Livv
Décisions

CA Toulouse, 3e ch., 28 juin 2024, n° 22/03161

TOULOUSE

Arrêt

Autre

CA Toulouse n° 22/03161

28 juin 2024

28/06/2024

ARRÊT N°322/2024

N° RG 22/03161 - N° Portalis DBVI-V-B7G-O64W

CB/IA

Décision déférée du 21 Juillet 2022 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULOUSE - 20/01946

M.GUICHARD

[C] [S]

C/

[R] [D]

S.A.S.U. FBA

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

3ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT HUIT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANT

Monsieur [C] [S]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Jérôme CHAUBET, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉS

Monsieur [R] [D]

lieu dit [Adresse 4]

[Adresse 4]

Représenté par Me Emmanuelle CASELLAS, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A.S.U. FBA Prise en la peronne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Viviane VIDALIE, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Matthieu LACHAISE de la SELARL LH AVOCATS, avocat plaidant au barreau de BRIVE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 27 Mars 2024 en audience publique, devant la Cour composée de :

C. BRISSET, président, déléguée par ordonnance modificative du 15 avril 2024

E.VET, conseiller

P. BALISTA, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : M. BUTEL

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par C. BRISSET, président, et par K.MOKHTARI, greffier de chambre.

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 02 avril 2015, M. [C] [S] a acquis un véhicule de marque Volkwagen, type Sirocco, immatriculé [Immatriculation 3] moyennant paiement d'un prix de 17 490 euros, suite à une annonce émise par la SASU Fba faisant état d'un dépôt vente.

Le 10 septembre 2016, le véhicule de M. [C] [S] a été accidenté, ce qui a donné lieu à une expertise d'assurance qui a mentionné des modifications du train roulant et de la puissance du moteur du véhicule, entraînant sa non-conformité.

L'assureur du véhicule de M. [S] a, en conséquence, refusé de l'indemniser conséquences du sinistre.

Par acte du 18 juin 2020, M. [C] [S] a fait assigner la société Fba devant le tribunal judiciaire de Toulouse, sur le fondement de la garantie des vices cachés et subsidiairement du dol, en résolution de la vente du véhicule automobile conclue le 2 avril 2015.

M. [R] [D], propriétaire antérieur du véhicule, a été appelé en cause.

Par ordonnance du 10 mars 2022, le juge de la mise en état, saisi de fins de non-recevoir, a déclaré irrecevable comme prescrite l'action fondée sur la garantie des vices cachés recevable celle fondée sur le dol.

Par jugement contradictoire du 21 juillet 2022, le juge a :

- débouté M. [C] [S] de ses demandes,

- condamné M. [C] [S] aux dépens et à payer la somme de 1 500 euros chacun à la SASU Fba et à M. [R] [D].

Par déclaration en date du 22 août 2022, M. [C] [S] a relevé appel de la décision en critiquant l'ensemble de ses dispositions.

M. [C] [S] dans ses dernières écritures du 20 octobre 2022, auxquelles il est fait expressément référence, demande à la cour, au visa de l'article 2240 du Code civil, des dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil, de l'article 1116 du Code civil, de l'article 901 du Code de procédure civile, des articles 908 et suivant du Code de procédure civile, de :

Réformer le jugement rendu le 21 juillet 2022 en ce qu'il :

- Déboute M. [C] [S] de l'ensemble de ses demandes (de voir constater que

M. [R] [D] et la société Fba se sont livrés à des man'uvres dolosives lors de la vente du véhicule Volkswagen scirocco immatriculé [Immatriculation 3] à M. [C] [S] ; juger que le consentement de M. [C] [S] à la vente du véhicule Volkswagen Scirocco immatriculé [Immatriculation 3] était vicié ; ordonner la résolution du contrat de vente du 02 avril 2015 et la restitution du prix d'acquisition, soit une somme de 17 490 euros, par M. [R] [D] et la société Fba à M. [C] [S] ; juger que la responsabilité contractuelle M. [R] [D] et de la société Fba doit être engagée, en leurs qualités de vendeur et de mandataire professionnel du véhicule Volkswagen scirocco immatriculé [Immatriculation 3] ; condamner solidairement M. [R] [D] et la société Fba au paiement de la somme de 17 490 euros à M. [C] [S] au titre de la vente litigieuse du véhicule. ; condamner solidairement M. [R] [D] et la société Fba au paiement M. [C] [S] des frais de certificat d'immatriculation, des frais d'assurance et des frais de gardiennage pour 10 884 euros (outre 352 euros pour les frais de carte grise) ; condamner solidairement M. [R] [D] et la société Fba au paiement de la somme totale de 2 500,00 euros au titre des préjudices de jouissance subis par M. [C] [S] ; condamner solidairement M. [R] [D] et la société Fba au paiement de la somme de 2 000 euros à M. [C] [S], en application de l'article 37 de la loi de 91, avec distraction au profit de Me Jérôme Chaubet sur son affirmation de droit, ainsi qu'aux entiers dépens),

- Condamne M. [C] [S] aux dépens et à la somme de 1 500 euros à M. [R][D] et la société Fba,

Et statuant à nouveau,

Juger que M. [R] [D] et la société Fba se sont livrés à des man'uvres dolosives lors de la vente du véhicule Volkswagen scirocco immatriculé [Immatriculation 3] à M. [C]

[S],

Juger que le consentement de M. [C] [S] à la vente du véhicule Volkswagen

Scirocco immatriculé [Immatriculation 3] était vicié,

Ordonner la résolution du contrat de vente du 02 avril 2015 et la restitution du prix d'acquisition, soit une somme de 17 490 euros, par M. [R] [D] et la société Fba à M. [C] [S],

En conséquence,

Juger que la responsabilité contractuelle M. [R] [D] et de la société Fba doit être engagée, en leurs qualités de vendeur et de mandataire professionnel du véhicule Volkswagen Scirocco immatriculé [Immatriculation 3],

Condamner solidairement M. [R] [D] et la société Fba au paiement de la somme de 17 490 euros à M. [C] [S] au titre de la vente litigieuse du véhicule,

Condamner solidairement M. [R] [D] et la société Fba au paiement à M. [C]

[S] des frais de certificat d'immatriculation, des frais d'assurance et des frais de gardiennage pour 10 884 euros (outre 352 euros pour les frais de carte grise),

Condamner solidairement M. [R] [D] et la société Fba au paiement de la somme totale de 2 500 euros au titre des préjudices de jouissance subis par M. [C] [S],

Condamner solidairement M. [R] [D] et la société Fba au paiement de la somme de 2 000 euros à M. [C] [S], en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Il soutient que les conditions du dol sont réunies dès lors qu'il n'a pas été informé des modifications importantes du véhicule et qu'averti de ce qu'il n'avait pas la possibilité de circuler sur la voie publique, il n'aurait pas contracté.

M. [R] [D] dans ses dernières écritures du 14 novembre 2022, auxquelles il est fait expressément référence, demande à la cour, au visa de l'article 1103 du Code civil, des articles 1641 et suivants du Code civil, des articles 1116 du Code civil, de :

Confirmer le jugement dont appel,

Condamner tous succombant au paiement d'une somme de 23 000 euros [3 000 dans les motifs] sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Il précise que la déclaration de dangerosité du véhicule est la conséquence du choc et non de ses modifications. Il conteste tout dol alors que les spécificités du véhicule étaient précisées dans les annonces aux fins de vente, cession confiée à un mandataire professionnel.

La société Fba dans ses dernières écritures du 10 janvier 2023, auxquelles il est fait expressément référence, demande à la cour, au visa de l'article 1116 du Code civil, de :

À titre principal,

Confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 juillet 2022 par le tribunal judiciaire de Toulouse,

Débouter M. [C] [S] de ses demandes,

À titre infiniment subsidiaire,

Condamner M. [R] [D] à relever indemne la société Fba de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre,

En tout état de cause,

Condamner tout succombant à payer à la société Fba la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

Le condamner aux entiers dépens.

Elle fait valoir qu'elle est intervenue en qualité de dépositaire et ne peut être tenue au remboursement d'un prix qu'elle n'a pas perçu. Elle conteste tout dol.

La clôture de la procédure a été prononcée selon ordonnance du 20 novembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Si dans ses écritures M. [S] vise encore les dispositions des articles 1641 et suivants du code civil, il n'en demeure pas moins que la cour est saisie uniquement de l'appel du jugement sur le fond prononcé par le tribunal judiciaire de Toulouse.

La prescription de l'action sur le fondement de la garantie des vices cachés telle que constatée par l'ordonnance de mise en état du 10 mars 2022 est donc acquise et les seuls moyens développés par l'appelant dans ses écritures portent sur le dol qu'il invoque.

Il résulte des dispositions de l'article 1116 du code civil, tel qu'applicable au jour de la vente, que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident, que sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.

Il apparaît tout d'abord que dans le dispositif de ses écritures M. [S] conclut toujours à une résolution de la vente et non à sa nullité, sur laquelle il s'explique toutefois dans les motifs.

Au-delà de cette difficulté, M. [S] fait valoir que la carte grise mentionnait toujours 200 chevaux pour le véhicule vendu alors qu'il avait été modifié, sa puissance étant portée à 310 chevaux et qu'il appartenait au vendeur professionnel de s'assurer de la conformité du véhicule.

Il est exact que le certificat de cession du véhicule, mentionnait qu'il n'avait pas subi de transformation notable susceptible de modifier les indications du certificat de conformité ou de l'actuel certificat d'immatriculation. Une telle indication était très manifestement erronée alors que le moteur du véhicule était passé de 200 (données constructeur) à 310 chevaux et qu'une telle modification suppose un passage aux mines.

Toutefois, la cour n'est pas saisie sur le terrain d'un défaut de conformité mais sur celui du dol. Or, sur ce fondement, il apparaît que ce seul document est insuffisant pour justifier d'un vice du consentement de l'acquéreur au regard des autres éléments produits.

La vente a en effet été réalisée suite à des annonces publiées sur les réseaux sociaux et sur le site Le bon coin. Les termes étaient légèrement différents dans chacune des annonces. Mais les deux faisaient expressément mention d'un véhicule ayant subi une préparation complète par MTM (société allemande qui a pour objet la modification des véhicules), d'un moteur de 310 cv, de gros freins et de performances époustouflantes.

Au vu d'une telle annonce, il était manifeste, même pour un acquéreur profane, que le véhicule avait été modifié et que la puissance de son moteur avait été augmentée, ainsi que le freinage manifestement dans un lien de corrélation. La mention de performances époustouflantes ne pouvait que renvoyer à cette modification. Une telle annonce ne pouvait se rapporter à un véhicule d'occasion n'ayant pas subi de modifications et dont seul l'état par rapport à un état neuf mais conforme aux données du constructeur aurait pu être valorisé.

Dans de telles conditions, la seule remise du certificat de cession comprenant une donnée erronée n'était pas de nature à provoquer chez l'acquéreur une erreur déterminante de son consentement et ne caractérisait pas la man'uvre du dol. En effet, seule une personne intéressée par un véhicule modifié pouvait souhaiter contracter sur la base de l'annonce telle que présentée par le mandataire du vendeur puisqu'il s'agissait en réalité de l'objet même de la vente.

La conclusion de l'expert d'assurance sur la dangerosité du véhicule ne peut ici être pertinente puisque c'est uniquement sa dangerosité après l'accident qui a été envisagée. Les déformations importantes mentionnées dans le rapport (pièce 6 de M. [S]) ont certes été considérées comme sans lien avec les circonstances déclarées du sinistre (pièce 8 de M. [D]) mais ne sont pas susceptibles d'établir l'état du véhicule au jour de la vente.

Le seul élément tangible est donc le certificat de cession lequel, rapporté à l'annonce très explicite à partir de laquelle la vente a pu se réaliser, ne peut établir des man'uvres du vendeur, ou de son mandataire, ayant causé une erreur de l'acquéreur sur les qualités substantielles qui étaient celles du véhicule.

Dans de telles conditions, M. [S] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe d'un dol vice du consentement de sorte que son action, qu'elle porte sur la nullité de la vente ou sur l'octroi de dommages et intérêts ne pouvait prospérer.

Le jugement qui a débouté M. [S] de toutes ses prétentions sera ainsi confirmé en toutes ses dispositions comprenant le sort des frais et dépens de première instance.

L'appel étant mal fondé, M. [S] sera condamné à payer à chacun des intimés la somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 21 juillet 2022 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [S] à payer à la SASU Fba et à M. [D] la somme de 1 500 euros chacun par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [S] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

K. MOKHTARI C. BRISSET