Décisions
CA Pau, 2e ch - sect. 1, 4 juillet 2024, n° 23/00628
PAU
Arrêt
Autre
PhD/ND
Numéro 24/2229
COUR D'APPEL DE PAU
2ème CH - Section 1
ARRET DU 04/07/2024
Dossier : N° RG 23/00628 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IOXB
Nature affaire :
Demande en réparation des dommages causés par un intermédiaire
Affaire :
S.A.S. SOLFIGE
C/
S.A.R.L. HOTELIO
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 04 juillet 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 13 Mai 2024, devant :
Monsieur Philippe DARRACQ, magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame Nathalène DENIS, Greffière présente à l'appel des causes,
Philippe DARRACQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Joëlle GUIROY et en a rendu compte à la Cour composée de :
Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller faisant fonction de Président
Madame Joëlle GUIROY, Conseillère
Madame Laurence BAYLAUCQ, Conseillère
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
S.A.S. SOLFIGE
immatriculée au RCS de Bergerac sous le n° 878 185 545
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Justine GIARD, avocat au barreau de Pau
Assistée de Me Hugues BOUGET (SELARL HB Avocats), avocat au barreau de Paris
INTIMEE :
S.A.R.L. HOTELIO
immatriculée au RCS de Bayonne sous le n° 503 856 379
représenté par son représentant légal domicilié au siège en cette qualité
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Laura ETIENNE, avocat au barreau de Mont-de-Marsan
Assistée de Me Marine HOSTAING, avocat au barreau de Périgueux
sur appel de la décision
en date du 30 JANVIER 2023
rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE BAYONNE
RG : 2021003502
FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES
Par acte notarié du 16 décembre 2019, la société Solfige (sas), représentée par M. [V] [Y], a procédé à l'acquisition des murs et d'un fonds de commerce d'hôtel-restaurant exploité sous l'enseigne Campanile à [Localité 2].
Dans la perspective de cette acquisition, et par acte sous seing privé du 7 novembre 2019, la société Solfige a confié à la société Hotelio (sarl), spécialisée dans la gestion hôtellière, un mandat de gestion commerciale courante dudit fonds de commerce.
La société Hotelio est dirigée par M. [S] et M. [E].
Par décision du 16 décembre 2019, la société Solfige a nommé M. [O] [S] aux fonctions de directeur général en charge de la direction interne de la société.
Les relations se sont rapidement dégradées entre les parties.
Le 10 juin 2020, M. [S] a démissionné de ses fonctions de directeur général.
Le 30 juin 2020, la société Solfige et la société Hotelio ont signé un accord de résiliation anticipée du mandat de gestion.
La société Solfige a repris l'exploitation en direct du fonds de commerce.
Par courrier du 12 janvier 2021, le conseil de la société Solfige, après avoir relevé diverses fautes dans l'exécution du mandat de gestion, a mis en demeure la société Hotelio de lui payer la somme de 379.190,39 euros en réparation de son préjudice.
La société Hotelio a contesté les termes de ce courrier.
Suivant exploit du 21 octobre 2021, la société Solfige a fait assigner la société Hotelio par devant le tribunal de commerce de Bayonne en responsabilité et indemnisation de son préjudice du fait de l'exécution fautive du mandat de gestion ayant lié les parties.
Par jugement du 30 janvier 2023, auquel il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens initiaux des parties, le tribunal a :
- débouté la société Solfige de sa demande d'écarter les pièces 34 et 45 bis
- dit que la société Hotelio a exécuté son contrat de mandataire de gestion, qu'elle n'a pas commis de fautes graves ou négligences fautives de nature à engager sa responsabilité civile et qu'elle n'a pas violé son obligation d'information ou de conseil, comme son devoir de loyauté et de transparence
- débouté la société Solfige de sa demande de condamner la société Hotelio à lui verser une somme de 356.833,21 euros à titre de dommages et intérêts
- débouté la société Solfige de sa demande de condamner la société Hotelio à lui verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice moral
- débouté la société Hotelio de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive
- condamné la société Solfige à régler à la société Hotelio la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et débouté la société Solfige de sa demande de ce chef
- condamné la société Solfige aux dépens
- débouté les parties de leurs autres demandes
- ordonné l'exécution provisoire du jugement.
Par déclaration faite au greffe de la cour le 27 février 2023, la société Solfige a relevé appel de ce jugement.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 10 avril 2024.
Les parties ont été avisées par message RPVA que la décision sera rendue par anticipation le 04 juillet 2024.
***
Vu les dernières conclusions notifiées le 25 mars 2024 par la société Solfige qui a demandé à la cour, au visa des articles 1104, 1231, 1231-1, 1231-2, 1231-3 et 1231-4, 1992 et 1993 du code civil, d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, de :
- juger que M. [S], directeur général, n'avait pas pouvoir de représenter la société vis-à-vis des tiers
- juger en conséquence, que M. [S] ne pouvait pas valablement autoriser pour Solfige les décisions et/ou actions de Hotelio dans l'exercice du mandat de gestion,
- juger qu'en tout état de cause, Hotelio ne prouve pas avoir informé Solfige, sollicité et obtenu d'autorisation expresse avant ses décisions et/ou actions auprès de Solfige, ni en la personne de son président, ni même en la personne de son directeur général,
- juger en conséquence que la société Hotelio n'a pas respecté la procédure d'autorisation prévue au contrat,
- juger que ni la société Solfige, ni M. [Y] n'ont jamais donné de directive à la société Hotelio notamment pour un changement d'enseigne,
- juger que la société Hotelio a commis des fautes et/ou négligences fautives au cours de l'exécution du mandat de gestion hôtelière qui lui avait été confié par la société Solfige selon contrat du 7 novembre 2019, résilié par le mandataire au 30 juin 2020,
- juger que la société Hotelio a manqué à ses obligations de loyauté, d'information et de conseil,
- juger que les fautes de la société Hotelio et/ou ses manquement à ses obligations de loyauté, d'information et de conseil, notamment en tant que mandataire, ont causé des préjudices à Solfige.
En conséquence :
- condamner la société Hotelio à lui verser u euros somme de 356.833,21 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices financiers subis résultant des fautes et/ou négligences fautives commises notamment dans l'exécution du contrat de gestion hôtelière.
Subsidiairement :
- condamner la société Hotelio à lui verser :
- une somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices financiers qu'elle a subis résultant des seuls manquements d'Hotelio à son obligation de loyauté
- une somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices financiers qu'elle a subis résultant des seuls manquements d'Hotelio à son obligation d'information et de conseil
- une somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu'elle a subi du fait du comportement de la société Hotelio
- juger que les dommages et intérêts alloués à la société Hotelio produiront intérêts au taux légal, avec anatocisme, à compter de la signification du jugement à intervenir - débouter la société Hotelio de toutes ses demandes, fins et prétentions
- condamner la société Hotelio à lui verser une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens (y compris les frais d'huissier pour l'exécuti on forcée du jugement à intervenir).
* Vu les dernières conclusions notifiées le 9 avril 2024 par la société Hotelio qui a demandé à la cour, au visa des articles L. 225-56 I. et L. 227-6 du code de commerce, 1991, 1 e al. et 1231-1 du code civil, 6 du code de procédure civile et 1353 du code civil, 32-1 du code de procédure civile, 514 et suivants et 696 du code de procédure civile, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, et statuant à nouveau de ce chef, de :
- juger la procédure introduite par la société Solfige manifestement abusive
- condamner la société Solfige à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive
- et, en tout état de cause de condamner la société Solfige à lui payer une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la responsabilité du mandataire
L'appelante fait grief au jugement d'avoir rejeté ses demandes indemnitaires après avoir retenu qu'elle avait validé, par l'intermédiaire de son directeur général, les décisions et actions du gestionnaire et que les fautes de gestion alléguées n'étaient pas établies alors que :
- le directeur général ne pouvait engager la société Solfige à l'égard de la société Hotelio dont il est également le gérant, ce cumul de fonctions créant un conflit d'intérêts
- l'inopposabilité statutaire de la limitation des pouvoirs du directeur général à l'égard des tiers ne peut être invoquée par la société Hotelio
- la société Hotelio, au travers de sa gestion déloyale, a cherché à prendre le contrôle de l'hôtel dans le dessein avéré d'évincer son mandant qu'elle a fautivement tenu à l'écart des décisions de gestion y compris de celles relevant, selon le mandat de gestion, de son pouvoir décisionnaire, ne lui fournissant ni conseil ni information sur la stratégie commerciale de l'hôtel, prenant au contraire des décisions unilatérales ayant entraîné la perte de la franchise Campanile et la désorganisation de la gestion administrative, commerciale et financière de l'entreprise à l'origine d'au moins 17 chefs de préjudices. L'appelante en déduit que la société Hotelio doit répondre de ses fautes de gestion sur le fondement de l'article 1992 du code civil.
Cela posé, il résulte de l'article 1992 du code civil que le mandataire répond non seulement du dol mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion.
La responsabilité contractuelle du mandataire en charge de la gestion d'un hôtel, tenu d'une obligation de moyens à l'égard de son mandant, peut être engagée en cas de démonstration d'une inexécution contractuelle qui a causé un préjudice au mandant.
La société Solfige doit donc rapporter la triple preuve de l'inexécution des obligations du mandat de gestion hôtelière confié à la société Hotelio, du préjudice allégué et du lien de causalité entre l'inexécution contractuelle et celui-ci.
Il ressort des conclusions de l'appelante que les préjudices dont l'indemnisation est sollicitée ne sont pas fondés systématiquement sur la même faute du mandataire, de sorte que, dans un souci de clarté, il convient d'examiner la responsabilité du mandataire au titre de chacun des chefs de préjudice allégués après avoir examiné préalablement les deux moyens transversaux sous-tendant l'entier litige relatifs aux pouvoirs du directeur général dans sa relation avec le gestionnaire et à la politique de changement d'enseigne franchiseur mise en place par le gestionnaire.
sur les pouvoirs du directeur général
Le mandat de gestion liant les parties a pour objet la supervision de l'exploitation et de la commercialisation de l'hôtel.
L'article 3 du mandat stipule que le « mandataire effectuera pour le compte du mandant toutes les tâches liées à la direction de l'hôtel, en accord avec le mandant et en se conformant aux instructions et directives générales qui lui seront données par ce dernier, étant précisé que les pouvoirs du mandataire seront limités à la gestion commerciale courant de l'hôtel, à l'exception de tout investissement, emprunt, etc. A ce titre le mandataire effectuera notamment, sur la base des conseils et/ou propositions qu'il aura formulés au bénéfice du mandant, et en accord avec ce dernier : [...]. »
Par ailleurs, il est constant que la société Solfige a nommé M. [S] en qualité de directeur général disposant des pouvoirs les plus étendus pour assurer la direction interne de la société mais sans disposer du pouvoir légal de représenter la société à l'égard des tiers.
Si la jurisprudence admet, en application de l'article L. 227-6 du code de commerce, que les tiers peuvent se prévaloir à l'égard d'une société par actions simplifiée des engagements pris pour le compte de cette dernière par une personne portant le titre de directeur général nonobstant toute clause contraire des statuts, en l'espèce, la société Hotelio ne peut-être regardée comme un tiers dès lors qu'elle s'est immiscée dans la désignation du directeur général et que son propre dirigeant a été désigné aux fonctions de directeur général.
En effet, la désignation de M. [S] en qualité de directeur général, qui n'a pas été imposée à la société Solfige comme celle-ci le prétend, a été décidée avec la société Hotelio pour permettre à la société Solfige, qui n'était pas titulaire d'un permis d'exploitation, d'ouvrir l'hôtel-restaurant sous couvert de M. [S], alors seul titulaire d'un tel permis, et à la société Hotelio d'exécuter son mandat de gestion.
Cet accord est exclusif de toute volonté des parties au mandat de gestion de déléguer, à l'égard de la société Hotelio, l'exercice des prérogatives du mandant au profit de M. [S], ce qui reviendrait à vider de leur substance les mécanismes du contrôle conventionnel des actes du mandataire prévus par le mandat de gestion liant les parties.
Il ne peut donc être soutenu que le directeur général a validé les décisions et actions prises par la société Hotelio dans le cadre du mandat de gestion, ce qui, toutefois, ne préjuge en rien du bien fondé des griefs articulés par la société Solfige.
A cet égard, l'exécution du mandat de gestion ne postulait pas le recueil d'un accord du mandant préalablement à toute décision relevant de la gestion courante de la société dont la finalité poursuivait les orientations données par le mandant.
sur la politique de changement d'enseigne
L'appelante fait valoir que la société Hotelio ne pouvait, sans son accord, entreprendre des démarches en vue d'un changement d'enseigne, et plus précisément de changement de franchise, en abandonnant Campanile au profit de Best Western, et que, au surplus, les décisions de gestion relatives à la rénovation des chambres de l'hôtel et du changement de logiciel d'exploitation sont à l'origine du non-renouvellement du contrat de franchise avec Campanile pour non-conformité avec le cahier des charges du franchiseur.
Mais, d'une part, l'appelante ne sollicite aucune indemnisation au titre de la perte prétendue de l'enseigne Campanile dont le contrat de franchise arrivait à expiration au 1er août 2021.
D'autre part, la lettre de dénonciation du contrat de franchise Campanile, en date du 24 juin 2020, par le groupe Louvre hôtel a été faite à titre purement conservatoire afin d'éviter un renouvellement automatique du contrat à son échéance contractuelle, mais en aucun cas en considération d'une non-conformité de l'établissement avec le cahier des charges Campanile.
Au demeurant, il n'est versé aux débats aucun élément démontrant que le groupe Louvre hôtel aurait refusé de proposer un renouvellement de la franchise en raison de l'existence de non-conformités.
Par ailleurs, dans un mail du 5 juin 2019, en vue d'acquérir l'hôtel-restaurant aux lieu et place de la société Hotelio avec laquelle il était en discussion, M. [Y] a détaillé les actions devant être entreprises notamment dans la perspective de « l'arrêt » du contrat de franchise Campanile et alors que la société Hotelio avait déjà consulté des franchiseurs alternatifs, dont le groupe Best Western.
C'est donc en adéquation avec cet objectif que, devenue mandataire de gestion, la société Hotelio a poursuivi la politique de changement d'enseigne adossée à la volonté de montée en gamme affichée par le mandant qui envisageait même la création d'une salle de fitness (pièce 55 intimée) et d'importants travaux de rénovation.
Et, loin de remettre en cause le choix du mandataire, la société Solfige n'a pas remis en cause la validation du dossier de franchise par le groupe Best Western en septembre 2020.
La société Hotelio n'a commis aucune faute contractuelle en mettant en place une politique de changement d'enseigne en cohérence avec les objectifs du mandant.
Il convient, à la lumière des considérations qui précèdent, d'examiner la responsabilité du mandataire en lien avec les préjudices dont la réparation est demandée.
1 - sur les travaux de rénovation
L'appelante sollicite une indemnité de 141.943,84 euros au titre de la réalisation de travaux non conformes aux normes imposées par le cahier des charges Campanile.
Mais, il ressort des productions que les travaux de rénovation des salles de bain et des chambres de l'hôtel ont été entrepris avec l'accord de M. [Y], sous le contrôle de son propre architecte, validant l'ensemble des factures.
Si lors de sa visite de l'établissement un représentant de l'enseigne Campanile a noté que certains éléments décoratifs n'étaient pas conformes au cahier des charges, aucune suite n'a été donnée à ces observations par le franchiseur.
Au demeurant, la société Hotelio verse aux débats des photographies démontrant que les chambres des hôtels Campanile ne répondent pas à des codes standardisés appliqués rigoureusement et que les chambres rénovées sont similaires à d'autres chambres commercialisées sous l'enseigne Campanile.
Ensuite, il a été démontré que ces travaux étaient en lien avec le projet d'évolution de la franchise de référence en cours.
La société Solfige a donc bénéficié de travaux de rénovation appropriés qui lui ont permis d'améliorer significativement le standing et le confort de son hôtel, conformément à la volonté du mandant.
Ce chef de demande est donc infondé.
2 - sur la perte du fichier clients
L'appelante fait valoir que le gestionnaire a remplacé, sans autorisation, les ordinateurs dédiés à l'exploitation de l'établissement, en négligeant de procéder à la sauvegarde des données antérieures au mois de janvier 2020 et, spécialement du fichier clients dont la perte doit être valorisée à 30 % du montant du prix d'acquisition du fonds de commerce de 200.000 euros, soit la somme de 60.000 euros sollicitée à titre d'indemnisation.
Mais, d'une part, la question de l'éventuelle autorisation du mandant est sans objet ici, seule l'indemnisation de la perte du fichier clients étant sollicitée.
D'autre part, le gestionnaire ne saurait répondre des fautes des prestataires en charge du remplacement du matériel informatique et du changement de logiciel qui devaient veiller à prendre toutes les mesures nécessaires à la sauvegarde des données d'exploitation antérieures à janvier 2020, ce qui ressort de l'attestation versée aux débats par le fournisseur du matériel (pièce 29 appelante) qui confirme également que, à la date du 12 novembre 2020, l'ancien matériel restait dans ses locaux à la disposition de la société Solfige.
Par ailleurs, l'appelante ne démontre pas, alors même que l'ancien logiciel Opera était relié au service cloud auquel la société Solfige et le franchiseur Campanile avait accès, que les données antérieures à janvier sont effectivement perdues.
Enfin, l'appelante n'a produit aucun élément susceptible d'établir un lien de causalité entre l'éventuelle perte du fichier clients et le préjudice allégué, l'attestation de l'expert-comptable, purement péremptoire et dénuée de tout fondement comptable, étant inopérante, d'autant que les éléments incorporels ont été cédés au prix de 120.000 euros et qu'il n'est justifié ni d'une dépréciation de ceux-ci du fait de la perte alléguée du fichiers clients ni d'une baisse du chiffre d'affaires en lien avec ladite perte.
Ce chef de demande est donc infondé.
3 - sur l'acquisition du logiciel Fiducial et la perte de chiffre d'affaires
L'appelante reproche à la société Hotelio d'avoir procédé, sans son accord, au remplacement inutile du logiciel Opera du groupe prologiciel « Louvre Hôtel » au profit d'un logiciel Fiducial, sans interface avec les serveurs Campanile et dysfonctionnant, au prix injustifié de 13.997,52 euros, à l'origine d'une baisse de 5% du chiffres d'affaires, soit la somme de 23.159,37 euros TTC du fait de ne pas avoir pu bénéficier de la mise en avant de l'hôtel via la plateforme Campanile à cause de la spécificité du paramétrage du nouveau logiciel Fiducila.
L'appelante sollicite l'indemnisation du prix d'acquisition du logiciel et de la perte de chiffres d'affaires.
Mais, dès lors que le mandant avait initié une politique de changement d'enseigne conduisant à la cessation de la franchise Campanile, la société Hotelio a pu, sans faute de sa part, tirer toutes les conséquences opérationnelles du choix du mandant en abandonnant le logiciel Opera, d'autant que ce serveur intégré offrait au franchiseur un accès direct aux propres données d'exploitation de la société Solfige.
En outre, le groupe « Louvre Hôtel » n'imposait pas, comme condition de la franchise Campanile, l'adoption par le franchisé du logiciel Opera.
Au demeurant, dès le mois de décembre 2019, le responsable d'exploitation de l'hôtel a pris attache avec le franchiseur pour envisager conjointement les modalités de migration vers un autre logiciel, sans que cela suscite de difficultés.
Et, dans sa note de visite du 28 août 2020, soit postérieurement à la cessation du mandat de gestion, loin de confirmer une violation du cahier des charges, le représentant du franchiseur Campanile a simplement relevé les risques de complication de la fluidité de la relation commerciale du fait de l'absence d'interface existante entre les serveurs Campanile et nouveau logiciel choisi par le gestionnaire.
Cependant, il n'est justifié d'aucune réalisation des risques annoncés alors que l'établissement pouvait recevoir des réservations via les autres outils mis en place par le franchiseur et avait accès à l'ensemble des informations tarifaires et promotionnelles du groupe.
Par ailleurs, non seulement la baisse alléguée du chiffre d'affaires de 5 %, au cours du premier semestre 2020, n'est pas établie mais elle ne peut être décorrelée des mesures de confinement sanitaire prises au cours de cette période dans le cadre de la lutte contre la propagation de la Covid-19.
Il suit de ce qui précède que la société Hotelio n'a pas commis de faute de gestion en procédant à l'acquisition d'un nouveau logiciel qui n'était pas exclusif de la poursuite normale de l'exploitation sous l'enseigne Campanile jusqu'au terme du contrat de franchise.
Ces deux chefs de demande d'indemnisation sont donc infondés.
4 - sur le coût de la maintenance du logiciel Opera
L'appelante sollicite le remboursement du coût de la maintenance de l'ancien logiciel Opera, soit la somme de 2.736 euros TTC, sur toute l'année 2020 alors que les anciens ordinateurs avaient été récupérés par le fournisseur du nouveau matériel.
Mais, l'appelante ne démontre pas avoir réglé cette somme, ce qui ne résulte pas de la seule production de la pièce 27 relative à l'estimation du coût respectif du logiciel Oracle et Opera.
Ce chef de demande est infondé.
5 - sur les frais de gestion dus à certains prestataires
L'appelante sollicite le paiement des frais de gestion de l'hôtel dus à certains prestataires :
- My hotel reputation : 1.093,80 euros TTC
- Hotels actions : 3.456,00 euros TTC
- Solocal : 3.112,80 euros
- AJ conseil : 6.600,00 euros
soit un montant total de 14.262,60 euros
Mais, l'appelante ne caractérise aucune faute de gestion en lien avec ces frais de gestion engagés dans l'intérêt de la société Solfige et qui ont fait l'objet d'une note récapitulative adressée au mandant dans le cadre de la résiliation amiable du mandat de gestion (pièce 63 intimée), tandis que la circonstance seule que le mandataire n'ait pas réglé ces factures, au-delà des difficultés de trésorerie ayant conduit la société Solfige à souscrire un prêt de 100.000 euros, n'étant pas une source de dommage.
Ce chef de demande est infondé.
6 - sur l'embauche d'une cuisinière
L'appelante reproche à son gestionnaire d'avoir, sans autorisation ni utilité pour l'établissement, embauché une cuisinière, de décembre 2019 à juillet 2020, soit une charge sociale de 9.942,38 euros, outre le coût des services d'un conseiller culinaire parisien pour un montant de 3.600 euros.
Mais, la cuisinière faisait partie des effectifs de l'établissement à la date de son acquisition par la société Solfige et il ne peut être fait grief au gestionnaire de ne pas l'avoir licenciée pendant le confinement sanitaire, d'autant que le mécanisme de chômage partiel a limité le coût de ce poste.
Ce premier grief manque en fait.
S'agissant du second grief, la commande de la prestation d'un conseiller culinaire, en lien avec la gestion courante de l'hôtel, est antérieure à l'état d'urgence sanitaire, et cohérente avec la reprise de l'exploitation de l'établissement pourvu d'un restaurant.
Le second grief est infondé.
La demande d'indemnisation est donc infondée.
7 - sur les dépenses de travaux de peinture
L'appelante fait grief à la société Hotelio d'avoir fait procéder à des travaux de peinture, confiés au père de l'ancienne directrice de l'hôtel, pour un montant de 2.200 euros.
Mais, il ressort de la facture détaillée du 29 février 2020, que l'artisan mandaté, peu important son lien de parenté avec la directrice, a réalisé des travaux de peinture et de menues réparations, nécessaires et utiles, relevant de l'entretien courant de l'établissement que pouvait engager le gestionnaire, de sorte qu'aucune faute ne peut être reprochée à ce dernier, ni aucun préjudice ne pouvant être caractérisé.
Cet chef de demande est infondé.
8 - sur l'embauche d'une assistante de réception
L'appelante fait grief au gestionnaire d'avoir embauché une assistante de réception dès le premier jour de l'exploitation de l'établissement pour pallier sa propre carence en amont de l'acquisition en vue de permettre son fonctionnement immédiat et sa rentabilité effective, lui occasionnant un préjudice de 11.056,57 euros au titre de la charge sociale de cette embauche.
Mais, le grief est infondé dès lors que l'établissement, fonctionnant 7/7 de 6 à 23 heures, était pourvu d'une seule réceptionniste en place lors de son acquisition, de sorte qu'il était indispensable d'embaucher une réceptionniste assurant les rotations sur le poste compte tenu des congés et repos dus aux salariés et alors qu'il n'est pas démontré qu'il existait une solution alternative moins onéreuse soit par une réaffectation des ressources internes soit par un autre mode de recrutement.
En outre, postérieurement à la cessation du mandat de gestion, la société Solfige a conservé la réceptionniste embauchée.
Par conséquent, aurait-elle pris seule l'initiative de l'embauche, sans aviser le mandant, ce manquement n'a aucune incidence sur la nécessité de la mesure prise par le gestionnaire, découlant de l'organisation de l'hôtel à la date de son acquisition nécessairement connue de la société Solfige.
Ce chef de demande d'indemnisation est infondé.
9 - sur le surcoût de l'opérateur téléphonique
Ce chef d'indemnisation d'un montant de 559,15 euros doit être rejeté dès lors que la production des factures de l'opérateur ne permet d'établir ni la faute du gestionnaire ni la réalité du préjudice allégué.
10 - sur le montant des offerts
L'appelante reproche au gestionnaire le montant exorbitant des offerts relatifs au mois de février 2020 portant sur la somme de 1.229,05 euros.
Mais, relevant de la gestion courante de l'établissement ne nécessitant pas un accord spécial préalable du mandant, la société Hotelio a pu, sans faute, consentir des remises pour l'hébergement des salariés de l'entreprise de peinture durant la période des travaux de rénovation réalisés en février 2020.
Ce chef de demande d'indemnisation est infondé.
11 - sur les frais de silhouettage de l'hôtel
L'appelante fait grief au gestionnaire d'avoir engagé des dépenses inutiles de silhouettage de l'hôtel, au surplus non conformes aux standards de l'enseigne Campanile, pour un montant de 10.732,32 euros.
Mais, il ressort notamment du mail du 27 novembre 2019, que M. [Y] avait envisagé le silhouettage de l'hôtel et une réfection de la signalétique.
Et, s'il est exact que l'enseigne lumineuse Campanile avait un fond blanc non conforme aux standards de la franchise, il reste que ce fait n'est à l'origine d'aucun préjudice démontré.
Ce chef de demande d'indemnisation est infondé.
12 - sur la perte des arrhes
Il convient de rejeter ce chef de demande d'indemnisation d'un montant de 8.971,63 euros qui n'est pas imputable au gestionnaire mais à l'inexécution par le précédent exploitant de son engagement pris envers M. [Y] de restituer les paiements réalisés par les clients du cessionnaire sur son terminal de paiement dans l'attente de l'installation du nouveau terminal.
Ce chef de demande d'indemnisation n'est pas fondée.
13 - sur la borne automatique de paiement
L'appelante fait grief au gestionnaire d'avoir tardé à mettre en place la borne automatique de paiement prévue seulement à la fin du mois de mai 2020 et opérationnelle en septembre 2020 alors que l'exploitation de l'hôtel a commencé en décembre 2019. L'appelante évalue son préjudice à une moyenne de cinq chambres par jour, soit la somme de 47.000 euros.
Mais, d'une part, la société Hotelio justifie avoir agi avec diligence en sollicitant plusieurs demandes de devis à la société Ariane en décembre 2019, lesquels sont parvenus par mail du 19 décembre 2019 et ont donné lieu à une commande en date du 7 janvier 2020, traitée tardivement par le prestataire qui, dans le contexte de la crise sanitaire, n'a pu installer la borne qu'en mai 2020, ce dont le mandant a été informé (pièce 54 intimée).
Il n'est pas démontré par l'appelante que la borne de paiement était défectueuse, ce dont ne répond pas le gestionnaire tenu d'une obligation de moyens.
Et, en tout état de cause, la société Solfige ne rapporte pas la preuve de l'existence même d'un quelconque préjudice en lien avec les éventuels retards et dysfonctionnements de la borne de paiement automatique.
Ce chef d'indemnisation n'est pas fondé.
14 - sur l'écart de caisse
L'appelante fait grief au gestionnaire de lui avoir remis des comptes faisant apparaître un écart de caisse injustifié de 5.442,78 euros pour le premier trimestre 2020.
L'intimé objecte que ces liquidités ont servi à régler les dépenses courantes d'exploitation de l'établissement dont les justificatifs ont été communiqués au comptable de Solfige.
Mais, force est de constater que la société Hotelio ne rapporte pas la preuve de ses allégations alors que l'injection de liquidités dans la trésorerie courante aurait dû être tracée dans la comptabilité.
Par conséquent, infirmant le jugement de ce chef, la société Hotelio sera condamnée à payer la somme de 5.442,78 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, avec capitalisation des intérêts échus pour une année entière.
Le jugement sera confirmé pour le surplus de ses dispositions.
Sur les autres demandes indemnitaires
Les manquements allégués du mandataire à son obligation de conseil, d'information et de loyauté n'étant pas caractérisés ni en lien avec les préjudices invoqués, la société Solfige doit être déboutée de ses demandes indemnitaires formées à titre subsidiaire, comme l'a retenu le jugement.
Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté la société Solfige de sa demande d'indemnisation d'un préjudice moral non caractérisé.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Hotelio de sa demande d'indemnisation pour procédure abusive, l'abus dans l'exercice du droit d'agir en justice n'étant pas établi en l'espèce.
Le jugement sera confirmé sur les dépens et les frais irrépétibles.
Chaque partie conservera ses dépens et frais irrépétibles d'appel.
PAR CES MOTIFS
la cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté la société Solfige de sa demande d'indemnisation au titre de l'écart de caisse,
et statuant à nouveau de ce seul chef,
CONDAMNE la société Hotelio à payer à la société Solfige la somme de 5.442,78 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, avec capitalisation des intérêts échus pour une année entière,
DIT que chaque partie conservera à sa charge ses dépens d'appel,
DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe DARRACQ, conseiller faisant fonction de Président et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.
La Greffière, Le Président,
Numéro 24/2229
COUR D'APPEL DE PAU
2ème CH - Section 1
ARRET DU 04/07/2024
Dossier : N° RG 23/00628 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IOXB
Nature affaire :
Demande en réparation des dommages causés par un intermédiaire
Affaire :
S.A.S. SOLFIGE
C/
S.A.R.L. HOTELIO
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 04 juillet 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 13 Mai 2024, devant :
Monsieur Philippe DARRACQ, magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame Nathalène DENIS, Greffière présente à l'appel des causes,
Philippe DARRACQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Joëlle GUIROY et en a rendu compte à la Cour composée de :
Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller faisant fonction de Président
Madame Joëlle GUIROY, Conseillère
Madame Laurence BAYLAUCQ, Conseillère
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
S.A.S. SOLFIGE
immatriculée au RCS de Bergerac sous le n° 878 185 545
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Justine GIARD, avocat au barreau de Pau
Assistée de Me Hugues BOUGET (SELARL HB Avocats), avocat au barreau de Paris
INTIMEE :
S.A.R.L. HOTELIO
immatriculée au RCS de Bayonne sous le n° 503 856 379
représenté par son représentant légal domicilié au siège en cette qualité
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Laura ETIENNE, avocat au barreau de Mont-de-Marsan
Assistée de Me Marine HOSTAING, avocat au barreau de Périgueux
sur appel de la décision
en date du 30 JANVIER 2023
rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE BAYONNE
RG : 2021003502
FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES
Par acte notarié du 16 décembre 2019, la société Solfige (sas), représentée par M. [V] [Y], a procédé à l'acquisition des murs et d'un fonds de commerce d'hôtel-restaurant exploité sous l'enseigne Campanile à [Localité 2].
Dans la perspective de cette acquisition, et par acte sous seing privé du 7 novembre 2019, la société Solfige a confié à la société Hotelio (sarl), spécialisée dans la gestion hôtellière, un mandat de gestion commerciale courante dudit fonds de commerce.
La société Hotelio est dirigée par M. [S] et M. [E].
Par décision du 16 décembre 2019, la société Solfige a nommé M. [O] [S] aux fonctions de directeur général en charge de la direction interne de la société.
Les relations se sont rapidement dégradées entre les parties.
Le 10 juin 2020, M. [S] a démissionné de ses fonctions de directeur général.
Le 30 juin 2020, la société Solfige et la société Hotelio ont signé un accord de résiliation anticipée du mandat de gestion.
La société Solfige a repris l'exploitation en direct du fonds de commerce.
Par courrier du 12 janvier 2021, le conseil de la société Solfige, après avoir relevé diverses fautes dans l'exécution du mandat de gestion, a mis en demeure la société Hotelio de lui payer la somme de 379.190,39 euros en réparation de son préjudice.
La société Hotelio a contesté les termes de ce courrier.
Suivant exploit du 21 octobre 2021, la société Solfige a fait assigner la société Hotelio par devant le tribunal de commerce de Bayonne en responsabilité et indemnisation de son préjudice du fait de l'exécution fautive du mandat de gestion ayant lié les parties.
Par jugement du 30 janvier 2023, auquel il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens initiaux des parties, le tribunal a :
- débouté la société Solfige de sa demande d'écarter les pièces 34 et 45 bis
- dit que la société Hotelio a exécuté son contrat de mandataire de gestion, qu'elle n'a pas commis de fautes graves ou négligences fautives de nature à engager sa responsabilité civile et qu'elle n'a pas violé son obligation d'information ou de conseil, comme son devoir de loyauté et de transparence
- débouté la société Solfige de sa demande de condamner la société Hotelio à lui verser une somme de 356.833,21 euros à titre de dommages et intérêts
- débouté la société Solfige de sa demande de condamner la société Hotelio à lui verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice moral
- débouté la société Hotelio de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive
- condamné la société Solfige à régler à la société Hotelio la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et débouté la société Solfige de sa demande de ce chef
- condamné la société Solfige aux dépens
- débouté les parties de leurs autres demandes
- ordonné l'exécution provisoire du jugement.
Par déclaration faite au greffe de la cour le 27 février 2023, la société Solfige a relevé appel de ce jugement.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 10 avril 2024.
Les parties ont été avisées par message RPVA que la décision sera rendue par anticipation le 04 juillet 2024.
***
Vu les dernières conclusions notifiées le 25 mars 2024 par la société Solfige qui a demandé à la cour, au visa des articles 1104, 1231, 1231-1, 1231-2, 1231-3 et 1231-4, 1992 et 1993 du code civil, d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, de :
- juger que M. [S], directeur général, n'avait pas pouvoir de représenter la société vis-à-vis des tiers
- juger en conséquence, que M. [S] ne pouvait pas valablement autoriser pour Solfige les décisions et/ou actions de Hotelio dans l'exercice du mandat de gestion,
- juger qu'en tout état de cause, Hotelio ne prouve pas avoir informé Solfige, sollicité et obtenu d'autorisation expresse avant ses décisions et/ou actions auprès de Solfige, ni en la personne de son président, ni même en la personne de son directeur général,
- juger en conséquence que la société Hotelio n'a pas respecté la procédure d'autorisation prévue au contrat,
- juger que ni la société Solfige, ni M. [Y] n'ont jamais donné de directive à la société Hotelio notamment pour un changement d'enseigne,
- juger que la société Hotelio a commis des fautes et/ou négligences fautives au cours de l'exécution du mandat de gestion hôtelière qui lui avait été confié par la société Solfige selon contrat du 7 novembre 2019, résilié par le mandataire au 30 juin 2020,
- juger que la société Hotelio a manqué à ses obligations de loyauté, d'information et de conseil,
- juger que les fautes de la société Hotelio et/ou ses manquement à ses obligations de loyauté, d'information et de conseil, notamment en tant que mandataire, ont causé des préjudices à Solfige.
En conséquence :
- condamner la société Hotelio à lui verser u euros somme de 356.833,21 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices financiers subis résultant des fautes et/ou négligences fautives commises notamment dans l'exécution du contrat de gestion hôtelière.
Subsidiairement :
- condamner la société Hotelio à lui verser :
- une somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices financiers qu'elle a subis résultant des seuls manquements d'Hotelio à son obligation de loyauté
- une somme de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices financiers qu'elle a subis résultant des seuls manquements d'Hotelio à son obligation d'information et de conseil
- une somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu'elle a subi du fait du comportement de la société Hotelio
- juger que les dommages et intérêts alloués à la société Hotelio produiront intérêts au taux légal, avec anatocisme, à compter de la signification du jugement à intervenir - débouter la société Hotelio de toutes ses demandes, fins et prétentions
- condamner la société Hotelio à lui verser une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens (y compris les frais d'huissier pour l'exécuti on forcée du jugement à intervenir).
* Vu les dernières conclusions notifiées le 9 avril 2024 par la société Hotelio qui a demandé à la cour, au visa des articles L. 225-56 I. et L. 227-6 du code de commerce, 1991, 1 e al. et 1231-1 du code civil, 6 du code de procédure civile et 1353 du code civil, 32-1 du code de procédure civile, 514 et suivants et 696 du code de procédure civile, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, et statuant à nouveau de ce chef, de :
- juger la procédure introduite par la société Solfige manifestement abusive
- condamner la société Solfige à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive
- et, en tout état de cause de condamner la société Solfige à lui payer une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la responsabilité du mandataire
L'appelante fait grief au jugement d'avoir rejeté ses demandes indemnitaires après avoir retenu qu'elle avait validé, par l'intermédiaire de son directeur général, les décisions et actions du gestionnaire et que les fautes de gestion alléguées n'étaient pas établies alors que :
- le directeur général ne pouvait engager la société Solfige à l'égard de la société Hotelio dont il est également le gérant, ce cumul de fonctions créant un conflit d'intérêts
- l'inopposabilité statutaire de la limitation des pouvoirs du directeur général à l'égard des tiers ne peut être invoquée par la société Hotelio
- la société Hotelio, au travers de sa gestion déloyale, a cherché à prendre le contrôle de l'hôtel dans le dessein avéré d'évincer son mandant qu'elle a fautivement tenu à l'écart des décisions de gestion y compris de celles relevant, selon le mandat de gestion, de son pouvoir décisionnaire, ne lui fournissant ni conseil ni information sur la stratégie commerciale de l'hôtel, prenant au contraire des décisions unilatérales ayant entraîné la perte de la franchise Campanile et la désorganisation de la gestion administrative, commerciale et financière de l'entreprise à l'origine d'au moins 17 chefs de préjudices. L'appelante en déduit que la société Hotelio doit répondre de ses fautes de gestion sur le fondement de l'article 1992 du code civil.
Cela posé, il résulte de l'article 1992 du code civil que le mandataire répond non seulement du dol mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion.
La responsabilité contractuelle du mandataire en charge de la gestion d'un hôtel, tenu d'une obligation de moyens à l'égard de son mandant, peut être engagée en cas de démonstration d'une inexécution contractuelle qui a causé un préjudice au mandant.
La société Solfige doit donc rapporter la triple preuve de l'inexécution des obligations du mandat de gestion hôtelière confié à la société Hotelio, du préjudice allégué et du lien de causalité entre l'inexécution contractuelle et celui-ci.
Il ressort des conclusions de l'appelante que les préjudices dont l'indemnisation est sollicitée ne sont pas fondés systématiquement sur la même faute du mandataire, de sorte que, dans un souci de clarté, il convient d'examiner la responsabilité du mandataire au titre de chacun des chefs de préjudice allégués après avoir examiné préalablement les deux moyens transversaux sous-tendant l'entier litige relatifs aux pouvoirs du directeur général dans sa relation avec le gestionnaire et à la politique de changement d'enseigne franchiseur mise en place par le gestionnaire.
sur les pouvoirs du directeur général
Le mandat de gestion liant les parties a pour objet la supervision de l'exploitation et de la commercialisation de l'hôtel.
L'article 3 du mandat stipule que le « mandataire effectuera pour le compte du mandant toutes les tâches liées à la direction de l'hôtel, en accord avec le mandant et en se conformant aux instructions et directives générales qui lui seront données par ce dernier, étant précisé que les pouvoirs du mandataire seront limités à la gestion commerciale courant de l'hôtel, à l'exception de tout investissement, emprunt, etc. A ce titre le mandataire effectuera notamment, sur la base des conseils et/ou propositions qu'il aura formulés au bénéfice du mandant, et en accord avec ce dernier : [...]. »
Par ailleurs, il est constant que la société Solfige a nommé M. [S] en qualité de directeur général disposant des pouvoirs les plus étendus pour assurer la direction interne de la société mais sans disposer du pouvoir légal de représenter la société à l'égard des tiers.
Si la jurisprudence admet, en application de l'article L. 227-6 du code de commerce, que les tiers peuvent se prévaloir à l'égard d'une société par actions simplifiée des engagements pris pour le compte de cette dernière par une personne portant le titre de directeur général nonobstant toute clause contraire des statuts, en l'espèce, la société Hotelio ne peut-être regardée comme un tiers dès lors qu'elle s'est immiscée dans la désignation du directeur général et que son propre dirigeant a été désigné aux fonctions de directeur général.
En effet, la désignation de M. [S] en qualité de directeur général, qui n'a pas été imposée à la société Solfige comme celle-ci le prétend, a été décidée avec la société Hotelio pour permettre à la société Solfige, qui n'était pas titulaire d'un permis d'exploitation, d'ouvrir l'hôtel-restaurant sous couvert de M. [S], alors seul titulaire d'un tel permis, et à la société Hotelio d'exécuter son mandat de gestion.
Cet accord est exclusif de toute volonté des parties au mandat de gestion de déléguer, à l'égard de la société Hotelio, l'exercice des prérogatives du mandant au profit de M. [S], ce qui reviendrait à vider de leur substance les mécanismes du contrôle conventionnel des actes du mandataire prévus par le mandat de gestion liant les parties.
Il ne peut donc être soutenu que le directeur général a validé les décisions et actions prises par la société Hotelio dans le cadre du mandat de gestion, ce qui, toutefois, ne préjuge en rien du bien fondé des griefs articulés par la société Solfige.
A cet égard, l'exécution du mandat de gestion ne postulait pas le recueil d'un accord du mandant préalablement à toute décision relevant de la gestion courante de la société dont la finalité poursuivait les orientations données par le mandant.
sur la politique de changement d'enseigne
L'appelante fait valoir que la société Hotelio ne pouvait, sans son accord, entreprendre des démarches en vue d'un changement d'enseigne, et plus précisément de changement de franchise, en abandonnant Campanile au profit de Best Western, et que, au surplus, les décisions de gestion relatives à la rénovation des chambres de l'hôtel et du changement de logiciel d'exploitation sont à l'origine du non-renouvellement du contrat de franchise avec Campanile pour non-conformité avec le cahier des charges du franchiseur.
Mais, d'une part, l'appelante ne sollicite aucune indemnisation au titre de la perte prétendue de l'enseigne Campanile dont le contrat de franchise arrivait à expiration au 1er août 2021.
D'autre part, la lettre de dénonciation du contrat de franchise Campanile, en date du 24 juin 2020, par le groupe Louvre hôtel a été faite à titre purement conservatoire afin d'éviter un renouvellement automatique du contrat à son échéance contractuelle, mais en aucun cas en considération d'une non-conformité de l'établissement avec le cahier des charges Campanile.
Au demeurant, il n'est versé aux débats aucun élément démontrant que le groupe Louvre hôtel aurait refusé de proposer un renouvellement de la franchise en raison de l'existence de non-conformités.
Par ailleurs, dans un mail du 5 juin 2019, en vue d'acquérir l'hôtel-restaurant aux lieu et place de la société Hotelio avec laquelle il était en discussion, M. [Y] a détaillé les actions devant être entreprises notamment dans la perspective de « l'arrêt » du contrat de franchise Campanile et alors que la société Hotelio avait déjà consulté des franchiseurs alternatifs, dont le groupe Best Western.
C'est donc en adéquation avec cet objectif que, devenue mandataire de gestion, la société Hotelio a poursuivi la politique de changement d'enseigne adossée à la volonté de montée en gamme affichée par le mandant qui envisageait même la création d'une salle de fitness (pièce 55 intimée) et d'importants travaux de rénovation.
Et, loin de remettre en cause le choix du mandataire, la société Solfige n'a pas remis en cause la validation du dossier de franchise par le groupe Best Western en septembre 2020.
La société Hotelio n'a commis aucune faute contractuelle en mettant en place une politique de changement d'enseigne en cohérence avec les objectifs du mandant.
Il convient, à la lumière des considérations qui précèdent, d'examiner la responsabilité du mandataire en lien avec les préjudices dont la réparation est demandée.
1 - sur les travaux de rénovation
L'appelante sollicite une indemnité de 141.943,84 euros au titre de la réalisation de travaux non conformes aux normes imposées par le cahier des charges Campanile.
Mais, il ressort des productions que les travaux de rénovation des salles de bain et des chambres de l'hôtel ont été entrepris avec l'accord de M. [Y], sous le contrôle de son propre architecte, validant l'ensemble des factures.
Si lors de sa visite de l'établissement un représentant de l'enseigne Campanile a noté que certains éléments décoratifs n'étaient pas conformes au cahier des charges, aucune suite n'a été donnée à ces observations par le franchiseur.
Au demeurant, la société Hotelio verse aux débats des photographies démontrant que les chambres des hôtels Campanile ne répondent pas à des codes standardisés appliqués rigoureusement et que les chambres rénovées sont similaires à d'autres chambres commercialisées sous l'enseigne Campanile.
Ensuite, il a été démontré que ces travaux étaient en lien avec le projet d'évolution de la franchise de référence en cours.
La société Solfige a donc bénéficié de travaux de rénovation appropriés qui lui ont permis d'améliorer significativement le standing et le confort de son hôtel, conformément à la volonté du mandant.
Ce chef de demande est donc infondé.
2 - sur la perte du fichier clients
L'appelante fait valoir que le gestionnaire a remplacé, sans autorisation, les ordinateurs dédiés à l'exploitation de l'établissement, en négligeant de procéder à la sauvegarde des données antérieures au mois de janvier 2020 et, spécialement du fichier clients dont la perte doit être valorisée à 30 % du montant du prix d'acquisition du fonds de commerce de 200.000 euros, soit la somme de 60.000 euros sollicitée à titre d'indemnisation.
Mais, d'une part, la question de l'éventuelle autorisation du mandant est sans objet ici, seule l'indemnisation de la perte du fichier clients étant sollicitée.
D'autre part, le gestionnaire ne saurait répondre des fautes des prestataires en charge du remplacement du matériel informatique et du changement de logiciel qui devaient veiller à prendre toutes les mesures nécessaires à la sauvegarde des données d'exploitation antérieures à janvier 2020, ce qui ressort de l'attestation versée aux débats par le fournisseur du matériel (pièce 29 appelante) qui confirme également que, à la date du 12 novembre 2020, l'ancien matériel restait dans ses locaux à la disposition de la société Solfige.
Par ailleurs, l'appelante ne démontre pas, alors même que l'ancien logiciel Opera était relié au service cloud auquel la société Solfige et le franchiseur Campanile avait accès, que les données antérieures à janvier sont effectivement perdues.
Enfin, l'appelante n'a produit aucun élément susceptible d'établir un lien de causalité entre l'éventuelle perte du fichier clients et le préjudice allégué, l'attestation de l'expert-comptable, purement péremptoire et dénuée de tout fondement comptable, étant inopérante, d'autant que les éléments incorporels ont été cédés au prix de 120.000 euros et qu'il n'est justifié ni d'une dépréciation de ceux-ci du fait de la perte alléguée du fichiers clients ni d'une baisse du chiffre d'affaires en lien avec ladite perte.
Ce chef de demande est donc infondé.
3 - sur l'acquisition du logiciel Fiducial et la perte de chiffre d'affaires
L'appelante reproche à la société Hotelio d'avoir procédé, sans son accord, au remplacement inutile du logiciel Opera du groupe prologiciel « Louvre Hôtel » au profit d'un logiciel Fiducial, sans interface avec les serveurs Campanile et dysfonctionnant, au prix injustifié de 13.997,52 euros, à l'origine d'une baisse de 5% du chiffres d'affaires, soit la somme de 23.159,37 euros TTC du fait de ne pas avoir pu bénéficier de la mise en avant de l'hôtel via la plateforme Campanile à cause de la spécificité du paramétrage du nouveau logiciel Fiducila.
L'appelante sollicite l'indemnisation du prix d'acquisition du logiciel et de la perte de chiffres d'affaires.
Mais, dès lors que le mandant avait initié une politique de changement d'enseigne conduisant à la cessation de la franchise Campanile, la société Hotelio a pu, sans faute de sa part, tirer toutes les conséquences opérationnelles du choix du mandant en abandonnant le logiciel Opera, d'autant que ce serveur intégré offrait au franchiseur un accès direct aux propres données d'exploitation de la société Solfige.
En outre, le groupe « Louvre Hôtel » n'imposait pas, comme condition de la franchise Campanile, l'adoption par le franchisé du logiciel Opera.
Au demeurant, dès le mois de décembre 2019, le responsable d'exploitation de l'hôtel a pris attache avec le franchiseur pour envisager conjointement les modalités de migration vers un autre logiciel, sans que cela suscite de difficultés.
Et, dans sa note de visite du 28 août 2020, soit postérieurement à la cessation du mandat de gestion, loin de confirmer une violation du cahier des charges, le représentant du franchiseur Campanile a simplement relevé les risques de complication de la fluidité de la relation commerciale du fait de l'absence d'interface existante entre les serveurs Campanile et nouveau logiciel choisi par le gestionnaire.
Cependant, il n'est justifié d'aucune réalisation des risques annoncés alors que l'établissement pouvait recevoir des réservations via les autres outils mis en place par le franchiseur et avait accès à l'ensemble des informations tarifaires et promotionnelles du groupe.
Par ailleurs, non seulement la baisse alléguée du chiffre d'affaires de 5 %, au cours du premier semestre 2020, n'est pas établie mais elle ne peut être décorrelée des mesures de confinement sanitaire prises au cours de cette période dans le cadre de la lutte contre la propagation de la Covid-19.
Il suit de ce qui précède que la société Hotelio n'a pas commis de faute de gestion en procédant à l'acquisition d'un nouveau logiciel qui n'était pas exclusif de la poursuite normale de l'exploitation sous l'enseigne Campanile jusqu'au terme du contrat de franchise.
Ces deux chefs de demande d'indemnisation sont donc infondés.
4 - sur le coût de la maintenance du logiciel Opera
L'appelante sollicite le remboursement du coût de la maintenance de l'ancien logiciel Opera, soit la somme de 2.736 euros TTC, sur toute l'année 2020 alors que les anciens ordinateurs avaient été récupérés par le fournisseur du nouveau matériel.
Mais, l'appelante ne démontre pas avoir réglé cette somme, ce qui ne résulte pas de la seule production de la pièce 27 relative à l'estimation du coût respectif du logiciel Oracle et Opera.
Ce chef de demande est infondé.
5 - sur les frais de gestion dus à certains prestataires
L'appelante sollicite le paiement des frais de gestion de l'hôtel dus à certains prestataires :
- My hotel reputation : 1.093,80 euros TTC
- Hotels actions : 3.456,00 euros TTC
- Solocal : 3.112,80 euros
- AJ conseil : 6.600,00 euros
soit un montant total de 14.262,60 euros
Mais, l'appelante ne caractérise aucune faute de gestion en lien avec ces frais de gestion engagés dans l'intérêt de la société Solfige et qui ont fait l'objet d'une note récapitulative adressée au mandant dans le cadre de la résiliation amiable du mandat de gestion (pièce 63 intimée), tandis que la circonstance seule que le mandataire n'ait pas réglé ces factures, au-delà des difficultés de trésorerie ayant conduit la société Solfige à souscrire un prêt de 100.000 euros, n'étant pas une source de dommage.
Ce chef de demande est infondé.
6 - sur l'embauche d'une cuisinière
L'appelante reproche à son gestionnaire d'avoir, sans autorisation ni utilité pour l'établissement, embauché une cuisinière, de décembre 2019 à juillet 2020, soit une charge sociale de 9.942,38 euros, outre le coût des services d'un conseiller culinaire parisien pour un montant de 3.600 euros.
Mais, la cuisinière faisait partie des effectifs de l'établissement à la date de son acquisition par la société Solfige et il ne peut être fait grief au gestionnaire de ne pas l'avoir licenciée pendant le confinement sanitaire, d'autant que le mécanisme de chômage partiel a limité le coût de ce poste.
Ce premier grief manque en fait.
S'agissant du second grief, la commande de la prestation d'un conseiller culinaire, en lien avec la gestion courante de l'hôtel, est antérieure à l'état d'urgence sanitaire, et cohérente avec la reprise de l'exploitation de l'établissement pourvu d'un restaurant.
Le second grief est infondé.
La demande d'indemnisation est donc infondée.
7 - sur les dépenses de travaux de peinture
L'appelante fait grief à la société Hotelio d'avoir fait procéder à des travaux de peinture, confiés au père de l'ancienne directrice de l'hôtel, pour un montant de 2.200 euros.
Mais, il ressort de la facture détaillée du 29 février 2020, que l'artisan mandaté, peu important son lien de parenté avec la directrice, a réalisé des travaux de peinture et de menues réparations, nécessaires et utiles, relevant de l'entretien courant de l'établissement que pouvait engager le gestionnaire, de sorte qu'aucune faute ne peut être reprochée à ce dernier, ni aucun préjudice ne pouvant être caractérisé.
Cet chef de demande est infondé.
8 - sur l'embauche d'une assistante de réception
L'appelante fait grief au gestionnaire d'avoir embauché une assistante de réception dès le premier jour de l'exploitation de l'établissement pour pallier sa propre carence en amont de l'acquisition en vue de permettre son fonctionnement immédiat et sa rentabilité effective, lui occasionnant un préjudice de 11.056,57 euros au titre de la charge sociale de cette embauche.
Mais, le grief est infondé dès lors que l'établissement, fonctionnant 7/7 de 6 à 23 heures, était pourvu d'une seule réceptionniste en place lors de son acquisition, de sorte qu'il était indispensable d'embaucher une réceptionniste assurant les rotations sur le poste compte tenu des congés et repos dus aux salariés et alors qu'il n'est pas démontré qu'il existait une solution alternative moins onéreuse soit par une réaffectation des ressources internes soit par un autre mode de recrutement.
En outre, postérieurement à la cessation du mandat de gestion, la société Solfige a conservé la réceptionniste embauchée.
Par conséquent, aurait-elle pris seule l'initiative de l'embauche, sans aviser le mandant, ce manquement n'a aucune incidence sur la nécessité de la mesure prise par le gestionnaire, découlant de l'organisation de l'hôtel à la date de son acquisition nécessairement connue de la société Solfige.
Ce chef de demande d'indemnisation est infondé.
9 - sur le surcoût de l'opérateur téléphonique
Ce chef d'indemnisation d'un montant de 559,15 euros doit être rejeté dès lors que la production des factures de l'opérateur ne permet d'établir ni la faute du gestionnaire ni la réalité du préjudice allégué.
10 - sur le montant des offerts
L'appelante reproche au gestionnaire le montant exorbitant des offerts relatifs au mois de février 2020 portant sur la somme de 1.229,05 euros.
Mais, relevant de la gestion courante de l'établissement ne nécessitant pas un accord spécial préalable du mandant, la société Hotelio a pu, sans faute, consentir des remises pour l'hébergement des salariés de l'entreprise de peinture durant la période des travaux de rénovation réalisés en février 2020.
Ce chef de demande d'indemnisation est infondé.
11 - sur les frais de silhouettage de l'hôtel
L'appelante fait grief au gestionnaire d'avoir engagé des dépenses inutiles de silhouettage de l'hôtel, au surplus non conformes aux standards de l'enseigne Campanile, pour un montant de 10.732,32 euros.
Mais, il ressort notamment du mail du 27 novembre 2019, que M. [Y] avait envisagé le silhouettage de l'hôtel et une réfection de la signalétique.
Et, s'il est exact que l'enseigne lumineuse Campanile avait un fond blanc non conforme aux standards de la franchise, il reste que ce fait n'est à l'origine d'aucun préjudice démontré.
Ce chef de demande d'indemnisation est infondé.
12 - sur la perte des arrhes
Il convient de rejeter ce chef de demande d'indemnisation d'un montant de 8.971,63 euros qui n'est pas imputable au gestionnaire mais à l'inexécution par le précédent exploitant de son engagement pris envers M. [Y] de restituer les paiements réalisés par les clients du cessionnaire sur son terminal de paiement dans l'attente de l'installation du nouveau terminal.
Ce chef de demande d'indemnisation n'est pas fondée.
13 - sur la borne automatique de paiement
L'appelante fait grief au gestionnaire d'avoir tardé à mettre en place la borne automatique de paiement prévue seulement à la fin du mois de mai 2020 et opérationnelle en septembre 2020 alors que l'exploitation de l'hôtel a commencé en décembre 2019. L'appelante évalue son préjudice à une moyenne de cinq chambres par jour, soit la somme de 47.000 euros.
Mais, d'une part, la société Hotelio justifie avoir agi avec diligence en sollicitant plusieurs demandes de devis à la société Ariane en décembre 2019, lesquels sont parvenus par mail du 19 décembre 2019 et ont donné lieu à une commande en date du 7 janvier 2020, traitée tardivement par le prestataire qui, dans le contexte de la crise sanitaire, n'a pu installer la borne qu'en mai 2020, ce dont le mandant a été informé (pièce 54 intimée).
Il n'est pas démontré par l'appelante que la borne de paiement était défectueuse, ce dont ne répond pas le gestionnaire tenu d'une obligation de moyens.
Et, en tout état de cause, la société Solfige ne rapporte pas la preuve de l'existence même d'un quelconque préjudice en lien avec les éventuels retards et dysfonctionnements de la borne de paiement automatique.
Ce chef d'indemnisation n'est pas fondé.
14 - sur l'écart de caisse
L'appelante fait grief au gestionnaire de lui avoir remis des comptes faisant apparaître un écart de caisse injustifié de 5.442,78 euros pour le premier trimestre 2020.
L'intimé objecte que ces liquidités ont servi à régler les dépenses courantes d'exploitation de l'établissement dont les justificatifs ont été communiqués au comptable de Solfige.
Mais, force est de constater que la société Hotelio ne rapporte pas la preuve de ses allégations alors que l'injection de liquidités dans la trésorerie courante aurait dû être tracée dans la comptabilité.
Par conséquent, infirmant le jugement de ce chef, la société Hotelio sera condamnée à payer la somme de 5.442,78 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, avec capitalisation des intérêts échus pour une année entière.
Le jugement sera confirmé pour le surplus de ses dispositions.
Sur les autres demandes indemnitaires
Les manquements allégués du mandataire à son obligation de conseil, d'information et de loyauté n'étant pas caractérisés ni en lien avec les préjudices invoqués, la société Solfige doit être déboutée de ses demandes indemnitaires formées à titre subsidiaire, comme l'a retenu le jugement.
Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté la société Solfige de sa demande d'indemnisation d'un préjudice moral non caractérisé.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Hotelio de sa demande d'indemnisation pour procédure abusive, l'abus dans l'exercice du droit d'agir en justice n'étant pas établi en l'espèce.
Le jugement sera confirmé sur les dépens et les frais irrépétibles.
Chaque partie conservera ses dépens et frais irrépétibles d'appel.
PAR CES MOTIFS
la cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté la société Solfige de sa demande d'indemnisation au titre de l'écart de caisse,
et statuant à nouveau de ce seul chef,
CONDAMNE la société Hotelio à payer à la société Solfige la somme de 5.442,78 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, avec capitalisation des intérêts échus pour une année entière,
DIT que chaque partie conservera à sa charge ses dépens d'appel,
DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe DARRACQ, conseiller faisant fonction de Président et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.
La Greffière, Le Président,