CA Grenoble, ch. com., 4 juillet 2024, n° 21/02170
GRENOBLE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Gefirex Holding (SAS), Cap Expert (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Figuet
Conseillers :
M. Bruno, Mme Faivre
Avocats :
Me Barichard, Me Montfort, Me Grimaud, Me Marmillot
Faits et procédure :
1. La société Gefirex Holding détient et anime plusieurs cabinets d'expertise-comptable et de commissariat aux comptes dans le Sud Est de la France. Elle est présidée par monsieur [B], Expert-comptable.
2. Au cours de l'année 2014, la société Gefirex Holding a souhaité étendre son activité. La société Cap Expert lui a été présentée, trois associés, dont [S] [M], souhaitant céder leurs parts.
3. Le 19 juin 2014, 335 parts détenues par monsieur [Y], et 41 parts détenues par monsieur [I], ont été cédées à la société Gefirex Holding. Le 7 juillet 2014, monsieur [M] a cédé 124 parts à la société Gefirex au prix de 982.512 euros, et une convention de garantie d'actif et de passif a été conclue le même jour entre ce cédant et le cessionnaire. La société Gefirex Holding est devenue propriétaire de la totalité des parts de la société Cap Expert.
4. Le 7 décembre 2015, un contrat d'assistance au développement a été signé entre monsieur [M] et la société Cap Expert, avec effet rétroactif au 7 juillet 2014, prévoyant la rémunération de monsieur [M] pour chaque entreprise nouvelle présentée à la société.
5. Le 26 mai 2017, le conseil de monsieur [M] a adressé un courrier à la société Cap Expert afin que soient respectés les termes du contrat d'assistance au développement. Le 9 février 2018, il a assigné la société Cap Expert devant le président du tribunal de commerce d'Avignon, afin d'obtenir le paiement provisionnel de la somme de 40.566,60 euros au titre de son contrat d'assistance au développement. Une ordonnance du 5 juin 2018 a débouté monsieur [M] de l'intégralité de ses demandes et a renvoyé les parties à se pouvoir au fond.
6. Le 10 septembre 2018, monsieur [M] a assigné la société Gefirex devant le tribunal de commerce d'Aubenas en paiement de la somme de 51.018,08 euros. Ce dernier s'est déclaré incompétent en faveur du tribunal de commerce de Grenoble, saisi de la demande principale des sociétés Gefirex et Cap Expert.
7. Le 17 septembre 2018, les sociétés Gefirex et Cap Expert ont assigné monsieur [M] devant le tribunal de commerce de Grenoble en annulation de l'acte de cession du 7 juillet 2014 ainsi qu'en annulation des actes connexes.
8. Par jugement du 2 avril 2021, le tribunal de commerce de Grenoble a :
- débouté les sociétés Gefirex Holding et Cap Expert de leur demande de nullité de l'acte de cession et des contrats accessoires ;
- constaté que [S] [M] n'a pas failli a son obligation précontractuelle d'information;
- débouté les sociétés Gefirex Holding et Cap Expert de leur demande de condamnation en réparation du préjudice ;
- condamné la société Gefirex Holding au paiement de la somme de 80.000 euros au titre de la garantie d'actif et de passif, assortie des intérêts conventionnels de 1,5% à compter du 30 juin 2017;
- débouter [S] [M] de sa demande de paiement de la somme de 270.444 euros au titre de la convention de présentation de clientèle ;
- condamné in solidum les sociétés Gefirex Holding et Cap Expert à payer à [S] [M] la somme de 3.000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné in solidum les sociétés Gefirex Holding et Cap Expert aux dépens de l'instance et les a liquidés à la somme indiquée au bas de la première page de la décision.
9. Les sociétés Gefirex Holding et Cap Expert ont interjeté appel de cette décision le 10 mai 2021, en ce qu'elle a :
- débouté les sociétés Gefirex Holding et Cap Expert de leur demande de nullité de l'acte de cession et des contrats accessoires ;
- constaté que [S] [M] n'a pas failli à son obligation précontractuelle d'information ;
- débouté les sociétés Gefirex Holding et Cap Expert de leur demande de condamnation en réparation du préjudice ;
- condamné les sociétés Gefirex Holding et Cap Expert au paiement de 80.000 euros au titre de la garantie d'actif et passif, assortie des intérêts conventionnels de 1.5% à compter de juin 2017 ;
- condamné in solidum les sociétés Gefirex Holding et Cap Expert à payer à monsieur [M] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les mêmes aux dépens de l'instance liquidés à la somme indiquée au bas de la première page du jugement ;
- et en ce que le tribunal ne fait pas droit à l'ensemble des demandes présentées par les sociétés Gefirex et Cap Expert en première instance.
10. Par ordonnance juridictionnelle du 30 juin 2022, le magistrat chargé de la mise en état a :
- déclaré irrecevables les demandes de sursis à statuer dans l'attente de l'issue définitive de la procédure pénale ouverte sous le N° Parquet 16179000070 et N° de Dossier JICABJI218000001, confiée à madame [P] [G] et depuis le 1er septembre 2021 à madame [N] [X] [U], vice-présidente chargée de l'instruction près le tribunal judiciaire de Mont-de-Marsan et de l'issue définitive du litige introduit par maître [O] [J] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Electricité des Costières devant le tribunal de commerce d'Avignon et enregistré sous le numéro RG 2017000208 ;
- condamné la société Gefirex Holding et la société Cap Expert aux entiers dépens de l'incident ;
- condamné la société Gefirex Holding et la société Cap Expert à payer la somme de 700 euros à monsieur [M] au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'incident.
11. Par arrêt définitif du 8 décembre 2022, la cour, statuant sur déféré, a :
- confirmé l'ordonnance déférée en ses dispositions soumises à la cour ;
- y ajoutant, a débouté les sociétés Gefirex Holding et Cap Expert de leur demande visant à interroger le ministère public afin de communication de tout ou partie du dossier d'instruction en cours ouvert sous le N° Parquet 16179000070 et N° de Dossier JICABJI218000001, confié à madame [G] et depuis le 1er septembre 2021 à madame [X] [U], vice-présidente chargée de l'instruction près le tribunal judiciaire de Mont-de-Marsan ;
- renvoyé la procédure devant le conseiller de la mise en état pour la poursuite de son instruction ;
- condamné les sociétés Gefirex Holding et Cap Expert à payer à monsieur [M] la somme complémentaire de 3.000 euros euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l'incident ;
12. Par ordonnance juridictionnelle du 8 février 2024, le magistrat chargé de la mise en état a également :
- débouté les appelantes de leur demande tendant à ordonner la production, sous astreinte, des statuts constitutifs de la société Cap Expert, du certificat du dépositaire du capital social initial de ladite société, de l'annonce légale initialement publiée dans le « Commercial Provence » et remplacée par celle versée en pièces adverse n°55 ;
- débouté [S] [M] de sa demande tendant à joindre l'incident de communication de pièces devant la cour ;
- déclaré sans objet la demande de [S] [M] de renvoyer les parties à plaider devant la cour le 14 décembre 2023 ;
- condamné in solidum les sociétés Gefirex Holding et Cap Expert aux dépens de l'incident.
13. L'instruction de cette procédure a été clôturée le 14 mars 2024.
Prétentions et moyens des sociétés Gefirex Holding et Cap Expert :
14. Selon les conclusions n°6 remises par voie électronique le 6 mars 2024, elles demandent à la cour, au visa de l'article 1116 du code civil :
- de faire droit à leurs demandes, moyens, fins, conclusions et appel ;
- de rejeter comme étant irrecevables ou, à défaut, infondés les demandes, moyens, fins, conclusions et appel présentés par [S] [M] ;
- en conséquence, d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande principale de la société Gefirex Holding tendant à l'annulation pour dol de la cession à son profit des 124 actions appartenant à [S] [M] dans le capital de la société Cap Expert; en ce qu'il a rejeté la demande subsidiaire de la société Gefirex Holding tendant à la condamnation de monsieur [M] à indemniser le préjudice subi à raison de son comportement dolosif et de ses manquements à son obligation précontractuelle d'information ; en ce qu'il a fait droit à la demande de monsieur [M] au paiement de la somme de 80.000 euros au titre de la garantie d'actif et de passif outre intérêts; en ce qu'il a condamné les concluantes au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'instance ;
- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de [S] [M] tendant à la condamnation de la société Cap Expert à lui régler des intéressements à hauteur de 270.444 euros au titre de nouveaux clients apportés après la cession du 7 juillet 2014 ;
- en conséquence, statuant à nouveau et à titre principal, de prononcer la nullité pour « dol vice du consentement » de la cession intervenue le 7 juillet 2014 entre [S] [M] (cédant) et la société Gefirex Holding (cessionnaire) de 124 actions du capital social de la société Cap Expert ;
- de condamner [S] [M] à rembourser à la société Gefirex Holding le prix de cession de 893.000 euros outre intérêts de droit à compter du 10 septembre 2018, date de délivrance de l'assignation ;
- « de rappeler que les opérations de la comptabilité action seront réalisées sur la simple présentation de la décision à intervenir » ;
- à titre subsidiaire, de condamner [S] [M], à raison de son attitude dolosive et de ses manquements à son obligation précontractuelle d'information envers la société Gefirex Holding, à verser à cette dernière 715.359,60 euros de dommages et intérêts ;
- en tout état de cause, de déclarer irrecevables les demandes de monsieur [M] visant (i) à écarter des débats les pièces des appelantes n°9, 11 et 21, (ii) à ordonner « le bâtonnement » de certains passages des écritures des appelantes et (iii) à obtenir le versement de dommages et intérêts (20.000 €) pour un prétendu préjudice moral ;
- à défaut, de les rejeter comme étant mal fondées et injustifiées ;
- de rejeter toutes les demandes, fin, moyens, conclusions de monsieur [M] comme étant mal fondés et injustifiés et en particulier la demande de dommages et intérêts à hauteur de 315.518 euros au titre de la convention de présentation de clientèle ;
- de condamner [S] [M] aux entiers dépens ainsi qu'à verser 15.000 euros à la société Gefirex Holding et 15.000 euros à la société Cap Expert au titre des frais irrépétibles.
Les appelantes exposent :
15. - que l'intimé, bien que n'étant pas expert-comptable et étant associé minoritaire, était le maître de l'affaire, ce qui explique le prix de 900.000 euros convenu pour l'acquisition de ses parts, celles des deux autres associés étant acquises au prix de 90.000 euros ; que ce fait explique que monsieur [M] ait consenti une garantie d'actif et de passif ;
16. - concernant la demande principale tendant à l'annulation de l'acquisition des parts de l'intimé, que la convention de garantie d'actif et de passif signée par l'intimé a garanti au cessionnaire que la société cédée était régulièrement constituée et qu'elle avait une existence juridique valable, que tous ses actifs étaient correctement évalués, qu'elle n'avait pas de dette ou d'obligation ne figurant pas dans les documents comptables remis, que toutes les provisions pour dépréciation, pour risques et charges, avaient été constituées au 31 décembre 2013, que la société était à jour de ses obligations fiscales et sociales, qu'elle disposait des autorisations nécessaires à son bon fonctionnement et qu'elle poursuivait son activité en conformité, qu'elle n'avait commis aucun manquement à ses obligations contractuelles, qu'aucun acte n'était susceptible d'engager sa responsabilité, qu'elle ne se trouvait impliquée dans aucun litige, action, procédure ou enquête judiciaire ou administrative et qu'il n'y avait aucun risque de survenance de pareille hypothèse, qu'elle était gérée en bon père de famille ;
17. - qu'il a été expressément convenu que l'octroi de cette garantie et les déclarations de l'intimé étaient une condition essentielle et déterminante du consentement de la société Gefirex ;
18. - que suite à la prise de contrôle de la société Cap Expert, la société Gefirex a découvert des anomalies, concernant en premier lieu l'existence de créances irrécouvrables, mais cependant non provisionnées comme telles au 31 décembre 2013, pour un total de 262.186 euros au regard de 575.001 euros de créances figurant au compte « clients et comptes rattachés »; qu'en définitif, suite aux recouvrements et à des avoirs, la somme de 153.337 euros HT reste impayée ;
19. - que si l'intimé produit, à ce titre, une attestation du cabinet [C], celle-ci a été établie quatre ans après la cession et pour les besoins de la cause, alors qu'elle ne respecte pas le formalisme prévu par l'article 202 du code de procédure civile et doit ainsi être écartée ; que ce cabinet confirme en réalité l'existence de créances irrécouvrables et en avoir informé l'intimé ; que l'intimé a commis un dol en occultant ces créances et en rassurant la société Gefirex sur l'enregistrement de toutes les provisions ;
20. - que la société Gefirex a également constaté la violation de règles propres à la profession d'expert-comptable, puisque l'intimé lui a caché l'existence de mises en demeure adressées par l'Ordre régional ; que n'étant pas expert-comptable, l'intimé ne pouvait être mandataire social de la société Cap Expert et ne pouvait détenir plus du tiers de son capital social, obligation rappelée par l'Ordre régional le 28 septembre 2012 ; que l'historique des inscriptions modificatives de la société indique cependant que l'intimé a été le gérant de la société depuis sa création en 1990 jusqu'au 28 janvier 1995 ; que l'ordonnance du 19 septembre 1945 relative à l'organisation de la profession impose qu'une société soit constituée par trois experts-comptables, alors que l'intimé n'a pas produit les statuts constitutifs de la société Cap Expert, ce dont la cour doit retenir les conséquences de fait et de droit ;
21. - que l'intimé, bien que n'étant pas expert-comptable, a été l'associé unique de la société Cap Expert, suite à un procès-verbal d'assemblée générale du 18 septembre 2012, après avoir acquis 376 parts du cabinet Der Baghdassarian ; qu'il n'a régularisé cette situation qu'en janvier 2014 en cédant ses parts à messieurs [Y] et [I] ;
22. - que la société Cap Expert n'a jamais déclaré à l'Ordre régional ses bureaux sis à [Localité 5] et à [Localité 1] ;
23. - qu'en contravention avec l'article 151 du code de déontologie, la société ne faisait pas régulariser des lettres de mission par ses clients, ce qu'a relevé le Conseil de l'Ordre en 2014 ;
24. - que l'intimé s'est fait passer frauduleusement pour un expert-comptable, à l'occasion de la rédaction de trois fausses attestations établies en janvier, avril et juillet 2014 au sujet des clients Electricité des Costières et société La Douce, en raison des difficultés graves rencontrées avec ces clients, lesquels sont susceptibles d'engager la responsabilité civile et pénale de la société Cap Expert ; qu'à ce titre, l'Ordre régional a opéré un contrôle, notant des irrégularités jusqu'à l'été 2014 ;
25. - que la société Cap Expert a fait l'objet d'un redressement de la part de l'Urssaf portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, pour 11.951 euros hors majoration de retard, ce qui indique que la société n'avait pas correctement déclaré ses obligations ; que la société a dû payer un total de 13.429 euros ;
26. - que l'intimé a occulté l'existence de litiges, ainsi pour le client Gazton Edition, lequel a engagé la responsabilité civile de la société Cap Expert en raison de retard dans les déclarations fiscales des années 2009 à 2011 ; que cette société a engagé une action devant le tribunal de Carpentras pour 30.000 euros en principal, ce qui a été dissimulé, alors qu'il en est résulté un préjudice pour la société Cap Expert de 7.341 euros ;
27. - qu'un autre litige occulté a concerné la société La Douce, en raison d'anomalies significatives figurant dans les comptes supervisés et contrôlés par l'intimé : enregistrement de factures proforma en tant que produits entraînant une variation du résultat d'exploitation pour 1.191.975 euros ; absence de prise en compte d'une plus-value suite à la réévaluation d'un actif dans le calcul de l'impôt, alors que la réévaluation et la production de faux documents établis par l'intimé a permis de bénéficier d'un crédit d'impôt, ce qui exposait cette société à subir un redressement fiscal à hauteur de 3.133.280 euros en cas de contrôle et à rechercher la responsabilité de la société Cap Expert, dont l'assureur aurait dénié sa garantie, outre une responsabilité pénale pour complicité de présentation de faux bilan et escroquerie ; que ces faits ont donné lieu à l'ouverture d'une information judiciaire ouverte au tribunal de Mont de Marsan avec le risque d'une condamnation de la société La Douce et en conséquence de la société Cap Expert ;
28. - que le même type d'agissement a concerné le client Electricité Des Costières, puisque l'intimé s'est présenté faussement comme expert-comptable et a établi une attestation destinée aux organes de la procédure de redressement judiciaire ; que suite à la liquidation judiciaire de cette société, le juge-commissaire a ordonné une expertise concernant les comptes relatifs aux exercices 2009 à 2013, ce qui a permis à la société Cap Expert de prendre connaissance du problème relatif à une erreur d'imputation comptable portant sur 196.017,67 euros ; que la société a ainsi été assignée par le liquidateur judiciaire le 27 décembre 2016, au motif que sous la direction de l'intimé, elle a activement aidé le dirigeant de la société Electricité des Costières à réaliser une fraude massive à la TVA aggravant le passif, afin d'obtenir le paiement de dommages et intérêts pour 501.172,60 euros; que cette procédure est actuellement pendante devant la cour d'appel de Nîmes ;
29. - que l'intimé a dissimulé ces faits sciemment, n'a pas attiré l'attention de la société Gefirex sur ces éléments, et a même déclaré lors de la cession qu'il n'y avait pas d'anomalie, ce qui constitue un dol, d'autant qu'il avait été convenu que les garanties faites par le cédant étaient une condition essentielle et déterminante du consentement du cessionnaire ;
30. - que l'action sur le fondement du dol est recevable, puisqu'elle se prescrit par cinq ans, délai courant à compter de la révélation du dol ; qu'en l'espèce, les déclarations de l'intimé et la cession remontent au 7 juillet 2014 alors que l'assignation a été délivrée par les concluantes le 10 septembre 2018 ;
31. - subsidiairement, que l'intimé doit indemniser le préjudice résultant de ses fautes dolosives, mais également en raison du défaut d'information précontractuelle et à son obligation de loyauté contractuelle ; que le fait que le cessionnaire soit un professionnel de l'activité cédée ne dispense pas le cédant de ces obligations qui doivent être exécutées spontanément;
32. - que ce préjudice correspond notamment à la perte de chance de contracter à des conditions plus avantageuses ; que si la société Gefirex avait connu les faits occultés par l'intimé, elle n'aurait pas acquis ses parts au prix de 893.000 euros ; que l'intimé doit ainsi être condamné au paiement de 715.359,60 euros couvrant les créances non provisionnées de la société Cap Expert, les conséquences du redressement Urssaf, les demandes du liquidateur judiciaire de la société Electricité des Costières, la somme versée suite à la condamnation prononcée au profit de la société Editions Gazton, les frais engagés par le cessionnaire dans le cadre des contrôles de l'Ordre des experts-comptables et des enquêtes pénales, le préjudice de réputation subi par la société Gefirex qui a dû se défendre dans deux procédures civiles et une procédure pénale ;
33. - concernant l'irrecevabilité des demandes de monsieur [M] visant à écarter des débats les pièces des appelantes n°9, 11 et 21, à ordonner « le bâtonnement » de certains passages des écritures des appelantes et à obtenir le versement de dommages et intérêts pour un prétendu préjudice moral, que ces demandes sont nouvelles devant la cour et ne se rattachent pas aux demandes originelles par un lien suffisant, qui sont l'annulation d'un contrat pour dol et subsidiairement l'octroi de dommages et intérêts ;
34. - subsidiairement, que ces demandes reconventionnelles sont mal fondées, puisque si l'intimé dénie sa signature sur les pièces concernées, elle est cependant corroborée par la signature figurant sur sa pièce n°17 ; qu'il ne rapporte pas la preuve de la fausseté de sa signature ; que concernant la demande de cancellation de certains passages des conclusions des appelantes, formulée sur le fondement de l'article 41 de l'ordonnance du 29 juillet 1881 et de l'article 24 du code de procédure civile, qu'il n'en résulte pas une atteinte au respect dû à la justice, alors que ces passages ne sont ni injurieux ni diffamatoires ;
35. - concernant l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Gefirex Holding au paiement de la somme de 80.000 euros au titre de la garantie d'actif et de passif, assortie des intérêts conventionnels de 1,5% à compter du 30 juin 2017, que cette appelante a été autorisée à conserver une partie du prix de cession par l'acte du 7 juillet 2014, afin de parfaire la garantie ; que si celle-ci n'a pas été actionnée avant son terme expirant le 31 décembre 2017, il est néanmoins sollicité l'annulation de la vente, de sorte que le cessionnaire ne peut être condamné au paiement du solde du prix ; que s'il est fait droit à la demande subsidiaire visant l'octroi de dommages et intérêts, une compensation devra nécessairement intervenir ;
36. - s'agissant de la demande de l'intimé portant sur la convention d'intéressement conclu avec la société Cap Expert le 7 décembre 2015, que cette convention a été conçue rétroactivement pour permettre le paiement d'intéressements sur les clients apportés depuis la cession le 7 juillet 2014, sur la base de 90 % des honoraires récurrents versés la première année ; que l'intimé n'a rien réclamé pendant plus de deux ans, avant d'adresser un courrier le 26 mai 2017 à la Sas [B] & Associés et non aux concluantes, en reconnaissant qu'il n'avait pas l'identité des clients qu'il aurait présentés à la société Cap Expert ; que suite à ce courrier, la convention a été résiliée immédiatement sans réaction de l'intimé ; que l'intimé ne produit qu'une liste en reconnaissant que les clients étaient sans valeur, outre une autre liste dont il résulte que le chiffre d'affaires apporté n'est que de 13.300 euros HT, ne pouvant ainsi donné lieu qu'à un intéressement de 11.970 euros ; que les autres documents produits intitulés « attestations » ne comprennent aucun chiffrage outre des noms différents de ceux figurant dans les deux listes ; que l'intimé demande également un intéressement courant jusqu'au 1er juillet 2021 alors qu'il conclut que la convention n'a été exécutée que jusqu'en mai 2017 et qu'elle a été résiliée le 1er juin 2017.
Prétentions et moyens de [S] [M]:
37. Selon ses conclusions n°3 remises par voie électronique le 18 octobre 2023, il demande à la cour, au visa des articles 9, 15, 24 du code de procédure civile, de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, des articles 1103, 1116, 1134 (anciens) et 1240 du code civil :
- de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté les sociétés Cap Expert et Gefirex de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions ; en ce qu'elle a condamné les sociétés Cap Expert et Gefirex au paiement de la somme de 80.000 euros outre intérêts, au titre de la garantie d'actif et passif ;
- de réformer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté le concluant de ses demandes au titre de la convention de présentation ;
- statuant de nouveau, d'écarter des débats les pièces adverses 9, 11 et 21 dès lors que les originaux ne seront pas produits ;
- d'ordonner le « bâtonnement » des extraits suivants des conclusions d'appelantes :
- Page 5/46 : «Gefirex a aussi et surtout découvert de très graves irrégularités imputables à monsieur [M] qui s'était fait passer, avant la cession, pour expert-comptable et qui avait, dans ce cadre personnellement participé à des opérations comptables et fiscales frauduleuses pour le compte de certains clients de Cap Expert» ;
- Page 6/46 :« Ce rapport est sévère à l'égard de Cap Expert pour ses diligences effectuées avant cession, sous l'égide de monsieur [M] ». « Les états de synthèse analysés par l'expert ont été établis par monsieur [S] [M], agissant sous la responsabilité déontologique de M. [A] [Y], expert-comptable inscrit au tableau du Conseil Régional de l'Ordre des Experts Comptables de Rhône Alpes» ;
- Page 15/46 : « Monsieur [M] a donc organisé, dans des conditions encore floues, lorsqu'il a envisagé de céder Cap Expert, une régularisation en cédant ses parts en janvier 2012 à [Y] et Cie et à monsieur [I]. Cette configuration, plus que baroque dans l'organisation d'un cabinet d'expertise, explique également qu'il y ait une valse de gérants qui ne restaient pas officiellement à la tête de Cap Expert » ;
- Page 16/46 : «Enfin, il est démontré qu'avant la cession, monsieur [S] [M] se faisait frauduleusement passer pour expert-comptable, nonobstant son absence de diplôme et d'inscription à l'ordre des experts comptables.» ;
- de condamner les appelants au versement de la somme de 20.000 euros à titre de légitimes dommages et intérêts en réparation du préjudice moral causé par les propos injurieux et diffamatoires, et ce, sur le fondement de l'article 1240 du code civil.
38. L'intime sollicite en outre, à titre principal :
- de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté les sociétés Cap Expert et Gefirex de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions ;
- de constater l'absence de man'uvre dolosive commise par le concluant ;
- de débouter les appelantes de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions.
39. Il demande, à titre subsidiaire :
- de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté les sociétés Cap Expert et Gefirex de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions ;
- de débouter la société Gefirex de sa demande subsidiaire au paiement de la somme totale de 715.359,60 euros de dommages et intérêts.
40. Il demande, à titre reconventionnel :
- de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la société Gefirex au paiement de la somme de 80.000 euros outre intérêts, au titre de la garantie d'actif et passif, assortie des intérêts conventionnels de 1,5% à compter du jour de la demande, soit le 1er juin 2017 ;
- de réformer cette décision en ce qu'elle a débouté le concluant de ses demandes au titre de la convention de présentation ;
- de condamner la société Cap Expert au paiement de la somme de 315.518 euros au titre de la convention de présentation de clientèle, assortie des intérêts légaux à compter du jour de la demande, soit le 26 mai 2017 ;
- de condamner les sociétés Gefirex et Cap Expert à lui payer la somme de 40.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- de condamner les sociétés Gefirex et Cap Expert aux entiers dépens de première instance et appel.
Monsieur [M] indique :
41. -s'agissant du dol invoqué par les appelantes, que suite à la cession par monsieur [I] et par la société [Y] & Associés de leurs parts dans le capital de la Sarl Cap Expert survenue le 19 juin 2014, la gérance de la société a été prise par monsieur [B] ; que dans les jours suivants, la société Gefirex a transformé la société en Sas, alors que le concluant, apportant ses parts, est devenu détenteur d'actions ; que le jour de la cession de ces actions, monsieur [B] a établi et certifié les comptes de l'année 2014, de sorte qu'il avait une parfaite connaissance de la situation ;
42. - concernant les créances irrécouvrables qui n'auraient pas été provisionnées au 31 décembre 2013, que les appelantes ne produisent pas d'élément probant ; que la société Cabex, qui a accompagné le concluant lors de la transmission de ses titres, atteste avoir attiré l'attention de monsieur [B] sur des soucis éventuels concernant l'encaissement de certaines créances anciennes, qu'il a pu vérifier lors de l'audit de la société Cap Expert ; qu'il résulte d'échanges de mails que pendant la négociation de la cession, des renseignements ont été communiqués avec des synthèses réalisées par monsieur [B] ;
43. - s'agissant de la prétendue violation des règles propres aux experts-comptables, que l'absence de demandes d'inscription des établissements secondaires de [Localité 5] et [Localité 7] auprès de l'Ordre des experts-comptables ne peut constituer ni une faute, ni une omission dommageable, puisque ces établissements étaient assurés et régulièrement immatriculés au RCS ; que l'absence de déclaration est ainsi sans conséquence, d'autant que le concluant n'avait que la qualité de directeur et non de gérant ;
44. - si les appelantes invoquent le fait que le concluant aurait tu les mises en demeure adressées par l'Ordre régional, que ces relations antérieures ne portent aucun préjudice aux appelantes et n'ont rien à voir avec l'acte de cession et la valeur de leurs parts, alors qu'aucun manquement grave n'a été commis ; que s'agissant de l'incompatibilité pour monsieur [E] [T] d'être gérant, ce problème remonte à 2012 et a pris fin le 14 février 2013 lors du changement de gérant ; que le contrôle réalisé en septembre 2014 a été effectué dans le cadre des contrôles classiques de l'Ordre et sans lien avec les manquements imputés au concluant ; que ce contrôle a retenu qu'il n'existait aucun problème significatif, mais qu'une vérification s'imposait dans un délai de deux ans concernant des modifications, régularisations ou améliorations liées à l'arrivée d'un nouveau dirigeant ;
45. - concernant sa qualité, qu'il n'a jamais caché le fait qu'il n'était pas expert-comptable ; qu'il a été gérant pendant un temps de la société Cap Expert en tant que fondé de pouvoir, avant que la législation impose que la gérance soit exercée exclusivement par un expert-comptable ; qu'il a été le directeur de la société pendant 24 ans ; que les pièces 9, 11 et 21 produites par les appelantes portant la mention de l'utilisation de la qualité d'expert-comptable n'ont pas été rédigées ni signées par le concluant, alors que les appelantes ne produisent pas les originaux de ces documents; que le concluant n'a jamais usurpé la qualité d'expert-comptable et n'a jamais fait l'objet de poursuite à ce titre ;
46. - s'agissant de l'absence de lettres de mission, que tous les dossiers comptables et les lettres de mission existaient, alors que préalablement à la cession, un audit a été réalisé ; qu'il n'existe aucun contentieux relatif à la contestation d'honoraires ;
47. - concernant le contrôle de l'Urssaf réalisé au titre des années 2012 à 2014, qu'il n'a concerné que la question de la majoration de déductions patronales sur les heures supplémentaires, des indemnités kilométriques et l'annulation d'une réduction, aboutissant à un rappel de seulement 1.049 euros ; que la société Gefirex n'a pas estimé devoir mettre en 'uvre la garantie de passif ;
48. - pour le dossier Gazton Editions, que le concluant ignorait qu'un contentieux allait exister avec ce client ; que l'erreur n'a porté que sur une déclaration d'un bien immobilier détenu par un résident à l'étranger pour l'année en cours ; que ce n'est que le 1er avril 2016 que ce client a assigné la société Cap Expert afin d'obtenir le paiement de 6.421 euros, de sorte que lors de la cession de ses parts, le concluant ne pouvait anticiper cette action ; que la société Cap Expert n'a été condamnée qu'au paiement de 6.000 euros, de sorte qu'il n'est pas établi que si elles avaient connu ce fait, les appelantes n'auraient pas acquis les parts dans les mêmes conditions ; que la garantie de passif n'a pas plus été mise en 'uvre à ce titre ;
49. - concernant le dossier de la société La Douce, qu'il n'y a eu aucun contrôle ou contentieux fiscal, ni procédure civile ou pénale engagée contre la société Cap Expert ; que par jugement du 20 décembre 2018, le tribunal administratif de Pau a annulé le contrôle fiscal ainsi que les pénalités et majorations ; que cette société n'a ainsi jamais été condamnée, de sorte qu'il n'y a pu y avoir de man'uvres frauduleuses constitutives d'un dol puisqu'il n'y avait rien à cacher ; que le rapport de l'année 2013 du commissaire aux comptes démontre l'absence de toute irrégularité ;
50. - concernant la société Electricité des Costières, que le concluant n'a jamais rédigé ni signé l'attestation litigieuse ; que l'assignation diligentée par le liquidateur de cette société date du 27 décembre 2016, soit plus de deux ans après la cession des parts de la société Cap Expert, de sorte que le concluant n'a pu avoir connaissance du contentieux préalablement à la vente de ses parts ; que la simple délivrance d'une assignation ne signifie pas que des fautes aient été
commises, alors qu'aucun jugement n'est produit puisque les appelantes indiquent que l'affaire reste pendante devant la cour d'appel de Nîmes, sans produire le jugement de première instance, ce qui indique que la société Cap Expert a certainement gagné en première instance; que le problème ne résulte pas d'une dissimulation de la TVA, mais du fait qu'elle n'était pas réglée par la société Electricité des Costières alors que le liquidateur ne reproche que le fait de n'avoir pas proposé de solutions ; que rien n'indique que l'assureur de la société Cap Expert ne prendra pas en charge une éventuelle condamnation ;
51. - que la société Gefirex n'a acquis que 124 parts du concluant, et demande l'annulation sans demander de réduction du prix, alors qu'elle n'a formé aucune demande en annulation des cessions des parts de messieurs [Y] et [I] ; que la présente instance ne vise ainsi qu'à permettre à la société Gefirex de rester majoritaire dans la société Cap Expert, en récupérant 893.000 euros au titre du prix de cession ;
52. - concernant le « bâtonnement » des écritures des appelantes, qu'elles forment des accusations concernant l'exercice illégal de la profession d'expert-comptable qui constitue un délit ; que ces accusations sont diffamatoires au regard de ce qui a été indiqué plus haut et constituent une tentative d'escroquerie au jugement ; que le recours aux conclusions injurieuses et diffamatoires est interdit ;
53. - s'agissant de la demande subsidiaire portant sur le paiement de 715.359,60 euros à titre de dommages et intérêts, que la nature du préjudice invoqué n'est pas précisée ; que cette demande repose sur les mêmes faits que la demande principale en annulation de la cession pour dol ; ainsi, que si le dol n'est pas retenu, cette demande ne peut aboutir; que cette demande est mal fondée en fait au regard de ce qui a été indiqué plus haut, alors que le prétendu préjudice de réputation n'est pas étayé ;
54. - concernant la demande reconventionnelle du concluant au titre du paiement du solde du prix de ses parts, que la convention de garantie d'actif et de passif a été conclue pour une durée de trois ans expirant le 31 juin 2017 ; que cette garantie n'a pas été actionnée, ce qui justifie le paiement du solde de 80.000 euros ; que le jugement déféré doit ainsi être confirmé sur ce point ;
55. - s'agissant de l'exécution de la convention de présentation, conclue le 7 décembre 2015, soit un an et demi après la cession des parts, que le concluant n'a jamais reçu le moindre intéressement alors qu'il a présenté de nombreux clients ; que si le montant exact de la créance reste inconnu, c'est en raison du refus de la société Cap Expert de communiquer les justificatifs nécessaires ; que le concluant produit cependant huit attestations indiquant que plusieurs entreprises ont eu recours à cette société sur sa recommandation directe ; qu'une liste a été établie concernant des dossiers indiqués comme étant sans valeur, bien que des honoraires aient été facturés ; que les tableaux produits par la société Cap Expert permettent cependant de constater que la somme de 45.074 euros revient chaque année au concluant entre le 1er juillet 2014 et le 1er juillet 2021, soit un total de 315.518 euros ; que faute à la société Cap Expert de produire les comptes clients certifiés de 2014 à 2021, il convient de se fonder exclusivement sur les tableaux du concluant ; qu'en première instance, comme l'indique le plumitif d'audience, les appelantes ont indiqué que le contrat d'accompagnement a été exécuté, de sorte qu'elles ne peuvent soutenir désormais le contraire.
*****
56. Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS DE LA DECISION
1) Sur les demandes de retrait de pièces, de cancellation des conclusions des appelantes et de dommages et intérêts pour préjudice moral de monsieur [M] :
57. Concernant en premier lieu la recevabilité de la demande de monsieur [M] concernant le retrait des pièces n°9, 11 et 21 des appelantes, la cour constate qu'il ne résulte pas du jugement déféré que cette demande ait été formée devant le tribunal. Elle est ainsi nouvelle devant la cour. Le dossier communiqué par le tribunal ne contient pas l'intégralité des conclusions échangées en première instance accompagnées des bordereaux des pièces communiquées. Il contient par contre l'assignation délivrée par les appelantes, produisant alors 22 pièces (contre 70 devant la cour). Le bordereau annexé à cette assignation indique la communication de trois attestations n°7, 8 et 20. La cour constate que devant elle, la pièce n°8 correspond à la pièce n°9 dont le retrait est demandé, alors que la pièce n°7 correspondant à la pièce n° 21 dont le retrait est demandé, et que la pièce n° 20 est la pièce n° 11 dont le retrait est également sollicité. Les pièces communiquées en appel contiennent d'ailleurs les numéros des pièces produites en première instance.
58. Il en résulte que ces pièces ont déjà été présentées devant le tribunal de commerce, sans que [S] [M] ne forme d'incident, et il ne justifie d'aucun élément devant la cour permettant de constater qu'il n'aurait découvert les faits qu'il invoque qu'à l'occasion de la procédure suivie en appel.
59. Cependant, s'il résulte de l'article 564 du code de procédure civile qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, exception est faite lorsqu'il s'agit de faire écarter les prétentions adverses. Tel est l'objet de cette demande de retrait, puisque ces pièces sont des attestations imputées à [S] [M] dans lesquelles il se prévaut de la qualité d'expert-comptable, alors qu'il est constant qu'il n'a jamais présenté les conditions lui permettant de l'invoquer. Cette demande de retrait est ainsi recevable.
60. Sur le fond, la cour relève que la pièce n°9 des appelantes consiste en une attestation imputée à la société Cap Expert, signée par [S] [M], dans laquelle il se prétend expert-comptable, inscrit au tableau, certifiant de l'existence d'un bail conclu entre la Sci Mathieu et la société Electricité des Costières. Cela concerne le transfert de factures à la charge de cette dernière, à hauteur de 196.017,67 euros. Ces factures concernent des travaux d'aménagement qui devait être à sa charge, mais qui ont été, par erreur, mises au nom du bailleur. La pièce n°11 est une attestation similaire, concernant les résultats de la société La Douce. La pièce n°21 est également une attestation, rédigée de façon identique, concernant également la société La Douce, et concernant le bilan 2013 au regard de certaines charges.
61. La cour note qu'il s'agit de photocopies et qu'aucun document original n'est produit permettant de constater qu'il s'agit de reproductions fidèles au sens de l'article 1379 du code civil concernant les copies, notamment concernant la signature attribuée à [S] [M]. En conséquence, la cour ne peut qu'ordonner le retrait de ces pièces des débats.
62. Concernant la demande de cancellation formée par [S] [M], il n'est pas contesté qu'il s'agit d'une demande nouvelle devant la cour. Cependant, il ne résulte pas du dossier transmis par le tribunal que les propos visés par l'intimé aient figuré dans les conclusions remises par les appelantes en première instance. Au regard de l'article 564 du code de procédure civile, cette demande est ainsi recevable, résultant des conclusions produites devant la cour.
63. Sur le fond, selon l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux. Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts. En outre, il résulte de l'article 24 du code de procédure civile que les parties sont tenues de garder en tout le respect dû à la justice. Le juge peut, suivant la gravité des manquements, prononcer, même d'office, des injonctions, supprimer les écrits, les déclarer calomnieux, ordonner l'impression et l'affichage de ses jugements
64. En la cause, la cour constate que les propos des appelantes, repris dans le dispositif des conclusions de [S] [M], ne contiennent pas d'éléments injurieux, outrageants ou diffamatoires, ni calomnieux, excédant les propos normalement admissibles dans le cadre d'un procès. Il n'y a pas en conséquence lieu d'ordonner la cancellation de ces passages des conclusions de la société Cap Expert et de la société Gefirex.
65. Par suite, la demande de dommages et intérêts de [S] [M] sera rejetée.
2) Sur le dol invoqué par la société Gefirex :
66. Concernant la qualité d'expert-comptable de [S] [M], le tribunal de commerce a retenu que l'intimé conteste avoir utilisé cette qualité, et il n'a jamais fait l'objet d'une condamnation à ce titre. Sa responsabilité pénale ne peut donc être recherchée, et les vérifications comptables et juridiques réalisées préalablement à la cession de parts, diligentées par des professionnels du chiffre et du droit, auraient permis de déceler toutes irrégularités remettant en cause l'opération, telles que les carences en matière de gérance de la société, et de la conformité juridique des établissements secondaires.
67. La cour constate qu'il résulte du procès-verbal de l'assemblée générale de la société Cap Expert du 18 septembre 2012 qu'elle est alors composée de [S] [M] et de la société Cabinet Der Baghdassarian & Associés, laquelle est majoritaire. La gérante (non associée) est madame [D]. L'assemblée désigne [Z] [E]-[T] gérant. A l'issue de cette assemblée, [S] [M] devient l'associé unique dans la Sarl, suite à la cession des parts de la société Cabinet Der Baghdassarian. L'Ordre des experts-comptables a demandé, par courrier adressé le 28 septembre 2012 à la société Cap Expert, de lui communiquer le nom du nouveau gérant qui doit être associé, avec rappel de l'article 7 de l'ordonnance de 1945 prévoyant que 2/3 du capital et des droits de vote doivent être détenus par des experts-comptables inscrits au tableau de l'ordre. Le 14 février 2013, l'Ordre a accordé un délai exceptionnel jusqu'au 31 mai 2013 pour que la société se mette en conformité. Par procès-verbal de l'assemblée générale de la société du 14 février 2013, [A] [Y] a été nommé gérant avec effet rétroactif au 18 septembre 2012, suite à la démission de l'ancien gérant en raison de son absence d'agrément par l'Ordre. [S] [M] est alors toujours l'associé unique.
68. Il résulte du procès-verbal des délibérations de l'assemblée générale extraordinaire et ordinaire de la société Cap Expert du 19 juin 2014 que postérieurement à la délibération du 14 février 2013, la société [Y] et Compagnie est entrée au capital de la société Cap Expert, avec la détention de 335 parts sur les 500 parts composant ce capital, de même que monsieur [I], détenteur de 41 parts. [S] [M] est devenu associé minoritaire avec 124 parts. Il n'est pas contesté que la société [Y] et Compagnie était alors inscrite à l'ordre des experts-comptables, et elle détenait
2/3 du capital et des droits de vote, puisque les 2/3 des parts de la société Cap
Expert représentaient 333,33 parts. Il en résulte que la composition de la société était devenue, avant la cession des parts à la société Gefirex, conforme à la législation.
69. La promesse d'achat des actions conclue entre [S] [M] et la société Gefirex le 12 mai 2014 a prévu la réalisation d'un audit préalable à la levée de l'option. Par mail de [K] [B] adressé à [S] [M] le 12 juin 2014, le premier a indiqué l'absence de remarque suite à l'audit, sauf le provisionnement de certaines créances clients, sans autre précision. Lors de l'assemblée générale de la société Cap Expert du 19 juin 2014, la société [Y] & Cie a été autorisée à céder ses parts à la société Gefirex et il en a été de même concernant les parts de monsieur [I]. Les actes de cession sont intervenus le même jour, et la société Gefirex, représentée par [K] [B], a détenu ainsi 376 parts sur 500. [S] [M] est resté associé pour le solde de 124 parts. Selon l'historique des inscriptions modificatives concernant la société Cap Expert, celle-ci est devenue une société par actions simplifiée le 7 juillet 2014, soit le même jour que la cession par [S] [M] de ses parts à la société Gefirex. [K] [B] a été nommé président le 1er octobre 2014. Il en résulte que la composition de la société Cap Expert est restée conforme aux obligations résultant du statut des experts-comptables.
70. Si les appelantes invoquent en outre un problème concernant deux établissements secondaire de la société Cap Expert, il ressort de courriers de l'Ordre des experts-comptables que des contrôles ont été réalisés notamment suite à la cession des parts de la société Cap Expert à la société Gefirex, ne donnant pas lieu à observation sur ces établissements.
71. Il résulte de ces éléments que lors de l'acquisition des parts de [S] [M] le 7 juillet 2014, la société Cap Expert se trouvait en conformité avec les règles régissant la profession d'expert-comptable.
72. Concernant l'absence de régularisation de lettres de mission, l'Ordre des experts-comptables a vérifié l'existence de ces lettres lors de son contrôle du 26 mars 2015 et n'a pas relevé de problème d'ordre professionnel significatif.
73. S'agissant de l'utilisation par [S] [M] de la qualité d'expert-comptable, alors qu'il n'est pas contesté qu'il ne peut en faire usage, le rejet des pièces des appelantes n° 9, 11 et 21 ne permet pas de retenir l'existence de ce grief. Aucun élément ne permet de constater que l'Ordre des expert-comptables ait noté des irrégularités à ce titre.
74. S'agissant des griefs pris d'un redressement de l'Urssaf portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, et de l'existence de créances irrécouvrables, la cour rappelle que selon la lettre d'intention de la société [B] & Associés du 29 avril 2014, un audit contradictoire devait être réalisé préalablement à la levée de l'option. La réalisation de cet audit a été confirmée dans la promesse d'achat des parts de [S] [M] par la société Gefirex du 12 mai 2014. Cet audit a été réalisé, et par mail du 12 juin 2014 adressé à [S] [M], [K] [B] lui a notifié l'absence de remarques, sauf le provisionnement de certaines créances clients, mais sans précision. La société Allians est intervenue en qualité de commissaire à la transformation de la Sarl Cap Expert en société par actions, et son rapport du 24 juin 2014, réalisé préalablement à la cession des parts de [S] [M], indique qu'il n'y a pas d'observation sur la valeur des biens composant l'actif et l'activité de la société. Ce commissaire précise avoir contrôlé les éléments constitutifs du patrimoine, et indique notamment une provision pour risques et charges de 4.562,16 euros. Il en résulte, comme retenu par le tribunal de commerce, que des vérifications comptables et juridiques ont été réalisés par des professionnels du chiffre et du droit, avant la cession des parts.
75. En outre, la cour retient que si le contrôle de l'Urssaf a abouti le 1er septembre 2015, il n'a concerné qu'un rappel de 4.230 euros au titre de frais professionnels, portant sur une période de trois ans, outre un rappel de charges de 10.902 euros au titre de réduction de cotisations patronales. Concernant l'un des établissements de la société Cap Expert, l'Urssaf a également opéré un rappel de 801 euros, et un autre rappel pour 1.049 euros. Or, d'une part les données de ce contrôle n'ont pas formé d'obstacle à la conclusion le 7 décembre 2015 de la convention d'assistance au développement conclue avec [S] [M], et d'autre part, la convention de garantie du passif conclue le 7 juillet 2014 n'a pas été mise en 'uvre par le cessionnaire alors qu'elle expirait le 31 décembre 2017. Outre le fait que la preuve de man'uvres dolosives de [S] [M] n'est pas démontrée, il résulte de ces éléments qu'à supposer qu'une dissimulation fautive ait été opérée par l'intimé, elle n'a pas été déterminante du consentement de la société Gefirex.
76. S'agissant de l'occultation du litige concernant la société Gazton Editions, il résulte du jugement du tribunal de grande instance de Carpentras du 1er mars 2018 que la responsabilité de la société Cap Expert a été engagée par assignation du 1er avril 2016, concernant un manquement professionnel en lien direct avec le redressement fiscal de ce client. Ce redressement a concerné des droits d'enregistrement concernant des biens immobiliers possédés en France par certaines personnes morales, au titre des années 2012 à 2014. Le contrôle a été réalisé entre les mois de juin 2014 et le 19 mars 2015. Le tribunal a retenu la faute de la société Cap Expert, et l'a condamnée à payer à la société Gazton Editions la somme de 6.421 euros en principal, outre 1.200 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
77. La cour constate d'une part que ce contrôle a été concomitant avec la cession des parts de [S] [M], et qu'il s'est poursuivi lorsque la société Gefirex est devenue propriétaire des parts de l'intimé, de sorte qu'il n'est pas établi que [S] [M] ait occulté l'existence de ce litige, alors que d'autre part, comme précédemment, la garantie de passif n'a pas été mise en 'uvre, de sorte que les appelantes ne justifient pas que l'occultation de ce litige ait eu un intérêt déterminant, eu égard en outre au faible montant financier mis à la charge de la société Cap Expert, au regard du coût de l'acquisition de l'intégralité des parts de la société Cap Expert.
78. Concernant la société La Douce, la cour relève qu'il ressort du jugement du tribunal administratif de Pau du 31 décembre 2018 qu'un redressement fiscal a concerné cette société, pour des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés concernant l'année 2010, des droits supplémentaires portant sur la TVA au titre des années 2010 et 2011 et des amendes fiscales concernant les années 2010 et 2011, le tout ayant été mis en recouvrement le 16 novembre 2015. Le tribunal a prononcé la décharge de la société La Douce pour un problème de procédure dans les contrôles opérés par le fisc. Les appelantes ne rapportent pas la preuve que la société Cap Expert ait été condamnée au paiement d'une indemnité au profit de la société La Douce en raison de fautes commises dans le cadre de sa mission. Il en résulte que l'appréciation du cessionnaire des parts de [S] [M] n'a pu être modifiée concernant leur valeur.
79. Concernant la société Electricité des Costières, un problème est apparu à l'occasion de la procédure de liquidation judiciaire de cette société, résultant d'une insuffisance dans la déclaration du chiffre d'affaires, entraînant une insuffisance de versement de la TVA, pour un total de 518.964 euros, sur la période 2010/2011. Une précédente vérification pour les années 2008/2009 avait mis en évidence le même problème. Le liquidateur judiciaire de la société Electricité des Costières a adressé au juge-commissaire le 9 octobre 2014 une requête afin de désigner un sapiteur. Le juge-commissaire a ordonné cette analyse par ordonnance du 5 novembre 2014.
80. Le rapport définitif établi le 23 septembre 2015 par monsieur [W], expert désigné par le juge-commissaire de la procédure de liquidation de la société Electricité des Costières, a indiqué que le problème vient de flux financiers anormaux entre une société civile et cette société au titre d'un bail commercial. Il a relaté une attestation de [S] [M] en qualité d'expert-comptable de la société Cap Expert, attestant que les travaux d'aménagement devaient être réglés par la Sarl Electricité des Costières, mais que suite à une erreur de transcription, les factures ont été établies au nom du bailleur, quoique réglées par le preneur. L'attestation indique que les factures vont ainsi être transférées à l'ordre du preneur, ce qui va impacter sa comptabilité de 196.017,67 euros. Le problème est apparu lors d'un contrôle fiscal réalisé en 2014, et les comptes ont été rectifiés après l'ouverture du redressement judiciaire, ce qui était impossible en raison de l'absence d'une déclaration de créance du bailleur. L'expert a pointé également un transfert de trésorerie intervenu au préjudice de la société Electricité des Costières au profit de deux sociétés civiles, en procédant à des décalages importants de TVA, ce qu'un simple recoupement comptable permettait de déceler. Il a retenu la responsabilité de l'expert-comptable pour ces deux faits, et a chiffré le préjudice subi par les créanciers à 390.000,48 euros.
81. Une assignation a été délivrée le 27 décembre 2016 devant le tribunal de commerce d'Avignon par maître [J], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Electricité des Costières, contre la société Cap Expert, par laquelle le liquidateur demande la condamnation solidaire de la société Cap Expert et de monsieur [Y] à payer une indemnité de 198.098 euros au titre du redressement effectué, outre 303.074,60 euros au titre du préjudice subi par l'ensemble des créanciers, en raison de rappels de TVA faisant suite à des chiffres d'affaires éludés allant jusqu'à 57 % pour l'année 2012, faits reconnus par la société Electricité des Costières. Cette assignation fait suite au dépôt du rapport d'expertise ordonné par le juge-commissaire. Selon cette assignation, la responsabilité de l'expert-comptable est ainsi recherchée, puisque l'analyse des comptes devait lui permettre de détecter facilement ce problème.
82. La cour rappelle que l'acte de cession des parts de [S] [M] a été conclu le 7 juillet 2014. Or, à cette date, aucun élément ne permet de retenir que l'intimé connaissait l'existence du litige qui a opposé ensuite la société Cap Expert à la liquidation judiciaire de la société Electricité des Costières, puisque ce n'est que le 9 octobre 2014 que le liquidateur judiciaire de cette société a adressé au juge-commissaire sa requête afin de désigner un sapiteur. Il ne peut ainsi être reproché à [S] [M] une man'uvre dolosive, ou une réticence intentionnelle, résultant de l'omission d'un contentieux qui n'existait pas lors de la cession, peu important à cet égard que l'expert désigné par le juge-commissaire ait retenu la responsabilité de l'expert-comptable. Comme souligné par [S] [M], le jugement du tribunal de commerce d'Avignon, faisant suite à l'assignation du liquidateur judiciaire, n'est pas produit, alors que l'instance est désormais pendante devant la cour d'appel de Nîmes. Il en résulte que les appelantes ne rapportent pas la preuve de man'uvres ou de réticences émanant de [S] [M] ayant faussé l'appréciation du cessionnaire des parts en juillet 2014.
83. La cour rappelle enfin qu'un audit avait été réalisé par [K] [B] avant la levée de l'option, alors qu'il s'agit d'un professionnel du chiffre et du droit, comme indiqué par le tribunal de commerce, et après la révélation de ces différents faits, d'une part la garantie d'actif et de passif n'a pas été mise en jeu, alors que d'autre part, un contrat de partenariat a été signé avec [S] [M] le 7 décembre 2015, et n'a été résilié que suite à la demande de paiement de l'intimé du 26 mai 2017. Il en résulte que le jugement déféré ne peut qu'être confirmé en ce qu'il a exclu tout dol émanant de [S] [M] ayant déterminé le consentement du cessionnaire de ses parts sociales dans la société Cap Expert.
3) Sur la demande subsidiaire de la société Gefirex tendant au paiement de dommages et intérêts :
84. La cour ne peut que rappeler que si la société Gefirex se prévaut d'un manquement de [S] [M] à ses obligations en matière d'information précontractuelle et de loyauté, la société Gefirex, par l'intermédiaire de [K] [B], a procédé à un audit juridique et comptable de la société Cap Expert préalablement à la levée de l'option, alors qu'il a été indiqué plus haut que les griefs résultant de man'uvres dolosives, voire de réticences de [S] [M], ne sont pas fondés. La cour note que de nombreux échanges sont intervenus entre les parties avant la conclusion de l'acte de cession de parts, afin de clarifier divers points, alors que les contentieux concernant certains clients de la société Cap Expert ne sont apparus qu'après la cession, sans qu'il soit établi que [S] [M] en ait eu ainsi connaissance avant la cession, et encore moins qu'il les ait occultés.
85. En outre, si la société Gefirex se prévaut d'une perte de chance de contracter à des conditions plus avantageuses, elle n'établit pas que la société Cap Expert ait subi des condamnations d'un montant tel que le cessionnaire, s'il les avait connu lors de la cession, n'aurait pas alors contracté, ou à d'autres conditions. Il a en effet été précisé plus haut que le redressement effectué par l'Urssaf a eu peu de conséquence au regard du prix de cession des parts de [S] [M], alors que pour la société Gazton Editions, la condamnation de la société Cap Expert a également été minime, et que pour la société La Douce, aucun préjudice n'a été subi, alors que concernant la société Electricité des Costières, la preuve d'un préjudice n'est pas rapportée. Il n'est pas plus justifié d'un préjudice subi par la société Gefirex à l'occasion des procédures civiles ou pénales intentées non contre elle, mais contre la société Cap Expert.
86. Par conséquence, le jugement entrepris ne peut qu'être confirmé en ce qu'il a retenu que [S] [M] n'a pas failli à son obligation précontractuelle. La cour ajoute qu'aucun élément ne permet de conclure qu'il ait manqué à son devoir de loyauté lors de la préparation de la cession de ses parts sociales.
87. Le jugement déféré sera ainsi confirmé en ce qu'il a débouté les appelantes de leur demande de nullité de l'acte de cession et des contrats accessoires, en ce qu'il a constaté que [S] [M] n'a pas failli à son obligation précontractuelle d'information, et en ce qu'il a débouté les appelantes de leur demande de condamnation en réparation du préjudice subi.
4) Concernant le paiement du solde du prix de la cession au profit de [S] [M] :
88. Selon la convention de cession intervenue entre [S] [M] et la société Gefirex le 7 juillet 2014, au prix de 982.512 euros, la somme de 89.521 euros est conservée par la société Gefirex au titre de la garantie d'actif et de passif. La convention concernant cette garantie a été conclue le 7 juillet 2014, sur 71 pages, et il est notamment précisé que la société n'a pas de dette, ni d'obligation qui ne figurent pas dans les documents comptables, et que les provisions pour dépréciation, notamment pour risques et charges, ont été effectivement constituées conformément aux documents comptables établis au 31 décembre 2013. [S] [M] déclare qu'aucun acte susceptible d'engager la responsabilité pénale de la société n'a été commis par ses dirigeants, qu'il n'existe aucune procédure concernant les dirigeants eux-mêmes de nature à engager la société et qu'elle n'est impliquée dans aucun litige, action judiciaire ou administrative, et qu'aucune action de ce type n'est susceptible d'être engagée contre la société. Le garant s'engage à indemniser le bénéficiaire de tout perte, dommage ou préjudice, dans la limite de 80.000 euros, en cas d'inexactitude des déclarations ou omission d'information significative. Il
garantit également, dans la même limite, tout passif ou engagement non comptabilisé ou insuffisamment provisionné. La garantie ne peut être actionnée que si le montant cumulé des réclamations du bénéficiaire excède 10.000 euros. La garantie expire le 31 décembre 2017. En couverture, le garant consent une retenue sur le prix de la vente de 80.000 euros. Figurent en annexe les documents annuels arrêtés au 31 décembre 2013, ainsi que les soldes intermédiaires de gestion et la liste des clients.
89. La cour ne peut constater que cette garantie a expiré avant l'assignation délivrée par la société Gefirex le 17 septembre 2018 afin de voir annuler l'acte de cession des parts et des actes connexes. Il en résulte que le jugement déféré ne peut qu'être confirmé en ce qu'il a condamné la société Gefirex au paiement du solde du prix de cession de 80.000 euros. Au regard de ce qui a été développé plus haut, la société Gefirex ne peut invoquer des faits imputables à [S] [M] la dispensant du paiement du solde du prix de la cession.
5) Concernant la convention de présentation :
90. Selon le contrat d'assistance au développement signé le 7 décembre 2015 entre [S] [M] et la société Cap Expert, [S] [M] devient consultant, et sera rémunéré à hauteur de 90 % du budget d'honoraires récurrents pour chaque entreprise nouvelle qu'il aura présentée et qui aura contracté. Le contrat prend effet à partir du 7 juillet 2014, et ne fixe aucun terme ni précision sur une résiliation.
91. Ainsi que retenu par le tribunal de commerce, si [S] [M] fournit des attestations émanant d'entreprises qui auraient contracté avec la société Cap Expert après la cession, elles sont insuffisantes pour établir les honoraires récurrents ainsi apportés, faute d'élément chiffré. Si l'intimé produit deux tableaux concernant la liste des clients ainsi apportés, il s'agit de pièces établies unilatéralement, sans aucun élément probant, et ainsi insusceptibles d'établir la preuve des honoraires récurrents encaissés par la société Cap Expert. Peu importe à cet égard que devant le tribunal, il a été acté au plumitif de l'audience que le contrat d'accompagnement a été exécuté.
92. Le jugement déféré sera ainsi confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de [S] [M] visant le paiement de 270.444 euros au titre de cette convention.
*****
93. Le tribunal de commerce a fait une juste appréciation des articles 696 et 700 du code de procédure civile, et le jugement déféré sera ainsi confirmé en toutes ses dispositions. Les appelantes et l'intimé succombant en leur appel principal et en leur appel incident, il est équitable de laisser à chacune des parties la charge des frais engagés devant la cour tant sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, qu'au titre des dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Vu les articles 24, 564 du code de procédure civile, les articles 1116, 1240, 1379 du code civil, l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, les articles du code de commerce ;
Déclare recevable la demande de [S] [M] visant à écarter des débats les pièces n° 9, 11 et 21 produites par la société Cap Expert et la société Gefirex ;
Déclare recevable la demande de [S] [M] visant à canceller les extraits des conclusions d'appelantes visés dans le dispositif de ses conclusions d'intimé ;
Ecarte des débats les pièces n° 9, 11 et 21 produites par la société Cap Expert et la société Gefirex ;
Déboute [S] [M] de sa demande visant à canceller les extraits des conclusions d'appelantes visés dans le dispositif de ses conclusions d'intimé ;
Déboute [S] [M] de sa demande de paiement de la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral causé par ces propos ;
Confirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour;
y ajoutant ;
Laisse à chacune des parties la charge des frais engagés devant la cour tant sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, qu'au titre des dépens d'appel;
SIGNÉ par Mme FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.