.'

A titre subsidiaire, la SCI Sérénité argue de ce que l'action tendant à contester l'affectation du lot n°2 est prescrite.

Rappelant les dispositions des articles 42 de la loi du 10 juillet 1965, 2224 et 2222, alinéa 2 du code civil, la SCI Sérénité expose que le changement d'affectation d'un lot est une action personnelle qui se prescrivait par 10 ans sous l'empire de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 en sa version antérieure à l'entrée en vigueur de la loi Elan du 23 novembre 2018 et que le délai commence à courir à partir du changement de destination ou du jour où le syndicat des copropriétaires était en mesure de le connaître.'

Elle fait valoir qu'une activité de restauration est exploitée dans les locaux depuis au moins dix ans, le syndicat des copropriétaires n'ayant pu méconnaitre cette activité exercée au rez-de-chaussée de l'immeuble dans un local comportant plusieurs vitrines et ouvert au public.'

Sur sa demande à l'encontre de la SCI [T] VI, la SCI Sérénité rappelant les dispositions de l'article 1641 du code civil expose qu'il ressort de l'acte de vente du 9 octobre 2012 qu'aucuns travaux affectant les parties communes de l'immeuble n'ont été réalisés au cours des dix années qui ont précédé la vente des lots à son bénéfice' et qu'elle a découvert le raccordement litigieux à la lecture du rapport de la société Hérisson 67, transmis le 26 novembre 2015, puis par la production en justice le 15 avril 2016 par le conseil de la société Velicious, du devis des travaux réalisés pour le compte du précédent locataire, le locataire de la SCI [T] VI, une fois dans les murs, ayant transformé le local commercial lot n°2 et ayant notamment mis en place une hotte de cuisine destinée à une activité de restauration.

Elle ajoute que le vice dont elle se prévaut est constitué par la découverte après la vente du problème de l'extraction de la cuisine qui avait été installée sans autorisation des copropriétaires, la preuve de la réalisation du raccordement illicite au moment où la SCI [T] VI était propriétaire étant rapportée par' le devis daté du 10 mai 2011 des travaux réalisés par Mme' [V] [I] et la facture de la société CHR confirmant la réalisation des travaux litigieux avant la vente par la SCI [T] VI à la SCI Sérénité, étant souligné que la première a été propriétaire entre le 23 novembre 2011 et le 9 octobre 2012.

Elle s'estime fondée à actionner la garantie des vices cachés à l'encontre de la SCI [T] VI qui doit être condamnée :'

-'à titre principal, et si la cour lui accorde l'autorisation de travaux, à lui verser la somme de 14 456,60 euros correspondant au coût desdits travaux,'

-'à titre subsidiaire, si l'autorisation n'est pas accordée, à lui verser la somme de 25'000 euros à titre de réduction du prix de cession car il est évident qu'un bien sans raccordement a une valeur vénale bien inférieure à celle d'un bien raccordée.'

Elle ajoute qu'en droit, le vendeur professionnel est réputé connaître les vices de la chose et ne peut invoquer une clause excluant ou limitant la garantie, le gérant d'une société immobilière étant un vendeur professionnel et une SCI ayant pour objet l'acquisition par voie d'achat ou d'apport, la propriété, la mise en valeur, la transformation, l'aménagement, l'administration et la location de tout bien et droit immobilier étant considérée comme un vendeur professionnel.'

Elle précise que l'activité exercée par la SCI [T] VI et indiquée sur son extrait K-bis et celle de la SARL Business France qui est l'associée de cette SCI et dont M. [T] est le gérant font que la première elle est un vendeur professionnel, la clause d'exclusion de la garantie des vices cachés ne pouvant donc jouer.'

Elle souligne qu'elle a été créée uniquement pour l'acquisition des lots dont il est question et son gérant est expert-comptable.'

Sur la demande en résiliation du bail commercial conclu entre elle et la SARL Velicious, la SCI Sérénité soutient que':

- l'action du syndicat des copropriétaires en résiliation de bail fondée sur l'infraction à une clause de destination du règlement de copropriété est prescrite,'

-'l'activité exercée dans le lot n°2 est parfaitement licite et conforme à la destination de l'immeuble,'

-'les nuisances dont fait état le syndicat des copropriétaires sont inexistantes.'

Sur la prescription, elle indique que l'activité de restauration dans le lot n°2 est exercée depuis au moins 2006 et que l'action oblique du syndicat des copropriétaires en résiliation du bail commercial pour infraction à la clause d'habitation bourgeoise date du 14 novembre 2016, de sorte que la demande du syndicat des copropriétaires doit être déclarée irrecevable car prescrite.'

Elle rappelle qu'elle a déjà exposé les raisons démontrant que l'exercice d'une activité de restauration était parfaitement licite au regard de la destination de l'immeuble sis [...] à [Localité 10].'

Elle conteste que des nuisances proviennent du local commercial situé au rez-de-chaussée, le syndicat des copropriétaires ne pouvant valablement se plaindre de nuisances éventuelles qui, si elles existaient, tiendraient pour une large part à son refus d'autoriser les travaux visant précisément à permettre à l'exploitant du local d'exercer son activité dans des conditions normales, conformes à la règlementation en vigueur concernant ce type d'établissement.

Elle ajoute que rien ne démontre en l'espèce que les travaux envisagés par la SCI Sérénité et la société Velicious portent atteinte aux droits des copropriétaires.

Sur l'appel de la SARL Vegan Union tel que formulé à son encontre, la SCI Sérénité indique que la première ne prouve pas plus à hauteur d'appel que son chiffre d'affaires aurait' baissé' depuis' la' réalisation' des' travaux' ordonnés' par' le' juge' des' référés' du' tribunal de grande instance' de Strasbourg'; elle conteste le préjudice matériel invoqué, l'acte de cession du droit au bail, indiquant que la société Vegan Union a déclaré être informée qu'il lui appartiendra de faire des travaux touchant au conduit de cheminée, fumée de type tubage ou autre pour éviter les odeurs à ses frais et avec l'obtention préalable de l'accord du bailleur et du syndicat des copropriétaires s'agissant de travaux sur parties communes.

Elle ajoute qu'elle ne pouvait mieux faire que de solliciter une autorisation judiciaire de travaux dès lors que le syndicat des copropriétaires a refusé à deux reprises d'autoriser la réalisation des travaux.'

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 30 novembre 2023, le syndicat des copropriétaires demande à la cour de':

'

-''''''' lui donner acte de ce qu'il a procédé à la déclaration de sa créance entre les mains du représentant des créanciers de la SARL Vegan Franchise (anciennement dénommée « Vegan Union '') en redressement judiciaire';

-''''''' ordonner la reprise de l'instance';

'

sur l'appel principal de la SARL Vegan Franchise venant aux droits de la SARL Velicious':

-''''''' le déclarer appel irrecevable, en tout cas mal fondé';

en conséquence,

-''''''' le rejeter';

-''''''' débouter la SARL Vegan Franchise en redressement judiciaire prise en la personne de son représentant légal de l'ensemble de ses fins, moyens et conclusions';

sur l'appel incident de la SCI Sérénité':

-''''''' le déclarer irrecevable, en tout cas mal fondé';

en conséquence,

- le rejeter';

- débouter la SCI Sérénité de l'ensemble de ses fins, moyens et conclusions,

sur son appel incident':

- le recevoir et l'y dire bien fondé ;

en conséquence':

-''''''' infirmer le jugement entrepris en ce qu'il':

·'''''' l'a débouté de sa demande sur l'article 700 du code de procédure civile,

·'''''' a dit que la SCI Sérénité sera dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure et des frais irrépétibles, dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires';

·'''''' a laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens;

et, statuant à nouveau :

-''''''' condamner la SCI Sérénité et la SARL Vegan Franchise en redressement judiciaire prise en la personne de son représentant légal à lui verser, chacune, la somme de 5'000 euros 'au titre de l'indemnité prévue par l'article 700 du code de procédure civile';

-''''''' condamner la SCI Sérénité et la SARL Vegan Franchise prise en la personne de son représentant légal aux entiers frais et dépens de première instance';

-''''''' débouter la SCI Sérénité de sa demande de dispense de participation dans la dépense commune des frais de procédure et des frais irrépétibles';

-''''''' confirmer le jugement entrepris pour le surplus';

en tout état de cause':

-''''''' fixer sa créance au redressement judiciaire de la SARL Vegan Franchise prise en la personne de Me [Z] [K]-[O], en sa qualité de mandataire judiciaire de la SARL Vegan Franchise à la somme de 10 000 euros 'à parfaire, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel;

-''''''' rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions de la SCI Sérénité et de la SARL Vegan Franchise en redressement judiciaire prise en la personne de son représentant légal';

-''''''' condamner la SCI Sérénité et la SARL Vegan Franchise en redressement judiciaire prise en la personne de son représentant légal à lui verser, chacune, la somme de 7 000 euros 'au titre de l'indemnité prévue par l'article 700 du code de procédure civile,

-''''''' condamner la SCI Sérénité et la SARL Vegan Franchise en redressement judiciaire prise en la personne de son représentant légal in solidum aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

Le syndicat des copropriétaires indique que c'est à juste titre que les premiers juges ont prononcé la résiliation du bail commercial conclu entre la SCI Sérénité et la SARL Vegan Union au motif que l'activité de cette dernière n'était pas conforme à la destination de l'immeuble et génératrice de troubles anormaux de voisinage.

Il fait état de ce que le règlement de copropriété indique que les appartements ne pourront être occupés que bourgeoisement et ne tolère que l'exercice de professions libérales, l'activité litigieuse étant constitutive de nuisances anormales supérieures à une occupation bourgeoise ou à l'une des activités professionnelles libérales tolérées dans les appartements par le règlement de copropriété, au regard de la taille de l'immeuble.

Il précise que constituent une violation manifeste du règlement de copropriété :

- les nuisances olfactives subies par les occupants de l'immeuble et provenant du restaurant,

- les nuisances sonores résultant de l'ouverture tardive du restaurant et notamment de sa terrasse (jusqu'à minuit certains soirs),

- l'occupation exclusivement commerciale du lot n°2 de la copropriété en méconnaissance des restrictions imposées par le règlement de copropriété pour assurer la tranquillité de l'immeuble.

Il conteste que son action soit prescrite faisant valoir que la SARL Vegan Union ne rapporte aucun élément tangible permettant de démontrer que l'occupation mixte aurait cessé en 2005 ou 2006, soulignant que le point de départ de la prescription de son action commençant à courir à compter du jour où il a eu connaissance du changement effectif d'usage.

A cet égard, il considère que':

-''la mention figurant au procès-verbal d'assemblée générale du 26 juin 2006 à savoir « compte-rendu de la situation actuelle du restaurant par rapport à son activité'» n'est pas pertinente puisqu'elle ne concerne pas l'occupation du local mais plutôt l'activité du restaurant, ce qui est différent,

-'la pose d'enseigne, sujet de l'assemblée générale du 11 juin 2007, ne constitue pas un indice de changement d'usage du lot.

Il ajoute que la demande de résiliation de bail repose également sur la présence de nuisances olfactives et sonores, de sorte que le point de départ de la prescription ne peut pas se situer avant le 20 octobre 2015, date de la reprise par la SARL Vegan Union du droit au bail portant sur le local litigieux.

Il entend voir confirmer que la présence des nuisances a été portée à sa connaissance par le courrier du service de l'hygiène de l'Eurométropole de [Localité 10] le 22 décembre 2015, de sorte que la prescription ne pouvait être acquise avant le 23 décembre 2020.

Il argue de ce que le délai de prescription a été interrompu par l'assignation du 19 février 2016 devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Strasbourg délivrée à la demande du syndicat des copropriétaires, de sorte que le nouveau délai n'a commencé à courir qu'à compter de la décision du juge des référés du 3 mai 2016.

Le syndicat des copropriétaires indique que bien que la SARL Vegan Union soutienne avoir exécuté la décision du juge des référés ordonnant de supprimer le raccordement de la hotte du restaurant au conduit de fumée de l'immeuble pour faire cesser les nuisances, cela n'a pas suffi pour faire cesser les nuisances rapportées par les occupants de l'immeuble auprès du syndic'; s'y ajoutent des nuisances sonores provenant notamment de la terrasse aux heures d'activité du restaurant soit de 11 heures 30 jusqu'à 23 heures voire minuit certains soirs provenant de'l'activité du restaurant Velicious mais aussi des livraisons hebdomadaires.

Il souligne que les nuisances provoquées par le restaurant s'étendent aux copropriétés voisines puisque la SARL Velicious se permet de jeter les déchets provenant du restaurant dans le conteneur d'ordures ménagères de l'immeuble sis [...].

Le syndicat des copropriétaires indique encore que le règlement de copropriété n'autorise l'exercice d'une activité commerciale que dans le cadre d'une occupation mixte des appartements pour maintenir la destination bourgeoise des locaux et prévenir toute nuisance, ce qui n'est pas respecté puisque l'occupation est exclusivement commerciale, la SCI Sérénité ayant connaissance, dès l'acquisition de son bien que l'occupation effective du local contrevenait aux dispositions du règlement de copropriété.

Le syndicat de copropriétaires expose que la demande d'autorisation des travaux, lesquels ne sont pas des travaux d'amélioration, formulée par la SCI Sérénité et la SARL Vegan Union ne peut donc aboutir, soulignant que cette demande est incomplète car non étayée par un dossier technique complet, ne porte pas sur des travaux d'amélioration au sens de l'article 30 de la loi du10 juillet 1965.

Sur la demande de dommages et intérêts de la société Vegan Union, le syndicat des copropriétaires fait valoir qu'elle ne démontre pas en quoi son refus serait fautif, ni le principe, ni le montant du préjudice allégué curieusement demandé à titre provisionnel et n'est étayé par aucun élément probant, le lien de causalité entre les deux.

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 6 novembre 2023, la SCI [T] VI demande à la cour de':

sur l'appel principal de la SCI Sérénité :

-''''''' le dire mal fondé';

-''''''' le rejeter';

-''''''' débouter la SCI Sérénité de l'ensemble des fins, moyens, demandes et prétentions dirigés contre elle';

en conséquence':

-''''''' confirmer le jugement entrepris, à tout le moins en ses dispositions la concernant';

y ajoutant :

-''''''' condamner la SCI Sérénité à lui payer une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile 'au titre de la procédure d'appel, outre les frais et dépens d'appel';

sur l'appel principal de la société Vegan Franchise, anciennement Vegan Union, sur les appels incidents et provoqués :

-''''''' constater que':

·'''''' l'appel de la société Vegan Franchise, anciennement Vegan Union, lequel ne l'intimait pas n'est plus régulièrement soutenu,

·'''''' en tout état de cause, qu'aucunes conclusions ne sont dirigées contre elle par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [...] ni pour le compte la société Vegan Franchise, anciennement Vegan Union, en redressement judiciaire';

-''''''' en tout état de cause, rejeter toutes demandes, fins et prétentions contraires aux présentes conclusions qui seraient dirigées contre elle par le syndicat des copropriétaires ou pour le compte de la société Vegan Franchise anciennement Vegan Union en redressement judiciaire.

'

La SCI [T] VI indique qu'elle a été propriétaire des lots 2, 25 et 26 dans la copropriété sis [...] moins d'une année et n'a pas été destinataire d'une plainte de la part du syndicat des copropriétaire du fait de nuisances olfactives ou sonores du fait de son locataire du temps où elle était propriétaire des lots.

Elle ajoute qu'il n'est pas établi que les travaux de raccordement litigieux dateraient de la période extrêmement courte durant laquelle elle a été propriétaire du local et qu'elle n'a jamais autorisé de tels travaux.

Elle considère qu'elle ne peut être tenue responsable du fait que l'activité développée par la SARL Vegan Union cause des nuisances olfactives et sonores à la copropriété.

La SCI [T] IV soutient qu'il n'est pas démontré que le vice allégué par la société Sérénité était antérieur à la vente intervenue entre elles en octobre 2012 ni que le vice invoqué rende le lot n°2 impropre à sa destination.

A cet égard, elle indique qu'elle n'a jamais autorisé de travaux de raccordement et qu'elle n'avait pas connaissance du branchement litigieux, les travaux litigieux ayant été réalisés sans l'accord du bailleur et sans l'accord de la copropriété, l'auteur desdits travaux étant inconnu.

Elle ajoute que les nuisances générées par le raccordement illicite n'ont débuté qu'en octobre 2015, suite à l'acquisition par la SARL Velicious du droit au bail pour l'exploitation d'un commerce de petite restauration, que durant toute l'année 2016, la SCI Sérénité a présenté au syndicat des copropriétaires un devis de travaux afin d'être autorisée par l'assemblée générale des copropriétaires à réaliser les travaux de mise aux normes.

Elle entend rappeler qu'il appartient à la société Sérénité de démontrer que le vice allégué était antérieur à la vente intervenue entre elles deux en octobre 2012, ce que celle-ci ne parvient pas à faire, ni le devis établi par la société CHR Alsace ni l'inventaire du Café Paradiso n'établissant que les travaux litigieux auraient été réalisés lorsqu'elle était bailleur.

Elle souligne que les lots de copropriété vendus sont conformes à l'usage tel que décrit à l'acte de vente et qu'elle ne pouvait lister potentiellement les travaux relatifs au raccordement de la hotte litigieuse, dans la mesure où elle n'en avait pas connaissance et qu'il n'est toujours rapporté la preuve du fait que ce raccordement a été effectué avant la vente à la SCI Sérénité.

Sur la clause d'exonération, la société [T] VI fait valoir que non seulement le raccordement illicite n'est pas un défaut grave dans la mesure où il peut et semble être réparé et il ne compromet pas l'usage de la chose dans la mesure où la reprise du désordre en permettrait l'usage, mais surtout, en application de la clause exonératoire de garantie contenue dans l'acte, l'action ne peut prospérer.

Elle en déduit qu'elle est en droit de se prévaloir de la clause exonératoire de garantie contenue dans l'acte de vente puisqu'elle n'a pas eu connaissance du raccordement litigieux, soulignant qu'elle a un caractère familial et ne saurait être considérée comme un professionnel de l'immobilier et comme à même de détecter une non-conformité que seul un homme de l'art a pu établir par la réalisation d'un diagnostic. Elle ajoute que la SCI Sérénité ne peut se prévaloir de sa propre turpitude dans la mesure où, de plus, elle connaissait son obligation inhérente au respect du règlement de copropriété.

Elle argue encore de ce que le délai de prescription des vices cachés est expiré puisqu'elle aurait dû être actionnée avant le 10 octobre 2014.

Sur l'indemnisation sollicitée par la SCI Sérénité, la société [T] VI soutient que cette dernière ne justifie pas du chiffrage de ses demandes, tant à titre principal qu'à titre subsidiaire.

Elle reprend à son compte les développements et l'argumentaire du syndicat des copropriétaires et de la SARL Velicious démontrant que le seul responsable est la SCI Sérénité.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions transmises aux dates susvisées.'

'

MOTIFS DE LA DÉCISION

'

A titre liminaire, il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour n'est tenue de statuer que sur les prétentions figurant au dispositif des dernières écritures des parties et n'a pas à répondre à des demandes tendant à voir «'constater'» qui correspondent seulement à la reprise de moyens développés dans les motifs des conclusions et ne constituent pas des prétentions.

Par ailleurs, les conclusions de la SCI Sérénité transmises le 19 décembre 2023, après l'ordonnance de clôture, doivent être déclarées irrecevables en application de l'article 802 du code de procédure civile.

I) Sur la recevabilité des appels de la société Vegan Franchise et de la SCI Sérénité

Le syndicat des copropriétaires ne développant aucun moyen à l'appui de sa demande d'irrecevabilité de l'appel principal de la société Vegan Franchise et de l'appel incident de la SCI Sérénité et en l'absence de cause d'irrecevabilité susceptible d'être soulevée d'office, il y a lieu de déclarer ces appels recevables.

'

II) Sur la demande du syndicat des copropriétaires tendant à la résiliation du bail commercial liant la SCI Sérénité à la SARL Vegan Franchise

Sur la recevabilité de l'action oblique du syndicat des copropriétaires

'

Comme l'a justement indiqué le jugement entrepris, le délai de prescription applicable est le délai de cinq ans prévu par l'article 2224 du code civil et non celui de dix ans prévu par l'article 42 de la loi du loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, dès lors que le syndicat des copropriétaires n'est pas un copropriétaire et agit par la voie de l'action oblique.

L'article 2224 du code civil prévoit que ce délai de court à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Le syndicat des copropriétaires sollicite la résiliation du contrat de bail commercial faisant état de ce que la SCI Sérénité, en sa qualité de bailleur, n'a pas pris les mesures nécessaires pour faire respecter le règlement de copropriété par la société Velicious devenue Vegan Union puis Vegan Franchise.

Considérant que le syndicat des copropriétaires a sollicité la résiliation du bail commercial liant la société Sérénité à la société Velicious devenue Vegan Union aux termes de ses conclusions en date du 29 mai 2017 soutenues devant le tribunal de grande instance de Strasbourg, soit moins de cinq ans après le contrat de bail commercial conclu le 18 juillet 2014 entre la société Sérénité et 'la SARL Polo, cédé à la société Velicious, la cédante étant déjà autorisée à y exploiter une activité de petite restauration, le délai de prescription n'est donc pas expiré, de sorte qu'il y a lieu de déclarer le syndicat des copropriétaires recevable en sa demande.

Sur le fond

Le syndicat des copropriétaires reproche à la société Sérénité de ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour que sa locataire, la société Velicious devenue Vegan Union respecte le règlement de copropriété pour ce qui concerne l'occupation des lieux et la destination des lieux.

Le syndicat des copropriétaires se prévaut de dispositions du règlement de copropriété'lesquelles ne sont pas contestées aux termes desquelles'«'Les locaux sont destinés à être occupés bourgeoisement par des personnes de bonne vie et m'urs de façon à ne pas nuire par leur fait direct ou indirect à la bonne tenue et à la tranquillité de l'immeuble collectif. Les appartements pourront également être utilisés pour partie à l'habitation et pour partie à l'exploitation de profession commerciale ou libérale, comme bureaux ou comme locaux administratifs, c'est-à-dire à un usage mixte», «'Chaque copropriétaire doit veiller à ne rien faire, ni laisser faire qui puisse nuire à la bonne tenue des lieux et troubler la jouissance des voisins'» et «'Les copropriétaires ne pourront faire ou laisser faire aucun travail habituel avec ou sans machine outils qui serait de nature à nuire à la solidité de l'immeuble, ou à gêner leurs voisins par le bruit, les odeurs persistantes ou les trépidations.'»

L'analyse de l'acte de cession de bail du 20 octobre 2015 permet de constater, d'une part, que la société Velicious, cessionnaire agréé par la société Sérénité, 'a donné son accord pour réaliser des travaux sur le conduit de cheminée pour éviter les odeurs et ce, à ses frais, avec l'obtention préalable de l'accord du bailleur et du syndicat des copropriétaires s'agissant de travaux sur des parties communes et, d'autre part, qu'elle a eu connaissance du règlement de copropriété quant à la destination des locaux.

Il s'en déduit que dès la cession du droit au bail, la société Velicious savait que les lieux loués en l'état ne permettaient pas l'exercice immédiat de l'activité de restauration en conformité avec le règlement de copropriété, aucune assurance n'existant sur une suite favorable à donner par les copropriétaires en assemblée générale sur la solution à mettre en place par la locataire lesquels, au demeurant, n'ont pas donné leur accord.

Le syndicat des copropriétaires produit des attestations justifiant des nuisances olfactives mais aussi, suit à l'installation d'une terrasse extérieure, de nuisances sonores.

De surcroît, la société Vegan Franchise entend exploiter le bien qu'elle loue en totalité à des fins commerciales, de sorte que la clause du règlement de copropriété n'autorisant qu'un usage mixte n'est pas respectée.

Au regard du non-respect du règlement de copropriété tel qu'établi ci-avant caractérisant des manquements de la locataire, la société Vegan Franchise, il y a lieu de prononcer la résiliation du contrat de bail du 20 octobre 2015 la liant à la société Sérénité ainsi que pour l'expulsion.

Le jugement entrepris est donc confirmé de ce chef.

'

III) Sur la demande d'autorisation pour réaliser des travaux de pose d'une gaine d'extraction extérieure pour évacuer les vapeurs de cuisine formulée par les sociétés Vegan Franchise et Sérénité

Le contrat de bail liant ces deux sociétés ayant été résilié, il y a lieu de constater que la demande de la société Vegan Franchise tendant à cette fin est sans objet. Le jugement entrepris est donc infirmé de ce chef.

S'agissant de la demande formulée par la société Vegan Franchise, au regard de la pertinence de la motivation du jugement entrepris, il y a lieu de le confirmer de ce chef étant souligné que':

-''''''' dans le procès-verbal d'assemblée générale du 29 juin 2016 lors de laquelle les copropriétaires ont refusé d'accorder l'autorisation de travaux sollicitée par la société Sérénité, le syndicat des copropriétaires a admis que les travaux en cause étaient des travaux d'amélioration,

-''''''' les travaux projetés ne sont pas conformes à la destination de l'immeuble puisqu'ils ont pour finalité d'installer une gaine d'extraction extérieure pour évacuer les vapeurs de cuisine pour permettre à la société Vegan Franchise d'exercer une activité de restauration notamment dans le lot n°2 en contradiction avec le règlement de copropriété lequel en sa page 16 autorise un usage mixte des appartements, à savoir pour partie à fin d'habitation et pour partie à fin d'exploitation de profession commerciale ou libérale, en limitant, cependant, l'exploitation à titre libéral ou commercial à des bureaux ou des locaux administratifs, étant précisé que cette demande n'a, au demeurant, plus de légitimité puisqu'elle ne concernait que l'exploitation par la société Vegan Franchise qui doit quitter les lieux loués du fait de la résiliation du bail ci-dessus prononcée,

-''''''' la société Sérénité, à titre subsidiaire, soulève la prescription de l'action du syndicat des copropriétaires tendant au rétablissement de la destination du lot n°2 conformément au règlement de copropriété alors que le syndicat n'a pas agi à cette fin et que, dans le dispositif de ses conclusions, la société Sérénité ne conclut pas à une irrecevabilité de ce chef, de sorte que la cour n'a pas à statuer sur ce point.

IV) Sur les demandes «'très subsidiaires'» de la société Vegan Franchise

1) Sur sa demande tendant à la condamnation de la société Sérénité à lui payer une provision de 10'064, 95 euros en réparation de son préjudice d'exploitation

La société Vegan Union devenue Vegan Franchise avait déjà formulé cette demande devant le tribunal judiciaire de Strasbourg lequel l'a déboutée de cette demande.

Aux termes du dispositif de ses conclusions, la société Vegan Franchise ne demande pas l'infirmation de ce chef de demande, de sorte qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris sur ce point.

2) Sur sa demande tendant à la condamnation de la société Sérénité à la garantir de l'intégralité de son préjudice financier et matériel en cas d'évacuation forcée

Cette demande, au demeurant nouvelle à hauteur d'appel, n'est pas motivée, de sorte qu'il y a lieu de la rejeter.

3) Sur sa demande tendant à la condamnation du syndicat des copropriétaires à lui payer, à titre provisionnel, la somme de 10'000 euros en réparation de son préjudice

La société Vegan Union a formulé une demande d'indemnisation devant le premier juge qui l'en a déboutée.

Aux termes du dispositif de ses conclusions, la société Vegan Franchise ne demande pas l'infirmation du jugement entrepris sur ce point, de sorte qu'il y a lieu de confirmer ce dernier.

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V) Sur la demande de la SCI Sérénité à l'encontre de la SCI [T] VI tendant à la garantir du vice caché en lien avec le raccordement illicite de l'extraction de la cuisine du commerce aux parties communes

Aux termes des dispositions combinées des articles 1641 et 1643 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus'; le vendeur est tenu des vices cachés, quand bien même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

La société Sérénité se prévaut de l'existence d'un vice caché au moment de la vente des lots n°2,25 et 26 faite à son profit par la société [T] VI le 9 octobre 2012 caractérisé par le raccordement illicite aux parties communes de l'extraction de la cuisine du commerce.

La société [T] VI argue, d'une part, de ce que le délai de prescription des vices cachés est expiré puisqu'elle aurait dû être actionnée avant le 10 octobre 2014 et, d'autre part, de ce que le raccordement litigieux a été supprimé et le nettoyage du conduit de cheminée nettoyé, de sorte que le vice a été réparé et que la garantie des vices cachés ne peut plus jouer dès lors que le vice originaire a disparu.

Toutefois, elle ne formule aucune fin de non-recevoir tirée de la prescription de cette action dans le dispositif de ses conclusions, de sorte que la cour n'est pas saisie de ce chef de demande et n'a donc pas à statuer'; il importe peu que le vice allégué n'existe plus, la société Sérénité étant en droit de poursuivre son action sur le fondement de la garantie des vices cachés dont la finalité est d'obtenir la condamnation de la société [T] VI soit à lui payer le coût des travaux de réparation du vice soit une réduction du prix de vente.

Ni l'existence, ni le caractère caché du vice ne sont contestés, la SCI [T] IV ne contestant que l'antériorité du vice à la vente du 9 octobre 2012 et le fait que le vice invoqué rende le lot n°2 impropre à sa destination, la preuve de ces deux éléments devant donc être rapportée par la société Sérénité.

Cette dernière soutient que le vice en cause résulte des travaux réalisés par le locataire de la SCI [T] VI et non évoqués par cette dernière dans l'acte de vente susvisé.

Elle produit une facture établie le 20 décembre 2021 par la SARL CHR Alsace qui porte sur la réalisation de plusieurs' travaux dont un capteur de hotte motorisé, au demeurant non autorisés par la copropriété, cette facture étant établie au nom de «'Sérénit'ude'» [...] à [Localité 10] et non de la société [T] VI, de sorte qu'elle ne suffit pas à établir que cette dernière en a eu connaissance avant la vente du 9 octobre 2012, ce qui explique qu'aucune mention afférente à ces travaux n'ait été faite dans cet acte, l'existence des travaux litigieux et de leur non-conformité ayant été révélée que par le diagnostic de la SARL Hérisson du 20 novembre 2015.

L'acte de vente du 9 octobre 2012, en sa page 8, contient un paragraphe «'vices cachés'» aux termes duquel il est prévu que le vendeur n'est pas tenu à la garantie des vices cachés pouvant affecter les bâtiments, à raison notamment des vices de construction qu'ils soient apparents ou cachés.

C'est avec pertinence que le jugement entrepris a retenu que la vente avait eu lieu entre deux SCI exerçant des activités identiques, de sorte que la garantie de la société [T] VI en sa qualité de vendeur ne pouvait jouer'; ce jugement est donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Sérénité de ses demandes à l'encontre de la SCI [T] VI au titre de la garantie des vices cachés.

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VI) Sur les dépens, les frais de procédure non compris dans les dépens et la participation de la société Sérénité à la dépense du syndicat des copropriétaires au titre des frais de procédure

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Il y a lieu de laisser à chacune des parties, la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel.

Le jugement entrepris est confirmé sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que sur la dispense de la société Sérénité de toute participation à la dépense du syndicat des copropriétaires au titre des frais de procédure et ce, sur le fondement de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 considération prise de la tolérance de la copropriété pendant des années quant à l'exploitation d'une activité de restauration au sein de la copropriété.

A hauteur d'appel, il y a lieu de laisser à la charge de chaque partie la charge de ses propres dépens, de rejeter les demandes d'indemnités formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de dire que, sur le fondement de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, la société Sérénité est dispensée de toute participation à la dépense du syndicat des copropriétaires au titre des frais de procédure pour les mêmes motifs que ci-dessus.

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PAR CES MOTIFS

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La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :

DÉCLARE irrecevables les conclusions de la SCI Sérénité transmises le 19 décembre 2023 ;

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DÉCLARE recevables l'appel principal de la SARL Vegan Franchise et l'appel incident de la SCI Sérénité';

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INFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg du 7 octobre 2021 en ce qu'il a débouté la SARL Vegan Union venant aux droits de la SARL Velicious de sa demande d'autorisation de réaliser les travaux de pose d'une gaine d'extraction extérieure pour évacuer les vapeurs de cuisine';

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LE CONFIRME pour le surplus, dans les limites de l'appel';

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Statuant de nouveau sur le seul point infirmé et y ajoutant :

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DÉCLARE sans objet la demande de la SARL Vegan Franchise tendant à être autorisée à réaliser des travaux de pose d'une gaine d'extraction extérieure pour évacuer les vapeurs de cuisine';

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DÉCLARE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [...] [Localité 10] recevable en sa demande tendant à la résiliation du bail commercial liant la SCI Sérénité à la SARL Vegan Franchise';

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REJETTE la demande de la SARL Vegan Franchise tendant à la condamnation de la SCI Sérénité à la garantir de l'intégralité de son préjudice financier et matériel en cas d'évacuation forcée';

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DIT que chaque partie doit supporter la charge de ses propres dépens de première instance et d'appel';

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REJETTE les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile concernant les frais de procédure non compris dans les dépens exposés par les parties à hauteur d'appel ;

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DIT y avoir lieu de dispenser la SCI Sérénité de toute participation à la dépense du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [...] [Localité 10] au titre des frais de la procédure d'appel.