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Décisions

CA Saint-Denis de la Réunion, ch. civ., 19 juillet 2024, n° 23/00425

SAINT-DENIS DE LA RÉUNION

Ordonnance

Autre

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Conseiller :

M. Chevrier

Avocats :

Me Bigot, Me Chung To Sang

CA Saint-Denis de la Réunion n° 23/0042…

18 juillet 2024

FAITS ET PROCÉDURE

Vu le jugement contradictoire mixte rendu le 27 janvier 2023 par le tribunal judiciaire de Saint-Pierre de la Réunion ayant statué en ces termes :

Déboute M. [Y] [G] [D] [X] de sa demande de restitution de matériel ;

Sursoit à statuer sur les autres demandes ;

Ordonne la révocation de l'ordonnance de clôture et la réouverture des débats ;

Renvoie l'affaire à l'audience de mise en état du 9 mars 2023 lors de laquelle les parties seront invitées à se prononcer sur leur acceptation ou leur refus d'une mesure de médiation.

Vu la déclaration d'appel déposée par RPVA au greffe de la cour d'appel le 31 mars 2023 par Monsieur [Y] [X] à l'encontre du jugement susvisé ;

Vu l'ordonnance renvoyant l'instruction de l'affaire à la mise en état ;

Vu les conclusions d'incident déposées par RPVA le 1er septembre 2023 puis le 5 février 2024, par Monsieur [F], aux fins de constatation de la caducité de la déclaration d'appel, et de condamnation de l'appelant à lui payer une indemnité de 2.000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions en réplique N° 2 sur l'incident, déposées par Monsieur [Y] [X] par RPVA le 2 avril 2024, demandant au conseiller de la mise en état de :

DIRE n'y avoir lieu à caducité de la caducité d'appel de Monsieur [X],

DEBOUTER Monsieur [F] de toutes ses demandes,

En conséquence,

DECLARER Monsieur [X] recevable en son appel,

CONDAMNER Monsieur [F] aux dépens, sauf à les réserver et les joindre au fond.

L'incident ayant été examiné à l'audience du 11 juin 2024.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la caducité de la déclaration d'appel :

Monsieur [Y] [X] plaide qu'il a subi, le vendredi 30 juin 2023, une panne informatique qui a empêché l'accès au logiciel informatique de l'avocat de Monsieur [X] ( dénommé KLEOS), qui est un logiciel hébergé stockant donc l'ensemble des données et documents dans un cloud fourni par le prestataire auquel on accède à distance, et comprenant donc l'agenda du cabinet, les documents du dossier, la création de document, de sorte que, cet accès ayant été interrompu ce jour-là, il n'a été possible de conclure le 30 juin 2023, mais uniquement le premier jour ouvrable suivant, à savoir le lundi 03 juillet 2023.

En raison de cet incident informatique, il est demandé au Conseiller de la Mise En Etat de dire n'y avoir lieu à caducité et de débouter Monsieur [F] de toutes ses demandes d'incident.

Monsieur [F] considère qu'il n'est pas démontré que la panne informatique ait un caractère extérieur et insurmontable. Les éléments présentés par l'appelant ne prouvent pas une circonstance insurmontable ne permettant pas de conclure entre le 30 juin 2023 et le " jour ouvrable suivant " à savoir le 03 juillet 2023. En tout état de cause, le logiciel Kleos n'est qu'un logiciel de gestion totalement indépendant du RPVA. Or, seul le RPVA est indispensable à la communication des conclusions d'appel, si bien que même en cas de panne de Kleos, il était tout à fait possible de communiquer des conclusions par RPVA. En l'état, l'appelant ne prouve pas l'existence d'un dysfonctionnement insurmontable du RPVA pendant le délai de 3 mois imparti pour conclure.

Sur ce,

L'article 908 du code de procédure civile prescrit qu'à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dispose d'un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel pour remettre ses conclusions au greffe.

Aux termes de l'article 911 du code de procédure civile, sous les sanctions prévues aux articles 905-2 et 908 à 910, les conclusions sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour. Sous les mêmes sanctions, elles sont signifiées au plus tard dans le mois suivant l'expiration des délais prévus à ces articles aux parties qui n'ont pas constitué avocat ; cependant, si, entre-temps, celles-ci ont constitué avocat avant la signification des conclusions, il est procédé par voie de notification à leur avocat.

La notification de conclusions au sens de l'article 910-1 faite à une partie dans le délai prévu aux articles 905-2 et 908 à 910 ainsi qu'à l'alinéa premier du présent article constitue le point de départ du délai dont cette partie dispose pour remettre ses conclusions au greffe.

L'article 910-3 du code de procédure civile prescrit qu'en cas de force majeure, le président de la chambre ou le conseiller de la mise en état peut écarter l'application des sanctions prévues aux articles 905-2 et 908 à 911.

Enfin, l'article 930-1 du même code prescrit qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique.

En l'espèce, les premières conclusions de l'appelant ont été remises par RPVA le 3 juillet 2023.

La déclaration d'appel avait été déposée le 31 mars 2023.

Ainsi, l'expiration du délai de trois mois prévu par l'article 908 du code de procédure civile est intervenue le vendredi le 30 juin 2023.

En déposant ses écritures le lundi 3 juillet 2023, l'appelant a dépassé le délai.

Il appartient cependant à l'appelant de démontrer que le défaut de dépôt de ses conclusions avant le 30 juin 2023 est causé par un cas de force majeure, imprévisible, irrésistible et extérieur.

Pour justifier de l'événement qu'il qualifie de force majeure, l'appelant produit :

1. Impression écran du 30 juin 2023

2. Présentation commerciale du logiciel Kleos

Selon la capture d'image d'écran du 30 juin, il est incontestable que le logiciel de gestion du cabinet de l'avocat de l'appelant a rencontré un problème technique, sans que la date exacte ni l'heure de l'incident informatique ne soit décelable sur la photo produite, même si les dates de session qui y figurent mentionnent celle du 3 juillet 2023.

Par ailleurs, la description du logiciel du cabinet d'avocat n'a aucun effet sur l'allégation de la force majeure.

Néanmoins, la panne du logiciel de gestion Keos est bien un événement extérieur et imprévisible comme le soutient justement l'appelant.

Mais cet événement n'apparaît pas irrésistible car,

Selon le second alinéa de l'article 930-1 du code de procédure civile, lorsqu'un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe ou lui est adressé par lettre recommandée avec demande d'avis

de réception.

Or, l'appelant n'a pas tenté de remettre au greffe de la cour d'appel ses écritures hors la voie électronique qui lui était apparemment bloquée en raison de la panne informatique de son logiciel de gestion.

En conséquence, la force majeure ne peut pas être retenue et la caducité de la déclaration d'appel doit être prononcée.

L'appelant supportera les dépens et les frais irrépétibles de Monsieur [W] [F].

PAR CES MOTIFS

Nous, Patrick CHEVRIER, président de chambre, chargé de la mise en état, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement, en matière civile par décision susceptible de déféré ;

PRONONCONS la caducité de la déclaration d'appel déposée le 31 mars 2023 par Monsieur [Y] [X] à l'encontre du jugement prononcé le 27 janvier 2023 par le tribunal judiciaire de Saint-Pierre de la Réunion ;

CONDAMNONS Monsieur [Y] [X] à payer à Monsieur [W] [F] une indemnité de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNONS Monsieur [Y] [X] aux dépens.

La présente ordonnance a été signée par Le conseiller de la mise en état et le greffier.