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Décisions

CA Paris, Pôle 1 - ch. 12, 5 juillet 2024, n° 24/00383

PARIS

Ordonnance

Autre

CA Paris n° 24/00383

5 juillet 2024

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 12

SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

MESURE D'ISOLEMENT ET DE CONTENTION

ORDONNANCE DU 05 JUILLET 2024

(n°383, 2 pages)

N° du répertoire général : N° RG 24/00383 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJVMC

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 04 Juillet 2024 - Tribunal Judiciaire d'EVRY (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 24/01945

COMPOSITION

Elise THEVENIN-SCOTT, conseiller à la cour d'appel, agissant sur délégation du Premier Président de la cour d'appel de Paris,

assisté de Roxane AUBIN, greffier lors des débats et du prononcé de la décision

APPELANT

M. [E] [G]

demeurant [Adresse 2]

Informé le 5 juillet 2024 à 10h58, de la possibilité de faire valoir ses observations, en application des dispositions de l'article R3211-38 du code de la santé publique et son conseil Me Océane GUENIOT, avocat choisi au barreau de l'Essonne, informé le 5 juillet 2024 à 10h58, et ayant transmis son avis au greffe par courriel le 5 juillet 2024 à 12h29 ;

INTIMÉ

M. LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER [3]

demeurant [Adresse 1]

Informé le 5 juillet 2024 à 10h58, de la possibilité de faire valoir ses observations, en application des dispositions de l'article R3211-38 du code de la santé publique ;

LE MINISTERE PUBLIC

Représenté par Mme Brigitte AUGIER DE MOUSSAC, avocat général,

Informé le 5 juillet 2024 à 10h58, de la possibilité de faire connaître son avis, en application des dispositions de l'article 431al2 du code de procédure civile, et ayant transmis son avis au greffe par courriel le 5 juillet 2024 à 11h30 ;

DÉCISION

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Monsieur [E] [G] a été admis en hospitalisation sous contrainte le27 juin 2024.

Il a fait l'objet d'une mesure d'isolement à compter du 27 juin 2024 à 10h00, mesure maintenue par ordonnance du juge des libertés et de la détention en date du 29 juin 2024 à 16h28.

Monsieur [E] [G] demande à la cour d'infirmer la décision rendue par le juge des libertés et de la détention d'EVRY le 4 juillet 2024 à 14h00 en ce qu'elle a ordonné la poursuite de la mesure d'isolement dont il fait l'objet.

A l'appui de cette infirmation, il fait valoir que :

- La preuve de délégation de signature du signataire de la requête saisissant le juge des libertés et de la détention n'est pas rapportée

- Il n'existe aucun élément sur la mesure d'hospitalisation sous contrainte

- L'information au patient et à ses proches n'a pas eu lieu

- La datation et l'horodatage des certificats médicaux est erronée

- La mesure n'est pas motivée suffisamment et disproportionnée

- Le juge des libertés et de la détention a été saisi au-delà du délai prescrit par le code de la santé publique (72ème heure)

Le ministère public a indiqué solliciter la confirmation de la décision déférée au regard des éléments médicaux produits et de la preuve de l'information donnée au patient.

MOTIVATION

Sur le contrôle du juge des libertés et de la détention

Il ressort de l'article L.3222-5-1 du code de la santé publique que :

" I.- L'isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d'un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. Leur mise en 'uvre doit faire l'objet d'une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l'établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical.

La mesure d'isolement est prise pour une durée maximale de douze heures. Si l'état de santé du patient le nécessite, elle peut être renouvelée, dans les conditions et selon les modalités prévues au premier alinéa du présent I, dans la limite d'une durée totale de quarante-huit heures, et fait l'objet de deux évaluations par vingt-quatre heures.

La mesure de contention est prise dans le cadre d'une mesure d'isolement pour une durée maximale de six heures.

Si l'état de santé du patient le nécessite, elle peut être renouvelée, dans les conditions et selon les modalités prévues au même premier alinéa, dans la limite d'une durée totale de vingt-quatre heures, et fait l'objet de deux évaluations par douze heures.

II. - A titre exceptionnel, le médecin peut renouveler, au-delà des durées totales prévues au I, les mesures d'isolement et de contention, dans le respect des conditions prévues au même I. Le directeur de l'établissement informe sans délai le juge des libertés et de la détention du renouvellement de ces mesures. Le juge des libertés et de la détention peut se saisir d'office pour y mettre fin. Le médecin informe du renouvellement de ces mesures au moins un membre de la famille du patient, en priorité son conjoint, le partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité ou son concubin, ou une personne susceptible d'agir dans son intérêt dès lors qu'une telle personne est identifiée, dans le respect de la volonté du patient et du secret médical.

Le directeur de l'établissement saisit le juge des libertés et de la détention avant l'expiration de la 72ème heure d'isolement ou de la 48ème heure de contention, si l'état de santé du patient rend nécessaire le renouvellement de la mesure au-delà de ces durées.

Le juge des libertés et de la détention statue dans un délai de 24 heures à compter du terme des durées prévues au deuxième alinéa du présent II.

Si les conditions prévues au I ne sont plus réunies, il ordonne la mainlevée de la mesure. Dans ce cas, aucune nouvelle mesure ne peut être prise avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures à compter de la mainlevée de la mesure, sauf survenance d'éléments nouveaux dans la situation du patient qui rendent impossibles d'autres modalités de prise en charge permettant d'assurer sa sécurité ou celle d'autrui. Le directeur de l'établissement informe sans délai le juge des libertés et de la détention, qui peut se saisir d'office pour mettre fin à la nouvelle mesure.

Si les conditions prévues au même I sont toujours réunies, le juge des libertés et de la détention autorise le maintien de la mesure d'isolement ou de contention. Dans ce cas, le médecin peut la renouveler dans les conditions prévues audit I et aux deux premiers alinéas du présent II. Toutefois, si le renouvellement d'une mesure d'isolement est encore nécessaire après deux décisions de maintien prises par le juge des libertés et de la détention, celui-ci est saisi au moins vingt-quatre heures avant l'expiration d'un délai de sept jours à compter de sa précédente décision et le médecin informe du renouvellement de ces mesures au moins un membre de la famille du patient, en priorité son conjoint, le partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité ou son concubin, ou une personne susceptible d'agir dans son intérêt dès lors qu'une telle personne est identifiée, dans le respect de la volonté du patient et du secret médical. Le juge des libertés et de la détention statue avant l'expiration de ce délai de sept jours. Le cas échéant, il est à nouveau saisi au moins vingt-quatre heures avant l'expiration de chaque nouveau délai de sept jours et statue dans les mêmes conditions. Le médecin réitère l'information susmentionnée lors de chaque saisine du juge des libertés et de la détention.

Pour l'application des deux premiers alinéas du présent II, lorsqu'une mesure d'isolement ou de contention est prise moins de quarante-huit heures après qu'une précédente mesure d'isolement ou de contention a pris fin, sa durée s'ajoute à celle des mesures d'isolement ou de contention qui la précèdent.

Les mêmes deux premiers alinéas s'appliquent lorsque le médecin prend plusieurs mesures dont la durée cumulée sur une période de quinze jours atteint les durées prévues auxdits deux premiers alinéas.

Les mesures d'isolement et de contention peuvent également faire l'objet d'un contrôle par le juge des libertés et de la détention en application du IV de l'article L. 3211-12-1.

Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent II.

III.- Un registre est tenu dans chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie et désigné par le directeur général de l'agence régionale de santé pour assurer des soins psychiatriques sans consentement en application du I de l'article L. 3222-1. Pour chaque mesure d'isolement ou de contention, ce registre mentionne le nom du psychiatre ayant décidé cette mesure, un identifiant du patient concerné ainsi que son âge, son mode d'hospitalisation, la date et l'heure de début de la mesure, sa durée et le nom des professionnels de santé l'ayant surveillée. Le registre, établi sous forme numérique, doit être présenté, sur leur demande, à la commission départementale des soins psychiatriques, au Contrôleur général des lieux de privation de liberté ou à ses délégués et aux parlementaires.

L'établissement établit annuellement un rapport rendant compte des pratiques d'admission en chambre d'isolement et de contention, la politique définie pour limiter le recours à ces pratiques et l'évaluation de sa mise en 'uvre. Ce rapport est transmis pour avis à la commission des usagers prévue à l'article L. 1112-3 et au conseil de surveillance prévu à l'article L. 6143-1. "

En l'espèce, l'appel est recevable.

Sur la saisine du juge des libertés et de la détention en seconde prolongation, le point de départ du calcul des 72h est la décision du juge des libertés et de la détention ordonnant ladite prolongation. Celle-ci est intervenue le 29 juin 2024 à 16h28, de sorte que le juge des libertés et de la détention devait donc être saisi au plus tard le 2 juillet 2024 à 16h28 et statuer avant le 3 juillet 2024 à 16h28. Or, le juge des libertés et de la détention a été saisi le 3 juillet 2024 à 15h08 et l'ordonnance déférée a été rendue le 4 juillet 2024 à 14h00. Ces deux événements sont donc intervenus tardivement, causant un grief à Monsieur [E] [G] dès lors que ce dernier a été privé d'un contrôle du juge judiciaire dans les délais prévus par l'article L.3222-5-1 du code de la santé publique.

Dans ces conditions, il convient d'infirmer la décision ayant autorisé la prolongation de la mesure d'isolement et d'en ordonner la levée, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens soulevés.

PAR CES MOTIFS

Le magistrat délégataire du premier président de la cour d'appel, statuant publiquement, après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire,

DÉCLARE recevable l'appel de Monsieur [E] [G]

INFIRME l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de EVRY en date du 4 juillet 2024.

ORDONNE en conséquence la main levée immédiate de la mesure d'isolement dont fait l'objet Monsieur [E] [G].

LAISSE les dépens la charge de l'État.

Ainsi fait, jugé le 05 JUILLET 2024 à 14h15.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGATAIRE

Une copie certifiée conforme notifiée le 05 juillet 2024 par fax / courriel à :

X patient à l'hôpital

ou/et ' par LRAR à son domicile

X avocat du patient

X directeur de l'hôpital

' tiers par LS

' préfet de police

' avocat du préfet

' tuteur / curateur par LRAR

X Parquet près la cour d'appel de Paris