CA Amiens, ch. économique, 11 juillet 2024, n° 23/02401
AMIENS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Cv Ecoenergieconfort (SAS)
Défendeur :
Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires de Dommages, Evolution (SELARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Grevin
Conseillers :
Mme Dubaele, Mme Dorsemaine
Avocats :
Me Mangel, Me Perdu, Me Latremouille
DECISION
Par un jugement en date du 30 juin 2022, publié au Bodacc le 12 juillet 2022, le tribunal de commerce de Soissons a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société par actions simplifiées à capital variable ECONERGIECONFORT.
Le 26 août 2022, le fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (ci-après " Fonds de garantie ") représenté par la SAS Fradin [I] et associés, huissiers de justice, a déclaré une créance de 211 946,83 euros à titre chirographaire entre les mains de la S.E.L.A.R.L EVOLUTION, ès-qualités de mandataire judiciaire de la S.A.S CV ECONERGIECONFORT, en vertu d'une ordonnance exécutoire rendue le 30 mai 2022 par le juge de l'exécution de Soissons déclarant ECONERGIECONFORT tiers saisi débiteur de cette somme.
Par courrier en date du 15 novembre 2022, le mandataire judiciaire a fait savoir au créancier déclarant que sa créance était contestée au motif que l'ordonnance de contrainte évoquée concernait la société l'Escale de Fere et non la SAS CV ECONERGIECONFORT et qu'il entendait proposer le rejet total de la créance.
Par courrier en réponse en date du 18 novembre 2022, l'huissier de justice représentant le fonds de garantie a répondu qu'une copie d'une ordonnance de contrainte précédemment rendue dans le cadre de cette affaire avait été par erreur jointe à la déclaration de créance en lieu et place de celle rendue contre la société ECOENERGIECONFORT et a joint l'ordonnance de contrainte exécutoire rendue à l'encontre de cette dernière le 30 mai 2022.
Par une ordonnance en date du 27 avril 2023 (n° 2023000217), le juge-commissaire du tribunal de commerce de Soissons a admis la créance du Fonds de garantie au passif de la procédure de redressement judiciaire de la S.A.S CV ECONERGIECONFORT pour la somme de 211 946,83 euros à titre chirographaire, estimant que compte tenu de la communication de l'ordonnance dans le délai légal imparti, la contestation n'était plus justifiée, et ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage.
Par déclaration par voie électronique du 26 mai 2023, la S.A.S CV ECONERGIECONFORT a interjeté appel de cette ordonnance en intimant le Fonds de garantie et la SELARL Evolution ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS CV ECONERGIECONFORT.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 03 avril 2024, l'appelante demande à la cour d'appel d'Amiens :
In limine litis de débouter le Fonds de garantie de sa demande tendant à voir déclarer nul l'acte de signification de ses conclusions d'appelant du 17 août 2023 du fait de l'erreur matérielle qu'il contient, faute de rapporter la preuve d'un quelconque grief.
En conséquence de débouter le Fonds de garantie de sa demande tendant à voir déclarer caduque sa déclaration d'appel.
Principalement :
- De débouter le Fonds de garantie de sa demande tendant à voir déclarer irrecevable l'appelante en sa demande de nullité de la déclaration de créance ;
- De déclarer l'appelante recevable en ses demandes ;
- De dire nulle la déclaration de créance effectuée par la S.P.E S.A.S FRADIN TRONEL [I] ET ASSOCIES, office d'huissier à [Localité 8], pour le compte du Fonds de garantie, faute d'avoir justifié d'un mandat spécial dans le délai de la déclaration de créance, en tout état de cause la déclarer irrecevable ;
- De dire nulle la déclaration de créance effectuée par la S.P.E S.A.S FRADIN TRONEL [I] ET ASSOCIES, office d'huissier à [Localité 8], pour le compte du FGAO, faute par le créancier de justifier d'une part du pouvoir qu'il a donné à Monsieur [G] [O], de déléguer celui de déclarer à un tiers, d'autre part de justifier que la signature apposée sur le pouvoir prétendu est bien celle de ce dernier.
Subsidiairement :
- De dire la créance litigieuse d'un montant de 211 946,83 euros inopposable à la procédure collective.
En conséquence :
- D'infirmer la décision querellée en sa totalité ;
- De rejeter la créance.
En tout état de cause :
- De condamner le Fonds de garantie à payer à la concluante la somme de 4 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- De les condamner aux entiers dépens.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 3 avril 2024, le fonds de garantie demande à la cour :
A titre principal :
- D'annuler l'acte de signification des conclusions d'appelant du 17 août 2023 du fait de l'irrégularité de forme qu'elle contient.
Par conséquent :
- De déclarer caduque la déclaration d'appel de la S.A.S CV ECONERGIECONFORT;
A titre subsidiaire :
- De déclarer le FGAO recevable en ses écritures au fond ;
- De confirmer l'ordonnance rendue par le juge-commissaire du tribunal de commerce de Soissons le 27/04/2023 en toutes ses dispositions.
En tout état de cause :
- De condamner la S.A.S CV ECONERGIECONFORT au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel ;
- De débouter la S.A.S CV ECONERGIECONFORT de toutes prétentions contraires.
La SELARL Evolution ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS CV ECONERGIECONFORT, à laquelle la déclaration d'appel a été signifiée à 29 juin 2023 à personne morale, n'a pas constitué avocat.
Suivant avis du 12 février 2024 notifié aux parties par voie électronique le 13 février 2024, le procureur général requiert l'infirmation de la totalité de la décision querellée en rappelant ses observations précédentes en date du 22 novembre 2023 aux termes desquelles il prie la cour " de bien vouloir mettre un terme à cette situation ubuesque qui ne résiste pas au principe de réalité, la société " L'Escale de Fère " étant un OVNI dans la procédure de redressement judiciaire de la SAS CV Ecoénergieconfort ".
L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 avril 2024.
SUR CE,
Sur la caducité de la déclaration d'appel :
L'article 911 du code de procédure civile dispose :
" Sous les sanctions prévues aux articles 905-2 et 908 à 910, les conclusions sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour. Sous les mêmes sanctions, elles sont signifiées au plus tard dans le mois suivant l'expiration des délais prévus à ces articles aux parties qui n'ont pas constitué avocat ; cependant, si, entre-temps, celles-ci ont constitué avocat avant la signification des conclusions, il est procédé par voie de notification à leur avocat.
La notification de conclusions au sens de l'article 910-1 faite à une partie dans le délai prévu aux articles 905-2 et 908 à 910 ainsi qu'à l'alinéa premier du présent article constitue le point de départ du délai dont cette partie dispose pour remettre ses conclusions au greffe. "
Le fonds de garantie, qui se prévaut des articles 904-1, 905, 905-1, 905-2 et 911 du code de procédure civile soulève la caducité de la déclaration d'appel en faisant valoir que la signification des conclusions de l'appelant le 17 août 2023 est irrégulière puisqu'elle vise les articles 909 et suivants du code de procédure civile octroyant à l'intimé notamment un délai de trois mois pour conclure alors que l'audience a été fixée à bref délai par la cour par une ordonnance en date du 20 juin 2023, ce qui aurait dû obliger l'appelant à viser les articles 905, 905-1 et 905-2 du même code. Il fait valoir qu'il a de ce fait pris le délai de trois mois comme étant le juste délai pour conclure, irrégularité de procédure qui lui a causé grief car il n'a pas pu répondre utilement aux écritures de l'appelant dans les délais légaux.
En outre, le Fonds souligne que les conclusions n'ont pas été signifiées à l'ensemble des parties dans la mesure où la S.E.L.A.R.L EVOLUTION, également intimée, ne semble avoir été destinataire d'aucun acte de la procédure.
Enfin, il estime que l'appel a été formé hors-délai puisqu'intervenu le 26 mai 2023 alors que la décision de première instance a été notifiée le 10 mai 2023, soit plus de dix jours avant.
Pour toutes ces raisons, il soulève la caducité de la déclaration d'appel.
La société ECONERGIECONFORT soutient que le Fonds de garantie ne pouvait raisonnablement considérer qu'il disposait d'un délai de trois mois pour conclure considérant l'ensemble des actes de procédure notifiés avant la signification querellée, lui rappelant la procédure à bref délai, et compte tenu de la nature de l'affaire.
En outre, l'appelant estime que le Fonds de garantie ne peut se prévaloir d'aucun grief puisqu'il a pu conclure et qu'aucune irrecevabilité de ses conclusions ne lui est opposée.
La cour relève qu'il ressort des actes de la procédure qu'à la suite de sa déclaration d'appel du 26 mai 2023 l'appelante a été avisée le 20 juin 2023 par le greffe de la cour de la fixation de l'affaire à bref délai par application de l'article 904-1 du code de procédure civile, l'informant que :
- le président de la chambre avait, en application de l'article 905 du code de procédure civile, fixé une date d'appel de l'affaire à bref délai à l'audience du 14 décembre 2023 à 13h30,
- il lui appartenait, à peine de caducité, de signifier la déclaration d'appel à l'intimé dans les dix jours de cet avis, l'acte de signification devant indiquer à l'intimé que faute pour lui de constituer avocat dans le délai de quinze jours à compter de celle-ci, il s'exposait à ce qu'un arrêt soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire et que faute de conclure dans le délai d'un mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant il s'exposait à ce que ses écritures soient d'office déclarées irrecevables,
- il disposait d'un mois, à compter de la réception de l'avis, pour remettre ses conclusions au greffe ainsi que pour les notifier aux avocats des autres parties et devraient être transmises par voie de signification dans le mois suivant l'expiration du délai précité aux parties n'ayant pas constitué avocat.
L'appelante a fait signifier sa déclaration d'appel, l'avis de fixation à bref délai et l'ordonnance de fixation à bref délai au Fonds de garantie par exploit du 27 juin 2023 et à la SELARL Evolution ès qualités de mandataire judiciaire de la société ECONERGIECONFORT par exploit du 29 juin 2023, leur rappelant le délai de 15 jours pour se constituer et le délai d'un mois pour conclure à compter de la notification des conclusions de l'appelant faute de quoi ils s'exposaient à ce que leurs écritures soient d'office déclarées irrecevables.
Elle a transmis ses conclusions d'appelant et pièces au greffe le 20 juillet 2023. Les intimés n'ayant pas constitué avocat, elle a procédé à leur signification au Fonds de garantie par exploit du 17 août 2023 et à la SELARL Evolution ès qualités de mandataire judiciaire de la SAS CV ECOENERGIECONFORTpar exploit du 18 août 2023.
Le Fonds de garantie a constitué avocat le 30 octobre 2023, puis conclu le 16 novembre 2023 et le 4 avril 2024, l'examen de l'affaire initialement fixé le 14 décembre 2023 ayant été reporté à l'audience du 18 avril 2024.
Il est de jurisprudence constante que la caducité de la déclaration d'appel faute de notification par l'appelant de ses conclusions à l'intimé dans le délai imparti par l'article 911 du code de procédure civile ne peut être encourue, en raison d'une irrégularité de forme affectant cette notification, qu'en cas d'annulation de cet acte, sur la démonstration par celui qui l'invoque du grief que lui a causé l'irrégularité.
Or si l'exploit de signification du 17 août 2023 mentionne par erreur les délais des articles 909 et suivants du code de procédure civile, cette irrégularité n'a cependant causé aucun grief au Fonds de garantie qui a pu conclure à deux reprises, l'examen de l'affaire ayant été repoussé.
Enfin la déclaration d'appel comme les conclusions de l'appelant ont été signifiées au mandataire judiciaire et le Fonds de garantie, qui ne justifie pas de la date de notification à la société ECONERGIECONFORT de l'ordonnance entreprise, n'est pas fondé à soulever la forclusion du recours, étant rappelé que le dépôt tardif d'une déclaration d'appel n'est en tout état de cause pas sanctionné par une caducité de la déclaration mais par l'irrecevabilité de l'appel.
Il y a donc lieu de rejeter l'incident de procédure tiré de la caducité de la déclaration d'appel.
Sur la nullité de la déclaration de créance :
L'appelant soulève la nullité de la déclaration de créance sur le fondement de l'alinéa 2 de l'article L.622-24 du code de commerce qui dispose que :
" La déclaration des créances peut être faite par le créancier ou par tout préposé ou mandataire de son choix. Le créancier peut ratifier la déclaration faite en son nom jusqu'à ce que le juge statue sur l'admission de la créance.".
Il estime que par application de l'article 853 du code de procédure civile, dans la mesure où la déclaration de créance équivaut à une action en justice, l'huissier se devait de produire un pouvoir spécial lors du dépôt de la déclaration de créance et au plus tard dans le délai légal de déclaration de créance, à peine de nullité de cette déclaration.
L'intimé réplique que dans sa déclaration de créance en date du 26 août 2022 il est indiqué explicitement que l'huissier a été mandaté spécialement et qu'un huissier n'a pas à justifier d'une quelconque procuration, qu'il ressort en outre des pièces versées aux débats que le mandataire judiciaire avait lui-même pris acte de la qualité de mandataire de l'huissier en échangeant avec lui et que l'avis d'audience en date du 25 janvier 2023 est adressé directement à l'huissier en question.
A ce titre, l'intimé conteste la recevabilité de la nouvelle demande formée au titre de la nullité de la déclaration de créance en ce qu'elle contrevient à l'article 910-4 du code de procédure civile dans la mesure où cette demande n'apparait pas dans le premier jeu de conclusions.
La cour constate que l'appelante avait déjà soulevé dans ses premières écritures d'appel l'irrégularité de la déclaration pour défaut de production de pouvoir spécial, dont elle déduisait une irrecevabilité. En tout état de cause les exceptions de nullité fondées sur l'inobservation des règles de fond relatives aux actes de procédure qui ne sont pas des prétentions sur le fond visées par l'article 910-4 du code de procédure civile peuvent être, selon l'article 118 du code de procédure civile, soulevées en tout état de cause, à moins qu'il n'en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.
Par ailleurs il résulte de l'article 121 du même code que si elle est susceptible d'être couverte la nullité n'est pas encourue si sa cause a disparu au moment où le juge statue ce qui est le cas en l'espèce puisque le Fonds de garantie produit en appel le pouvoir spécial qu'il a donné à la société d'huissier Fradin Tronel, [I] et associés daté du 26 août 2022, la signature de ce pouvoir par un préposé représentant le Fonds de garantie présumant de sa qualité et de son pouvoir de représentation à cette fin.
En tout état de cause en demandant dans ses conclusions d'appel, notifiées par son avocat, la confirmation de l'admission de sa créance, le Fonds de garantie a nécessairement ratifié la déclaration de créance faite en son nom conformément à l'article susvisé (Com.29 sept.2021, n°20-12.291).
Dès lors, la nullité de la déclaration de créance n'est pas encourue et l'appelante doit être déboutée de cette exception de nullité.
Sur l'exigibilité de la créance :
La SAS ECOENERGIECONFORT conteste l'exigibilité de la créance à son égard en contestant l'opposabilité du titre qui a été produit par le fonds de garantie. Elle affirme qu'elle n'a jamais eu connaissance de l'ordonnance de contrainte produite rendue contre elle, dont elle attend la preuve irréfutable de la régulière signification. Elle ajoute que cette ordonnance mentionne que l'acte de saisie des rémunérations contre Monsieur [L] [E] en date du 18 mars 2013 a été notifiée à l'employeur tiers saisi par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 20 mars 2013 alors même qu'à cette date elle n'existait pas puisqu'elle a débuté son activité le 08 mai 2017, tandis qu'au contraire la société l'Escale de Fere contre laquelle avait été rendue une première ordonnance de contrainte est une société toujours active à l'heure actuelle dont le gérant n'est autre que [M] [E] le débiteur poursuivi par le Fonds de garantie. Elle fait encore valoir que contrairement à ce qu'affirme le Fonds de garantie l'article R.622-23 du code de commerce impose que le créancier justifie notamment de l'existence et le montant de sa créance, qu'en l'état le fonds de garantie ne démontre pas la fixation de sa créance à la procédure de saisie des rémunérations dirigée contre M. [E], que l'ordonnance ne permet en effet pas d'identifier le créancier poursuivant et que rien ne justifie que la créance de 211946,83 euros corresponde à la seule créance du Fonds de garantie puisque cette somme doit être réglée entre les mains du régisseur du tribunal judiciaire lequel répartit les fonds entre les divers créanciers, qu'il est donc justifié de rejeter la créance.
L'intimé réplique que la créance est bien exigible à l'endroit de la SAS ECONERGIECONFORT, qu'elle résulte des sommes qu'il a versées en lieu et place de M. [E] dont le véhicule non assuré a été impliqué dans un accident de la circulation, que ce dernier n'a pas contesté cette créance devant le juge de la saisie des rémunérations mais n'a pas respecté les termes de la conciliation, qu'une première ordonnance de contrainte prise à l'encontre de son employeur d'alors la société l'Escale de Fere, le 25 mars 2015, n'a pas permis au Fonds d'obtenir le règlement de sa créance, que l'huissier chargé du recouvrement a sollicité le 30 mars 2021 la réactivation de la saisie des rémunérations entre les mains du nouvel employeur la société Ecoenergie, que le greffe du juge de l'exécution de Soissons a notifié l'acte de saisie des rémunérations à la société ECONERGIECONFORT, nouveau tiers saisi, que ce courrier a été retourné au greffe comme ayant été avisé mais non réclamé, raison pour laquelle le greffe procédait une nouvelle fois à cette notification le 16 juin 2021, qu'en l'absence de règlement intervenu de la part de la société ECONERGIECONFORT, l'ordonnance de contrainte du 30 mai 2022 a bien été notifiée à la société ECONERGIECONFORT par le greffe du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Soissons, sans qu'aucune opposition ne soit formée dans le délai de 15 jours, si bien que le greffe a apposé la formule exécutoire sur l'ordonnance litigieuse le 8 août 2022. Elle ajoute que cette créance étant née antérieurement à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire intervenue le 30 juin 2022, le fonds de garantie était légitime à déclarer sa créance le 26 août 2022, le fait que la société ECONERGIECONFORT n'ait pas réclamé les courriers recommandés adressés par le greffe du juge de l'exécution ne pouvant faire obstacle au recours du fonds de garantie.
La cour rappelle qu'aux termes de l'article L. 622-25 du code de commerce, la déclaration de créance contient :
1° Les éléments de nature à prouver l'existence et le montant de la créance si elle ne résulte pas d'un titre; à défaut, une évaluation de la créance si son montant n'a pas encore été fixé ;
2° Les modalités de calcul des intérêts dont le cours n'est pas arrêté, cette indication valant déclaration pour le montant ultérieurement arrêté ;
3° L'indication de la juridiction saisie si la créance fait l'objet d'un litige ;
4° La date de la sûreté et les éléments de nature à prouver son existence, sa nature et son assiette, si cette sûreté n'a pas fait l'objet d'une publicité.
A cette déclaration sont joints sous bordereau les documents justificatifs ; ceux-ci peuvent être produits en copie. À tout moment, le mandataire judiciaire peut demander la production de documents qui n'auraient pas été joints. "
Par ailleurs l'article L. 3252-28 du code du travail dispose que " Si l'employeur omet d'effectuer les versements en exécution d'une saisie, le juge rend à son encontre une ordonnance le déclarant personnellement débiteur conformément à l'article L. 3252-10. L'ordonnance est notifiée à l'employeur. Le greffier informe le créancier et le débiteur.
A défaut d'opposition dans les quinze jours de la notification, l'ordonnance devient exécutoire. L'exécution en est poursuivie à la requête de la partie la plus diligente. "
S'il est constant qu'à l'appui de la déclaration de créance l'huissier représentant le Fonds de garantie a dans un premier temps transmis une ordonnance de contrainte rendue conformément à l'article R.3252-28 du code du travail qui ne concernait pas la SAS ECONERGIECONFORT, mais le précédent employeur du débiteur, il a ensuite, dans le délai requis par l'article L.622-24 du code de commerce, produit l'ordonnance de contrainte rendue le 30 mai 2022 sur le même fondement contre la société ECOENERGIECONFORT, nouvel employeur, revêtue de la formule exécutoire par le greffe du juge de l'exécution de Soissons qui a certifié sur la copie exécutoire qu'au 8 août 2022 il n'y avait eu aucune opposition. La SAS CV ECOENERGIECONFORT n'ayant pas contesté cette ordonnance devant le juge de l'exécution est mal fondée à la contester devant la présente cour.
Par ailleurs il ressort des pièces versées aux débats, et notamment du visa dans l'ordonnance de contrainte d'un seul acte de saisie du 18 mars 2013 à l'encontre de M. [M] [E], de la demande faite le 30 mars 2021 par l'étude d'huissier Fradin Tronel [I] et associés au greffe du juge de l'exécution de réactiver la saisie des rémunérations de M. [M] [E] ayant pour nouvel employeur ECONERGIECONFORT [Adresse 6], de l'ordonnance de contrainte SARL l'Escale de Fere [Adresse 4] n'ayant pu être exécutée cette société étant sans existence matérielle, ainsi que de la notification le 3 mai 2021 par le greffe de l'acte de saisie à la SAS ECONERGIECONFORT en tant que nouvel employeur, mentionnant son obligation de verser chaque mois une somme égale à la fraction saisissable du salaire du débiteur au moyen d'un chèque établi à l'ordre de Fradin Tronel [I] et associés, que cette ordonnance qui condamne ECONERGIECONFORT à payer la somme de 211946,83 euros ne se rapporte qu'à la créance du Fonds de garantie représenté par cette étude d'huissier, le fait que cette somme doive être réglée entre les mains du régisseur du tribunal judiciaire de Soissons étant indifférent à cet égard.
Dès lors la cour considère que le Fonds de garantie justifie suffisamment de l'existence et du montant de la créance qu'il a déclarée entre les mains du liquidateur et de son opposabilité à la société en liquidation. L'ordonnance sera donc confirmée en toutes ses dispositions.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
La S.A.S CV ECONERGIECONFORT succombant en son recours sera condamnée au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, et par arrêt réputé contradictoire,
Déboute le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages de sa demande de caducité de la déclaration d'appel,
Déboute la SAS CV ECONERGIECONFORT de l'exception de nullité de déclaration de créance,
Confirme l'ordonnance entreprise, en toutes ses dispositions, et Y ajoutant,
Condamne la SAS CV ECONERGIECONFORT à payer au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.