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Décisions

CA Caen, 1re ch. civ., 30 juillet 2024, n° 22/00674

CAEN

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Époux (S)

Défendeur :

G (Époux)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guiguesson

Conseillers :

Mme Velmans, Mme Delaubier

Avocats :

Me Marais, Me Lejard

TJ Lisieux, du 7 févr. 2022, n° 20/00867

7 février 2022

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant acte authentique du 11 juillet 2019, M. [X] [S] et son épouse Mme [B] [D] ont acquis auprès de M. [J] [G] et de son épouse Mme [E] [Y], une maison d'habitation sise [Adresse 4] (14) moyennant le prix de 280 000 euros.

Déplorant des désordres, M. et Mme [S] ont, le 11 septembre 2019, adressé à M. [G] une lettre recommandée avec accusé de réception comportant une liste d'anomalies constatées dans la maison : dysfonctionnement de la chaudière et des volets roulants, absence de VMC, radiateur avachi, fuites sous les appuis de fenêtres et dans la pergola.

M. [G] y a répondu par courrier du 14 septembre 2019, contestant certains griefs proposant des solutions de reprise pour d'autres.

Le 22 octobre 2019, une réunion d'expertise contradictoire a été organisée par le cabinetSaretec Dommage Caen missionné par l'assureur de protection juridique des époux [S] ce, en présence de M. [G] assisté par l'expert mandaté par son assureur, le cabinet IXI Architecture conseil, chaque cabinet d'expertise ayant établi son rapport.

En l'absence de solution amiable, M. et Mme [S] ont assigné M. et Mme [G] devant le tribunal judiciaire de Lisieux par acte en date du 5 novembre 2020 aux fins d'obtenir à titre principal la réparation de leurs préjudices et à titre subsidiaire, la désignation d'un expert judiciaire avant-dire-droit.

Par jugement du 7 février 2022 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal judiciaire de Lisieux a :

- débouté M. et Mme [S] de leurs demandes principales ;

- débouté M. et Mme [S] de leur demande d'expertise judiciaire ;

- condamné solidairement M. et Mme [S] à payer à M. et Mme [G] ensemble la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

- condamné solidairement M. et Mme [S] aux entiers dépens ;

- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration du 16 mars 2022, M. et Mme [S] ont formé appel de la décision.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 11 mars 2024, M. et Mme [S] demandent à la cour, au visa des articles 1112-1, 1231-1, 1240, 1137, 1792, 1792-1 et 1641 et suivants du code civil, d'infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :

- condamner solidairement M. et Mme [G] à leur verser les sommes suivantes:

* 4 647,79 euros au titre du dysfonctionnement des moteurs des volets roulants ;

* 8 442 euros au titre des réparations sur la pergola ;

* 2 297,50 euros au titre de la dépose de la pergola ;

- condamner solidairement M. et Mme [G] à leur verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 15 mars 2024, M. et Mme [G] demandent à la cour de confirmer le jugement entrepris en l'ensemble de ses dispositions, débouter en conséquence M. et Mme [S] de l'ensemble de leurs demandes, et de les condamner au paiement d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la procédure d'appel.

Par ordonnance du 18 janvier 2023, le magistrat chargé de la mise en état, saisi par M. et Mme [S] aux fins de désignation d'un expert suite à la découverte d'une fuite d'eau à l'étage de la maison, les a déboutés de leur demande, les condamnant au paiement d'une somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'incident.

L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 20 mars 2024.

Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Liminairement, la cour, qui statue dans les limites de l'appel dont la portée est déterminée au regard des dernières conclusions en application de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, relève qu'elle n'est saisie d'aucune demande de réformation du jugement en ses dispositions ayant rejeté les demandes présentées par M. et Mme [S] au titre du radiateur et de la ventilation mécanique contrôlée, et leur demande d'expertise judiciaire, lesquelles seront en conséquence considérées comme définitives.

- Sur les demandes en réparation :

1-Sur les volets roulants :

M. et Mme [S] soutiennent que M. et Mme [G], en ne produisant pas la bonne facture correspondant à la pose des volets roulants ont commis un dol ou, à tout le moins, un manquement à leur obligation précontractuelle d'information, leur faisant espérer l'existence d'une garantie dont, en définitive, ils n'ont pu bénéficier pour remplacer les moteurs des volets défectueux tels que constatés lors de leur installation.

Ils affirment qu'en communiquant la mauvaise facture pour l'établissement de l'acte de vente, M. et Mme [G] les ont volontairement trompés par cette manoeuvre frauduleuse.

Les appelants estiment que la responsabilité de M. et Mme [G] est engagée sur le fondement des articles 1112-1 et 1137 du code civil et demandent l'indemnisation de leur préjudice, précisant que l'expert mandaté par leur protection juridique a évalué le remplacement des volets suivant devis à hauteur de 3 553 euros et qu'au surplus, ils ont été contraints de procéder à leurs frais au remplacement d'une motorisation du volet roulant pour un montant de 627 euros.

De surcroît, ils sollicitent une somme supplémentaire de 467,79 euros au titre remplacement du moteur du volet roulant situé dans une chambre du premier étage tombé en panne en fin d'année 2021 à la suite d'infiltrations.

Ils soutiennent en s'appuyant sur les conclusions d'un rapport d'expertise amiable du 15 décembre 2023, que les époux [G] avaient nécessairement connaissance d'un désordre relatif au coffret du volet roulant imbibé d'eau ce, au regard d'une plaque en zinc installée par les vendeurs et destinée à rejeter l'eau s'infiltrant dans le dit coffret et de la pose au plafond d'un papier aux fins de dissimuler l'existence de moisissures.

Les appelants considèrent que ces éléments caractérisent au plus fort d'une part, l'intention des époux [G] de tromper leurs cocontractants en communiquant une mauvaise facture de nature à les assurer d'une garantie qui n'a pu être mise en oeuvre pour le remplacement du moteur en panne et d'autre part, l'importance que revêtait pour eux cette garantie.

Enfin, ils affirment que cette absence de garantie des volets constitue un vice caché devant emporter condamnation des époux [G] sur le fondement de l'article 1641 du code civil.

A titre confirmatif, M. et Mme [G] répliquent que l'action engagée au titre des volets roulants ne saurait prospérer quel que soit le fondement juridique invoqué.

Ils contestent toute manoeuvre frauduleuse et intention dolosive de leur part, s'agissant d'une simple erreur dont ils expliquent l'origine, étant rappelé en tout état de cause, l'absence de toute facture annexée à l'acte de vente, et donc de garantie contractuelle entrée dans le champ contractuel.

Ils ajoutent que leur responsabilité ne peut être engagée au titre d'un manquement à l'obligation précontractuelle d'information ni sur le fondement du dol alors que les époux [G] ne démontrent pas que l'information relative à la date de la fourniture et de la pose des volets roulants était déterminante de leur volonté d'acquérir l'immeuble.

Ils prétendent que l'absence de garantie mobilisable relative à un bien ne peut être qualifiée de défaut, a fortiori caché puisqu'aucune garantie n'était mobilisable, étant rappelé que l'acte de vente prévoit une clause d'exclusion des vices cachés sauf à prouver la connaissance du vice caché par le vendeur, ce qui n'est pas rapporté en l'espèce.

Enfin, s'agissant de la panne de moteur de l'un des volets roulants survenue à la suite d'infiltrations, ils considèrent qu'ils ne peuvent se voir reprocher une quelconque dissimulation à la suite d'un désordre survenu deux ans et demi après la vente, alors qu'ils avaient fait intervenir un professionnel pour la fourniture et pose des volets et que la fissure sur le mur pignon dite de structure était existante et visible lors de l'acquisition de l'immeuble dont la garantie décennale est de surcroît expirée.

Subsidiairement, les époux [G] font valoir que les époux [S] ne sont pas fondés à réclamer le remplacement de quatre volets roulants alors que leur expert préconise le changement de deux volets et le reparamétrage d'un troisième. Ils observent au surplus que le devis produit sur lequel s'appuient M. et Mme [S] pour solliciter la somme totale de 4647,79 euros inclut l'installation d'une VMC contrôlée pour 1727 euros TTC, laquelle ne fait l'objet d'aucune réclamation.

Sur ce,

L'article 1137 du code civil dispose que 'Le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges. Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie. Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation.'

Aux termes de l'article 1112-1 du code civil, 'Celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.

Néanmoins, ce devoir d'information ne porte pas sur l'estimation de la valeur de la prestation.

Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.

Il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie.

Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.

Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d'information peut entraîner l'annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants.'

Selon l'article 1641 du code civil, 'le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.'

En l'espèce, il est établi que les époux [G] ont remis aux époux [S] une facture en date du 21 juillet 2015 ne concernant pas les volets roulants de la maison vendue située à [Localité 5] et dont le remplacement avait donné lieu à l'établissement d'une facture du 6 janvier 2012, mais la pose et fourniture de volets d'un autre bien acquis par les époux [G] en mars 2015 et situé à [Localité 10].

Il ne fait pas davantage débat qu'au moment de la réalisation de la vente, aucune garantie n'était mobilisable par M. et Mme [S] concernant les volets roulants remplacés en 2012.

M. et Mme [S] soutiennent à tort que les vendeurs ont obtenu leur consentement en communiquant intentionnellement une facture de 2015 assortie d'une garantie contractuelle de cinq ans.

En effet, l'acte authentique de vente communiqué par les époux [S] ne comporte aucune facture jointe à l'acte et la facture du 21 juillet 2015 qu'ils produisent n'est pas assortie du cachet notarial ni paginée ou paraphée par les parties à l'acte, lequel énonce à ce sujet que 'le vendeur fera ses meilleurs efforts pour transmettre la copie de la facture(...)'.

Il en résulte que ce document a été transmis par les vendeurs aux acquéreurs postérieurement à l'acte de vente de sorte qu'elle ne peut s'analyser en une manoeuvre frauduleuse destinée à obtenir le consentement des époux [G] alors qu'au surplus, l'acte notarié ne fait pas état d'une quelconque garantie contractuelle de cinq ans relative aux volets roulants du bien acquis, laquelle n'est donc pas entrée dans le champ contractuel.

En outre, alors que les époux [G] invoquent une simple erreur de leur part, les deux factures ayant été établies par la même enseigne Leroy Merlin, les époux [S] sont défaillants en cause d'appel comme en première instance à rapporter la preuve que M. et M. [G] ont ainsi cherché intentionnellement à dissimuler une information quant à la garantie des volets en leur communiquant une facture ne correspondant pas aux volets posés.

Le tribunal a ainsi exactement considéré que la demande des époux [G] ne pouvait aboutir sur le fondement du dol au vu de ces éléments.

Il en est de même s'agissant du manquement à l'obligation précontractuelle d'information reproché, alors que M. et Mme [S] ne démontrent pas que l'information relative à l'existence ou non d'une garantie contractuelle de cinq ans des volets roulants, ou celle concernant la date de leur pose avait déterminé leur volonté à acquérir le bien, ni a fortiori que les époux [G] avaient connaissance au moment de la vente de l'importance que cette information revêtait pour les acquéreurs, et de son caractère déterminant pour leur consentement.

En cause d'appel, les époux [S] font état de la survenue d'infiltrations en juillet 2021 les ayant obligés à changer le moteur d'un volet roulant pour solliciter une somme supplémentaire de 467,79 euros à ce titre et tenter de démontrer au plus fort la volonté de dissimulation des époux [G] et l'importance que revêtait pour eux l'information relative à la garantie des volets.

Il reste que le caractère déterminant de l'information pour les acquéreurs s'apprécie au jour de la vente et non au regard de circonstances survenues postérieurement.

Par ailleurs, il ressort de la facture du 6 janvier 2012 que la pose des volets roulants a été exécutée par un professionnel et non par M. et Mme [S] eux-même.

L'expertise réalisée en fin d'année 2023 par la société Saretec et régulièrement versée aux débats révèle que la présence d'humidité dans le coffret à l'origine de l'endommagement du moteur du volet roulant a pour origine une fissure horizontale ancienne et infiltrante sur le mur pignon sud ouest, l'expert ajoutant que cette fissure était visible à l'achat. Même à considérer que les époux [G] soient les auteurs de l'installation d'une plaque de zinc à l'intérieur du coffret pour tenter de rejeter l'eau, dispositif insuffisant selon l'expert, cette intervention passée ne saurait suffire à caractériser l'intention dolosive des époux [G] de tromper les acquéreurs ou de dissimuler une information sur l'existence d'une garantie des volets, laquelle n'avait fait précisément l'objet d'aucun engagement ou déclaration de leur part au jour de la vente ni antérieurement.

Enfin, l'absence de garantie mobilisable des volets roulants ne constitue pas un défaut caché au sens de l'article 1641 du code civil précité de sorte que l'action des époux [S] ne saurait davantage aboutir en application des dispositions de l'article 1641 du code civil précité.

Pour l'ensemble de ces motifs, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par M. et Mme [S] de ce chef.

2- Sur la pergola :

M. et Mme [S] critiquent le jugement en ce que le tribunal a considéré à tort que la pergola ne constituait pas un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil, les déboutant de leur demande présentée sur le fondement de la garantie décennale.

Ils affirment qu'au contraire, la pergola doit être considérée comme un ouvrage en ce que sa construction fait appel aux techniques de travaux du bâtiment attachée au sol ou au sous-sol par des travaux de fondation, et que celle-ci, fixée à la maison, se présente comme un élément indissociable d'équipement ne pouvant être démonté sans altérer le bâtiment auquel il est accolé.

Ils ajoutent que les infiltrations subies par l'ouvrage revêtent en conséquence le caractère de désordres décennaux pour lesquels les vendeurs doivent leur garantie.

Les appelants contestent les devis produits au titre du remplacement des matériaux et soutiennent que la pergola devant être reprise dans son intégralité, ils sont bien fondés à demander la condamnation de M. et Mme [G] au paiement des sommes de 8 442 euros au titre des réparations sur la pergola et de 2 297,50 euros au titre de sa dépose.

M. et Mme [G] répondent que M. et Mme [S] ont acquis leur bien immobilier en toute connaissance de cause à la suite de plusieurs visites lors desquelles l'existence d'infiltrations au niveau de la pergola a été évoquée, les futurs acquéreurs prévoyant de la remplacer par un grand store, de sorte qu'en présence d'un dommage apparent, la demande devra être rejetée pour ce premier motif.

En second lieu, ils contestent la qualification de désordre de nature décennale en ce que les infiltrations dénoncées ne rendent pas la pergola, structure extérieure totalement ouverte et non close, impropre à sa destination.

En troisième lieu, les intimés font valoir que la qualification d'ouvrage ne saurait être retenue dès lors que la pergola n'est pas scellée dans un mur mais repose sur une poutre elle-même tenue par deux tire-fonds, qu'elle résulte de travaux de faible importance n'ayant pas nécessité de fondations et qu'elle n'a pas pour finalité d'assurer le clos, celle-ci pouvant être démontée sans endommager la maison.

Enfin, ils relèvent que l'expert les ayant assistés lors de l'expertise amiable a préconisé uniquement le remplacement des chevrons et des plaques de couverture en polycarbonate pour lequel ils produisent un devis chiffrant ces travaux à la seule somme de 509,86 euros.

Sur ce,

Aux termes de l'article 1792 du code civil, 'Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère'.

L'article 1792-2 du même code ajoute que 'la présomption de responsabilité établie par l'article 1792 s'étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un ouvrage, mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert.

Un élément d'équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l'un des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage.'

En application de l'article 1792-1 du même code, est réputé constructeur le particulier qui vend un immeuble après avoir réalisé des travaux de rénovation de grande ampleur et sa responsabilité décennale peut être recherchée dans les 10 ans qui suivent l'achèvement des travaux.

En application de ces dispositions, le vendeur qui vend après avoir rénové des biens immobiliers est réputé constructeur et engage à ce titre sa responsabilité décennale, lorsque les travaux de rénovation réalisés peuvent recevoir la qualification d'ouvrage et pour les désordres de nature décennale constatés après la réception qui n'étaient ni apparents, ni réservés à la réception, ou encore pour des dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un ouvrage, faisant indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert.

Il n'est pas contesté que les époux [G] ont vendu leur bien immobilier après réalisation par eux-même de travaux de rénovation dont l'édification d'une pergola en 2014.

Le tribunal a rappelé à juste titre que la qualification d'ouvrage impliquait un ancrage au sol et une fixité, et nécessitait de prendre en compte l'importance des travaux et la présence de fondations.

Les deux rapports d'expertise amiable communiqués décrivent la pergola comme une structure en bois massif, d'une largeur de 5 mètres et d'une portée de 4,50 mètres, avec un support de couverture en chevrons de résineux de 7,5 cm de hauteur, éléments sur lesquels a été mise en place une couverture en polycarbonate dont l'étanchéité entre panneaux est assurée par des joints silicone.

En cause d'appel, les époux [S] communiquent un rapport d'expertise rendu par le cabinet Saretec le 15 décembre 2023 en l'absence de M. et Mme [G] dûment convoqués, lequel, soumis à la libre discussion des parties, peut être pris en compte par la présente cour à la condition toutefois qu'il puisse être corroboré par d'autres éléments versés aux débats.

Ce rapport fait état de points de fixation de la pergola dans le mur pignon de la maison en partie haute et parties latérales (10 tire-fonds en partie haute et 7 tire-fonds en partie latérale), de béton ajouté en partie latérale contre le mur pignon pour caler les poteaux de bois, lesquels sont aussi scellés dans la dalle, indiquant que le carrelage de la terrasse a été découpé.

Il est justifié qu'à tout le moins la dépose de la pergola nécessiterait la réalisation de raccord d'enduits en saillie sur la façade de maison et le remplacement de trois carreaux de carrelage sous réserve de retrouver le même modèle.

Ces éléments permettent de retenir la qualification d'ouvrage, ou à tout le moins d'élément d'équipement indissociable du clos, nonobstant l'absence de fondation, dès lors que la pergola n'est pas simplement posée au sol mais y est ancrée par des poteaux scellés dans la dalle carrelée dont elle est indissociable, et que de surcroît, elle est fixée au mur pignon grâce à des tire-fonds et ajout de béton pour caler les dits poteaux de sorte qu'elle ne saurait être enlevée sans altérer la façade de la maison à laquelle elle est fixée.

M. et Mme [G] doivent en conséquence être réputés constructeurs de la pergola et leur responsabilité décennale est susceptible d'être engagée sur le fondement des dispositions précitées.

Il ressort des éléments du dossier et notamment des deux rapports d'expertise amiable réalisés à l'automne 2019 que des fuites d'eau existent 'en différents points de la couverture probablement au niveau des jonctions de panneaux' et que la réalité des infiltrations est indéniable.

Les époux [G] ne sauraient valablement remettre en cause le caractère décennal de ces désordres en affirmant que la destination d'une pergola n'est pas d'assurer le clos, alors que cette édification avait à l'évidence pour objet d'assurer la protection des intempéries de ceux qui en usaient.

Le cabinet IXI Architecture conseil mentionne que l'origine du dommage est probablement à rechercher dans une absence de pente et un sous dimensionnement des chevrons, précisant que cette prise d'assise de la véranda était parfaitement visible et ce sans démontage et avec un examen un peu attentif des ouvrages.

Le cabinet Saretec a constaté la flexion des chevrons en sapin constituant le support de la couverture en plaques polycarbonate de la pergola ainsi qu'une très faible pente, la flexion des chevrons engendrant localement une rétention d'eau et des infiltrations. Il considère que les désordres sont dus à la mise en oeuvre hasardeuse du support des plaques avec une utilisation de chevrons en bois et non en aluminium et remet en cause l'étanchéité entre les plaques, estimant nécessaire de procéder au remplacement des chevrons sapin par des chevrons en aluminium et à celui des plaques de couverture en polycarbonate.

Ces éléments ne permettent pas de conclure au caractère apparent du désordre par un acquéreur moyennement attentif alors que les époux [G] ne rapportent pas la preuve que cette question avait été évoquée lors de la vente, leur seul courrier du 14 septembre 2019 étant à cet égard insuffisant.

Les travaux de reprise préconisés par le cabinet Saretec dans son premier rapport portent sur le remplacement des chevrons sapin par des chevrons en aluminium et le remplacement des plaques de couverture en polycarbonate, mais non sur celui de la pergola en son intégralité devisé à l'initiative des époux [S] pour un montant de 8 442 euros. Le cabinet Saretec, qui avait évalué initialement le coût des travaux de reprise à une somme comprise entre 3500 et 4000 euros, n'explique en rien la nécessité de procéder au remplacement total de la pergola dans son dernier rapport corroboré au surplus par aucun autre élément.

Les époux [G] communiquent un devis relatif à l'achat de chevrons en sapin (et non en aluminium), une plaque polycarbonate Nervesco, et du mastic silicone pour un montant de 509,86 euros lequel, cependant, ne prend pas en compte le coût de la main d'oeuvre.

En conséquence, il conviendra d'allouer à M. et Mme [S] la somme de 3500 euros au titre des travaux de reprise, la dite somme étant justifiée au regard du rapport Saretec dans son évaluation initiale ayant estimé avec pertinence l'étendue des réparations à effectuer, les appelants étant déboutés du surplus de leur demande de ce chef en particulier s'agissant du coût de la dépose de la pergola, et la cour se rapportant aux appréciations du rapport Saretec ;

En conséquence, le jugement sera infirmé de chef.

- Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Le jugement doit être infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est justifié de faire partiellement droit à la demande présentée par M. et Mme [S] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner solidairement M. et Mme [G] au paiement de la somme de 2000 euros sur ce fondement.

M. et Mme [G], parties perdantes même partiellement, doivent être déboutés de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile formée en première instance comme en cause d'appel et condamnés solidairement aux entiers dépens de première instance et de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant dans les limites de l'appel, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort par mise à disposition au greffe ;

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [X] [S] et Mme [B] [S] née [D] de leurs demandes présentées au titre des volets roulants ;

L'infirmant pour le surplus de ses dispositions restant soumises à la cour ;

Statuant des seuls chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne solidairement M. [J] [G] et Mme [E] [G] née [Y] à payer à M. [X] [S] et Mme [B] [S] née [D] la somme de 3500 euros au titre des réparations à effectuer sur la pergola ;

Rejette le surplus des demandes formées par M. [X] [S] et Mme [B] [S] née [D] de ce chef ;

Condamne solidairement M. [J] [G] et Mme [E] [G] née [Y] à payer à M. [X] [S] et Mme [B] [S] née [D] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette les demandes formées par M. [J] [G] et Mme [E] [G] née [Y] sur ce même fondement ;

Condamne solidairement M. [J] [G] et Mme [E] [G] née [Y] aux dépens de première instance et de la procédure d'appel.