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Cass. 3e civ., 4 juillet 2024, n° 23-11.475

COUR DE CASSATION

Autre

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Teiller

Rapporteur :

Mme Vernimmen

Avocats :

Me Lyon-Caen et Thiriez, Me Boré, Salve de Bruneton et Mégret, Me Cabinet Munier-Apaire, Me Cabinet Rousseau et Tapie, Me Célice, Texidor, Périer, Me Gadiou et Chevallier

Toulouse, du 28 septembre 2022

28 septembre 2022

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 28 septembre 2022), la société civile immobilière Domaine des cèdres, assurée auprès de la SMABTP, a fait construire un ensemble immobilier dont une villa a été vendue en l'état futur d'achèvement à M. [I].

2. Elle a confié la réalisation du lot climatisation, VMC et plomberie à la société Guerreiro frères (le constructeur), assurée auprès de la société Axa France IARD (la société Axa) puis des MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles (les MMA).

3. Le constructeur s'est approvisionné en VMC auprès de la société Atlantic climatisation et traitement d'air industrie (le vendeur), assurée auprès de la société Zurich Insurance Public Limited Company (la société Zurich Insurance), qui s'est fournie auprès de la société Ebm-Papst (le fournisseur), laquelle s'était elle-même fournie auprès de la société Ebm-Papst Mulfingen Gmbh & Co.Kg (le fabricant).

4. Considérant que l'incendie survenu le 24 mai 2012 dans sa villa provenait d'un dysfonctionnement du moteur de la VMC, M. [I] et son assureur, la société Pacifica ont, après expertise, assigné la SMABTP en indemnisation, laquelle a appelé en garantie le constructeur et ses assureurs.

5. Le vendeur, le fournisseur et le fabricant ont été appelés en garantie sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. Le fabricant fait grief à l'arrêt de le condamner avec le fournisseur à garantir le vendeur et la société Zurich Insurance des condamnations prononcées à leur encontre au profit des sociétés Axa et MMA et de M. [I], de le condamner in solidum avec le vendeur et la société Zurich Insurance ainsi que le fournisseur à garantir les sociétés Axa et MMA des condamnations prononcées à leur encontre au profit de la SMABTP et de M. [I], le condamner à garantir le fournisseur de ces  condamnations et à en supporter la charge finale, de le condamner in solidum avec ce dernier à verser diverses sommes au titre des frais irrépétibles, de le condamner avec les MMA, les sociétés Axa et Zurich Insurance, le fournisseur et le vendeur aux entiers dépens et de le condamner à les garantir des condamnations prononcées à leur encontre au titre des dépens et frais irrépétibles, alors « que l'action en garantie des vices cachés, qui doit être exercée à bref délai après la découverte du vice ou dans les deux ans de la découverte du vice selon que la vente est antérieure ou postérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 17 février 2005, est aussi enfermée, lorsqu'elle est exercée contre un commerçant, dans le délai butoir prévu par l'article L. 110-4 du code de commerce, qui court à compter de la vente initiale ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que le moteur de la VMC avait été vendu pour la première fois le 15 juin 2004 par son fabricant, Ebm-Papst Mulfingen, à la société Ebm-Papst ; qu'il s'ensuit que le délai butoir de 5 ans, qui avait commencé à courir le 19 juin 2008, date d'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, était expiré le 19 juin 2013, ce qui interdisait de déclarer recevables les actions récursoires exercées à compter de 2018 contre la société Ebm-Papst Mulfingen ; que pour les déclarer néanmoins recevables comme non prescrites, la cour d'appel a retenu que le constructeur dont la responsabilité est retenue en raison des vices affectant les matériaux qu'il a mis en oeuvre pour la réalisation de l'ouvrage, doit pouvoir exercer une action récursoire contre son vendeur sur le fondement de la garantie des vices cachés sans voir son action enfermée dans un délai de prescription courant à compter de la vente initiale et que le point de départ du délai qui leur est imparti par l'article 1648, alinéa 1er, du code civil est constitué par la date de leur propre assignation et le délai de l'article L. 110-4 I du code de commerce, courant à compter de la vente, est suspendu jusqu'à ce que la responsabilité de l'entrepreneur et la garantie du vendeur intermédiaire aient été recherchées ; qu'en statuant ainsi, elle a violé l'article L. 110-4 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

7. L'encadrement dans le temps de l'action en garantie des vices cachés est assuré par l'article 2232 du code civil, de sorte que cette action doit être formée dans le délai de deux ans à compter de la découverte du vice sans pouvoir dépasser le délai butoir de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit, lequel est, en matière de garantie des vices cachés, le jour de la vente conclue par la partie recherchée en garantie.

8. L'article 2232 du code civil ayant pour effet, dans les ventes commerciales ou mixtes, d'allonger de dix à vingt ans le délai pendant lequel la garantie des vices cachés peut être mise en oeuvre, le délai butoir prévu par ce texte relève, pour son application dans le temps, des dispositions transitoires énoncées à l'article 26, I, de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, selon lequel les dispositions qui allongent la durée d'une prescription s'appliquent lorsque le délai de prescription n'était pas expiré à la date de son entrée en vigueur et il est alors tenu compte du délai déjà écoulé.

9. Il en résulte que ce délai butoir est applicable aux ventes conclues avant l'entrée en vigueur de cette loi, si le délai de prescription décennal antérieur n'était pas expiré à cette date, compte étant alors tenu du délai déjà écoulé depuis celle du contrat conclu par la partie recherchée en garantie (Ch. mixte, 21 juillet 2023, pourvoi n° 21-17.789, publié).

10. La cour d'appel a constaté que la vente à l'origine de la garantie invoquée au soutien de l'action récursoire avait été conclue par le fabricant le 15 juin 2004.

11. Il en résulte que l'action récursoire intentée le 11 octobre 2018 à l'encontre du fabricant, moins de vingt ans après, est recevable.

12. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, la décision attaquée se trouve légalement justifiée en ce qu'elle a déclaré recevable l'action récursoire des assureurs du constructeur, du vendeur et de son assureur à l'encontre du fabricant.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Ebm-Papst Mulfingen Gmbh & Co.Kg aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille vingt-quatre.