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Décisions

CA Poitiers, référés premier président, 18 juillet 2024, n° 24/00042

POITIERS

Ordonnance

Autre

CA Poitiers n° 24/00042

18 juillet 2024

Ordonnance n 46

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18 Juillet 2024

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N° RG 24/00042 - N° Portalis DBV5-V-B7I-HCIH

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[X] [Y]

C/

[Z] [W]

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R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

ORDONNANCE DE LA PREMIERE PRÉSIDENTE

RÉFÉRÉ

Rendue publiquement le dix huit juillet deux mille vingt quatre par Madame Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence déléguée par la première présidente de la cour d'appel de Poitiers, assistée de Madame Elodie TISSERAUD, greffière,

Dans l'affaire qui a été examinée en audience publique le onze juillet deux mille vingt quatre, mise en délibéré au dix huit juillet deux mille vingt quatre.

ENTRE :

Madame [X] [Y]

[Adresse 5]

[Localité 3]

non comparante, représentée par Me Céline TIXIER de la SELARL OPTIMA AVOCATS, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT substituée par Me Nathalie MANCEAU, avocat au barreau de POITIERS

DEMANDERESSE en référé ,

D'UNE PART,

ET :

Monsieur [Z] [W]

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparant, assisté de Me Vincent DOUTREUWE, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

DEFENDEUR en référé ,

D'AUTRE PART,

Faits et procédure :

Madame [X] [Y] est propriétaire d'une parcelle cadastrée Section AL n°[Cadastre 2] située sur la commune de [Localité 3].

Monsieur [Z] [W] est propriétaire de la parcelle contigüe cadastrée Section AL n°[Cadastre 6].

Monsieur [Z] [W] a construit plusieurs abris à proximité immédiate de la limite de propriété avec la parcelle de Madame [X] [Y].

Arguant d'infestations régulières de termites qui se développeraient dans le bois de récupération entreposé par Monsieur [Z] [W] dans les abris situés sur son terrain, Madame [X] [Y] a saisi un conciliateur de justice.

Un constat d'accord a été signé le 24 novembre 2022, aux termes duquel Monsieur [Z] [W] s'engageait à enlever les bois objet du litige au plus tard pour le 25 décembre 2022.

A la demande de Madame [X] [Y], par courrier en date du 2 janvier 2023, le maire indiquait avoir mis en demeure Monsieur [Z] [W] d'évacuer lesdits bois outre les objets hors d'usage et le véhicule épave.

Le stockage des bois sur le terrain de Monsieur [Z] [W] perdurant, Madame [X] [Y] a vainement mis ce dernier en demeure de respecter ses engagements par courriers recommandés en date des 17 janvier et 7 février 2023, avant de solliciter du juge qu'il soit conféré force exécutoire à l'accord signé entre les parties le 24 novembre 2022.

Selon ordonnance en date du 13 mars 2023, le tribunal judiciaire de La Rochelle a fait droit à cette demande et conféré force exécutoire au constat d'accord signé entre les parties le 24 novembre 2022.

Par exploit en date du 6 juin 2023, Madame [X] [Y] a saisi le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de La Rochelle afin de solliciter la fixation d'une astreinte pour obtenir l'exécution dudit accord.

Selon jugement en date du 8 mars 2024, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de La Rochelle a notamment :

condamné Monsieur [Z] [W] à évacuer les bois se trouvant sur son terrain, conformément au constat d'accord du 24 novembre 2022, et ce dans le mois de la signification du jugement et passé ce délai sous astreinte de 100 euros par jours de retard, pendant trois mois, passé lequel délai, il sera à nouveau fait droit,

condamné Monsieur [Z] [W] à payer à Madame [X] [Y] la somme de 500 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive et la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Monsieur [Z] [W] a interjeté appel dudit jugement selon déclaration en date du 5 avril 2024.

L'affaire a été orientée en circuit court.

Par exploit en date du 25 juin 2024, Madame [X] [Y] a fait assigner Monsieur [Z] [W] devant la première présidente de la cour d'appel de Poitiers, afin d'obtenir, par application des dispositions de l'article 524 du code de procédure civile, la radiation de l'affaire du rôle de la cour.

L'affaire a été appelée à l'audience du 11 juillet 2024.

Madame [X] [Y] indique que Monsieur [Z] [W] lui a fait parvenir par l'intermédiaire de leur conseils respectifs, un chèque libellé à l'ordre de la CARPA d'un montant de 2 138,90 euros correspondant aux dommages et intérêts pour résistance abusive alloués pour un montant de 500 euros, 1 000 euros d'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens de première instance.

Elle fait néanmoins valoir que Monsieur [Z] [W] n'aurait procédé à aucune intervention pour évacuer les bois se trouvant sur son terrain.

Elle indique que sa demande est formulée dans le délai d'un mois accordé à l'intimé pour conclure, les conclusions d'appelant ayant été signifiés le 5 juin 2024.

Elle sollicite la condamnation de Monsieur [Z] [W] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [Z] [W] s'oppose à la demande de radiation.

Il indique qu'il n'y aurait jamais eu la moindre termite chez lui, mais qu'il y en aurait toujours eu chez Madame [X] [Y] et que ce ne serait que dans un souci d'apaisement qu'il aurait accepté de signer un procès-verbal d'accord dont la rédaction serait selon lui incertaine et source d'interprétation quant aux obligations en découlant.

Il soutient ainsi ne s'être engagé qu'à « enlever les bois objet du litige », c'est-à-dire, susceptible selon lui d'amener des termites, et à n'entreposer que « du bois sain », de sorte qu'il ne se serait jamais engagé à enlever tout le bois.

Il indique avoir évacuer tous les bois litigieux, de sorte qu'il aurait exécuté le jugement dont appel.

En réponse aux conclusions adverses, Madame [X] [Y] soutient que l'enlèvement des bois ne serait que partiel et ne concernerait que les bois visibles depuis la voie publique.

Elle fait valoir qu'il demeurait une grande quantité de bois de récupération sur la parcelle de Monsieur [Z] [W], malgré les interventions d'enlèvement entre le mois de décembre 2022 et le mois de janvier 2023.

Elle soutient que Monsieur [Z] [W] n'aurait pas intégralement exécuté son obligation d'enlèvement des bois entreposés à proximité du fonds de la concluante et qu'il ne justifierait pas avoir procédé à un quelconque enlèvement depuis la signification du jugement.

Elle fait valoir, en outre, que l'objet du litige ne consisterait pas à démontrer qu'elle serait régulièrement Monsieur [Z] [W], mais seulement que ce dernier ne se serait pas conformé à ses engagements.

Motifs :

L'article 524 du code de procédure civile dispose que « lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu'il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l'article 521, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

La demande de l'intimé doit, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, être présentée avant l'expiration des délais prescrits aux articles 905-2, 909, 910 et 911.

La décision de radiation est notifiée par le greffe aux parties ainsi qu'à leurs représentants par lettre simple. Elle est une mesure d'administration judiciaire.

La demande de radiation suspend les délais impartis à l'intimé par les articles 905-2, 909, 910 et 911.

Ces délais recommencent à courir à compter de la notification de la décision autorisant la réinscription de l'affaire au rôle de la cour ou de la décision rejetant la demande de radiation.

La décision de radiation n'emporte pas suspension des délais impartis à l'appelant par les articles 905-2, 908 et 911. Elle interdit l'examen des appels principaux et incidents ou provoqués.

Le délai de péremption court à compter de la notification de la décision ordonnant la radiation. Il est interrompu par un acte manifestant sans équivoque la volonté d'exécuter. Le premier président ou le conseiller de la mise en état peut, soit à la demande des parties, soit d'office, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, constater la péremption.

Le premier président ou le conseiller de la mise en état autorise, sauf s'il constate la péremption, la réinscription de l'affaire au rôle de la cour sur justification de l'exécution de la décision attaquée ».

Sur la recevabilité de la demande de radiation :

L'affaire ayant été orientée en circuit court devant la cour d'appel en application de l'article 905 du code de procédure civile, aucun conseiller de la mise en état n'a été désigné, de sorte que le premier président reste compétent pour statuer sur la radiation de l'appel.

Par ailleurs, la demande a été introduite le 25 juin 2024, soit dans les délais impartis par le code de procédure civile à l'intimée pour conclure.

La demande de radiation est donc recevable.

Sur le bien-fondé de la demande de radiation :

En l'espèce, Monsieur [Z] [W] justifie s'être acquitté du montant des condamnations pécuniaires mises à sa charge par le règlement de la somme de 2 138,90 euros correspondant aux dommages intérêts pour résistance abusive alloués à Madame [X] [Y] pour un montant de 500 euros, 1 000 euros d'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens de première instance.

Aux termes du constat d'accord Monsieur [Z] [W] s'est engagé à « enlever les bois objet du litige » et à n'entreposer que « du bois sain ».

Il ressort des éléments versés aux débats que Monsieur [Z] [W] a vraisemblablement fait procéder à l'enlèvement de bois de récupération.

La discussion relative à l'étendue de l'engagement de Monsieur [Z] [W] aux termes du constat d'accord est inopérante en l'espèce, la juridiction du premier président n'ayant pas à statuer sur cette question, laquelle relève du juge du fond.

La mesure de radiation sollicitée paraît disproportionnée au but poursuivi par l'article 524 du code de procédure civile compte-tenu des diligences accomplies par Monsieur [Z] [W] et de l'intérêt de la procédure d'appel.

En conséquence, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de radiation de Madame [X] [Y].

Succombant à la présente instance, Madame [X] [Y] sera condamnée à payer à Monsieur [Z] [W] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Décision :

Par ces motifs, nous, Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence déléguée par la première présidente de la cour d'appel de Poitiers, statuant par ordonnance contradictoire :

Déboutons Madame [X] [Y] de sa demande de radiation de l'appel interjeté par Monsieur [Z] [W] à l'encontre du jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de La Rochelle le 8 mars 2024,

Condamnons Madame [X] [Y] à payer à Monsieur [Z] [W] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons Madame [X] [Y] aux dépens.

Et nous avons signé la présente ordonnance avec le greffier.

La greffière, La conseillère,

Elodie TISSERAUD Estelle LAFOND