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Décisions

CA Chambéry, 2e ch., 11 juillet 2024, n° 21/00795

CHAMBÉRY

Autre

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Parcours (SAS), Sci Parcours (SCI)

Défendeur :

Sci Fonciann (SCI), Sa Techni Fram (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Fouchard

Conseillers :

M. Therolle, M. Gauvin

Avocats :

Me Seaumaire, Me Fillard, Me Morel Vulliez

TJ [Localité 5], du 11 mars 2021, n° 16/…

11 mars 2021

EXPOSÉ DU LITIGE

La SAS Parcours a pour activité principale la location longue durée de véhicules de tourisme et utilitaires, et le négoce de véhicules d'occasion. Pour les besoins de son activité elle a recherché un terrain en Haute-Savoie pour y implanter une nouvelle agence. Elle est alors entrée en négociations avec la SCI Fonciann, propriétaire d'un terrain à Cran-Gevrier.

Une promesse unilatérale de vente a été signée entre les parties le 17 octobre 2014, mentionnant la présence d'une cuve d'hydrocarbure enterrée, encore utilisée, la société venderesse s'engageant à procéder à son retrait.

L'acte authentique de vente est intervenu le 2 février 2015 selon les modalités suivantes :

- la vente a été consentie par la SCI Fonciann à la société BpiFrance financement, crédit-bailleur, que la SAS Parcours a substituée dans ses droits,

- la SAS Parcours est intervenue à l'acte,

- la SCI Parcours Annecy est elle-même intervenue en qualité de crédit-preneur.

Le contrat précise qu'il a été procédé au dégazage, à la dépose et à l'évacuation des cuves à fioul, ainsi qu'au remblaiement des trous, par la société Techni Fram et par l'entreprise [H].

En septembre 2015, à l'occasion de la réalisation des travaux de construction de l'agence, la SCI Parcours Annecy a constaté la présence d'hydrocarbures dans le sol du terrain vendu. La SAS Parcours a tenté d'obtenir la prise en charge par le vendeur, la SCI Fonciann, des frais exposés pour la dépollution du sol, en vain, celle-ci soutenant avoir entièrement rempli les obligations auxquelles elle était tenue aux termes de l'acte de vente.

C'est dans ces conditions que, par acte délivré le 24 février 2016, la SAS Parcours a fait assigner la SCI Fonciann devant le tribunal de grande instance d'Annecy pour obtenir sa condamnation au paiement des sommes de :

- 21 347,64 euros au titre du coût des travaux de dépollution,

- 38 742,68 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice subi du fait de la suspension des travaux pendant un mois,

outre une indemnité procédurale de 6 000 euros et les dépens.

Par actes des 4 et 7 juillet 2016, la SCI Fonciann a fait appeler en cause les sociétés Techni Fram et [H] aux fins de la garantir de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre. L'appel en cause a été joint à l'instance principale le 16 juin 2017.

Enfin, le 7 décembre 2016, la SCI Parcours Annecy est intervenue volontairement à l'instance aux côtés de la SAS Parcours.

La SCI Fonciann a contesté la faute contractuelle qui lui est reprochée, estimant que ses obligations se limitaient au retrait des cuves à fioul dans les règles de l'art, rien ne permettant d'établir que la pollution constatée proviendrait de cette opération, et aucune obligation de dépollution de l'ensemble du site ne pesant sur elle aux termes du contrat de vente.

La société Techni Fram et M. [H] ont également contesté toute responsabilité dans la pollution constatée.

Par jugement contradictoire rendu le 11 mars 2021, le tribunal judiciaire d'Annecy a :

reçu l'intervention volontaire de la SCI Parcours Annecy,

débouté les sociétés Parcours et Parcours [Localité 5] de l'ensemble de leurs demandes,

condamné in solidum les sociétés Parcours et Parcours Annecy à payer à la SCI Fonciann la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la SCI Fonciann à payer aux société Techni Fram et [H] la somme de 1 000 euros chacune, en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné in solidum les sociétés Parcours et Parcours [Localité 5] aux dépens.

Par déclaration 12 avril 2021, la SAS Parcours et la SCI Parcours Annecy ont interjeté appel de ce jugement en intimant la SCI Fonciann.

Par actes délivrés les 28 septembre et 5 octobre 2021, la SCI Fonciann a fait signifier à la société Techni Fram (acte délivré à une personne habilitée) et à M. [J] [H] (acte délivré à sa personne), une assignation portant appel provoqué.

Par conclusions d'appelantes n° 2 notifiées le 9 mars 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la SAS Parcours et la SCI Parcours Annecy demandent en dernier lieu à la cour de :

Vu les articles 1134 (ancien), et 1147 (ancien) du code civil,

Vu les articles 1603 et suivants du code civil,

infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté les sociétés Parcours et Parcours [Localité 5] de l'ensemble de leurs demandes,

infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné les sociétés Parcours et Parcours Annecy à payer à la SCI Fonciann la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Et, statuant de nouveau :

condamner la SCI Fonciann à verser à la société Parcours Annecy la somme de 21 347,64 euros au titre du montant des travaux de dépollution réalisés par la société Blanck qu'elle a dû avancer à ses frais,

condamner la SCI Fonciann à verser à la société Parcours Annecy la somme de 38 742,68 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice subi du fait de la suspension des travaux pendant un mois,

Et, en tout état de cause :

débouter la SCI Fonciann de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions telles que dirigées à l'encontre des concluantes,

condamner la SCI Fonciann à verser la somme de 3 000 euros à Parcours et la somme de 7 000 euros à Parcours Annecy, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la SCI Fonciann aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées les 21 septembre 2021 (aux appelants principaux) et 26 octobre 2021 (aux intimés sur appel provoqué), auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la SCI Fonciann demande en dernier lieu à la cour de :

Vu les dispositions des anciens articles 1134 et 1147 du code civil,

Vu le droit positif,

A titre principal,

débouter la SAS Parcours et la SCI Parcours Annecy de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

confirmer la décision entreprise en ce qu'elle rejeté l'ensemble des demandes de la SAS Parcours et la SCI Parcours Annecy, et condamné ces dernières in solidum à payer à la SCI Fonciann la somme de 3 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

A titre subsidiaire,

dire et juger que la SCI Fonciann sera relevée et garantie par la société Techni Fram et l'entreprise [H] de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,

débouter la SOCIÉTÉ Techni Fram et l'entreprise [H] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

En tout état de cause,

réformer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la SCI Fonciann à payer aux sociétés Techni Fram et [H] la somme de 1000 euros, chacune, en application de l'article 700 du code de procédure civile,

débouter la SAS Parcours, la SCI Parcours Annecy, la SOCIÉTÉ Techni Fram et l'entreprise [H] du surplus de leurs demandes, fins et prétentions,

condamner in solidum la SAS Parcours et la SCI Parcours Annecy, à payer à la SCI Fonciann la somme de 6 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, laquelle somme venant s'ajouter à la somme de 3 000,00 euros prononcée par le jugement du 11 mars 2021,

condamner les mêmes sous la même solidarité aux entiers dépens sur le fondement l'article 699 du code de procédure civile, dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP Bollonjeon Arnaud Bollonjeon, avocats associés, au barreau de Chambéry.

Par conclusions notifiées le 23 décembre 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société Techni Fram demande en dernier lieu à la cour de :

A titre principal :

constater l'absence de manquement de la société Fonciann à son obligation de délivrance conforme à l'égard de la société Parcours et Parcours [Localité 5],

en conséquence, confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, en particulier en ce qu'il a débouté les sociétés Parcours et Parcours [Localité 5] de leurs demandes à l'encontre de la société Fonciann,

rejeter toute demande à l'encontre de la société Techni Fram,

Subsidiairement :

constater l'absence de manquement à l'une de ses obligations contractuelles de la Société Techni Fram,

en toute hypothèse, constater l'absence de preuve d'un lien de causalité entre la pollution litigieuse et le périmètre contractuel de la société Techni Fram,

en conséquence, débouter la société Fonciann de son appel en garantie à l'encontre de la société Techni Fram,

mettre hors de cause la société Techni Fram,

condamner la société Fonciann à verser à la Société Techni Fram la somme de 5 000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la société Fonciann aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Aline Perrin de la SARLU Aline Perrin avocat, sous le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 23 décembre 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, M. [J] [H] demande en dernier lieu à la cour de :

Vu les articles 1134 et 1147 du code civil,

dire et juger mal fondé l'appel provoqué par la SCI Fonciann à l'égard de M. [J] [H],

confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

dire et juger que la preuve d'une faute qui aurait été commise par l'entreprise [H] n'est pas rapportée, pas plus qu'un lien de causalité entre son intervention et la pollution des sols alléguée,

débouter la SCI Fonciann de sa demande d'être relevée et garantie par l'entreprise [H] de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,

condamner la société Fonciann à payer à l'entreprise [J] [H] une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la SCI Fonciann aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Michel Fillard, avocat, sur son affirmation de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'affaire a été clôturée à la date du 6 février 2023 et renvoyée en dernier lieu à l'audience du 26 mars 2024, à laquelle elle a été retenue et mise en délibéré à la date du 13 juin 2024, prorogé à ce jour.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour observe que la recevabilité de l'action engagée par les sociétés Parcours et Parcours [Localité 5] n'est plus discutée en appel. Il n'y a donc pas lieu d'examiner ce point.

Sur la délivrance conforme et la responsabilité du vendeur

Les sociétés Parcours et Parcours Annecy soutiennent que la SCI Fonciann s'était engagée à livrer un terrain dépollué et qu'elle a ainsi manqué à son obligation de délivrance conforme. Elles soutiennent également que la pollution constatée résulte nécessairement d'un retrait des cuves non conforme aux règles de l'art, en soulignant que des tuyaux n'avaient pas été retirés.

La SCI Fonciann soutient pour sa part qu'elle a rempli l'intégralité de ses obligations contractuelles, limitées au retrait des deux cuves d'hydrocarbure, lequel a été réalisé par deux entreprises spécialisées, sans qu'aucun lien ne soit établi entre ces travaux et la pollution constatée. Elle soutient également qu'elle ne s'est pas engagée à livrer un terrain dépollué, mais seulement un terrain débarrassé des deux cuves qui s'y trouvaient.

Sur ce, la cour,

Les conventions sur lesquelles l'action est fondée sont antérieures à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, de sorte que les textes du code civil appliqués à l'espèce sont ceux en vigueur avant le 1er octobre 2016.

En application de l'article 1134 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Selon l'article 1147 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

L'article 1603 du même code dispose que le vendeur a deux obligations principales, celle de délivrer et garantir la chose qu'il vend.

Selon l'article 1604, la délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur.

Ainsi, le vendeur est tenu de délivrer à l'acquéreur une chose conforme à ce qui a été convenu. A défaut, il engage sa responsabilité, à charge pour l'acquéreur de rapporter la preuve de la non conformité alléguée.

En l'espèce, il est constant que, en septembre 2015, lors de l'exécution des travaux d'affouillement pour la réalisation de la construction projetée par les sociétés Parcours, il a été découvert des hydrocarbures dans le sol.

Il n'est pas prétendu que le site aurait fait l'objet, antérieurement à la vente, de l'exploitation d'une installation soumise à autorisation ou à enregistrement au titre des dispositions du code de l'environnement, de sorte que les obligations spéciales relatives à la dépollution des sols préalablement à la vente prévues par ce code ne sont pas applicables à la vente litigieuse. La promesse de vente du 17 octobre 2014 et l'acte de vente du 2 février 2015 révèlent à cet égard que la consultation des bases de données environnementales a été négative pour le terrain objet de la vente. Aucun élément ne permet de retenir qu'une telle installation aurait pu être exploitée sur ce terrain.

Il convient donc de s'en tenir aux termes du contrat de vente liant les parties pour apprécier les obligations du vendeur et la détermination des caractéristiques de la chose vendue.

La promesse unilatérale de vente du 17 octobre 2014 (pièce n° 4 des appelantes), prévoit au titre des conditions suspensives (page 9) :

« La présente convention est consentie sous la conditions suspensive à l'initiative du bénéficiaire, au plus tard au 10 janvier 2015 que la nature du sous-sol [...] ne révèle pas de pollution particulière nécessitant des travaux spécifiques compte tenu des normes et de l'utilisation envisagées ».

La réitération de l'acte ayant eu lieu, la condition suspensive est réputée avoir été réalisée, ou que l'acquéreur y a renoncé. Cette clause ne peut donc être considérée comme créant, à la charge du vendeur, une obligation de délivrer un terrain exempt de toute pollution.

La promesse de vente prévoit encore, après rappel des dispositions des articles L. 514-20 et L. 125-7 du code de l'environnement, que (page 16) :

« Etant ici précisé par le promettant :

- qu'il existe à l'entrée du tènement foncier présentement venu une cuve d'hydrocarbure enterrée

- et que cette cuve est actuellement utilisée.

Le promettant s'oblige à faire enlever à ses frais par toute entreprise de son choix et dans les règles de l'art ladite cuve au plus tard dans les DEUX (2) MOIS de la signature de l'acte authentique réitérant les présentes.

Il est convenu entre les parties que faute par le promettant d'avoir réalisé les travaux énoncés au précédent paragraphe dans les délais sus-énoncés le promettant s'oblige à régler au bénéficiaire une indemnité forfaitaire de CENT CINQUANTE EUROS (150,00 €) par jour de retard, à titre de clause pénale [...]

La méthode retenue au titre de l'intervention ne devra engendrer aucune pollution du sol et sous-sol et le promettant s'oblige à produire au bénéficiaire, dès réalisation des travaux, une attestation ou facture de l'entreprise ayant réalisé les travaux ».

L'acte authentique de vente du 2 février 2015 (pièce n° 5 des appelantes) contient (page 11) une clause relative à l'état du bien, aux termes de laquelle :

« L'acquéreur prend le bien dans son état au jour de l'entrée en jouissance, sans recours contre le vendeur pour quelque cause que ce soit et notamment :

' du bon ou mauvais état du sol, du sous-sol, des fouilles ou excavations, des ouvrages en infrastructure et en superstructure, des constructions ou de leurs éléments d'équipement, ou en raison de vices apparents ou cachés dont il pourrait être affecté, demandes termites et autres insectes xylophages dont les ouvrages pourraient être affectés ou du non respect des normes d'hygiène, sécurité, environnement par lesdits ouvrages ou construction ou de la pollution du sol ou sous-sol, de présente de réseaux, de fuites, collecteur d'égout, présence de nappes, voisinage des ouvrages de l'EDF ou autres [...]».

Il est précisé en page 20 :

« Le vendeur déclare, à sa connaissance :

- qu'il existait à l'entrée du tènement foncier présentement vendu une cuve d'hydrocarbure enterrée et que cette cuve était utilisée au jour de la promesse de vente régularisée par les parties le 17 octobre 2014.

Aux termes de deux interventions réalisées préalablement aux présentes de la société Techni Fram [...], et de la société [H] [...] il a été procédé au dégazage, à la dépose et à l'évacuation des cuves à fioul, et enfin le remblaiement des trous avec matériaux terreux, et ainsi que l'intervenant a pu le constater sur le site postérieurement à la réalisation desdits travaux.

Copie des factures correspondantes établies par lesdites sociétés demeureront annexées aux présentes après mention [...]

L'acquéreur déclare se satisfaire des déclarations et diligences du vendeur et en conséquence renoncer à se prévaloir des dispositions visées dans le troisième alinéa de l'article L. 514-20 du code de l'environnement l'autorisant, à défaut de ces informations, à demander la résolution de la vente, ou la restitution d'une partie du prix, ou encore la remise en état du site aux frais du vendeur.

L'acquéreur se reconnaît parfaitement informé des dispositions légales en matières environnementales et s'y conformer ».

Il résulte donc de ces stipulations que le vendeur s'était engagé à procéder à l'enlèvement, dans les règles de l'art, de la cuve d'hydrocarbure enterrée présente sur le site (étant précisé qu'il est acquis en définitive que deux cuves étaient présentes et devaient être enlevées), sans provoquer de pollution.

Ainsi, aucune obligation de dépollution générale du sol, autre que celle concernant le retrait des cuves, ne pèse sur le vendeur, et c'est à juste titre que le tribunal a retenu que ni l'absence de pollution du sol ou du sous-sol du terrain vendu, ni sa dépollution, n'ont été considérées par les parties comme une condition déterminante de la vente ou comme une caractéristique essentielle du bien vendu.

Il appartient donc aux appelantes de rapporter la preuve que les produits hydrocarbures découverts lors des travaux réalisés en septembre 2015 proviennent effectivement du retrait des deux cuves auquel la SCI Fonciann a fait procéder en janvier 2015, seule circonstance de nature à engager sa responsabilité en exécution du contrat de vente.

Les deux procès-verbaux de constat d'huissier produits par les appelantes (pièces n° 7 et 10), en date des 10 septembre et 5 octobre 2015 mettent en évidence que les hydrocarbures résurgent du sous-sol qui apparaît en être imbibé, ce qui induit que leur présence est ancienne. L'huissier note ainsi (pièce n° 10) :

« Au fur et à mesure du creusement du fond du trou et de l'évacuation de cette terre et sable détrempés, je constate la résurgence continue et importante de liquides au fond du trou, accompagnés d'une mousse de couleur jaune et verte en dépôt au dessus de ces liquides ».

Il note également que :

« Au fur et à mesure du creusement du fond du trou par la pelle mécanique, je constate que sont mis à jour dans ce trou plusieurs tuyaux et canalisations ayant auparavant équipé la cuve à fioul qui se trouvait à cet emplacement ».

Il n'est pas démontré par les appelantes que les hydrocarbures présents proviendraient de ces canalisations, dont on ignore si elles étaient effectivement raccordées aux cuves.

Il n'est pas plus prouvé que les travaux d'enlèvement des cuves auraient nécessairement dû s'accompagner de la dépose de ces tuyaux, ni qu'ils auraient pu contenir des hydrocarbures après vidange et dégazage des cuves. Il convient de noter sur ce point que la facture émise par l'entreprise [H] le 26 janvier 2015 (pièce n° 4 de la SCI Fonciann) précise qu'elle concerne notamment des travaux de « dépose et évacuation de 2 cuves à fioul de 10 000 à 20 000 litres environ ainsi que des tuyaux d'alimentations » ce qui signifie que des tuyaux ont bien été retirés, sauf à établir que cette opération n'aurait pas été faite, ce qui ne l'est pas.

Cette opération de retrait va d'ailleurs de pair avec l'intervention réalisée le 19 janvier 2015 par la société Techni Fram portant sur « dégazage nettoyage cuves et conduites hydrocarbures fioul et gasoil », le devis précisant que les travaux comprennent le « nettoyage, dégazage des conduites », mais aussi la « dépose et évacuation de la pompe à gazoil » (pièces n° 1 et 2 de la SCI Fonciann).

Par ailleurs, concernant les travaux réalisés par la société Techni Fram et M. [H], dont les sociétés Parcours ont pu vérifier la réalisation effective avant la signature de l'acte authentique de vente ainsi que cela résulte des mentions de l'acte précitées, aucune des pièces produites ne permet d'établir qu'ils n'auraient pas été faits dans les règles de l'art, ni qu'ils seraient à l'origine des hydrocarbures retrouvés dans le sol. En effet, il est tout à fait possible que ces produits aient été présents dans le sol dès avant les travaux de retrait des cuves, l'hypothèse d'une pollution de cette ampleur, provoquée entre l'acte de vente le 2 février 2015 et le démarrage des travaux en septembre 2015 apparaissant au demeurant peu plausible compte tenu de la profondeur à laquelle ils sont apparus.

L'entreprise [H] a d'ailleurs fourni une attestation le 29 septembre 2015 (pièce n° 5 de la SCI Fonciann), aux termes de laquelle elle précise que, lors de l'enlèvement des cuves, celles-ci étaient vides et dégazées, et qu'aucun fluide n'était visible après l'enlèvement. Les procès-verbaux de constat étant postérieurs de huit mois aux opérations de retrait, le lien de la pollution avec la réalisation de ces travaux n'est pas établi.

Il sera ajouté que, les appelantes ayant souhaité poursuivre les travaux de construction, aucun avis d'un technicien sur la nature de la pollution, son ancienneté ou sa provenance n'a été sollicité, de sorte que les seuls constats d'huissier produits aux débats ne sont pas de nature à établir un quelconque lien entre les opérations de retrait des cuves et la pollution constatée.

Il résulte de ce qui précède que les sociétés Parcours et Parcours [Localité 5] ne rapportent pas la preuve qui leur incombe d'un manquement de la société Fonciann à ses obligations contractuelles.

Le jugement déféré sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les demandes accessoires

Les sociétés Parcours et Parcours [Localité 5], qui succombent en leur appel, en supporteront les entiers dépens, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit des avocats de la cause.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SCI Fonciann la totalité des frais exposés en appel, et non compris dans les dépens. Il convient en conséquence de condamner in solidum les sociétés Parcours et Parcours [Localité 5] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La même équité commande de condamner la SCI Fonciann à payer à la société Techni Fram et M. [H] la somme de 1 500 euros chacune pour les frais exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Annecy le 11 mars 2021,

Y ajoutant,

Condamne in solidum la SAS Parcours et la SCI Parcours Annecy aux entiers dépens de l'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit des avocats de la cause,

Condamne in solidum la SAS Parcours et la SCI Parcours Annecy à payer à la SCI Fonciann la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais exposés en appel,

Condamne la SCI Fonciann à payer à la société Techni Fram et à M. [H] la somme de 1 500 euros chacune (soit 3 000 euros au total), sur le même fondement.

Ainsi prononcé publiquement le 11 juillet 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.