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Décisions

CA Rennes, 1re ch., 23 juillet 2024, n° 23/05320

RENNES

Ordonnance

Autre

CA Rennes n° 23/05320

23 juillet 2024

1ère chambre

ORDONNANCE N°121

N° RG 23/05320

N° Portalis DBVL-V-B7H-UC37

S.E.L.A.R.L. DAVID - GOIEC & ASSOCIES

Entreprise FERME DE LA GUINBERGERE

C/

SCP JACQUES MARIE, LAURENT BOUTROIS ET CLEMENCE LE DOZE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ORDONNANCE DE MISE EN ETAT

DU23 JUILLET 2024

Le vingt trois juillet deux mille vingt quatre après avancée du délibéré annoncé au dix sept septembre deux mille vingt quatre à l'issue des débats du premier juillet deux mille vingt quatre, Madame Véronique VEILLARD, Magistrate de la mise en état de la 1ère chambre, assistée de Madame Marie-Claude COURQUIN , Greffière

Statuant dans la procédure opposant :

La SELARL DAVID - GOIC & ASSOCIES, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Rennes sous le n°834.941.197, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

agissant en qualité de Mandataire ad hoc de

L'EARL FERME DE LA GUINBERGERE, exploitation agricole, représentée par Monsieur [Y] [B] son gérant,

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentées par Me Hélène LAUDIC-BARON de la SELARL LBP AVOCAT, avocat au barreau de RENNES

APPELANTES

A

La SCP JACQUES MARIE, LAURENT BOUTROIS ET CLÉMENCE LE DOZE, Etude d'huissiers de justice associés, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Thibaud HUC de la SELARL CONSEIL ASSISTANCE DEFENSE C.A.D., avocat au barreau de NANTES

INTIMÉE

A rendu l'ordonnance suivante :

EXPOSÉ DU LITIGE

Par jugement du 11 avril 2023, le tribunal judiciaire de Rennes a déclaré recevable la Selarl David-Goïc & associés, liquidateur de l'Earl Ferme de Guinbergère, en son intervention volontaire et en sa reprise d'instance et l'a déboutée de l'action en responsabilité diligentée à l'encontre de la société civile professionnelle Marie-Boutrois-Le Doze, huissiers de justice, qui avait été désignée dans le cadre de la liquidation pour procéder à la vente des actifs mobiliers de la débitrice.

La société David-Goïc & associés a interjeté un 1er appel par déclaration du 10 mai 2023 à 19 h 19 en indiquant 'Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués' puis un 2ème appel par déclaration du 11 mai 2023 à 14 h 28 en complétant l'objet de l'appel par la phrase '- débouté la SARL DAVID-GOÏC et associés es qualités de toutes ses demandes.' Les deux instances ont été jointes par décision du 22 juin 2023.

Par exploit du 8 août 2023, la société David-Goïc & associés a notifié à la Scp Marie-Boutrois-Le Doze sa déclaration d'appel et ses conclusions d'appelante.

Le 17 août 2023, les parties ont été invitées à s'expliquer sur la caducité de la déclaration d'appel en l'absence de dépôt au greffe dans les délais impartis des conclusions de l'appelante.

Par déclaration du 8 septembre 2023 à 16 h 23, la société David-Goïc & associés, anticipant l'éventuelle caducité de son appel joint des 10 et 11 mai 2023, a alors interjeté un 3ème appel en ajoutant à l'objet de l'appel la liste de ses demandes formées devant le tribunal judiciaire de Rennes dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 23 février 2023.

Puis, en réponse à la demande d'observations du 17 août 2023, la Selarl David-Goïc & associés a, par observations du 18 septembre 2023, indiqué ne trouver aucune trace de l'envoi de ses conclusions par RPVA mais a affirmé que l'ensemble des parties avaient été touchées par la déclaration d'appel et ses conclusions dans les délais impartis par exploit d'huissier pour la partie intimée.

Le conseiller de la mise en état a, par ordonnance du 28 septembre 2023, dit n'y avoir lieu à prononcer la caducité de l'appel des 10 et 11 mai 2023, considérant que l'omission de déposer au greffe les conclusions résultait d'une simple erreur et que le prononcé de la caducité serait disproportionné.

La société Marie-Boutrois-le Doze a, par requête du 11 octobre 2023, déféré cette décision à la cour.

Par arrêt du 19 janvier 2024, rectifié par arrêt du 6 février 2024, la chambre des déférés de la cour d'appel de Rennes a :

- infirmé l'ordonnance du conseiller de la mise en état, considérant qu'il n'était pas justifié par la société David-Goïc & associés qu'elle avait remis ses conclusions au greffe dans les trois mois de la déclaration d'appel,

- déclaré caduc l'appel interjeté le 10 mai 2023 par la société David-Goïc & associés agissant en qualité de mandataire ad hoc de l'Earl Ferme de la Guinbergère,

- rejeté les autres demandes des parties,

- condamné la société David-Goïc & associés agissant en qualité de mandataire ad hoc de l'Earl Ferme de la Guinbergère aux dépens de l'incident et du déféré.

Par conclusions d'incident remises au greffe et notifiées le 6 mai 2024, réitérées le 28 juin 2024, la Scp Marie-Boutrois-Le Doze demande au conseiller de la mise en état de :

- déclarer irrecevable la 3ème déclaration d'appel introduite par la société David-Goïc & associés le 8 septembre 2023 enregistrée le 11 septembre 2023 sous le n° 23/05095 et enrôlée le même jour à la 1ère chambre de la cour d'appel sous le numéro RG 23/05320,

- la condamner in solidum en tant que mandataire ad hoc de l'Earl Ferme de la Guinbergère à lui payer 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle soutient que cette déclaration d'appel est irrecevable au motif que l'appelante n'avait pas intérêt à agir.

Par conclusions en réponse remises au greffe et notifiées le 28 juin 2024, la société David-Goïc & associés conclut :

- à la recevabilité de son appel,

- au débouté des demandes de la Scp Marie-Boutrois-Le Doze,

- à sa condamnation à lui payer la somme de 1.000 € au visa des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- à sa condamnation aux entiers dépens du présent incident.

Elle soutient que la saisine irrégulière d'une cour d'appel qui fait encourir une irrecevabilité à l'appel n'interdit pas son auteur de former un second appel même sans désistement préalable du premier appel sous réserve de l'absence d'expiration du délai d'appel et que le premier appel n'ait pas été déclaré irrecevable.

SUR CE,

1) Sur l'irrecevabilité du nouvel appel

S'il est admis qu'une partie puisse former, dans le délai pour conclure, une nouvelle déclaration d'appel (ici la troisième) afin d'en régulariser une première entachée d'une irrégularité, il convient de relever en l'espèce que les deux premières déclarations d'appel des 10 et 11 mai 2023 ayant donné lieu à une jonction avaient valablement saisi la cour mais que la caducité de cette déclaration jointe était encourue non en raison d'une irrégularité mais faute pour l'appelante d'avoir remis ses conclusions au greffe dans le délai de l'article 908 du code de procédure civile, à savoir dans les 3 mois à compter du 10 mai 2023 soit le 10 août 2023 au plus tard.

L'appel que la société David-Goïc & associés a réitéré en des termes identiques par la 3ème déclaration d'appel du 8 septembre 2023 n'a eu en réalité d'autre finalité que d'anticiper le prononcé de la caducité des déclarations d'appel jointes des 10 et 11 mai 2023 interjetées contre le jugement critiqué de sorte que la société David-Goïc & associés ne justifie d'aucun intérêt, au sens de l'article 546 du code de procédure civile, à saisir la cour une nouvelle fois du même jugement contre la même partie et en termes identiques, cette nouvelle déclaration d'appel n'étant pas une déclaration rectificative.

La circonstance tirée du fait que la société David-Goïc & associés ait laissé expirer un délai de procédure mettant à sa charge une obligation, est indifférente au regard de l'intérêt à interjeter appel qui est de soumettre une décision de première instance à la cour et non de contourner une sanction (2ème Civ, 11 mai 2017, Bull 2017, II, n 94).

Le fait que la caducité n'était pas encore prononcée au jour du second appel est, à cet égard, indifférent.

Il sera donc fait droit à la demande de prononcer l'irrecevabilité de l'appel interjeté le 8 septembre 2023.

2) Sur les dépens et les frais irrépétibles

Partie succombante, la société David-Goïc & associés supportera la charge des dépens et devra verser à la Scp Marie-Boutrois-Le Doze une somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Déclarons irrecevable l'appel interjeté le 8 septembre 2023 contre le jugement rendu le 11 avril 2023 par le tribunal judiciaire de Rennes,

Condamnons la société David-Goïc & associés aux dépens.

Condamnons la société David-Goïc & associés à verser à la Scp Marie-Boutrois-Le Doze une somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA CONSEILLÈRE DE LA MISE EN ÉTAT