Décisions
CA Douai, ch. 1 sect. 1, 11 juillet 2024, n° 21/05313
DOUAI
Arrêt
Autre
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 11/07/2024
****
N° de MINUTE :
N° RG 21/05313 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T4ZK
Jugement (N° 19/00963)
rendu le 08 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Béthune
APPELANTE
La SAS Locam - Location automobiles matériels
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 6]
[Localité 3]
représentée par Me Marie-Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
assistée de Me Guillaume Migaud, avocat au barreau de Val-de-Marne, avocat plaidant
INTIMÉ
Monsieur [Y] [C] exerçant sous l'enseigne Pizzeria [S]
né le 14 juillet 1978 à [Localité 8]
[Adresse 1]
[Localité 4]
bénéficie d'une aide juridictionnelle partielle numéro 59178/02/21/012987 du 23/12/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 7]
La SELAS MJS Partners prise en la personne de Me [W] [D] en qualité de liquidateur judiciaire de [Y] [C] exerçant sous l'enseigne Pizzeria [S]
ayant son siège social [Adresse 2]
[Localité 5]
- intervenant volontaire-
représentés par Me Frédérique Vuattier, avocat au barreau de Saint-Omer, avocat constitué
DÉBATS à l'audience publique du 11 septembre 2023, tenue par Camille Colonna magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Bruno Poupet, président de chambre
Céline Miller, conseiller
Camille Colonna, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2024 après prorogation du délibéré en date du 07 décembre 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 11 septembre 2023
****
Par acte sous seing privé du 21 juillet 2017, la société Locam Location Automobiles Matériels (ci-après, 'la société Locam') a consenti à M. [Y] [C], exerçant sous l'enseigne Pizzeria [S], un contrat de location d'une durée de soixante mois portant sur du matériel d'équipement de pizzeria, fourni et posé par la société Pesage MB.
Le même jour, M. [C] a réceptionné sans réserve le matériel loué.
La société Locam a réglé à la société Pesage MB une facture d'un montant de 15 360 euros pour la fourniture et la pose du matériel loué.
Par courrier recommandé dont M. [C] a accusé réception le 19 décembre 2017, la société Locam l'a mis en demeure de lui payer, sous huitaine, la somme de 2 176,29 euros à titre d'arriéré correspondant aux loyers impayés des 20 septembre, 20 octobre et 20 novembre 2017 à hauteur de 1 544,31 euros, à la somme de 193,34 euros pour indemnité et clause pénale, aux intérêts de retard d'un montant de 49,42 euros et à une provision de 389,29 euros pour le loyer de décembre 2017. Elle faisait alors valoir qu'à défaut de paiement dans le délai imparti, elle se prévaudrait de la déchéance du terme et réclamerait le paiement d'une somme totale de 25 724,10 euros, égale au montant cumulé de l'arriéré, des loyers à échoir jusqu'au terme du contrat et d'une indemnité et clause pénale de 10 %.
Par acte d'huissier du 8 février 2019, la société Locam a fait assigner M. [C] devant le tribunal de grande instance de Béthune afin d'obtenir, notamment, sa condamnation au paiement à son profit de la somme de 24 263,51 euros et à la restitution du matériel objet du contrat sous astreinte.
Par jugement contradictoire du 8 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Béthune a :
- déclaré irrecevable le moyen de défense soulevé par M. [Y] [C], exerçant sous l'enseigne Pizzeria [S], tiré du caractère abusif de l'article 13 des conditions générales du contrat de location sur le fondement de l'ancien article L.442-6 du code de commerce en raison du défaut de pouvoir juridictionnel du tribunal judiciaire de Béthune pour en connaître,
- condamné M. [Y] [C] à payer à la société Locam la somme de 9 734,08 euros, majorée du taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter du 19 décembre 2017,
- ordonné la capitalisation des intérêts échus dus pour une année entière,
- ordonné à M. [Y] [C] de restituer à la société Locam le matériel objet du contrat de location dans un délai maximum d'un mois à compter de la signification de la décision,
- débouté cette dernière de sa demande tendant à voir assortie cette obligation de restitution d'une astreinte,
- débouté M. [C] de sa demande de délai de paiement,
- condamné celui-ci aux dépens de l'instance et à payer à la société Locam la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
La société Locam a interjeté appel de ce jugement.
M. [C] a notifié le 1er mars 2022 des conclusions d'intimé et d'appel incident.
Par jugement du 25 juillet 2023, le tribunal judiciaire d'Arras a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire au profit de M. [Y] [C] et désigné la SELARL MJS Partners pris en la personne de Me [W] [D] en qualité de mandataire judiciaire.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 28 août 2023,
la société Locam demande à la cour, abstraction faite des demandes de 'constater', 'dire' et 'juger' qui ne sont que des rappels de ses moyens et non des prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile, au visa des articles 1103, 1104, 1343-2 et 1343-5 du code civil et des articles L.442-10 et L. 441-10 du code de commerce, de :
- juger M. [Y] [C] et la SELARL MJS Partners, prise en la personne de Me [W] [D], irrecevables en toutes leurs demandes,
- les débouter de toutes leurs demandes et de leur appel incident,
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné M. [C] à lui payer la somme de 9 734,08 euros des intérêts à compter du 19 décembre 2017 et en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes tendant à le voir condamner à lui payer la somme de 24 263,51 euros avec intérêts à compter du 18 décembre 2017 et à ce que l'obligation de restitution de M. [C] soit assortie d'une astreinte,
- fixer, à son profit, au passif de la procédure de redressement de M. [C], la somme de 24 263,51 euros avec intérêts égal au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter de la date de mise en demeure, soit le 18 décembre 2017,
- ordonner l'anatocisme des intérêts,
- ordonner la restitution, par M. [C], du matériel objet du contrat sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de l'assignation,
- condamner la société MJS Partners, en qualité de mandataire judiciaire de M. [C], à lui verser la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 24 août 2023, M. [Y] [C] et la SELAS MJS Partners demandent à la cour, abstraction faite des demandes de 'constater', 'dire' et 'juger' qui ne sont que des rappels de moyens et non des prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile, au visa de l'ancien article 1134 et de l'article 1152 du code civil, de l'article L.442-6 du code de commerce, des articles 49 et 544 du code de procédure civile, de :
- prendre acte de l'intervention volontaire de la SELAS MJS Partners, prise en la personne de Me [D], en sa qualité de mandataire judiciaire,
- débouter la SAS Locam - location automobiles matériels de l'ensemble de ses demandes,
statuant à nouveau,
- infirmer le jugement entrepris en ce qui concerne les frais de résiliation, les clauses et la clause pénale,
- dire les clauses relatives aux frais de résiliation non écrites,
- rejeter les demandes formulées par la société Locam en application des frais de résiliation en sus de la clause pénale,
subsidiairement, si la cour devait estimer que les indemnités contractuelles de résiliation étaient dues,
- constater qu'elles revêtent le caractère de clause pénale,
- constater que la société Locam ne justifie d'aucun préjudice,
en conséquence,
- réduire les sommes au titre des clauses pénales,
- sous réserve de la procédure collective en cours, octroyer à M. [C] des délais de paiement à hauteur de 300 euros par mois,
- dire qu'il s'acquittera du solde au bout de deux ans,
- suspendre la restitution du matériel durant les délais de paiement,
subsidiairement, si l'incompétence de la juridiction devait être retenue quant à l'appréciation d'une clause contractuelle,
- renvoyer l'examen de la clause devant la juridiction compétente,
- surseoir à statuer dans l'attente de la décision à intervenir,
en tout état de cause,
- condamner la société Locam à lui verser la somme de 1 000 euros au titre des frais de première instance et à la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens au cause d'appel.
Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'intervention volontaire de la SELAS MJS Partners prise en la personne de Me [D]
Par jugement du 25 juillet 2023, le tribunal judiciaire d'Arras a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire au profit de M. [Y] [C] et la SELAS MJS Partners prise en la personne de Me [W] [D] a été désignée en qualité de mandataire judiciaire.
La société Locam a déclaré sa créance entre ses mains le 9 août 2023.
Il y a donc lieu de constater l'intervention volontaire à la procédure de la SELAS MJS Partners, prise en la personne de Me [D], en sa qualité de mandataire judiciaire.
Sur la demande en paiement
L'article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
L'article 13 des conditions générales du contrat de location conclu entre les parties le 21 juillet 2017, libellé 'Résiliation contractuelle du contrat', stipule que :
'Pour défaut du respect dudit contrat, le contrat de location pourra notamment être résilié de plein droit par le loueur, sans aucune formalité judiciaire, 8 jours après la mise en demeure restée sans effet dans les cas suivants: inobservation par le locataire de l'une des conditions générales ou particulière du présent contrat, non paiement d'un loyer ou d'une prime d'assurance à son échéance [...]
Les cas sus-indiqués emporteront les conséquences suivantes :
1) le locataire sera tenu de restituer immédiatement le matériel au loueur au lieu fixé par ce dernier et de supporter tous les frais occasionnés par cette résiliation [...],
2) outre la restitution du matériel, le locataire devra verser au loueur une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation majorée d'une clause pénale de 10 % ainsi qu'une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat telle que prévue à l'origine majorée d'une clause pénale de 10 % [...]'.
au titre des loyers échus impayés et de la clause pénale de 10 % s'y rapportant
Aux termes des conditions particulières du contrat et de l'article 4 des conditions générales libellé 'conditions financières de location' la société Locam s'est engagée à louer à M. [C] du matériel d'équipement de pizzeria moyennant un loyer mensuel de 373,86 euros (dont 14,75 euros au titre de l'assurance).
Il n'est pas contesté que la société Locam a exécuté son obligation alors que M. [C] n'a plus honoré le paiement des loyers à compter de l'échéance de septembre 2017 et que le contrat a été résilié huit jours après la mise en demeure de payer les échéances échues impayées de septembre à novembre 2017, réceptionnée le 19 décembre 2017 et demeurée infructueuse.
C'est par conséquent à bon droit que le premier juge a retenu que la somme de 1 234,08 euros était due au titre des trois échéances de loyer échues impayées (1 121,58 euros), augmentée d'une indemnité de 10 % (112,15 euros).
au titre de l'indemnité de résiliation et de la clause pénale de 10 % s'y rapportant
- sur le moyen tiré du caractère abusif de l'indemnité de résiliation
Aux termes de l'article L 442-6, I 2°, du code de commerce, pris en sa rédaction applicable au présent litige, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ;
Aux termes de l'avant dernier alinéa de cet article, les litiges relatifs à l'application de cet article sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret.
L'article D 442-3 du même code, en sa rédaction applicable au présent litige, dispose que pour l'application de l'article L 442-6, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 de ce livre précisant que ces procédures relèvent de la compétence du tribunal de commerce de Tourcoing pour le ressort de la cour d'appel de Douai.
La cour d'appel compétente pour connaître des décisions rendues par ces juridictions est celle de Paris.
C'est donc à bon droit que la juridiction béthunoise a déclaré irrecevable le moyen soulevé par M. [C] tiré du caractère abusif de l'article 13 des stipulations contractuelles sur le fondement de l'article L 442-6 du code de commerce après avoir relevé que ces dispositions instituent une compétence dérogatoire exclusive et d'ordre public au profit de certaines juridictions spécifiquement identifiées et que le défaut de pouvoir juridictionnel de la juridiction saisie pour statuer sur le moyen constitue une fin de non-recevoir.
De même, l'appréciation des clauses abusives en appel relevant de la compétence exclusive de la cour d'appel de Paris, la cour d'appel de céans n'a pas de pouvoir juridictionnel en la matière.
L'irrecevabilité de ce moyen de défense soulevé par M. [C] sera par conséquent confirmée.
A titre subsidiaire, M. [C] se prévaut des dispositions de l'article 49 du
code de procédure civile, demandant que la cour renvoie cette appréciation à la cour compétente et sursoie à statuer dans l'intervalle.
Cet article dispose que toute juridiction saisie d'une demande de sa compétence connaît, même s'ils exigent l'interprétation d'un contrat, de tous les moyens de défense à l'exception de ceux qui soulèvent une question relevant de la compétence exclusive d'une autre juridiction ; que lorsque la solution d'un litige dépend d'une question soulevant une difficulté sérieuse et relevant de la compétence de la juridiction administrative, la juridiction judiciaire initialement saisie la transmet à la juridiction administrative compétente en application du titre Ier du livre III du code de justice administrative ; qu'elle sursoit à statuer jusqu'à la décision sur la question préjudicielle.
Or le moyen soulevé relève de la compétence exclusive d'une autre juridiction de l'ordre judiciaire de sorte que ces demandes de renvoi et de sursis à statuer seront rejetées.
- sur la qualification de clause pénale d'une telle clause et le caractère excessif des clauses pénales contractuelles
L'article 1231-5 du code civil dispose que lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre ; que néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire ; que lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent ; que toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite ; que sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure.
Il est constant que constitue une clause pénale la clause d'un contrat par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de l'obligation contractée.
En l'espèce, les dispositions de l'article 13 précité, mettant à la charge du bénéficiaire de la prestation, en cas de résiliation du contrat avant son terme, une obligation de paiement équivalente au coût qu'il aurait dû payer en cas d'exécution du contrat jusqu'à son terme, qu'il bénéficie ou non de la prestation, rend illusoire toute liberté de choix de résiliation unilatérale avant l'échéance du terme extinctif. Cette clause le contraint à l'exécution du contrat sur la durée prévue et à défaut, évalue de manière forfaitaire et anticipée le montant du préjudice résultant pour son créancier de la résiliation anticipée, ce en quoi elle a nécessairement la nature d'une clause pénale ainsi que l'a exactement qualifiée le premier juge.
Par ailleurs, le même article prévoit à titre de clause pénale une majoration de 10 % appliquée sur la totalité de ces loyers restant à courir.
Cette disposition doit être réduite en application de l'article 1231-5 du code civil car excessive, la majoration de 10% constituant une clause pénale calculée sur une clause pénale.
La défaillance du locataire et la résiliation du contrat, les situations économiques respectives des parties et l'investissement et le risque financier supportés par la société Locam, le défaut de restitution du matériel au delà du terme du contrat initialement prévu, en l'absence de prorogation et sans contrepartie, justifient que la somme totale due soit supérieure à la somme des loyers convenus sur la totalité de la période prévue et demeurée impayée (soit 59 x 373,86 euros ) et fixée à la somme de 22 235 euros.
Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a condamné M. [Y] [C] à payer à la société Locam la somme de 9 734,08 euros portant intérêts taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter du 19 décembre 2017, et la somme de 22 235 euros, portant intérêts au taux contractuel à compter du 19 décembre 2017, sera fixée au passif de la procédure de redressement de M. [C] au profit de la société Locam.
En application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil, la capitalisation des intérêts échus dus pour une année entière demandée par la société Locam doit être ordonnée et le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur la demande de délai de paiement
Selon l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital. Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette. La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge. Toute stipulation contraire est réputée non écrite.
En l'espèce, M. [C] a déjà bénéficié de larges délais, ayant conservé le matériel depuis la résiliation du contrat intervenue en décembre 2017, période pendant laquelle il ne justifie d'aucun paiement.
Le rejet de sa demande de délais de paiement sera par conséquent confirmé.
Sur les demandes relatives à la restitution du matériel
En application des dispositions de l'article 13 du contrat de location, la restitution doit être ordonnée consécutivement à la résiliation du contrat.
M. [C] doit par ailleurs être débouté de sa demande de suspension de cette obligation parallèlement au rejet de sa demande de délai de paiement.
La décision critiquée sera confirmée de ces chefs.
En revanche, M. [C] n'ayant pas procédé à la restitution du matériel malgré la résiliation du contrat et le dépassement du terme contractuellement prévu, sa condamnation à la restitution sous astreinte se justifie et le jugement sera réformé sur ce point.
Sur les dispositions accessoires
M. [C] succombant en ses prétentions, les dispositions adoptées en application des dispositions des articles 696 et 700 du code de procédure civile seront confirmées et la société MJS Partners en qualité de mandataire judiciaire de M. [C] sera condamnée à payer à la société Locam une indemnité de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel et aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour
constate l'intervention volontaire de la SELAS MJS Partners, prise en la personne de Me [D], en sa qualité de mandataire judiciaire de M. [Y] [C],
confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :
- condamné M. [Y] [C], exerçant sous l'enseigne Pizzeria [S], à payer à la SAS Locam - location automobiles matériels la somme de 9 734,08 euros, majorée du taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter du 19 décembre 2017,
- débouté la SAS Locam - location automobiles de sa demande tendant à voir assortie l'obligation de restitution d'une astreinte,
statuant à nouveau sur ces chefs,
fixe au passif de la procédure de redressement de M. [Y] [C] une créance de la SAS Locam - location automobiles matériels de 22 235 euros, portant intérêts au taux contractuel à compter du 19 décembre 2017,
dit que M. [C] devra restituer le matériel dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant deux mois à l'issue desquels il pourra être à nouveau statué,
rejette les demandes de renvoi et de sursis à statuer,
condamne la société MJS Partners en sa qualité de mandataire judiciaire de M. [Y] [C] aux dépens d'appel et à payer à la SAS Locam - location automobiles une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier
Delphine Verhaeghe
Le président
Bruno Poupet
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 11/07/2024
****
N° de MINUTE :
N° RG 21/05313 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T4ZK
Jugement (N° 19/00963)
rendu le 08 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Béthune
APPELANTE
La SAS Locam - Location automobiles matériels
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 6]
[Localité 3]
représentée par Me Marie-Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
assistée de Me Guillaume Migaud, avocat au barreau de Val-de-Marne, avocat plaidant
INTIMÉ
Monsieur [Y] [C] exerçant sous l'enseigne Pizzeria [S]
né le 14 juillet 1978 à [Localité 8]
[Adresse 1]
[Localité 4]
bénéficie d'une aide juridictionnelle partielle numéro 59178/02/21/012987 du 23/12/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de [Localité 7]
La SELAS MJS Partners prise en la personne de Me [W] [D] en qualité de liquidateur judiciaire de [Y] [C] exerçant sous l'enseigne Pizzeria [S]
ayant son siège social [Adresse 2]
[Localité 5]
- intervenant volontaire-
représentés par Me Frédérique Vuattier, avocat au barreau de Saint-Omer, avocat constitué
DÉBATS à l'audience publique du 11 septembre 2023, tenue par Camille Colonna magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Bruno Poupet, président de chambre
Céline Miller, conseiller
Camille Colonna, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2024 après prorogation du délibéré en date du 07 décembre 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 11 septembre 2023
****
Par acte sous seing privé du 21 juillet 2017, la société Locam Location Automobiles Matériels (ci-après, 'la société Locam') a consenti à M. [Y] [C], exerçant sous l'enseigne Pizzeria [S], un contrat de location d'une durée de soixante mois portant sur du matériel d'équipement de pizzeria, fourni et posé par la société Pesage MB.
Le même jour, M. [C] a réceptionné sans réserve le matériel loué.
La société Locam a réglé à la société Pesage MB une facture d'un montant de 15 360 euros pour la fourniture et la pose du matériel loué.
Par courrier recommandé dont M. [C] a accusé réception le 19 décembre 2017, la société Locam l'a mis en demeure de lui payer, sous huitaine, la somme de 2 176,29 euros à titre d'arriéré correspondant aux loyers impayés des 20 septembre, 20 octobre et 20 novembre 2017 à hauteur de 1 544,31 euros, à la somme de 193,34 euros pour indemnité et clause pénale, aux intérêts de retard d'un montant de 49,42 euros et à une provision de 389,29 euros pour le loyer de décembre 2017. Elle faisait alors valoir qu'à défaut de paiement dans le délai imparti, elle se prévaudrait de la déchéance du terme et réclamerait le paiement d'une somme totale de 25 724,10 euros, égale au montant cumulé de l'arriéré, des loyers à échoir jusqu'au terme du contrat et d'une indemnité et clause pénale de 10 %.
Par acte d'huissier du 8 février 2019, la société Locam a fait assigner M. [C] devant le tribunal de grande instance de Béthune afin d'obtenir, notamment, sa condamnation au paiement à son profit de la somme de 24 263,51 euros et à la restitution du matériel objet du contrat sous astreinte.
Par jugement contradictoire du 8 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Béthune a :
- déclaré irrecevable le moyen de défense soulevé par M. [Y] [C], exerçant sous l'enseigne Pizzeria [S], tiré du caractère abusif de l'article 13 des conditions générales du contrat de location sur le fondement de l'ancien article L.442-6 du code de commerce en raison du défaut de pouvoir juridictionnel du tribunal judiciaire de Béthune pour en connaître,
- condamné M. [Y] [C] à payer à la société Locam la somme de 9 734,08 euros, majorée du taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter du 19 décembre 2017,
- ordonné la capitalisation des intérêts échus dus pour une année entière,
- ordonné à M. [Y] [C] de restituer à la société Locam le matériel objet du contrat de location dans un délai maximum d'un mois à compter de la signification de la décision,
- débouté cette dernière de sa demande tendant à voir assortie cette obligation de restitution d'une astreinte,
- débouté M. [C] de sa demande de délai de paiement,
- condamné celui-ci aux dépens de l'instance et à payer à la société Locam la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
La société Locam a interjeté appel de ce jugement.
M. [C] a notifié le 1er mars 2022 des conclusions d'intimé et d'appel incident.
Par jugement du 25 juillet 2023, le tribunal judiciaire d'Arras a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire au profit de M. [Y] [C] et désigné la SELARL MJS Partners pris en la personne de Me [W] [D] en qualité de mandataire judiciaire.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 28 août 2023,
la société Locam demande à la cour, abstraction faite des demandes de 'constater', 'dire' et 'juger' qui ne sont que des rappels de ses moyens et non des prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile, au visa des articles 1103, 1104, 1343-2 et 1343-5 du code civil et des articles L.442-10 et L. 441-10 du code de commerce, de :
- juger M. [Y] [C] et la SELARL MJS Partners, prise en la personne de Me [W] [D], irrecevables en toutes leurs demandes,
- les débouter de toutes leurs demandes et de leur appel incident,
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné M. [C] à lui payer la somme de 9 734,08 euros des intérêts à compter du 19 décembre 2017 et en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes tendant à le voir condamner à lui payer la somme de 24 263,51 euros avec intérêts à compter du 18 décembre 2017 et à ce que l'obligation de restitution de M. [C] soit assortie d'une astreinte,
- fixer, à son profit, au passif de la procédure de redressement de M. [C], la somme de 24 263,51 euros avec intérêts égal au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter de la date de mise en demeure, soit le 18 décembre 2017,
- ordonner l'anatocisme des intérêts,
- ordonner la restitution, par M. [C], du matériel objet du contrat sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de l'assignation,
- condamner la société MJS Partners, en qualité de mandataire judiciaire de M. [C], à lui verser la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 24 août 2023, M. [Y] [C] et la SELAS MJS Partners demandent à la cour, abstraction faite des demandes de 'constater', 'dire' et 'juger' qui ne sont que des rappels de moyens et non des prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile, au visa de l'ancien article 1134 et de l'article 1152 du code civil, de l'article L.442-6 du code de commerce, des articles 49 et 544 du code de procédure civile, de :
- prendre acte de l'intervention volontaire de la SELAS MJS Partners, prise en la personne de Me [D], en sa qualité de mandataire judiciaire,
- débouter la SAS Locam - location automobiles matériels de l'ensemble de ses demandes,
statuant à nouveau,
- infirmer le jugement entrepris en ce qui concerne les frais de résiliation, les clauses et la clause pénale,
- dire les clauses relatives aux frais de résiliation non écrites,
- rejeter les demandes formulées par la société Locam en application des frais de résiliation en sus de la clause pénale,
subsidiairement, si la cour devait estimer que les indemnités contractuelles de résiliation étaient dues,
- constater qu'elles revêtent le caractère de clause pénale,
- constater que la société Locam ne justifie d'aucun préjudice,
en conséquence,
- réduire les sommes au titre des clauses pénales,
- sous réserve de la procédure collective en cours, octroyer à M. [C] des délais de paiement à hauteur de 300 euros par mois,
- dire qu'il s'acquittera du solde au bout de deux ans,
- suspendre la restitution du matériel durant les délais de paiement,
subsidiairement, si l'incompétence de la juridiction devait être retenue quant à l'appréciation d'une clause contractuelle,
- renvoyer l'examen de la clause devant la juridiction compétente,
- surseoir à statuer dans l'attente de la décision à intervenir,
en tout état de cause,
- condamner la société Locam à lui verser la somme de 1 000 euros au titre des frais de première instance et à la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens au cause d'appel.
Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'intervention volontaire de la SELAS MJS Partners prise en la personne de Me [D]
Par jugement du 25 juillet 2023, le tribunal judiciaire d'Arras a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire au profit de M. [Y] [C] et la SELAS MJS Partners prise en la personne de Me [W] [D] a été désignée en qualité de mandataire judiciaire.
La société Locam a déclaré sa créance entre ses mains le 9 août 2023.
Il y a donc lieu de constater l'intervention volontaire à la procédure de la SELAS MJS Partners, prise en la personne de Me [D], en sa qualité de mandataire judiciaire.
Sur la demande en paiement
L'article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
L'article 13 des conditions générales du contrat de location conclu entre les parties le 21 juillet 2017, libellé 'Résiliation contractuelle du contrat', stipule que :
'Pour défaut du respect dudit contrat, le contrat de location pourra notamment être résilié de plein droit par le loueur, sans aucune formalité judiciaire, 8 jours après la mise en demeure restée sans effet dans les cas suivants: inobservation par le locataire de l'une des conditions générales ou particulière du présent contrat, non paiement d'un loyer ou d'une prime d'assurance à son échéance [...]
Les cas sus-indiqués emporteront les conséquences suivantes :
1) le locataire sera tenu de restituer immédiatement le matériel au loueur au lieu fixé par ce dernier et de supporter tous les frais occasionnés par cette résiliation [...],
2) outre la restitution du matériel, le locataire devra verser au loueur une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation majorée d'une clause pénale de 10 % ainsi qu'une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'à la fin du contrat telle que prévue à l'origine majorée d'une clause pénale de 10 % [...]'.
au titre des loyers échus impayés et de la clause pénale de 10 % s'y rapportant
Aux termes des conditions particulières du contrat et de l'article 4 des conditions générales libellé 'conditions financières de location' la société Locam s'est engagée à louer à M. [C] du matériel d'équipement de pizzeria moyennant un loyer mensuel de 373,86 euros (dont 14,75 euros au titre de l'assurance).
Il n'est pas contesté que la société Locam a exécuté son obligation alors que M. [C] n'a plus honoré le paiement des loyers à compter de l'échéance de septembre 2017 et que le contrat a été résilié huit jours après la mise en demeure de payer les échéances échues impayées de septembre à novembre 2017, réceptionnée le 19 décembre 2017 et demeurée infructueuse.
C'est par conséquent à bon droit que le premier juge a retenu que la somme de 1 234,08 euros était due au titre des trois échéances de loyer échues impayées (1 121,58 euros), augmentée d'une indemnité de 10 % (112,15 euros).
au titre de l'indemnité de résiliation et de la clause pénale de 10 % s'y rapportant
- sur le moyen tiré du caractère abusif de l'indemnité de résiliation
Aux termes de l'article L 442-6, I 2°, du code de commerce, pris en sa rédaction applicable au présent litige, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ;
Aux termes de l'avant dernier alinéa de cet article, les litiges relatifs à l'application de cet article sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret.
L'article D 442-3 du même code, en sa rédaction applicable au présent litige, dispose que pour l'application de l'article L 442-6, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 de ce livre précisant que ces procédures relèvent de la compétence du tribunal de commerce de Tourcoing pour le ressort de la cour d'appel de Douai.
La cour d'appel compétente pour connaître des décisions rendues par ces juridictions est celle de Paris.
C'est donc à bon droit que la juridiction béthunoise a déclaré irrecevable le moyen soulevé par M. [C] tiré du caractère abusif de l'article 13 des stipulations contractuelles sur le fondement de l'article L 442-6 du code de commerce après avoir relevé que ces dispositions instituent une compétence dérogatoire exclusive et d'ordre public au profit de certaines juridictions spécifiquement identifiées et que le défaut de pouvoir juridictionnel de la juridiction saisie pour statuer sur le moyen constitue une fin de non-recevoir.
De même, l'appréciation des clauses abusives en appel relevant de la compétence exclusive de la cour d'appel de Paris, la cour d'appel de céans n'a pas de pouvoir juridictionnel en la matière.
L'irrecevabilité de ce moyen de défense soulevé par M. [C] sera par conséquent confirmée.
A titre subsidiaire, M. [C] se prévaut des dispositions de l'article 49 du
code de procédure civile, demandant que la cour renvoie cette appréciation à la cour compétente et sursoie à statuer dans l'intervalle.
Cet article dispose que toute juridiction saisie d'une demande de sa compétence connaît, même s'ils exigent l'interprétation d'un contrat, de tous les moyens de défense à l'exception de ceux qui soulèvent une question relevant de la compétence exclusive d'une autre juridiction ; que lorsque la solution d'un litige dépend d'une question soulevant une difficulté sérieuse et relevant de la compétence de la juridiction administrative, la juridiction judiciaire initialement saisie la transmet à la juridiction administrative compétente en application du titre Ier du livre III du code de justice administrative ; qu'elle sursoit à statuer jusqu'à la décision sur la question préjudicielle.
Or le moyen soulevé relève de la compétence exclusive d'une autre juridiction de l'ordre judiciaire de sorte que ces demandes de renvoi et de sursis à statuer seront rejetées.
- sur la qualification de clause pénale d'une telle clause et le caractère excessif des clauses pénales contractuelles
L'article 1231-5 du code civil dispose que lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre ; que néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire ; que lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent ; que toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite ; que sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure.
Il est constant que constitue une clause pénale la clause d'un contrat par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de l'obligation contractée.
En l'espèce, les dispositions de l'article 13 précité, mettant à la charge du bénéficiaire de la prestation, en cas de résiliation du contrat avant son terme, une obligation de paiement équivalente au coût qu'il aurait dû payer en cas d'exécution du contrat jusqu'à son terme, qu'il bénéficie ou non de la prestation, rend illusoire toute liberté de choix de résiliation unilatérale avant l'échéance du terme extinctif. Cette clause le contraint à l'exécution du contrat sur la durée prévue et à défaut, évalue de manière forfaitaire et anticipée le montant du préjudice résultant pour son créancier de la résiliation anticipée, ce en quoi elle a nécessairement la nature d'une clause pénale ainsi que l'a exactement qualifiée le premier juge.
Par ailleurs, le même article prévoit à titre de clause pénale une majoration de 10 % appliquée sur la totalité de ces loyers restant à courir.
Cette disposition doit être réduite en application de l'article 1231-5 du code civil car excessive, la majoration de 10% constituant une clause pénale calculée sur une clause pénale.
La défaillance du locataire et la résiliation du contrat, les situations économiques respectives des parties et l'investissement et le risque financier supportés par la société Locam, le défaut de restitution du matériel au delà du terme du contrat initialement prévu, en l'absence de prorogation et sans contrepartie, justifient que la somme totale due soit supérieure à la somme des loyers convenus sur la totalité de la période prévue et demeurée impayée (soit 59 x 373,86 euros ) et fixée à la somme de 22 235 euros.
Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a condamné M. [Y] [C] à payer à la société Locam la somme de 9 734,08 euros portant intérêts taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter du 19 décembre 2017, et la somme de 22 235 euros, portant intérêts au taux contractuel à compter du 19 décembre 2017, sera fixée au passif de la procédure de redressement de M. [C] au profit de la société Locam.
En application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil, la capitalisation des intérêts échus dus pour une année entière demandée par la société Locam doit être ordonnée et le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur la demande de délai de paiement
Selon l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital. Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette. La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge. Toute stipulation contraire est réputée non écrite.
En l'espèce, M. [C] a déjà bénéficié de larges délais, ayant conservé le matériel depuis la résiliation du contrat intervenue en décembre 2017, période pendant laquelle il ne justifie d'aucun paiement.
Le rejet de sa demande de délais de paiement sera par conséquent confirmé.
Sur les demandes relatives à la restitution du matériel
En application des dispositions de l'article 13 du contrat de location, la restitution doit être ordonnée consécutivement à la résiliation du contrat.
M. [C] doit par ailleurs être débouté de sa demande de suspension de cette obligation parallèlement au rejet de sa demande de délai de paiement.
La décision critiquée sera confirmée de ces chefs.
En revanche, M. [C] n'ayant pas procédé à la restitution du matériel malgré la résiliation du contrat et le dépassement du terme contractuellement prévu, sa condamnation à la restitution sous astreinte se justifie et le jugement sera réformé sur ce point.
Sur les dispositions accessoires
M. [C] succombant en ses prétentions, les dispositions adoptées en application des dispositions des articles 696 et 700 du code de procédure civile seront confirmées et la société MJS Partners en qualité de mandataire judiciaire de M. [C] sera condamnée à payer à la société Locam une indemnité de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel et aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour
constate l'intervention volontaire de la SELAS MJS Partners, prise en la personne de Me [D], en sa qualité de mandataire judiciaire de M. [Y] [C],
confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :
- condamné M. [Y] [C], exerçant sous l'enseigne Pizzeria [S], à payer à la SAS Locam - location automobiles matériels la somme de 9 734,08 euros, majorée du taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter du 19 décembre 2017,
- débouté la SAS Locam - location automobiles de sa demande tendant à voir assortie l'obligation de restitution d'une astreinte,
statuant à nouveau sur ces chefs,
fixe au passif de la procédure de redressement de M. [Y] [C] une créance de la SAS Locam - location automobiles matériels de 22 235 euros, portant intérêts au taux contractuel à compter du 19 décembre 2017,
dit que M. [C] devra restituer le matériel dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant deux mois à l'issue desquels il pourra être à nouveau statué,
rejette les demandes de renvoi et de sursis à statuer,
condamne la société MJS Partners en sa qualité de mandataire judiciaire de M. [Y] [C] aux dépens d'appel et à payer à la SAS Locam - location automobiles une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier
Delphine Verhaeghe
Le président
Bruno Poupet