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Décisions

CA Amiens, ch. économique, 27 juin 2024, n° 23/02620

AMIENS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Ideal Pneu (SARL)

Défendeur :

Bel Air (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Grevin

Conseillers :

Mme Leroy-Richard, Mme Dubaele

Avocats :

Me Crépin, Me Chivot

TJ Amiens, du 22 mai 2023, n° 23/03982

22 mai 2023

DECISION

Le 7 juin 2016 la SCI du Bel air a consenti à M. [W] [T] artisan, un bail commercial d'une durée de 9 ans portant sur deux locaux dénommés H 1 et H 3 situés [Adresse 2] à [Localité 9] (80) moyennant paiement d'un loyer de 8 477,88 € soit 706,49 € par mois outre provision sur charges.

M. [W] [T] a cédé son droit au bail à la société Idéal pneu le 5 août 2020, le bailleur a agréé cette cession.

M. [G] [N] et M. [R] [M] se sont portés caution du preneur en garantie du paiement des loyers charges et accessoires pour une durée de 18 ans.

Le 14 octobre 2022 le bailleur a délivré commandement de payer visant la clause résolutoire du bail à la SARL Idéal pneu, acte dénoncé le 24 octobre 2022 à M. [W] [T].

Le 21 octobre 2022 et les 24 et 27 octobre 2022 un commandement de payer a été délivré à chaque caution.

Se prévalant de la défaillance du preneur la SCI du Bel air a assigné le 14 février 2023 la SARL Ideal Pneu, M. [W] [T], M. [G] [N], M. [R] [M] devant le président du tribunal judiciaire d'Amiens qui par ordonnance du 22 mai 2023 a :

- constaté l'acquisition des effets de la clause résolutoire insérée dans le bail liant les parties à la date du 14 novembre 2022 à compter de laquelle la SARL Idéal pneu est occupante sans droit ni titre ;

- débouté M. [W] [T] de sa demande de délai de grâce ;

- ordonné à défaut de restitution volontaire des lieux, l'expulsion de la SARL Idéal pneu et de tout occupant de son chef du local commercial situé à [Adresse 10] à compter de la signification de l'ordonnance avec en cas de besoin le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier ;

- condamné solidairement la SARL Idéal pneu, M. [G] [N] et M. [W] [T] au paiement de la provision de 12 122,78 € correspondant à la dette locative due au titre de la période allant du mois d'août 2022 au 4 avril 2023 comportant 812,39 € de frais ;

- condamné solidairement la SARL Idéal pneu, M. [G] [N] et M. [W] [T] au paiement à titre provisionnel d'une indemnité d'occupation mensuelle de 966,83 € à compter de la date de résiliation du bail et jusqu'à libération complète des lieux avec restitution des clés;

- condamné in solidum M. [G] [N] et M. [W] [T] aux dépens comportant les frais de commandement de payer et dénonciation et d'assignation ;

- condamné in solidum M. [G] [N] et M. [W] [T] à payer à la SCI du Bel air la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- fixé au passif de M. [M] en sa qualité de caution les sommes suivantes :

> 12 122,78 € correspondant à la dette locative due au titre de la période allant du mois d'août 2022 au 4 avril 2023 comportant 812,39 € de frais ;

> 966,83 € par mois au titre d'indemnité d'occupation à compter de la date de résiliation du bail et jusqu'à libération complète des lieux avec restitution des clés ;

> 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

> les dépens comprenant le coût du commandement.

Par déclaration en date du 14 juin 2023 la SARL Ideal pneu, M. [N] et M. [M] ont interjeté appel de cette ordonnance et l'affaire a été enregistrée sous le n° RG 23 2620 à la chambre économique.

Par déclaration en date du 12 septembre 2023 M. [T] a interjeté appel de cette ordonnance enregistrée sous le n° RG 23 3982 à la chambre civile puis transférée à la chambre économique de la cour pour que les deux appels d'une même décision soient traités ensembles.

Lors de l'audience du 25 janvier 2024 les parties ont demandé la jonction des deux affaires.

Par conclusions remises le 16 novembre 2023 dans l'affaire RG 23 39 82 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, M. [W] [T], M. [G] [N], M. [R] [M] et la SARL Ideal pneu demandent à la cour d'infirmer l'ordonnance dont appel et de :

- dire nuls et de nuls effets le commandement de payer et l'assignation signifiées à M. [M]

- déclarer irrecevables les demandes de fixation au passif de M. [M];

- débouter la SCI du Bel air de ses demandes de condamnations au titre des provisions pour charges et pour paiement de taxes foncières ;

- dire et juger que la SARL Ideal pneu n'est redevable que des loyers effectivement impayés et des éventuelles indemnités d'occupation ;

- suspendre les effets de la clause résolutoire ;

- dire et juger que la SARL Ideal pneu pourra régler les sommes mises à sa charge par mensualité de 800 € en sus des loyers courants ;

- dire et juger qu'il existe une contestation sérieuse quant à l'obligation de garantie de M. [W] [T] tant au titre de l'assiette de la garantie qu'en égard à la tardiveté de l'information donnée par le bailleur;

- déclarer irrecevables en conséquence les demandes formées contre M. [W] [T] ;

- condamner la SCI du Bel air à payer à M. [T] la somme de

3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Par conclusions remises le 23 novembre 2023, dans l'affaire RG 23 39 82 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, la SCI du Bel air demande à la cour à titre principal de :

- déclarer M. [M] irrecevable en son appel pour défaut de qualité à agir ;

- confirmer l'ordonnance dont appel ;

- débouter la SARL Ideal pneu, M. [G] [N], M. [C] et M. [T] de leurs demandes.

A titre subsidiaire :

- déclarer M. [M] irrecevable en son appel pour défaut de qualité à agir ;

- infirmer l'ordonnance et statuant à nouveau :

> condamner solidairement la SARL Ideal pneu, M. [N], M. [T] à payer à la SCI du Bel air une provision de 18 987,12 € pour la période de janvier 2022 à novembre 2023 comportant 1 461,26 € et 1 050 € de provisions sur charges ;

En tout état de cause :

- condamner in solidum la SARL Ideal pneu, M. [N], M. [T] à payer à la SCI du Bel air une somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens dont recouvrement direct par la SELARL Chivot Soufflet.

Par conclusions remises le 10 octobre 2023 dans l'affaire RG 23 2620 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, elle conclut aux mêmes fins.

SUR CE :

En application de l'article 367 du code de procédure civile il est ordonné la jonction des procédures qui portent sur le n° RG 23 2620 et le n° RG 23 3982 s'agissant d'appels portant sur la même décision.

Sur la demande de résiliation du bail commercial, d'expulsion du preneur et de paiement d'une provision

La société Idéal pneu conteste le montant des sommes dont il est demandé paiement visées dans le commandement de payer et l'assignation et demande la suspension des effets de la clause résolutoire et la possibilité de pouvoir apurer les sommes qu'elle reconnaît devoir à hauteur de 3 489,15 € par mensualité de 800 €.

Elle explique qu'il lui est demandé paiement de provisions sur charges et une quote part de la taxe foncière, mensuellement, depuis 2021 sans qu'elle n'ait jamais été destinataire annuellement du montant des dépenses réelles depuis cette date.

Elle indique que tout au plus elle est redevable du loyer hors charges pour la période de septembre 2021 au 14 novembre 2022 (date de la résiliation) à hauteur de 6 589,15 € dont à déduire la somme de 3 100 € qu'elle a payée soit 3 489,15 € outre indemnité d'occupation à compter du 14 novembre 2022.

Au titre des sommes qu'elle reconnaît devoir, elle demande le bénéfice d'un échelonnement au motif qu'elle a été privée de la possibilité de pouvoir jouir normalement du local loué du fait des coupures d'électricité régulièrement réalisées par le bailleur.

La SCI du Bel air demande la confirmation de l'ordonnance ayant constaté l'acquisition de la clause résolutoire au motif que le preneur n'a pas régularisé les causes du commandement dans le délai de la loi, que la dette constituée des loyers et des charges s'accroît et qu'elle ne justifie pas d'une situation financière lui permettant de faire face au paiement du loyer courant et de l'arriéré.

Elle précise qu'outre les impayés le bien loué n'est pas occupé de façon paisible.

Elle demande la confirmation de la décision dont appel sauf à majorer la provision allouée en première instance.

Par application de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut sans avoir à constater l'urgence, dans les cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Aux termes de l'article L.145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement de demeuré infructueux.

En l'espèce, si les parties sont en désaccord sur le compte de loyers et charges, la SARL Idéal pneu reconnaît qu'à la date du 14 novembre 2022 soit dans le mois de la délivrance du commandement le 14 octobre 2022 elle était redevable d'une somme de 6 589,15 € au titre des loyers de septembre 2021 au 14 novembre 2022 et qu'elle n'a apuré partiellement sa dette à hauteur de 3 100 € qu'entre le 6 avril 2023 au 12 mai 2023 (page 7 de ses conclusions) de sorte que c'est à juste titre que l'acquisition de la clause résolutoire a été constatée dans la décision dont appel.

Au soutien de sa demande en paiement d'une provision la SCI du Bel air produit :

- le bail et l'acte de cession ;

- un commandement de payer les loyers visant la clause résolutoire du 14 octobre 2022 délivré au preneur ;

- 3 significations du commandement, à garant ([T]) et cautions ([N] et [M]) du 24 octobre 2022 ;

- 1 signification du 27 octobre 2022 d'un commandement de payer à M. [M] ;

- un décompte des sommes dues arrêté au 9 octobre 2023 ;

- un régularisation de charges en date du 9 octobre 2023 pour les années 2020 et 2021 eau et edf

- une régularisation de charges du 9 octobre 2023 pour l'année 2023 eau et edf.

Le commandement de payer visant la clause résolutoire fait état d'impayés arrêtés au 3 août 2022 à hauteur de 5 542,58 € conformément à un décompte joint arrêté au 22 juillet 2022.

Le décompte arrêté au 9 octobre 2023 fait état d'impayés arrêtés au 22 juillet 2022 à hauteur de 2 311,02 €.

Le décompte de régularisation de charges n'a été établi pour les années 2020, 2021 et 2022 que le 9 octobre 2023 et aucune pièce ne corroborent les sommes annoncées à ce titre.

Dans ces circonstances la somme dont le bailleur demandait paiement en première instance à titre provisionnel et majorée à hauteur de cour est contestable sauf dans la limite de 3 489,15 € que le preneur reconnaît devoir.

Dans ces conditions statuant dans les limites de la compétence du juge des référés qui est le juge de l'évidence, il ne peut être alloué au bailleur que la somme de 3 489,15 € à titre de provision

La SCI Bel air est renvoyée à mieux se pourvoir devant le juge compétent pour le surplus de sa demande en paiement au titre des loyers et charges.

Si le gérant de la SARL Idéal pneu justifie avoir déposé plainte le 11 mai 2023 contre le gérant de la SCI Bel air pour avoir missionné deux personnes afin de déverser du béton devant son établissement et l'avoir menacé de mort, circonstances susceptibles de porter atteinte à l'exercice de son activité, les suites données à cette plainte ne sont pas connues et il ne justifie pas de la situation financière de la SARL Idéal pneu permettant de faire application de l'article 1343-5 du code civil, à savoir, suspendre les effets de la clause résolutoire le temps de solder la dette locative dans un délai de 24 mois.

L'ordonnance est donc confirmée en ce qu'elle a :

- constaté l'acquisition des effets de la clause résolutoire insérée dans le bail liant les parties à la date du 14 novembre 2022 à compter de laquelle la SARL Idéal pneu est occupante sans droit ni titre ;

- ordonné à défaut de restitution volontaire des lieux, l'expulsion de la SARL Idéal pneu et de tout occupant de son chef du local commercial situé à [Adresse 10] à compter de la signification de l'ordonnance avec en cas de besoin le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier ;

- condamné la SARL Idéal pneu au paiement d'une provision au titre de l'arriéré locatif ;

- condamné la SARL Idéal pneu au paiement à titre provisionnel d'une indemnité d'occupation mensuelle de 966,83 € à compter de la date de résiliation du bail et jusqu'à libération complète des lieux avec restitution des clés.

Elle est infirmée sur le montant de la provision.

Dans ces circonstances la SARL Idéal pneu est déboutée de sa demande de suspension des effets de la clause résolutoire et d'échelonnement.

Sur les demandes en paiement de provision dirigées contre le cédant et les cautions

> contre M. [T]

M. [T] prétend à l'infirmation de l'ordonnance au titre des dispositions rendues à son endroit.

Il fait valoir que sa garantie qui est recherchée est contestable sérieusement et qu'il ne relève pas de la compétence du juge des référés d'en apprécier l'étendue ni d'apprécier si le bailleur a respecté à son endroit l'obligation d'information de l'article L.145-16-1 du code de commerce.

Il fait valoir d'une part que la clause de garantie prévue dans l'acte de cession doit s'interpréter restrictivement et que pour ce faire elle doit être suffisamment précise, que tel n'est pas le cas au regard de sa rédaction dans la mesure où elle prévoit une garantie au titre de l'exécution de toutes les conditions du bail.

D'autre part il fait valoir que la clause de garantie ne peut lui être opposée car elle n'a pas été mise en oeuvre de bonne foi par le bailleur dans la mesure où il n'a eu connaissance de l'existence d'impayés que 14 mois après la première défaillance et qu'il n'a jamais été proposé de tentative de résolution amiable du conflit.

Il affirme que cette attitude constitue une faute susceptible d'engager la responsabilité du bailleur ou en tous cas d'entraîner sa décharge.

Enfin il explique qu'il n'a plus d'activité, qu'il a procédé à la radiation de son activité d'entretien et de réparation de véhicule et qu'il assure sa survie en percevant les minima sociaux.

Le bailleur prétend que la clause de garantie est claire quant à son étendue et qu'il a respecté son obligation d'information de sorte qu'il est bien fondé à poursuivre le cédant du fonds de commerce exploité dans le local litigieux.

En l'espèce l'existence d'une clause de garantie n'est pas contestée seule sa mise en oeuvre et son étendue sont en discussion.

Il résulte de l'article L 145-16-1 du code de commerce que, si la cession du bail commercial s'accompagne d'une clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur, ce dernier informe le cédant de tout défaut de paiement du locataire dans le délai d'un mois à compter de la date à laquelle la somme aurait dû être acquittée par celui-ci.

En l'absence de sanction spécifique prévue par la loi, il appartient aux juges d'apprécier les diligences du bailleur dans le cadre de l'obligation d'information du cédant, le premier ne devant pas se montrer négligent dans le recouvrement de sa créance et devant agir dans les délais raisonnables. Il leur appartient d'apprécier les conséquences susceptibles d'être tirées du manquement allégué en appréciant, au cas par cas, le préjudice, les circonstances aggravantes ou les pertes de chance imputables au défaut d'information préalable. Il est donc admis que la garantie du cédant peut ne pas jouer en cas de négligence fautive du bailleur. En effet, le bailleur qui n'avertit pas le garant du non-paiement des loyers par le cessionnaire et qui laisse s'accumuler la dette sans agir est susceptible de perdre totalement ou partiellement son recours étant donné que le poids de sa faute n'a pas à peser sur le cédant alors même que le bailleur bénéficie dans le bail d'une clause résolutoire.

En l'espèce, le bailleur déclare dans ses écritures que les premières défaillances remontent au mois de septembre 2021 et ne produit aucune pièce démontrant qu'il a rempli son obligation d'information dans le mois prévu à l'article L.145-16-1 du code de commerce.

Il ne justifie avoir informé le cédant des défaillances du preneur que le 24 novembre 2022 alors qu'il mettait en oeuvre la procédure de résiliation expulsion de la société Idéal pneu soit 14 mois à compter de la première défaillance.

Le cédant ayant perçu la somme de 9 000 € le 5 août 2020 dans le cadre de la cession, un débat, portant sur la négligence fautive du bailleur dans son obligation d'information au titre de la perte de chance pour M. [T] de faire face au paiement du premier impayé dès le mois d'octobre 2021 et de préserver son recours contre le preneur notamment, ne relève pas de la compétence du juge des référés qui ne peut statuer sur l'inopposabilité de la garantie ou l'allocation de dommages et intérêts éventuels, dans la mesure où ce débat affecte sérieusement l'obligation de garantie du cédant.

Par ailleurs l'étendue de la garantie qui ne fait pas strictement référence à l'indemnité d'occupation mais aux conditions du bail supposent également l'analyse de l'acte de cession et du bail qui ne relève pas plus de la compétence du juge saisi et étant observé que le premier juge a condamné M. [T] au paiement d'une indemnité d'occupation jusqu'à libération effective des lieux alors qu'à supposer que la garantie puisse être mise en oeuvre cette dernière est limitée dans le temps par application de l'article L.145-16-2 du code de commerce de façon incontestable.

Les discussions portant sur la supposée faute du bailleur dans le respect de l'obligation d'information et sur l'étendue de la garantie relèvent de la compétence du juge du fond et non du juge des référés, juge de l'évidence, de sorte que la contestation élevée par M. [T] doit être qualifiée de sérieuse ; circonstance qui s'oppose à la demande de provision dirigée contre lui

Il y a donc lieu d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné M. [T] au paiement d'une provision au titre d'une dette locative, d'une indemnité d'occupation jusqu'à libération effective de lieux.

> contre M. [N] et [M]

La SCI Bel air prétend à titre principal à l'irrecevabilité de l'appel interjeté par M. [M] artisan maçon au visa de l'article L.641-9 du code de commerce et à la confirmation de l'ordonnance ayant fixé au passif de sa liquidation une dette locative et une indemnité d'occupation jusqu'à restitution des lieux.

Subsidiairement il prétend à l'infirmation de l'ordonnance sur le montant des sommes dont elle se prétend créancière dont elle demande la majoration.

Elle fait valoir que placé en liquidation judiciaire suivant jugement du tribunal de commerce d'Arras en date du 18 mai 2022 seul le liquidateur judiciaire de M. [M] à savoir la Selas Mjs partners représentée par maître [E] [P] avait qualité pour agir ès qualités dans la mesure où le liquidé était dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens.

M. [M] prétend à la nullité du commandement de payer et de l'assignation délivrée à son endroit mais également à l'irrecevabilité des créances fixées à son passif pour avoir été attrait à une procédure alors qu'il était dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens du fait de la procédure collective dont il faisait l'objet lui faisant interdiction de payer des créanciers.

Il s'étonne qu'alors que le liquidateur judiciaire n'a pas été attrait à la procédure, le premier juge ait fixé une créance au passif sans qu'aucune déclaration n'ait été faite au passif de son activité.

Si effectivement M. [M] n'avait pas qualité pour interjeter appel de l'ordonnance comme dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens en application de l'article L.641-9 du code de commerce pour avoir été placé en liquidation judiciaire le 18 mai 2022 et qu'il n'est pas dans ces conditions fondé à demander la nullité du commandement de payer et de l'assignation délivrée à son endroit, la cour se trouve saisie de l'appel de l'ordonnance critiquée par M. [W] [T], M. [G] [N] (l'autre caution) et la SARL Idéal pneu notamment sur les dispositions portant sur la créance litigieuse dont M. [M] et M. [N] seraient solidairement débiteurs en leur qualité de caution.

Si M.[M] n'a pas qualité pour faire appel, le bailleur était également irrecevable à l'assigner en paiement en connaissance de cette situation juridique et ne peut prétendre à la confirmation de l'ordonnance.

Les dispositions en matière de procédure étant d'ordre public la cour saisie de l'appel de l'ordonnance dans sa globalité ne peut confirmer une décision rendue au mépris de ces dispositions sans que le liquidateur judiciaire ait été attrait à la procédure.

Le juge des référés dans ces circonstances n'avait pas compétence pour fixer des créances dans la mesure où seul le juge commissaire en application de l'article L.624-2 du code de commerce a compétence à cet effet et/ou à défaut une autre juridiction en cas d'instance en cours; la procédure de référé ne pouvant être qualifiée comme telle.

Dans ses conclusions d'appel si M. [N] demande l'infirmation de l'ordonnance il ne développe aucun moyen dans le corps de ses conclusions.

Le bailleur demande qu'il soit débouté de ses demandes et que la décision entreprise soit confirmée.

Il est admis qu'en application de l'article 2292 du code civil une caution ne peut devoir plus que le débiteur principal.

La détermination de l'étendue d'un engagement de caution relève du pouvoir souverain des juges du fond.

En l'espèce il ressort de la lecture de l'acte de cession que M. [N] [G] s'est porté caution solidaire du preneur envers le bailleur, que son engagement porte sur le paiement des loyers, charges, accessoires, intérêts, dommages et intérêts, indemnité d'occupation etc...pour une durée de 18 ans.

En conséquence l'ordonnance est confirmée en ce que M. [N] a été condamné solidairement avec le preneur au paiement d'une provision au titre d'une dette locative et au paiement à titre provisionnel d'une indemnité d'occupation mensuelle de 966,83 € à compter de la date de résiliation du bail et jusqu'à libération complète des lieux avec restitution des clés.

En revanche elle est infirmée sur le montant de la provision au titre de la dette locative qui est limitée à 3 489,15 € dans la mesure où la caution ne peut pas être plus tenue que le débiteur principal.

Sur les demandes accessoires

Compte tenu de la solution du litige chaque partie gardera la charge des frais irrépétibles et des dépens exposés en première instance et en appel sauf pour le coût du commandement visant la clause résolutoire et sa dénonciation à M. [N] et l'assignation aux fins de constat de l'acquisition de la clause résolutoire qui seront mis à la charge de la SARL Idéal pneu.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe ;

Prononce la jonction des procédures qui portent sur le n° RG 23 2620 et le n° RG 23 3982

Déclare irrecevable l'appel de M. [M] ;

Infirme l'ordonnance sauf en ce qu'elle a :

Constaté l'acquisition des effets de la clause résolutoire insérée dans le bail liant les parties à la date du 14 novembre 2022 à compter de laquelle la SARL Idéal pneu est occupante sans droit ni titre ;

ordonné à défaut de restitution volontaire des lieux, l'expulsion de la SARL Idéal pneu et de tout occupant de son chef du local commercial situé à [Adresse 10] à compter de la signification de l'ordonnance avec en cas de besoin le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier ;

condamné solidairement la SARL Idéal pneu et M. [G] [N] au paiement d'une provision au titre de la dette locative ;

condamné solidairement la SARL Idéal pneu, M. [G] [N] au paiement d'une provision au titre d'une indemnité d'occupation mensuelle de 966,83 € à compter de la date de résiliation du bail et jusqu'à libération complète des lieux avec restitution des clés.

Statuant des chefs infirmés et y ajoutant ;

Déclare irrecevable la demande de fixation de créances au passif de la liquidation judiciaire de M. [M] ;

Limite la provision au titre de la dette locative à la somme de

3 489,15 € ;

Dit n'y avoir lieu à référé pour le surplus des demandes au titre de la dette locative ni au titre des demandes dirigées contre M. [T] ;

Dit que chaque partie gardera la charge des frais irrépétibles et des dépens exposés en première instance et en appel à l'exception du coût du commandement de payer visant la clause résolutoire et de l'assignation en constat de l'acquisition de la clause résolutoire qui seront mis à la charge de la SARL Idéal pneu.