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Décisions

Cass. 3e civ., 11 mai 2010, n° 09-11.334

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lacabarats

Avocats :

Me Odent, SCP Baraduc et Duhamel, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Piwnica et Molinié, SCP Thomas-Raquin et Bénabent

Versailles, du 19 janvier 2009

19 janvier 2009

Joint les pourvois n° F 09-11.334 et Y 09-12.132 ;

Sur la recevabilité du pourvoi principal de la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (n° F 09-11.334), contestée par la défense :

Vu les articles 330 et 609 du code de procédure civile ;

Attendu qu'ayant fait valoir que, condamnée en référé le 23 juillet 2008 à garantir la société Bureau Véritas, dont elle assurait exclusivement la responsabilité décennale, elle avait intérêt à soutenir la position de cette dernière sur l'absence de lien contractuel direct avec le maître de l'ouvrage, la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux Publics (la SMABTP), qui n'est intervenue qu'accessoirement devant la cour d'appel pour appuyer les prétentions de la société Bureau Véritas, ne peut se prévaloir d'aucun droit propre et n'est pas recevable à se pourvoir en cassation, dès lors que la société Bureau Véritas ne s'est elle-même pourvue que postérieurement à ce premier pourvoi ;

Sur la recevabilité du pourvoi provoqué de la société Assurances générales de France IART (n° F 09-11.334) et du pourvoi incident de la société Bureau Véritas (n° F 09-11.334), relevée d'office, après avis donné aux avocats :

Vu les articles 611-1 et 979 du code de procédure civile ;

Attendu que la société Assurances générales de France (AGF) IART et la société Bureau Véritas ne justifiant pas de la signification de l'arrêt attaqué, l'irrecevabilité du pourvoi principal entraîne l'irrecevabilité du pourvoi provoqué et celle du pourvoi incident ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches, et le second moyen, pris en sa cinquième branche, du pourvoi principal de la société mutuelle d'assurances L'Auxiliaire (n° Y 09-12.132), le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi provoqué de la société AGF IART (n° Y 09-12.132 et le premier moyen du pourvoi incident de la société Bureau Véritas (n° Y 09-12.132), réunis, ci-après annexés :

Attendu qu'ayant souverainement retenu que c'est avec le consentement des locateurs d'ouvrage, dont les factures avaient été entièrement réglées, que la société Fidei, maître de l'ouvrage, avait pris possession des lieux, et, que la fin des travaux avait été mentionnée par le maître d'oeuvre, la société Espace consultant aménagement (société ECA), dans sa dernière facture qui avait été payée le 8 septembre 1995, ce dont il résultait que le maître de l'ouvrage avait manifesté une volonté non équivoque d'accepter l'ouvrage, la cour d'appel a, abstraction faite d'un motif surabondant relatif à la location des lieux, pu en déduire qu'une réception tacite de l'ouvrage était intervenue à cette date ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, du pourvoi principal de la société mutuelle d'assurances L'Auxiliaire (n° Y 09-12.132), le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, du pourvoi provoqué de la société AGF IART (n° Y 09-12.132) et le second moyen du pourvoi incident de la société Bureau Véritas (n° Y 09-12.132), réunis, ci-après annexés :

Attendu qu'ayant relevé qu'il n'était pas démontré que le maître de l'ouvrage avait été informé, après le 4 juillet 1993 et à la date de la dernière facture mentionnant les bons à payer aux entreprises et l'achèvement des travaux, de l'absence de suite donnée par la société Cers, entrepreneur chargé de l'exécution du lot "cloisonnement et faux plafond", aux injonctions du maître d'oeuvre, ni que son attention avait été attirée par celui-ci à cette date sur la portée de la clause contractuelle subordonnant la réception et le règlement intégral des entreprises à la transmission par le contrôleur technique, la société Contrôle et prévention, devenue la société Bureau Véritas (société Véritas), de son "procès-verbal de vérification des installations techniques", constaté que c'est seulement les 10 octobre, 11, 12 et 20 décembre 1995, que ce contrôleur avait avisé le maître de l'ouvrage des non-conformités relevées dans les documents ou au cours de ses visites de chantier, ainsi que des raisons de la suspension de ses avis, et ayant retenu que la réalité et la nature exacte des défauts de conformités affectant le faux-plafond et la totalité des cloisons, non susceptibles de tenir au feu, n'avaient été révélées dans toute leur ampleur et leurs conséquences qu'au cours des opérations d'expertise et que le maître de l'ouvrage, profane de la construction, n'avait pu, en l'absence de toute indication en ce sens donnée par le maître d'oeuvre et le contrôleur technique, se rendre compte de l'existence de non-conformités à une réglementation technique, la cour d'appel, d'une part, a, sans se contredire, souverainement retenu que les vices n'étaient pas apparents à la réception, d'autre part, a pu en déduire que le maître de l'ouvrage, qui n'avait pas, en réceptionnant tacitement l'ouvrage dans les conditions où il l'avait fait, commis de faute ayant concouru à la survenance des dommages, n'avait pas non plus accepté de risques de nature à engager sa responsabilité ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, pris en ses quatre premières branches réunies, du pourvoi principal de la société mutuelle d'assurances L'Auxiliaire (n° Y 09-12.132), ci-après annexé :

Attendu que l'appréciation tant de l'aléa dans le contrat d'assurance que de la faute intentionnelle ayant pour effet de retirer à ce contrat son caractère aléatoire, qui implique la volonté de son auteur de créer le dommage tel qu'il est survenu, relève du pouvoir souverain des juges du fond ; qu'ayant constaté non seulement que la société Cers n'avait pas, à la date de la signature de son contrat d'assurance avec la société mutuelle d'assurances L'Auxiliaire (société L'Auxiliaire), connaissance du caractère inéluctable de la survenance du dommage, mais encore ne s'était pas délibérément soustraite, dans le cours de l'exécution de ce contrat, aux règles de sécurité incendie et aux dispositions de son marché ou même aux règles de l'art puisque les avis du contrôleur technique sur les moyens à mettre en oeuvre pour prévenir les non-conformités ou y remédier ne lui avaient pas été transmis, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Attendu, d'autre part, que la cour d'appel, devant laquelle la société L'Auxiliaire s'était bornée à invoquer un ordre de service daté du 17 décembre 1992, n'a pas inversé la charge de la preuve en retenant que l'ouverture du chantier, qui devait s'entendre comme désignant le commencement effectif des travaux confiés à la société Cers, était postérieure au 1er janvier 1993, date de prise d'effet du contrat d'assurance puisque, à la date du 17 décembre 1992, avait seulement été tenue une réunion préparatoire, préalablement à l'ouverture du chantier, que d'autres entreprises étaient appelées à intervenir avant la société Cers notamment pour démolir les cloisons, enlever les éléments d'équipements existants et réaliser d'autres travaux, et que le premier devis de cette société était postérieur au cahier des clauses techniques particulières daté du 8 janvier 1993 ;

Attendu, enfin, que saisie de conclusions de la société L'Auxiliaire invoquant l'exclusion de garantie contenue à l'article 6-4 du chapitre III des conditions générales du contrat "tenant à l'existence des réserves formulées avant réception par le bureau de contrôle", "si le sinistre a son origine dans l'objet même de ces réserves et ce tant que ces réserves n'auront pas été levées", et ayant retenu que les rapports du contrôleur technique au maître de l'ouvrage contenant ces réserves étaient postérieures à la réception, la cour d'appel a pu déduire de ces seuls motifs que cette clause d'exclusion n'était pas applicable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi provoqué de la société AGF IART (n° Y 09-12.132), ci-après annexé :

Attendu qu'ayant constaté que si la société ECA, assurée par la société AGF IART, avait été imprudente en laissant la société Cers poursuivre les travaux au-delà du premier étage en l'absence de communication par elle des justificatifs réclamés les 22 décembre 1992 et 4 janvier 1993 relatifs aux travaux à exécuter à cet étage, cette imprudence ne suffisait pas, en l'absence de preuve de la connaissance par la société ECA d'un risque déjà réalisé lorsqu'ont été entrepris les travaux sur les autres étages, à constituer, de sa part, la volonté de causer le dommage, la cour d'appel en a souverainement déduit l'absence de disparition de l'aléa ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

DECLARE IRRECEVABLES les pourvois principal, incident et provoqué n° F 09-11.334 ;

REJETTE les pourvois principal, incident et provoqué n° Y 09-12.132 ;

Sur le pourvoi n° F 09-11.334 :

Condamne la SMABTP aux dépens du pourvoi principal ;

Laisse à la société AGF IART et à la société Bureau Véritas la charge des dépens afférents à leur pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de ce chef ;

Sur le pourvoi n° Y 09-12.132 :

Condamne la société L'Auxiliaire aux dépens du pourvoi principal ;

Laisse à la société AGF IART et à la société Bureau Véritas la charge des dépens afferents à leur pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de la société AGF IART, de la société L'Auxiliaire et de la société Bureau Véritas ; condamne la société L'Auxiliaire à payer à la société Chantecoq la somme de 2 500 euros et à la société Foncière 1 la somme de 2 500 euros ; condamne, ensemble, la société AGF IART et la société Véritas à payer à la société Foncière 1 la somme de 2 500 euros ;

Rejette toutes autres demandes de ce chef ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille dix.