Livv
Décisions

CA Bourges, 1re ch., 4 juillet 2024, n° 23/00817

BOURGES

Arrêt

Autre

CA Bourges n° 23/00817

4 juillet 2024

VS/RP

COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :

- SCP AVOCATS CENTRE

Expédition TJ

LE : 04 JUILLET 2024

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 04 JUILLET 2024

N° - Pages

N° RG 23/00817 - N° Portalis DBVD-V-B7H-DSPR

Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal judiciaire de CHATEAUROUX en date du 25 Juillet 2023

PARTIES EN CAUSE :

I - M. [D] [O]

né le 02 Mars 1959 à

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté et plaidant par la SCP AVOCATS CENTRE, avocat au barreau de CHATEAUROUX

timbre fiscal acquitté

APPELANT suivant déclaration du 09/08/2023

II - M. [K] [V], entrepreneur individuel exerçant sous le nom commercial 'Le Petit Garage'

[Adresse 1]

[Localité 4]

N° SIRET : 900 781 816

Non représenté

Suivants déclaration d'appel et conclusions signifiées par voie d'huissiers les 26 septembre 2023 et 15 novembre 2023 à étude

INTIMÉ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Mai 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme CLEMENT,Présidente chargée du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme CLEMENT Présidente de Chambre

M. PERINETTI Conseiller

Mme CIABRINI Conseillère

***************

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme SERGEANT

***************

ARRÊT : RENDU PAR DEFAUT

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

**************

EXPOSÉ

[D] [O] a fait l'acquisition le 30 novembre 2021 auprès de [K] [V], entrepreneur individuel exerçant sous le nom commercial « Le Petit Garage », d'un véhicule Audi Quattro A5 cabriolet, immatriculé sous le numéro [Immatriculation 5], pour la somme de 12.450 €.

Indiquant avoir constaté, quelques jours seulement après la vente, que le véhicule présentait un grand nombre de dysfonctionnements le rendant impropre à son utilisation, Monsieur [O] a fait procéder à une expertise amiable du véhicule par son assureur COVEA Protection juridique, puis a assigné [K] [V] le 6 avril 2023 devant le tribunal judiciaire de Châteauroux en paiement de la somme de 6225 € en restitution de la moitié du prix de vente, 27'486,94 € à titre de dommages-intérêts, outre une indemnité de 5000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

[K] [V] n'a pas constitué avocat devant le tribunal et, par jugement réputé contradictoire rendu le 25 juillet 2023, le tribunal judiciaire de Châteauroux a débouté Monsieur [O] de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné aux dépens, après avoir estimé qu'il ne résultait pas des pièces produites la preuve de l'antériorité à la vente des vices du véhicule allégués.

[D] [O] a interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée le 9 août 2023 et demande à la cour, dans ses dernières écritures en date du 30 octobre 2023, à la lecture desquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, de :

Vu les articles 1641 et suivants du Code Civil,

Vu l'article 700 du Code de procédure civile,

- Déclarer Monsieur [D] [O] recevable et bien-fondé en ses demandes de garantie en vice cachés à l'encontre de [K] [V] ;

- Condamner [K] [V] au paiement de la somme de 6.225 euros au titre de la restitution de la moitié du prix de vente ;

- Condamner [K] [V] au paiement de la somme de 20.026, 68 euros au titre de préjudice matériel futur résultant des frais nécessaires pour la réparation du véhicule;

- Ordonner le remboursement des frais engendrés pour la réparation du véhicule d'un montant de 4.960, 26 euros ;

- Condamner [K] [V] au paiement de la somme de 2.500 euros au titre du préjudice moral subi ;

- Condamner [K] [V] au paiement de la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens comprenant ceux de première instance et d'appel.

Pas plus que devant le premier juge, [K] [V] n'a constitué avocat devant la cour.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 avril 2024.

SUR QUOI

Il résulte des articles 9 et 472 du code de procédure civile qu'« il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention » et que « si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée. »

En application de l'article 1641 du code civil, « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. »

Selon les articles 1644 et 1645 du même code, « dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix » et « si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur ».

L'article 1648 alinéa premier du même code prévoit par ailleurs que l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice.

Il est constant, en l'espèce, que selon certificat de cession établi le 27 novembre 2021, [D] [O] a fait l'acquisition auprès de [K] [V], entrepreneur individuel exerçant sous le nom commercial « le Petit Garage », d'un véhicule automobile de marque Audi A5 cabriolet immatriculé [Immatriculation 5] (pièce numéro 2 de son dossier) pour un prix de 12'450 €.

Pour se prévaloir des dispositions précitées, [D] [O] indique dans ses écritures que « quelques jours seulement après son acquisition, le véhicule a présenté lors de son utilisation un grand nombre de dysfonctionnements qui l'ont rendu impropre à toute utilisation ».

Il précise qu'après avoir fait procéder au remplacement des garnitures de freins arrière et des pneumatiques ' dont la nécessité résultait d'un contrôle technique réalisé antérieurement à la cession ', il « pensait pouvoir enfin circuler avec sa voiture quand il s'est avéré qu'il était impossible de la faire rouler, la boîte de vitesses étant défectueuse » et, « le véhicule étant totalement immobilisé depuis le début décembre 2021 » ajoute avoir été contraint « d'en utiliser un autre pour le remplacer afin d'effectuer ses trajets professionnels ».

L'appelant ajoute qu'en raison de l'absence de toute réponse à ses courriers par [K] [V], vendeur du véhicule, il a fait procéder à une expertise amiable par le biais de son assureur COVEA Protection Juridique, dont il indique qu'elle a permis de constater « les graves anomalies existant lors de l'achat et non apparentes », en l'espèce :

' « le dysfonctionnement de la boîte de vitesses, lequel est dû à des défauts calculateurs. Il résulte de ces défauts constatés l'impossibilité de monter au rapport supérieur en accélération, ce qui nécessite un arrêt total du moteur pour une reprise du fonctionnement normal, et une boîte séquentielle inutilisable en cas de changement de vitesse (') », l'appelant estimant, à cet égard, que « dans ces conditions, le véhicule est radicalement inutilisable »

' « l'incompatibilité du bras du balai d'essuie-glace sur le verre du pare-brise (détérioration progressive en arc de cercle du verre à hauteur des yeux du conducteur) »

' « le caractère défectueux du système de sécurité de la voiture traduit par l'absence de témoin sonore lors du recul du véhicule à l'approche d'un obstacle » (page numéro 3 des conclusions).

L'appelant indique qu'« à la suite de la découverte de ces vices, l'expert a supposé que l'ensemble des réparations nécessairement à effectuer afin de pouvoir faire cesser l'immobilisation totale du véhicule pourrait atteindre un montant approximatif de 10'950€ hors-taxes : changement de la boîte de vitesses : 7800 €, changement du bras d'essuie-glace : 250 €, changement du pare-brise : 2500 €, réparation du système de sécurité de la voiture : 400 € ».

Au soutien de sa demande en garantie des vices cachés, [D] [O] produit en premier lieu les courriers qu'il a adressés à [K] [V] ' sans réponse de ce dernier ' pour se plaindre des dysfonctionnements allégués du véhicule (pièces numéros 5, 7 et 12), ainsi qu'un devis en vue de la réparation du moteur d'un véhicule Renault ' ayant été utilisé en remplacement du véhicule dont il a fait l'acquisition ' dont il réclame le remboursement par [K] [V] mais qui n'est pas établi à son nom et qui comporte, en outre, une adresse à [Localité 3] différente de celle figurant dans les courriers précités et dans ses écritures judiciaires (pièce numéro 10).

L'existence d'un vice caché affectant le véhicule antérieurement à son acquisition ne saurait résulter des factures établies par le garage Alpha Passion Service les 6 et 23 décembre 2021 relatives au remplacement des garnitures de freins arrière, des pneumatiques avec contrôle de géométrie des roues et des essuie-glaces, dès lors que l'usure importante des plaquettes de frein et l'existence d'un ripage excessif avaient été mises en évidence par le procès-verbal de contrôle technique établi le 24 novembre 2021, soit antérieurement à la vente, dont [D] [O] ne soutient pas qu'il ne lui aurait pas été communiqué avant l'achat (pièce numéro 16).

Les devis réalisés par la société Auto Rétro Prestige les 27 février et 9 mars 2023 permettent seulement d'appréhender le coût prévisible du changement de la boîte de vitesses et du pare-brise, sans toutefois établir la nécessité de procéder à de telles interventions (pièces numéros 13 et 14).

Au final, la seule pièce produite par [D] [O] et permettant utilement d'apprécier la réalité de l'existence du vice caché réside dans le rapport d'expertise amiable du cabinet d'expertise automobile Groupe Lang & Associés, figurant en pièce numéro 17 du dossier, et dont le premier juge avait rappelé qu'il n'avait pas été soumis à son appréciation.

Force est de constater que dans ce document, extrêmement succinct, l'expert amiable indique avoir procédé aux constatations suivantes : « désordre carrosserie et traces de réparations antérieures sur le pare-choc avant, voyant "capote non verrouillée" reste allumé au tableau de bord, aide au parking arrière ne fonctionne pas, nous procédons à un essai routier, pas d'anomalie relevée lors de cet essai, défaut mémorisé dans le calculateur concernant la boîte à vitesse [sic] P17E100 et P17D400 ».

Dans le paragraphe intitulé « analyses techniques », le rédacteur de ce rapport indique, au sujet de la boîte de vitesses : « malgré l'essai réalisé, nous ne constaterons pas de désordre sur un court essai ».

Il ajoute : « toutefois, au regard des défauts calculateurs enregistrés, il est fort probable que lors de sa montée en température les dysfonctionnements doivent apparaître ».

Force est ainsi de constater que ledit rapport d'expertise amiable ne mentionne aucunement le vice allégué par [D] [O] résultant de l'incompatibilité du bras du balai d'essuie-glace sur le verre du pare-brise qui aurait occasionné une détérioration progressive en arc de cercle de celui-ci ce qui « ne permettait plus une conduite en toute sécurité » (page numéro 6 des conclusions).

D'autre part, et surtout, il résulte de ce rapport qu'aucun dysfonctionnement du moteur n'a été constaté lors de l'essai routier pratiqué dans le cadre de l'expertise amiable le 15 juillet 2022, ce qui contredit les allégations de l'appelant selon lesquelles le véhicule serait totalement immobilisé « depuis le début décembre 2021 », circonstance qui aurait nécessité l'utilisation d'un second véhicule, lui-même également tombé en panne au mois de février 2022 (page numéro 3 des conclusions).

La seule allégation laconique de l'expert selon laquelle la survenue d'un dysfonctionnement de la boîte de vitesses serait « fort probable » lors de la montée en température du moteur, et alors même qu'il lui était loisible d'attendre une telle montée en température pour poursuivre ses constatations, ne saurait suffire à établir la réalité du vice caché allégué du véhicule.

En tout état de cause, ce document s'avère particulièrement imprécis s'agissant du défaut mémorisé dans le calculateur relativement à la boîte de vitesses, un tel défaut ' sans précision sur sa nature, son incidence sur le bon fonctionnement du véhicule, et sa date de survenue ' étant tout d'abord mentionné au singulier dans la rubrique « constatations » avec une photographie d'un écran informatique totalement illisible, puis au pluriel dans la rubrique « analyses techniques ».

Enfin, et contrairement aux allégations de l'appelant selon lesquelles « l'expert a supposé que l'ensemble des réparations nécessairement à effectuer afin de pouvoir faire cesser l'immobilisation totale du véhicule pourrait atteindre un montant approximatif de 10'950 € hors-taxes », la cour constate que l'expert amiable a indiqué, dans le chapitre intitulé « évaluation des dommages » de son rapport qu'« aucun chiffrage de dommages ne peut être établi en l'état ».

Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que [D] [O] ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe en application des articles 1641 et suivants du code civil, de l'existence d'un vice caché, antérieur à la vente du véhicule, rendant celui-ci impropre à l'usage auquel il était destiné ou qui diminue tellement cet usage qu'il ne l'aurait pas acquis ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il l'avait connu.

La décision du premier juge, l'ayant débouté de ses demandes sur le fondement de ces textes, devra, dans ces conditions, être confirmée par substitution de motifs.

PAR CES MOTIFS

La cour,

' Confirme le jugement entrepris

Y ajoutant,

' Dit que les entiers dépens d'appel seront à la charge de [D] [O].

L'arrêt a été signé par O. CLEMENT, Président, et par V.SERGEANT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

V.SERGEANT O. CLEMENT