CA Aix-en-Provence, ch. 1-2, 4 juillet 2024, n° 23/13307
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Office Notarial (SAS)
Défendeur :
Époux, Wretman Estate et Consulting (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Pacaud
Conseillers :
Mme Leydier, Mme Neto
Avocats :
Me Degrado, Me Pellegrin, Me Guedj, Me Joly, Me Forno, Me Sabatie
EXPOSÉ DU LITIGE
Par ordonnance contradictoire en date du 13 septembre 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Draguignan, a :
- débouté Mme [J] [R] et M. [B] [X] de leur demande d'extension de mission ;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
- condamné Mme [J] [R] et M. [B] [X] aux dépens du référé.
Selon déclaration reçue au greffe le 26 octobre 2023, Mme [J] [R] et M. [B] [X] ont interjeté appel de cette décision, l'appel portant sur toutes ses dispositions dûment reprises.
Par ordonnance, en date du 2 novembre 2023, l'affaire a été fixée à l'audience du 10 septembre 2024, l'instruction devant être déclarée close le 25 juin précédent.
L'avis de fixation a été envoyé le jour même au conseil des appelants.
Par conclusions d'incident, transmises le 13 décembre 2023, la SAS Wretman Estate et Consulting a demandé au président de la chambre 1-2 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence de :
- prononcer la caducité de la déclaration d'appel régularisée de M. [X] et Mme [R] ;
- condamner M. [X] et Mme [R] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Par avis du 5 février 2024, l'incident a été fixé sur l'audience du 4 mars suivant.
Par conclusions d'incident, transmises le 29 février 2024, la SAS Wretman Estate et Consulting a maintenu ses précédentes prétentions.
Par conclusions d'incident, transmises le 30 janvier 2024, la SAS Office Notarial [M] et Associés et Maître [Z] [M] ont demandé au président de chambre de :
- prononcer la caducité de la déclaration d'appel régularisée de M. [X] et Mme [R] ;
- condamner M. [X] et Mme [R] à leur payer la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Par conclusions d'incident, transmises le 30 janvier 2024, Mme [S] [V] a informé le président de chambre qu'elle s'en rapportait à justice quant à la demande de caducité de la déclaration d'appel soulevée par la SAS Wretman Estate et Consulting et sollicité la condamnation de tout succombant à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions d'incident transmises le 3 février 2024, M. [X] et Mme [R] ont sollicité du président de chambre :
- à titre principal, qu'il :
' rejette la demande des intimés tendant à voir prononcer la caducité de l'appel ;
' les relève de la caducité de la déclaration d'appel ;
' les juge recevables en leur appel ;
- à titre subsidiaire, qu'il :
' juge que la caducité de l'appel est limitée à la SAS Wreitman, la SAS [M] et maître [M] ;
' juge que la déclaration d'appel a été régulièrement notifiée à Mme [V] ;
' juge l'appel recevable et régulier à l'égard de Mme [V] ;
' déboute la SAS [M], Maître [M] et la SAS Wreitman de leurs demandes telles que formulées en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance contradictoire, en date du 28 mars 2024, la conseillère de la chambre 1-2 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, statuant sur délégation du premier président, a :
- débouté la SAS Wretman Estate et Consulting, la SAS Office Notarial [M] et Associés et Maître [Z] [M] de leur demande en caducité de la déclaration d'appel ;
- laissé à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles et dépens de l'incident.
Par requête aux fins de déféré, transmise au greffe le 8 avril 2024, la SAS Office Notarial [M] et Associés et Maître [Z] [M] demandent à la cour de réformer l'ordonnance précitée et de :
- prononcer la caducité de la déclaration d'appel régularisée aux intérêts de M. [B] [X] et Mme [J] [R] ;
- condamner in solidum [B] [X] et Mme [J] [R] à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Par avis du 10 avril 2024, les conseils des parties ont été informés que le déféré serait examiné à l'audience du 25 juin suivant.
Par conclusions transmises le 24 juin 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, M. [B] [X] et Mme [J] [R] épouse [X] sollicitent de la cour qu'elle :
- déboute la SAS Office Notarial [M] et Maître [M] de leur requête en déféré ;
- confirme l'ordonnance d'incident en date du 28 mars 2024 ;
- subsidiairement, juge l'appel recevable et régulier à l'égard de Madame [V] ;
- déboute la SAS Wretman Estate et Consulting, la SAS Office Notarial [M] et Maître [M] de leurs demandes en caducité de la déclaration d'appel.
Par conclusions transmises le 24 juin 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SAS Wretman Estate et Consulting sollicite de la cour qu'elle infirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :
- prononce la caducité de la déclaration d'appel régularisée dans les intérêts de M. [B] [X] et Mme [J] [R] ;
- à défaut, prononce la caducité de la déclaration d'appel régularisée dans les intérêts de M. [B] [X] et Mme [J] [R] à son égard ;
- en tout état de cause, condamne M. [B] [X] et Mme [J] [R] à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la caducité de la déclaration d'appel
Aux termes de l'article 905-1 alinéa 1 du code de procédure civile, lorsque l'affaire est fixée à bref délai par le président de chambre, l'appelant signifie la déclaration d'appel dans les dix jours de la réception de l'avis de fixation qui lui est adressé par le greffe à peine de caducité de la déclaration d'appel relevée d'office par le président de chambre ou le magistrat désigné par le premier président ; cependant, si, entre-temps, l'intimé a constitué avocat avant la signification de la déclaration d'appel, il est procédé par voie de notification à son avocat.
Lorsque la caducité de la déclaration d'appel est encourue sur le fondement du premier alinéa de l'article précité, du fait de l'absence de signification dans le délai imparti et non d'un vice de forme de ladite signification, la cour d'appel, le président de chambre ou le conseiller délégué, qui relève ou est saisi de cette irrégularité, n'a pas à rechercher si elle a causé un grief.
Aux termes d'une jurisprudence constante de la Cour de cassation, elle ne constitue pas une sanction disproportionnée au but poursuivi qui est d'assurer la célérité et l'efficacité de la procédure d'appel avec représentation obligatoire et n'est pas contraire à l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Il résulte d'une part des articles 900 et 901 du code de procédure civile que l'appel est formé par une déclaration d'appel unilatérale remise au greffe de la cour d'appel et, d'autre part, des articles 748-3 et 930-1du même code que, lorsqu'elle est accomplie par voie électronique, la remise de cette déclaration d'appel est attestée par un avis électronique de réception adressé au destinataire.
L'article 8 de l'arrêté du 20 mai 2020 dispose : Le message de données relatif à une déclaration d'appel provoque un avis de réception par les services du greffe, auquel est joint un fichier récapitulatif reprenant les données du message : ce récapitulatif accompagné, le cas échéant, de la pièce jointe établie sous forme de copie numérique annexée à ce message et qui fait corps avec lui, tient lieu de déclaration d'appel, de même que leur édition par l'avocat tient lieu d'exemplaire de cette déclaration lorsqu'elle doit être produite sous un format papier.
Selon une jurisprudence constante de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (Civ 2, 22 octobre 2020, n° 19-21.978), c'est ce récapitulatif, confirmant la réception par le greffe de l'acte d'appel, qui doit être signifié aux intimés non constitué par application des dispositions, précitées, de l'article 905-1 du code de procédure civile.
En l'espèce, il résulte des actes de signification versés aux débats par la SARL Wretman, Maitre [Z] [M] et à la SAS Office Notarial [M] et Associés que les appelants ne leur ont pas fait signifier le document intitulé 'récapitulatif de déclaration d'appel', émis par le greffe le 26 octobre 2023 à 14 heures 34 et constituant un accusé de réception de l'acte d'appel, mais la seule copie numérique de leur déclaration d'appel, intitulée 'déclaration d'appel' transmise à la cour, par RPVJ puis RPVA, le même jour à 13 heures 52.
Le fait que Maître [N] [E], commissaire de justice ayant procédé aux significations le 13 novembre 2023, a porté sur son acte la mention d'une signification de la déclaration d'appel, sans davantage de précision, ne peut suffire à rapporter la preuve contraire, dès lors que le document qu'elle signifiait était bien ainsi intitulé et ce, indépendamment de sa valeur juridique qu'elle n'avait pas à apprécier.
Ledit document ne confirmant pas la réception par le greffe de ladite déclaration d'appel et ne constituant pas le récapitulatif de ladite déclaration visé par l'article 8 de l'arrêté du 20 mai 2020, il convient de considérer que la déclaration d'appel n'a pas été signifiée, aux intimés précités, dans le délai de 10 jours de l'avis de fixation du 2 novembre 2023.
Il importe peu que la SARL Wretman, Maitre [Z] [M] et à la SAS Office Notarial [M] et Associés aient constitué avocat les 14 et 20 novembre 2023 puisque, comme indiqué supra, la caducité prononcée par application des dispositions de l'article 905-1 alinéa 1 du code de procédure civile est étrangère à toute notion de grief.
L'ordonnance déférée sera donc infirmée, en ce qu'elle débouté les intimés précités de leur incident, et la caducité de la déclaration sera constatée à l'endroit de la SARL Wretman, Maître [Z] [M] et la SAS Office Notarial [M] et Associés.
S'agissant de Mme [V], les appelants soutiennent que l'acte qui lui a été signifié le 13 novembre 2023, à son domicile savoyard, contient 12 feuillets et inclut le récapitulatif de la déclaration d'appel délivré par le greffe le 26 octobre 2023 à 14 heures 34. Cette intimée ne le conteste pas puisqu'elle s'en est rapportée à justice dans le cadre de l'incident, n'a pas déposé de conclusions de déféré et n'a donc pas produit l'acte de signification de la déclaration d'appel dont elle a été destinataire. Il n'y a donc lieu de constater la caducité de la déclaration d'appel à son endroit.
En revanche, il appartient à la cour et à elle seule d'apprécier la recevabilité de l'appel à l'égard de cette dernière. Les appelants seront donc déboutés de leur demande de ce chef.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
L'incident étant fondé, il serait inéquitable de laisser à la charge de la SARL Wretman, Maître [Z] [M] et la SAS Office Notarial [M] et Associés, les frais non compris dans les dépens, qu'ils ont exposés dans ce cadre procédural.
L'ordonnance déférée sera donc infirmée en ce qu'elle a rejeté leurs demandes formulées de ce chef.
M. [B] [X] et Mme [J] [R] seront dès lors condamnés in solidum à verser, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :
- la somme de 1 200 euros à la SARL Wretman ;
- la somme de 1 200 euros à M. [Z] [M] et la SAS Office Notarial [M] et Associés, ensemble.
Il n'y a lieu de faire application de ce texte au bénéfice de Mme [V] qui s'en est simplement rapportée à justice dans le cadre de l'incident.
M. [B] [X] et Mme [J] [R] supporteront les frais de l'incident et du présent déféré.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant dans les limites du déféré,
Infirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Constate la caducité partielle de la déclaration d'appel enregistrée le 26 octobre 2023 à l'endroit de la SARL Wretman, Maître [Z] [M] et la SAS Office Notarial [M] et Associés ;
Constate l'absence de caducité de la déclaration d'appel à l'endroit de Mme [S] [V] ;
Dit n'y avoir lieu de statuer dans le cadre du présent déféré sur la recevabilité de l'appel à l'égard de Mme [S] [V] ;
Condamne in solidum M. [B] [X] et Mme [J] [R] à verser à la SARL Wretman la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum M. [B] [X] et Mme [J] [R] à verser à M. [Z] [M] et à la SAS Office Notarial [M] et Associés, ensemble, la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute Mme Mme [S] [V], de sa demande sur ce même fondement ;
Condamne in solidum M. [B] [X] et Mme [J] [R] aux dépens de l'incident et du présent déféré.