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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 15, 24 juillet 2024, n° 24/07473

PARIS

Ordonnance

Autre

PARTIES

Demandeur :

Ania (Association)

Défendeur :

Autorité de la concurrence

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tell

Avocats :

Me Boccon Gibod, Me Genty, Me Bourgery

CA Paris n° 24/07473

23 juillet 2024

Par décision n° 23-D-15 en date du 29 décembre 2023, notifiée le 14 mars 2024 à l'Association Nationale des Industries Alimentaires (ci-après 'ANIA '), l'Autorité de la concurrence (ci-après ' l'Autorité ') relative à des pratiques dans le secteur de la fabrication et la vente de denrées alimentaires en contact avec des matériaux pouvant ou ayant pu contenir du bisphénol A, a prononcé à l'encontre de l'ANIA une sanction pécuniaire de 2.700.000 euros.

Le 18 mars 2024, l'Association Nationale des Industries Alimentaires a formé un recours en annulation ou en réformation contre cette décision et a déposé au greffe de la Cour d'appel, le 2 mai 2024, une assignation aux fins de sursis à exécution de la décision de l'Autorité, sur le fondement des articles L. 464-2, L. 464-8 et R. 464-22 à R.464-24 du code de commerce (RG n° 24/07473).

L'audience pour statuer sur cette demande a été fixée au 12 juin 2024.

SUR LE RECOURS (RG n° 24/07473)

Par conclusions récapitulatives déposées au greffe de la Cour d'appel de PARIS le 3 juin 2024, la requérante demande au magistrat délégué par le Premier Président de la Cour d'appel de Paris de :

- Juger que la sanction prononcée à l'article 10 de la Décision n° 23-D-15 de l'Autorité de la concurrence est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives pour l'ANIA.

En conséquence,

- Ordonner le sursis à exécution de la sanction de 2 700 000 euros prévue à l'article 10 de la Décision n° 23-D-15 de l'Autorité de la concurrence, jusqu'à ce que la Cour d'appel de Paris ait statué sur le bien-fondé du recours en annulation et en réformation formé par l'ANIA contre la décision n° 23-D-15.

En tout état de cause, condamner l'Autorité de la concurrence à verser à l'ANIA la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.

Dans ses observations reçues au greffe de la cour le 17 mai 2024, l'Autorité de la concurrence soutient que la requête formulée par l'ANIA, qui vise à obtenir le sursis à exécution de la sanction prononcée à son encontre à l'article 10 de la Décision n° 23-D-15, doit être rejetée.

EXPOSE DES MOYENS

Dans ses conclusions précitées, l'ANIA soutient que sa situation financière ne lui permet pas de faire face au paiement du montant excessif de la sanction prononcée par l'Autorité de la concurrence. Elle expose qu'elle est une association d'associations d'entreprises, qui rassemble trente-deux syndicats métiers, six membres associés et dix-sept associations régionales représentatives du secteur de l'industrie alimentaire en France ; ses membres étant donc des syndicats métiers ou des associations, et non des entreprises, ayant eux-mêmes des ressources limitées. L'ANIA soutient que malgré son rôle et ses diverses actions, elle ne dispose que de ressources très limitées, dont une partie non négligeable est consacrée au paiement des salaires, puisqu'au 31 décembre 2023, l'ANIA compte 18 salariés (Pièce n°3), représentant une masse salariale brute de 1 520 196 euros (Pièce n°4).

L'ANIA soutient qu'elle ne dispose pas de la capacité à s'acquitter de l'amende compte tenu de sa situation financière :

S'agissant de ses ressources, elle expose qu'en vertu de ses statuts, ses recettes se composent essentiellement des cotisations des membres adhérents et des cotisations des membres associés et que s'agissant de l'exercice clos au 31 décembre 2022, l'ANIA disposait de produits courants d'un montant de 3 787 000 euros (Pièce n° 5) alors que le projet de compte pour 2023 fait quant à lui apparaitre un montant de 3 761 000 euros (Pièces n°6 et 7). Elle ne dispose d'aucunes autres recettes propres. L'ANIA soutient donc que le montant de l'amende apparaît manifestement disproportionné par rapport aux ressources dont elle dispose puisqu'il représente environ 71 % de ses produits annuels (2022 et 2023).

S'agissant de ses résultats, l'ANIA expose que les bilans 2022 et 2023 font état d'un résultat net déficitaire (Pièces n°8, 9 et 6 et 7) alors que sa situation financière s'est dégradée en 2023 comme le démontre l'attestation de l'expert-comptable présentant le bilan définitif de 2023 (Pièce n°16). Si l'ANIA a pu précédemment réaliser un résultat net négatif sur un exercice donné, elle fait face à une succession de résultats nets déficitaires inédits par leur ampleur (-228 166 euros en 2022 et -357 966 euros en 2023) qui fragilisent son équilibre financier. Il en découle une réduction drastique de ses réserves (500 111 euros en 2022, 142 144 euros en 2023).

L'ANIA rappelle qu'en tant qu'association, elle doit présenter des comptes équilibrés, ce qui explique que pour la plupart des exercices passés son résultat d'exploitation soit positif, mais elle souligne que son excédent d'exploitation est faible (135 794 euros en 2023) au regard des produits au bilan (environ 3,6 % de ses produits) et du montant de l'amende (5%).

Sur l'argument de l'Autorité selon lequel l'actif circulant de l'ANIA lui permettrait largement de couvrir son passif à court terme, elle rétorque qu'il faut prendre en compte le bilan d'ANIA SERVICES pour obtenir une vision agrégée des états financiers de l'ANIA. Or, le bilan agrégé de l'ANIA 2023 (ANIA + ANIA SERVICES) fait apparaitre un actif circulant (hors immobilisations) de 1 872 636 euros (et non de 4,8 millions d'euros comme le prétend l'Autorité), en baisse de plus de 34% sur un an (2 825 842 euros au 31 décembre 2022) ; cet actif circulant étant inférieur aux dettes qui atteignent un montant de 1 910 324 euros au 31 décembre 2023.

L'ANIA ajoute qu'ainsi, elle ne compte dans son actif des créances que pour un montant de 1 124 454 euros fin 2023, alors que ces créances constituent principalement des cotisations des adhérents et partenariats institutionnels en voie de recouvrement, ainsi que des créances fiscales (comme la TVA). Elle soutient que ce recouvrement des cotisations permet de payer les charges de fonctionnement (masse salariale, loyer, activités') et ne constitue pas des ressources additionnelles mobilisables pour un usage exceptionnel sans remettre profondément en cause les activités et les services rendus aux adhérents.

S'agissant de son patrimoine, l'ANIA indique qu'en outre, elle ne possède aucun bien immobilier et ne détient que quelques titres de participations pour un montant limité (87 107 euros une fois les dépréciations prises en compte). Il en va de même des 748 182 euros de disponibilités dans son bilan 2023 qui ne constituent pas une épargne de précaution, mais un fonds de roulement. Elle justifie d'un solde des avoirs sur comptes bancaires au 29 février 2024 d'un montant de 500 059 euros (Pièce n°10). L'ANIA soutient encore qu'il n'existe aucun actif détenu par elle susceptible d'être cédé (Pièce n°14).

S'agissant de ses charges de personnel, l'ANIA soutient que le paiement immédiat de la sanction aurait un impact sur le personnel de l'ANIA, puisqu'elle dispose d'un effectif de 18 salariés au 31 décembre 2023 (Pièce n°3), représentant une masse salariale brute annuelle de 1 520 196 euros (Pièce n°4). Elle affirme qu'au regard de l'actif disponible (500 059 euros au 29 février 2024), et de cette masse salariale brute, le paiement de l'amende ne lui permettrait pas d'assurer le paiement des salaires et que le licenciement de son personnel serait inévitable.

L'ANIA soutient qu'elle n'a pas la possibilité de recourir à un concours bancaire ou de faire appel à ses adhérents pour payer la sanction infligée. Elle expose ainsi que le Crédit Agricole, banque avec laquelle elle traite habituellement et qui est la référence en matière agro-alimentaire, a refusé sa demande de crédit de trésorerie de 2,7 millions d'euros (Pièce n° 11). Dès lors qu'elle ne dispose d'aucun actif ou d'aucune ressource pouvant tenir lieu de garantie pour le remboursement d'un tel emprunt bancaire, elle argue qu'il serait déraisonnable de la contraindre de faire appel à d'autres banques, n'ayant aucune relation d'affaires avec l'ANIA, ni aucun intérêt particulier vis-à-vis du secteur agricole, afin de lui accorder un prêt d'un tel montant sans aucune garantie à offrir de la part de l'ANIA.

L'ANIA soutient également ne pouvoir faire appel à ses membres pour s'acquitter du montant de la sanction, arguant qu'il n'existe pas de mécanisme de solidarité financière de principe des adhérents de l'association. L'ANIA se réfère à ses statuts pour exposer que " parce qu'elle est personnifiée, l'association dispose d'une autonomie patrimoniale : elle a ses propres créances et ses propres dettes bien distinctes de celles de ses membres. Les membres ne sont d'ailleurs pas redevables du passif de la personne morale associative. " (Pièce n°12). Elle se prévaut en outre d'un document selon lequel ses principaux adhérents ont indiqué qu'ils ne contribueraient pas volontairement au paiement de la sanction qui lui a été infligée, en raison des ressources limitées dont ils disposent (Pièce n°13). Elle rappelle que l'article 14 de la directive ECN + qui vise à remédier à cet inconvénient créant un mécanisme obligeant l'association à faire appel à contributions pour couvrir le montant de l'amende infligée, et dont se prévaut l'Autorité, n'est pas applicable à la date du litige.

Sur le risque de départ des adhérents et de disparition de l'ANIA, il est soutenu que le paiement de la sanction infligée par l'Autorité de la concurrence à l'ANIA mettrait inévitablement en péril sa viabilité pour deux principales raisons. Premièrement, l'ANIA serait en état manifeste de cessation de paiement. Deuxièmement, les adhérents pourraient avoir la tentation de quitter l'ANIA pour rejoindre des syndicats concurrents. Elle rappelle ainsi que l'ADEPALE et ses syndicats métiers dont la FIAC ont quitté l'ANIA ; ce départ de l'ADEPALE de l'ANIA créant une véritable alternative à l'ANIA en devenant une organisation généraliste, Pact'Alim (anciennement l'ADEPALE). L'ADEPALE représentait le quatrième plus gros contributeur du budget de l'ANIA avec une cotisation qui représentait 506 006 euros en dernière année pleine (2019). Elle ajoute qu'elle a reçu le courrier de démission de son principal et premier contributeur, la Fédération Nationale des Industries Laitières (FNIL), qui représente 544 366 euros de cotisation en 2023, soit 15% des produits de l'ANIA (Pièce n°15). L'ANIA prétend donc que ces éléments démontrent, contrairement à ce qu'affirme l'Autorité, que les organismes professionnels dans le secteur, et notamment Pact'Alim qui se revendique "au niveau d'organisations telles que l'ANIA " représentent tous " une alternative crédible " à l'ANIA, ce qui pourrait donc déboucher sur un départ de ses adhérents et entrainerait donc nécessairement des conséquences manifestement excessives.

L'ANIA soutient que le paiement de la sanction, avant que la Cour d'appel de Paris ne se soit prononcée sur le fond, entraînerait donc une incapacité pour celle-ci à faire face à son passif exigible et dès lors, sa mise en liquidation.

En outre, dans ses écritures auxquelles il sera référé pour des plus amples détail sur les arguments soulevés, l'ANIA soutient qu'il ressort manifestement de la décision n°23-D-15 précitée que l'Autorité de la concurrence a manqué à son obligation de motivation de la sanction qu'elle lui a infligée. Il est prétendu que Autorité de la concurrence s'est uniquement contentée d'écarter son Communiqué sanctions et d'appliquer une sanction forfaitaire de 2,7 millions d'euros à l'ANIA, sans indiquer les raisons qui l'ont conduite à infliger un tel montant. Elle soutient en réplique aux arguments soulevés par l'Autorité que ce moyen n'a pas vocation à demander au Premier Président de la Cour d'appel de statuer sur la motivation ou non de la Décision, mais de statuer sur les conséquences que le défaut de motivation entraîne pour l'ANIA, à savoir, un risque sérieux d'annulation de nature à engendrer des conséquences manifestement excessives pour l'ANIA en cas de paiement de l'amende avant l'exercice des voies de recours au fond.

- Dans ses observations précitées, auxquelles il sera référé pour des plus amples détails sur les arguments avancés, l'Autorité de la concurrence considère qu'aucun des moyens soutenus par l'ANIA ne saurait prospérer.

En premier lieu, l'Autorité soutient que la valeur probatoire des éléments invoquées par la requérante pour justifier de ses difficultés financières qui seraient de nature à mettre en péril la continuité de son activité, est insuffisante.

L'Autorité soutient qu'un résultat net négatif n'est donc pas synonyme à lui seul d'une mauvaise situation financière mettant en péril l'activité d'une entreprise. Elle expose que l'ANIA a déjà fait l'objet dans le passé de résultats déficitaires (-114 012€ en 2012, -142 142€ en 2018) sans pour autant disparaitre. S'agissant de l'impact qu'aurait le paiement de la sanction sur le personnel de l'ANIA, l'Autorité considère l'argument infondé dès lors que le solde d'avoir bancaire de l'ANIA tel qu'attesté par son expert-comptable au 29 février 2024, ne permettrait pas, en tout état de cause, de couvrir la totalité de sa masse salariale.

L'Autorité fait valoir que la capacité contributive d'une entité s'apprécie au regard de l'actif mobilisable, lequel ne se résume pas uniquement à des disponibilités sur comptes bancaires et peut comprendre d'autres actifs. L'Autorité souligne qu'à ce titre, le projet de comptes annuels de 2023 et les comptes annuels de 2022 font apparaître que l'actif circulant de l'association excède largement son passif à court terme puisque l'ANIA prévoit de disposer, au 31 décembre 2023, d'un actif circulant à hauteur de 4,8 millions d'euros, alors qu'en 2022, il s'élève à 6,1 millions d'euros. Il est constaté que l'actif circulant de l'ANIA représente ainsi respectivement plus de 3 fois son passif de court terme en 2023, et plus de 2,5 son passif de court terme en 2022 (selon un tableau produit en page 7 des observations de l'Autorité). Selon l'Autorité, l'ANIA ne démontre donc pas en quoi elle serait confrontée à des risques significatifs de solvabilité à court terme. L'Autorité note en outre que l'ANIA détient, au sein de cet actif, des créances à hauteur de 4 millions d'euros en 2023 et 5,6 millions d'euros en 2022, dont respectivement 3,6 millions d'euros en 2023 et 4 millions d'euros en 2022 vis-à-vis d'ANIA Services. Il est encore relevé que s'agissant de l'actif immobilisé de l'association, si aucun bien immobilier n'est inscrit à l'actif de l'association, certains postes du bilan font apparaître des capacités de mobilisation de liquidités puisque l'ANIA detient ainsi plus de 285 000 euros de participations, d'immobilisations financières et des prêts vis-à-vis de tiers. Il est soutenu que si ces montants sont inférieurs au montant de la sanction, il s'agit d'actifs potentiellement mobilisables en tout ou partie conjointement aux autres actifs circulants pour concourir au paiement de la sanction.

L'Autorité ajoute que l'ANIA ne tient compte, ni d'éventuels concours bancaires, ni d'éventuels délais de paiement dont elle pourrait bénéficier de la part du comptable public.

S'agissant de l'absence de facilité bancaire de la part du Crédit Agricole dont fait état l'ANIA, l'Autorité soutient en outre qu'elle n'est pas pleinement démontrée. Il est argué que l'ANIA n'a pas sollicité d'autres établissements financiers du marché. Il est ajouté par l'Autorité que le refus d'accord de crédit de trésorerie pour un montant équivalent à la totalité de la sanction prononcée par l'Autorité n'exclut pas l'octroi de facilités bancaires pour des montants inférieurs, mais suffisants pour permettre à l'ANIA de faire face à l'acquittement de son amende.

S'agissant de l'impossibilité de faire appel aux adhérents de l'ANIA pour le paiement de la sanction, l'Autorité considère qu'il serait trop aisé pour une association d'entreprises d'échapper à une sanction si elle pouvait invoquer le simple fait qu'elle ne dispose pas formellement du pouvoir d'engager ses membres en exigeant d'eux le paiement d'une cotisation exceptionnelle destinée à couvrir le montant d'une amende. L'Autorité ajoute que les entreprises envisageant des comportements anticoncurrentiels auraient ainsi intérêt à constituer une association d'entreprises pour conclure des accords contraires au droit de la concurrence, ce qui compromettrait la faculté d'imposer des amendes dissuasives dès lors que des associations disposant de peu de moyens financiers, mais regroupant, sans pour autant pouvoir les engager formellement, un nombre élevé d'adhérents réalisant un chiffre d'affaires important, ne pourraient être sanctionnées que par des amendes très réduites.

L'Autorité soutient qu'en l'espèce, il ne peut donc être exclu que l'ANIA puisse faire appel à la contribution de ses membres, quand bien même ces derniers auraient indiqué ne pas souhaiter " volontairement " participer au paiement de la sanction infligée à l'ANIA.

L'Autorité conteste donc que le paiement de l'amende mettrait en péril la poursuite de l'activité de l'ANIA. Il est argué que l'argument relatif au risque d'exploitation encouru par l'ANIA n'est pas valide dès lors que les documents comptables soumis par l'ANIA à ce stade de la procédure ne permettent pas de conclure qu'elle serait dans un état de cessation de paiement, son actif de court terme, évalué par l'actif circulant, excédant largement son passif de court terme, y compris dans l'hypothèse du paiement de la sanction.

S'agissant du moyen relatif au départ de ses adhérents, l'Autorité soutient que l'ANIA ne démontre pas suffisamment le risque allégué. L'Autorité relève l'importance de l'ANIA pour le secteur agroalimentaire qui incite à relativiser le risque d'un départ massif de ses membres, dès lors que l'ANIA est une association professionnelle majeure, sinon quasi-incontournable, dans le secteur agro-alimentaire et qu'elle-même se présente comme jouant un rôle de premier plan dans la représentation du secteur, lui permettant d'être " un interlocuteur privilégié des pouvoirs publics, des institutions et des médias sur tous les sujets relatifs à l'agroalimentaire ".

S'agissant, en second lieu, du prétendu caractère disproportionné de la sanction, l'Autorité fait valoir qu'elle a fait application d'une disposition transitoire de l'ordonnance n° 2021-649 du 26 mai 2021 transposant en droit français la directive dite " ECN+ " prévoyant, pour les contrevenants n'étant pas des entreprises, un plafond forfaitaire d'amende fixé à trois millions d'euros. L'Autorité ajoute que les sanctions pécuniaires qu'elle prononce doivent revêtir un caractère dissuasif et proportionné, ce qui implique, dans le cas d'une association d'entreprises, de tenir compte des moyens financiers de ses adhérents, des objectifs poursuivis par l'association et son comportement étant fortement déterminé par ses membres ; à défaut, les entreprises pourraient avoir un intérêt à mettre en place des stratégies anticoncurrentielles via une association. L'Autorité ajoute qu'en l'espèce, dans la motivation de la Décision, elle a notamment pris en compte, dans le calcul de la sanction infligée à l'ANIA, le fait qu'il s'agit d'un acteur quasi-incontournable du secteur agro-alimentaire, représentant " les entreprises alimentaires françaises, grands leaders mondiaux, ETI et TPE-PME " de la " première industrie de France " ainsi que l'ensemble des circonstances pertinentes, dans le respect du plafond légal prévu par la loi. L'Autorité souligne qu'elle n'a donc pas méconnu le principe de proportionnalité en l'espèce. Il est encore soutenu qu'en l'espèce, compte tenu de la gravité de l'infraction à laquelle l'ANIA a participé, le montant de la sanction qui lui a été infligée apparait relativement modeste, de même que le sont les sanctions prononcées à l'égard des entreprises mises en cause, dont certaines appartiennent à de grands groupes.

Enfin, l'Autorité fait valoir qu'il ressort d'une jurisprudence constante qu'il n'appartient pas au juge statuant sur une demande de sursis à exécution d'apprécier la proportionnalité de la sanction, laquelle incombe au juge du fond.

- Le ministère public dans son avis du 7 juin 2024, rappelle qu'il est constant que le risque de conséquences manifestement excessives induit par le règlement de l'amende dont la preuve lui incombe, doit être apprécié au regard de la situation de la requérante.

Le ministère public est d'avis en premier lieu, que cette juridiction rejette le moyen tiré d'un défaut allégué de motivation de la décision de l'Autorité, objet d'un recours au fond, dès lors que s'agissant d'un moyen de fond, celui-ci ne ressortit pas à la compétence du magistrat délégué du Premier Président saisi d'une requête sur le fondement de l'article L. 464-8, alinéa 2, du code de commerce.

Le ministère public rappelle qu'il résulte d'un arrêt récent de la Cour de cassation, que le caractère manifestement excessif des conséquences visées à l'article L. 621-30 du CMF de l'exécution immédiate d'une décision de sanction de l'AMF permettant de solliciter le sursis à exécution, doit être apprécié par rapport à la situation de la personne sanctionnée sans qu'il y ait lieu d'analyser les chances de succès du recours en annulation ou en réformation de cette décision. Dans cette affaire, la Chambre commerciale a validé la motivation du magistrat délégué du Premier président et rejeté le pourvoi formé contre l'ordonnance qui avait écarté sans les examiner les arguments tirés de ce qu'une irrégularité manifeste alléguée de la procédure de sanction était la cause, avec le montant de l'amende, d'une conséquence manifestement excessive.

Le ministère public considère que cette jurisprudence récente est l'occasion saisie par la Chambre commerciale de mettre fin à une jurisprudence jugée hétérogène de la Cour d'appel de Paris en matière de sursis à exécution de ces décisions, apparait transposable aux conséquences manifestement excessives visées par l'article L. 464-8 du code de commerce, de sorte qu'il en découle que ces demières ne recouvrent pas l'existence éventuelle d'irrégularités procédurales flagrantes ressortissant à la seule compétence de la chambre de la cour d'appel de Paris statuant sur le fond des recours.

Le ministère public est d'avis en outre qu'il convient d'écarter les arguments relatifs à l'appréciation de la proportionnalité de l'amende infligée par la décision objet d'un recours au fond, notamment s'agissant de son montant, au regard du plafond applicable aux entreprises et des montants infligés aux autres personnes sanctionnées, dès lors qu'il est également de jurisprudence constante qu'il n'appartient pas au magistrat délégué du Premier Président saisi d'une telle requête d'apprécier la proportionnalité de la sanction qui ressortit à la juridiction du fond.

S'agissant d'éventuels délais de paiement dont pourrait bénéficier l'ANIA de la part du comptable public, le ministère public rappelle que cette cour a déjà jugé que les demanderesses à un sursis à exécution ne sont pas dans l'obligation de déposer une demande d'échelonnement de paiement.

S'agissant de l'analyse de la situation financière de l'ANIA, le ministère public considère qu'il ressort des éléments produits que celle-ci est déficitaire. Il est rappelé que l'ANIA, en tant qu'association, doit disposer d'un résultat d'exploitation positif. Il est rappelé qu'il ressort de la jurisprudence qu'il n'est pas nécessaire de démontrer qu'une entreprise risque d'entrer en cessation des paiements pour caractériser les conséquences manifestement excessives de l'article L. 464-8, alinéa 2 du code de commerce. Mais selon le ministère public, si un tel risque n'apparait pas démontré en l'espèce, il ressort toutefois des éléments communiqués que la situation de l' ANIA est obérée.

Ses résultats nets d'exploitation s'inscrivent dans une tendance baissière. Il convient de relever l'absence de biens immobiliers, le nombre limité de participations d'un montant de 87 107 euros et le caractère limité d'actif immobilisé de 219 873 euros, étant considéré ses charges notamment salariales d'un montant de 1 520 596 euros, et la nécessité de conserver un fonds de roulement.

De même s'agissant de ses réserves, ces dernières ayant diminué de 500 111 euros en 2022 à 142 144 euros en 2023.

Le ministère public est d'avis qu'au regard de l'ensemble des éléments produits par la requérante, cette juridiction pourra, dans la ligne de sa jurisprudence, considérer que l'exécution immédiate de la décision engendrerait pour l'ANIA des conséquences manifestement excessives au sens de l'article précité en ce qu'elle est de nature à mettre manifestement en péril la pérennité de l'activité de la requérante. Le ministère public est d'avis que l'argument de l'Autorité relatif aux créances qu'ANIA détient sur ANIA Services (de 3,6 d'euros en 2023 et 4 millions d'euros en 2022) doit être écarté, dès lors que l'agrégation de leur bilan en 2023 fait apparaître un actif circulant hors immobilisations de 1 872 636 euros, inférieur aux dettes qui atteignent un montant de 1 910 324 euros au 31 décembre 2023.

Le ministère public relève en outre que le départ de la FNIL, principal contributeur de l' ANIA (pour un montant de 544 366 euros), cumulé au départ antérieur de l'ADEPALE, représente approximativement une perte de 30% des revenus de l'ANIA issus des contributions de ses membres; les nouvelles contributions depuis le départ de l' ADEPALE, d'un montant cumulé de 144 383 euros ne peuvent être considérées comme équivalentes, en particulier dès lors que le montant de l'amende infligée représente un peu plus de 70 % de ses produits annuels en 2022 et 2023.

Le ministère public est d'avis que l'argument de l'Autorité relatif à l'absence de refus de l'ensemble des établissements de crédits d'accorder un prêt à l'ANIA devra être écarté, celle-ci ayant démontré le refus de son établissement bancaire de proposer un prêt.

Sur le moyen relatif au risque allégué de départ des adhérents et de disparition de l'ANIA, le ministère public est d'avis que si elle est un acteur important, et un interlocuteur des pouvoirs publics en tant qu'association professionnelle, elle n'est pas le seul acteur du secteur, en présence d'autres acteurs en sus de l'ADEPALE qui se présente dorénavant comme une alternative à l' ANIA. Le ministère public juge crédible que le risque avéré de démission des contributeurs, participe du caractère obéré de la situation financière de l' ANIA. Le ministère public estime, au regard de la jurisprudence, qu'il s'en déduit que l'activité de l'ANIA serait manifestement mise en péril par le paiement immédiat du montant de la sanction, d'autant que, comme elle le relève, ses membres ne sont pas contraints au paiement d'une contribution exceptionnelle en vue du recouvrement de la sanction.

Le ministère public est ainsi d'avis que le sursis à exécution pourra donc lui être octroyé, le paiement immédiat de la sanction de 2,7 millions étant susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives au regard des résultats de l' ANIA et de l'éventuelle aggravation de ces demiers en raison de la démission de ses membres.

SUR CE

Sur la recevabilité de la requête en sursis à exécution :

L'Association Nationale des Industries Alimentaires a présenté une requête en sursis à exécution de la Décision n° 23-D-15 de l'Autorité de la concurrence notifiée le 14 mars 2024.

Le 18 mars 2024, l'Association Nationale des Industries Alimentaires a formé un recours en annulation ou en réformation contre cette décision de l'Autorité de la concurrence et a déposé au greffe de la Cour d'appel, le 2 mai 2024 un recours en sursis à exécution de ladite décision, sur le fondement des articles L. 464-2, L. 464-8 et R. 464-22 à R.464-24 du code de commerce. La requête en sursis à exécution de la décision n° 23-D-15 de l'Autorité de la concurrence par l'Association Nationale des Industries Alimentaires sera déclarée recevable.

Sur les moyens tirés du caractère excessif de la sanction et du défaut de motivation

Comme il a été jugé à propos de l'article L. 621-30 du code monétaire et financier, dans une solution transposable à l'article L. 464-8 du code de commerce, en application de cet article, lorsqu'un recours est formé devant le juge judiciaire contre une décision de l'Autorité de la concurrence relevant de sa compétence, il ne peut être sursis à l'exécution de cette décision que si celle-ci est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives en l'état de la situation patrimoniale invoquée par le requérant (Com., 14 février 2012, n°11-15.062) ou encore des répercussions financières sur la situation du requérant.

Le caractère manifestement excessif des conséquences de l'exécution provisoire d'une telle décision doit être apprécié par rapport à la situation de la personne sanctionnée, sans qu'il y ait lieu d'analyser les chances de succès du recours en annulation ou réformation de cette décision (Com., 15 février 2023, pourvoi n° 21-24.401).

Cette solution, développée en application des dispositions de l'article L. 621-30 du code monétaire et financier, est également transposable à l'appréciation des conséquences manifestement excessives visées à l'article L. 464-8 du code de commerce, en raison de l'identité de conditions prévues par le législateur pour l'octroi par cette juridiction du sursis à exécution des décisions de l'Autorité de la concurrence mentionnées audit article.

Ainsi, en l'espèce, s'agissant d'évaluer les répercussions de la sanction financière infligée l'ANIA sur la situation de la requérante, il ressort de l'article L. 464-8 du code de commerce, alinéa 2, que la demande de sursis à exécution de la décision contestée ne saurait être examinée et appréciée que si celle-ci est susceptible d'entraîner des 'conséquences manifestement excessives', au rang desquelles, ni le caractère prétendument excessif ou exorbitant de la sanction pécuniaire prononcée, ni d'éventuelles irrégularités procédurales manifestes ne figurent. Ces questions relèvent en effet de l'examen du recours distinct en annulation ou en réformation de la sanction prononcée qui a été formé concommitamment par la requérante et ne sauraient donc être invoquées dans la présente instance.

En effet, par le biais d'une appréciation par cette juridiction, statuant sur le fondement de l'article L. 464-8 du code de commerce, alinéa 2, de la pertinence des griefs tirés d'une prétendue irrégularité grave de procédure tenant à l'absence alléguée de motivation de la décision attaquée ou du caractère prétendument excessif de la sanction prononcée par l'Autorité de la concurrence, ne serait-ce que s'agissant comme prétendu d'établir qu'ils sont susceptibles de constituer des 'conséquences manifestement excessives' de nature à suspendre l'exécution de cette décision, le magistrat délégué par le Premier président préempterait le débat sur le recours en annulation ou en réformation qui découlera de ce même recours formé par la requérante, dans un sens ou l'autre, s'agissant de leur bien fondé.

Les moyens seront donc écartés.

Sur le sursis à exécution de la décision de l'Autorité de la concurrence :

Selon l'article L. 464-8 du code de commerce, dans sa version applicable à l'espèce, ' Les décisions de l'Autorité de la concurrence mentionnées aux articles L. 462-8, L. 464-2, L. 464-3, L. 464-6, L. 464-6-1 et L. 752-27 sont notifiées aux parties en cause et au ministre chargé de l'économie, qui peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours en annulation ou en réformation devant la cour d'appel de Paris.

Le recours n'est pas suspensif. Toutefois, le Premier président de la cour d'appel de Paris peut ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de la décision si celle-ci est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives ou s'il est intervenu, postérieurement à sa notification, des faits nouveaux d'une exceptionnelle gravité.'.

Ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, l'article L. 464-8 du code de commerce doit s'interpréter en ce que, lorsqu'un recours est formé devant le juge judiciaire contre une décision de l'Autorité de la concurrence relevant de sa compétence, il peut être sursis à l'exécution de cette décision si celle-ci est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives en l'état de la situation patrimoniale invoquée par la requérante ou encore des répercussions financières sur la situation de la requérante, en l'espèce.

Il est de jurisprudence établie que la preuve de l'existence de conséquences manifestement excessives, induites par l'exécution d'une décision, pèse sur la requérante.

En l'espèce, l'Autorité de la concurrence a prononcé à l'encontre de l'Association Nationale des Industries Alimentaires une sanction d'un montant de 1.700.000 euros.

Il ressort des pièces que l'ANIA verse aux débats que :

- le montant des produits courants perçus par l'ANIA s'élèvent au 31.12.2022 à la somme de 3 787 000 euros, dont 3 185 000 euros proviennent des cotisations des adhérents (pièce n° 5), alors que le projet de compte pour 2023 fait apparaître un montant analogue (n° 6 et 7) ;

- selon une attestation d'un expert-comptable qu a effectué un mission de présentation des comptes annuels de l'ANIA relatifs à la période du 01.01.2023 au 21.12.2023, la situation de l'association se caractérise par les données suivantes :

- total du bilan : 2 120 810 euros

- produits courants : 3 796 376 euros

- résultats nets comptables : - 357 966 euros.

Partant, le montant de la sanction financière représente plus de 70 % de ses produits annuels 2022/2023.

- le solde de ses avoirs sur ses comptes bancaires s'élévait au 29.01.2024 à la somme de 500 059 euros (pièce n° 10) ;

- or la masse salariale de l'ANIA s'élève à la somme de 1 520 196 euros (pièce n° 4) ;

- selon une lettre du Crédit agricole Ile de France du 29 mars 2024, elle a reçu une réponse défavorable à sa demande de financement de trésorerie de 2 M. euros pour le compte de l'ANIA sur la base des différents éléments communiqués soit :

- les derniers éléments comptables disponibles (2020-2021-2023),

- l'atterrissage 2023 évoqué,

- les perspectives 2024 envisagées (pièce n° 11) ;

iI n'apparaît pas raisonnable dans ce contexte, au vu des motifs du refus qui intègrent la situation financière et patrimoniale dégradée de l'ANIA d'exiger de la requérante qu'elle sollicite des concours bancaires d'autres établissements de la place.

En effet, en l'état d'un actif immobilisé faible (219 873 euros), aucun bien immobilier n'est inscrit à l'actif du bilan de l'ANIA qui pourrait venir en garantie d'un prêt ou être cédé pour solder sa dette à l'égard de l'Autorité (pièce n° 14).

L'argument soulevé par l'Autorité relatif aux créances qu'ANIA détient sur ANIA Services (de 3,6 millions d'euros en 2023 et 4 millions d'euros en 2022) ne peut être retenu car l'agrégation de leur bilan en 2023 fait apparaître un actif circulant hors immobilisations de 1 872 636 euros, inférieur aux dettes qui atteignent un montant de 1 910 324 euros au 31 décembre 2023.

Dans ce contexte de situation financière obéré de la structure, eu égard au montant de la sanction à payer, le moyen de l'ANIA selon lequel son paiement créérait un risque élevé de démission de ses adhérents pour rejoindre des syndicats concurrents et mettrait en péril son activité, voire son existence, est fondé. Il apparait en effet que déjà l'un de ses principaux contributeurs (cotisation de 506 600 euros en 2019 et 4ème plus gros contributeur), l'ADEPALE a quitté l'ANIA en 2020 pour créer une entité concurrente Pact'Alim. Il ressort d'une lettre de la Fédération nationale de l'industrie laitière (FNIL) du 27 mai 2024 (pièce n° 15) que ce syndicat se retire de l'ANIA alors qu'il représente 544 366 euros de cotisations soit 15% des produits de l'ANIA en 2023.

Il n'existe pas de clause contraignante de solidarité financière de principe des adhérents de l'association (pièce n° 12). Or, il ressort du procès-verbal du conseil d'administration de l'ANIA du 18 avril 2024, que, interrogé par le président de l'association au sujet d'une éventuelle contribution volontaire des syndicats membres, au paiement de la sanction de 2.7 M. euros, dans le cas où ce paiement serait réclamé par le Trésor public, que 'le conseil d'administration acte le fait que, à date, les syndicats membres ne souhaitent pas régler le montant de l'amende éventuellement réclamée par le Trésor public' (pièce n° 13).

En outre, conformément à une jurisprudence établie, la requérante au sursis à exécution n'est pas dans l'obligation de déposer une demande d'échelonnement de paiement auprès du comptable public pour justifier se trouver dans la circonstance prévue à l'article L. 464-8 du code de commerce.

Il résulte de ce qui précède que l'ANIA justifie que l'exécution de la décision attaquée est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives en l'état de la situation financière et patrimoniale actuelle de cette association. Par suite, il sera fait droit à sa demande de sursis à exécution de la Décision n° 23-D-15 du 29 décembre 2023 de l'Autorité de la concurrence.

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Les circonstances de l'espèce et l'équité ne commandent pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l'Association Nationale des Industries Alimentaires.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement et en dernier ressort,

Déclarons recevable la requête en sursis à exécution présentée par l'Association Nationale des Industries Alimentaires concernant la Décision n° 23-D-15 de l'Autorité de la concurrence,

Ordonnons le sursis à exécution de la Décision n° 23-D-15 en date du 29 décembre 2023, notifiée le 14 mars 2024, prononcée à l'encontre de l'Association Nationale des Industries Alimentaires par l'Autorité de la concurrence (ci-après ' l'Autorité '), jusqu'à ce que la Cour d'appel de Paris statue sur la recours en annulation ou en réformation formé par l'ANIA contre la Décision n° 23-D-15,

Rejetons le surplus des demandes,

Disons que les dépens de la présente instance suivront ceux de l'instance au fond.