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Décisions

CA Pau, 2e ch - sect. 1, 31 juillet 2024, n° 22/01797

PAU

Arrêt

Autre

CA Pau n° 22/01797

31 juillet 2024

JG/CS

Numéro 24/2472

COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1

ARRET DU 31 juillet 2024

Dossier : N° RG 22/01797 - N° Portalis DBVV-V-B7G-IH7Z

Nature affaire :

Demande en nullité des actes des assemblées et conseils

Affaire :

[I] [V]

C/

[D] [J]

S.E.L.A.R.L. EKIP'

S.A.R.L. CIGARE SO

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 31 juillet 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 6 mai 2024, devant :

Joëlle GUIROY, magistrat chargé du rapport,

assisté de Mme DENIS, Greffière présente à l'appel des causes,

Joëlle GUIROY, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Laurence BAYLAUCQ et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame Joëlle GUIROY, Conseillère faisant fonction de Présidente

Madame Laurence BAYLAUCQ, Conseillère

Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [I] [V]

né le [Date naissance 2] 1953 à [Localité 12] (64)

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 9]

Représenté par Me Marie laure SALIES de la SELARL AJC, avocat au barreau de Pau

Assisté de Me Olivier COULEAU, avocat au barreau de Bordeaux

INTIMES :

Monsieur [D] [J]

né le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 14] (Italie)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 10] / SUISSE

Représenté par Me Magalie MARCHESSEAU LUCAS de la SELARL SELARL AVOCADOUR, avocat au barreau de Pau

Assisté de Me Nicolas DRUJON d'ASTROS, avocat au barreau d'Aix en Provence

S.E.L.A.R.L. EKIP' Prise en la personne de Maître [W] [X], prise en son établissement secondaire de [Localité 13] situé [Adresse 5],

Agissant ès qualité de Liquidateur judiciaire la SARL CIGARE SO, fonctions à elle conférées par jugement du tribunal de Commerce de Pau du 7 septembre 2021.

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me Camille ESTRADE, avocat au barreau de Pau

S.A.R.L. CIGARE SO Prise en la personne de la SELARL EKIP, es qualité de mandataire liquidateur, représentée par Me [W] [X], domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 11]

Assignée

sur appel de la décision

en date du 03 MAI 2022

rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE BAYONNE

Exposé du litige et des prétentions des parties :

La SARL Cigare SO, anciennement Cigare Navarre, dont l'activité principale est la manufacture et la commercialisation de produits issus du tabac, en particulier de cigares et cigarillos a débuté son activité en 2015.

Son capital social, d'un montant de 5.000 euros était divisé en 500 parts sociales réparties entre trois associés, Monsieur [D] [J], gérant, Madame [N] [S], son épouse et la société Hedon Heritage (SCA).

Par assemblée générale du 10 décembre 2020, les associés de la SARL Cigare Navarre ont décidé de transférer son siège social à [Localité 11] et de changer sa dénomination en Cigare SO.

Monsieur [I] [V], présidant le groupe international [A] dont la holding de tête est sise à [Localité 11] et dont l'activité est notamment la production de pièces aéronautiques, s'est rapproché de la société Cigare So dans le cadre d'une opération d'augmentation du capital.

Suivant procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 18 février 2021, les associés ont décidé d'augmenter le capital social de la société Cigare SO pour le porter à 10 000 € par la création de 500 parts sociales nouvelles à souscrire et à libérer intégralement en numéraire, d'agréer [I] [V] en tant que nouvel associé et de le nommer co-gérant.

Les nouvelles parts souscrites par Monsieur [I] [V] ont été libérées par virement le 19 février 2021 de la somme de 120.000€ sur un compte nommé « augmentation de capital » ouvert auprès de la Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique selon attestation du 22 février 2021.

Suivant procès-verbal du 5 mars 2021, l'augmentation de capital décidée par l'assemblée générale du 18 février 2021 a été déclarée intégralement souscrite et libérée et il a été procédé aux modifications statutaires, en particulier à la modification du capital social afin d'intégrer [I] [V] audit capital.

Cependant, suivant déclaration en date du 8 avril 2021, la société Cigare SO a déclaré être en cessation de paiements et a sollicité l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire.

Par jugement en date du 13 avril 2021 du tribunal de commerce de Pau, il a été fait droit à cette demande, la date de cessation des paiements étant fixée au 28 février 2021. La SELARL Ekip' a été désignée mandataire judiciaire.

Par requête du 05 mai 2021, Monsieur [J], en sa qualité de gérant de la SARL Cigare SO, a saisi le juge commissaire du tribunal de commerce de Pau afin qu'il autorise la banque à libérer les fonds provenant de l'augmentation de capital souscrite par Monsieur [V], par versement sur le compte courant de la société débitrice.

Par ordonnance du 6 mai 2021, le juge commissaire du tribunal de commerce de Pau a dit qu'il appartient à la Banque populaire Aquitaine centre atlantique de faire droit à la demande de la société Cigare SO et de libérer le montant de l'augmentation de capital sur le compte ouvert à son nom.

Toutefois, affirmant avoir été tenu dans l'ignorance des difficultés économiques et juridiques de la société Cigare SO et avoir été trompé par son gérant afin d'obtenir l'augmentation de capital du 18 février 2021 qu'il avait souscrite en fraude de ses propres droits, [I] [V] a assigné, le 12 mai 2021 et le 7 juin 2021, la société Cigare S0, la SELARL Ekip', ès qualité de mandataire judiciaire, et Monsieur [J] devant le tribunal de commerce de Bayonne pour s'entendre et voir, à titre principal,

- Dire et juger nulle l'augmentation de capital de la société Cigare SO décidée le 18 février 2021, faute pour une seconde assemblée générale des associés d'avoir constaté sa réalisation.

- Dire et juger que son consentement à souscrire à cette augmentation de capital et au paiement des primes d'émission y afférentes, a été vicié par le silence dolosif de la société Cigare S0 et de son dirigeant, M. [D] [J].

- Dire et juger, au vu de la valeur des primes d'émission, que l'augmentation de capital votée par l'assemblée générale extraordinaire du 18 février 2021 est entachée de fraude et donc de nullité absolue.

- Ordonner la restitution, entre ses mains de la somme de 120.000 €, versée par ses soins sur un compte dénommé « Augmentation de capital '' dans les livres de la Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique.

- Condamner M. [D] [J] à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts.

En parallèle, le 17 mai 2021, Monsieur [V] a déposé une requête en tierce-opposition devant le tribunal de commerce de Pau afin de voir ordonner la rétractation de l'ordonnance du juge commissaire du 6 mai 2021.

Et, par courrier recommandé avec accusé de réception du 9 juin 2021, il a déclaré sa créance entre les mains du mandataire judiciaire de la SARL Cigare SO, à titre chirographaire, à hauteur de 140.291,75€, comprenant 120.000 euros correspondant à la somme qu'il a versée au titre de l'augmentation de capital de la société Cigare SO décidée le 18 février 2021 et diverses primes d'émission.

Par jugement du 29 juin 2021, la SELARL FHB a été désignée en qualité d'administrateur judiciaire afin d'assurer l'assistance et la surveillance de l'entreprise Cigare SO.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 27 août 2021, la SELARL Ekip', ès-qualités, a contesté la créance déclarée par Monsieur [V].

Par jugement du 07 septembre 2021, le tribunal de commerce de Pau a prononcé la liquidation judiciaire de la société Cigare SO et a désigné la SELARL Ekip' en qualité de liquidateur.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 09 septembre 2021, Monsieur [V] a contesté la position du mandataire judiciaire au regard de sa créance et, par jugement du 19 octobre 2021, le tribunal de commerce de Pau a ordonné le sursis à statuer dans l'attente du jugement du tribunal de commerce de Bayonne saisi de la contestation de la libération des fonds par versement par Monsieur [V] sur le compte courant de la société débitrice de la somme de 120.000 euros.

Par jugement du 03 mai 2022, le tribunal de commerce de Bayonne a :

- reçu les parties en leurs demandes, fins et conclusions,

- s'est déclaré compétent pour statuer,

- débouté M. [I] [V] de sa demande de sursis à statuer et jugement mixte,

- dit que le moyen de M. [I] [V] visant à faire entacher de nullité l'augmentation de capital au motif du défaut de qualité d'un gérant à en constater la réalisation ne sera pas retenu ;

- dit que le moyen de M. [I] [V] visant à faire juger irrégulière l'augmentation de capital faute par une seconde assemblée générale des associés d'avoir constaté sa réalisation ne sera pas retenu,

- débouté M. [I] [V] de ses demandes visant à faire juger que son consentement à souscrire à l'augmentation de capital a été sciemment vicié par le manquement au devoir d'information et le silence dolosif de la société Cigare SO et de son dirigeant,

- dit que le moyen de M. [I] [V] visant à faire juger nulle l'augmentation de capital du 18 février 2021 au motif de la fraude sur la valeur des primes d'émission ne sera pas retenu,

- confirmé la validité de l'augmentation de capital de la société Cigare SO décidée le 18 février 2021,

- débouté M. [I] [V] de sa demande de condamnation de M [D] [J] pour préjudice moral,

- débouté M [D] [J] de ses demandes au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile,

- débouté M [D] [J] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamné M. [I] [V] à payer à la SELARL Ekip', es-qualités, et à M [D] [J] la somme de 2.000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les a déboutés du complément de leur demande,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné M. [I] [V] aux entiers dépens, dont les frais de greffe liquidés à la somme de 109,74 euros.

Par déclaration au greffe en date du 27 juin 2022, [I] [V] a interjeté appel de ce jugement

La clôture a été prononcée par ordonnance en date du 10 avril 2024.

***

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 1er mars 2024, [I] [V] demande à la cour, au visa des articles L.223-30, L.223-32 et L.223-8 alinéa 2, L.235-1 et L.223-27 du code de commerce, des articles 1112-1, 1130 et suivants, 1104, 1162 et 1217 du code civil et des articles 49 et 378 à 380-1 du code de procédure civile, d'infirmer le jugement déféré sur les points objets de son appel et statuant à nouveau, de :

' le déclarer recevable et bien fondé en ses demandes ;

En conséquence,

A titre principal,

' Dire et juger que son consentement à souscrire à l'augmentation de capital et au paiement des primes d'émission y afférentes, a été vicié sur le fondement de l'erreur ;

A titre subsidiaire,

' Dire et juger nul, le procès-verbal des délibérations de la gérance en date du 5 mars 2021 ;

' Dire et juger irrégulière et donc inexistante et entachée de nullité, l'augmentation de capital de la société Cigare SO décidée par les associés initiaux le 18 février 2021, mais dont la réalisation n'a jamais été constatée par les associés, anciens et nouveau, votant à la majorité des deux tiers des voix, faute de convocation d'une seconde assemblée générale;

' Dire et juger que la violation des dispositions impératives de l'article L.223-27 du code de commerce, entache de nullité, l'augmentation de capital de la société Cigare SO;

' Dire et juger que son consentement à souscrire à cette augmentation de capital et au paiement des primes d'émission y afférentes, a été vicié par le manquement à leur devoir d'information précontractuelle loyale et le silence dolosif de la société Cigare SO et de son dirigeant, [D] [J] ;

' Dire et juger, au vu de la valeur des primes d'émission, que l'augmentation de capital votée par l'assemblée générale extraordinaire du 18 février 2021 est entachée de fraude et donc de nullité absolue ;

En tout état de cause,

' Ordonner la restitution entre ses main, par la SELARL Ekip', ès-qualités, de la somme de 120.000 euros, versée par ses soins sur un compte dénommé « Augmentation de capital » dans les livres de la Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique ;

' Condamner [D] [J] à lui verser la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

' Rejeter toutes prétentions plus amples ou contraires ;

' Condamner in solidum [D] [J] et la SELARL EKIP', ès-qualités, à lui verser la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

' Condamner in solidum [D] [J] et la SELARL Ekip', ès-qualités, aux entiers dépens de première instance et d'appel.

***

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 4 avril 2024, [D] [J] demande à la cour, au visa des articles 1240, 1130 et suivants du code civil, L235-1 du code de commerce et 32-1, 695, 696 et 700 du code de procédure civile, de :

- confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il l'a débouté de ses demandes sur le fondement de l'article 1240 du code civil et de l'article 32-1 du code de procédure civile,

- débouter Monsieur [V] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

Statuant à nouveau sur ces points :

- condamner Monsieur [V] au paiement d'une amende civile de 10.000 € sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile ;

- le condamner à lui payer la somme de 10.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Y ajoutant

- le condamner au paiement de la somme de 8.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- le condamner aux entiers dépens.

***

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 14 mars 2024, la SELARL EKIP', prise en la personne de Maître [W] [X], agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Cigare SO, demande à la cour, au visa des articles L.622-21, L.641-3, L.223-30 et L.223-32 et L.223-33, L.235-1 et L.235-12 du code de commerce, des articles 1112-1, 1130 et 1137 al. 2 du code civil et de l'article 114 du code de procédure civile, de confirmer le jugement du 3 mai 2022, sauf en ce qu'il a écarté la fin de non-recevoir tirée de l'arrêt des poursuites individuelles et, statuant à nouveau, à titre incident, de :

- déclarer irrecevables à l'égard de la liquidation les demandes formulées par Monsieur [I] [V] ;

À titre subsidiaire, au fond,

- confirmer le jugement du 3 mai 2022 entrepris,

- dire et juger que les moyens développés par Monsieur [V] ne sont pas fondés,

- les écarter purement et simplement ;

À titre infiniment subsidiaire,

- fixer la créance de 120.000 € déclarée par [I] [V] au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Cigare SO ;

En tout état de cause,

- confirmer le jugement entrepris ayant condamné Monsieur [V] à lui verser une indemnité de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en règlement des frais irrépétibles de première instance,

- le condamner à lui payer, ès-qualités, une indemnité de 6.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- le débouter de ses demandes.

- Le condamner aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel avec distraction au profit de Maître Camille Estrade en application de l'article 699 du code de procédure civile.

MOTIFS :

A hauteur d'appel, les dispositions par lesquelles le tribunal de commerce de Bayonne a retenu sa compétence et a rejeté la demande de Monsieur [V] de sursis à statuer sur les conséquences de la nullité de l'augmentation de capital ne sont pas remises en cause.

Ces dispositions sont dès lors devenues définitives.

1 - Sur la recevabilité des demandes de Monsieur [V] :

La Selarl Ekip', en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Cigare SO, soulève l'irrecevabilité des demandes de Monsieur [V] à son encontre exposant :

- qu'elle tendent à voir déclarer nulle l'augmentation de capital et, en conséquence, à voir ordonner la restitution de la somme de 120.000 euros soit au payement d'une somme d'argent.

- que le jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire a été rendu le 13 avril 2021 alors que l'action qu'il a engagée devant le tribunal de commerce de Bayonne le 12 mai 2021 comme la requête en tierce-opposition devant le tribunal de commerce de Pau lui sont postérieures et ne peuvent être considérées comme des instances en cours de telle sorte que le jugement entrepris doit être réformé.

En droit, il résulte de la combinaison des articles 369 du code de procédure civile et des articles L 641-3, L. 622-21, L. 622-22 et R. 622-20 du code de commerce que le jugement ouvrant une procédure collective interrompt ou interdit toute action en justice de la part des créanciers tendant à la condamnation de la personne objet de cette liquidation au paiement d'une somme d'argent au titre d'une créance dont la cause est née avant ce jugement d'ouverture, d'une part, et, d'autre part, si l'instance aux fins de condamnation était en cours avant ce même jugement la juridiction saisie, après mise en cause du liquidateur et déclaration de créance au passif de la liquidation, ne peut prononcer une quelconque condamnation au même titre et doit se borner à constater et fixer la créance au passif de la personne liquidée

En l'espèce, l'action initiée par Monsieur [V] qui tend à voir dire et juger nulle l'augmentation de capital décidée le 18 février 2021 et à la restitution des sommes d'argent versées à cet effet pour vices de son consentement et nullité de la procédure ne constitue pas une action tendant au payement d'une somme d'argent soumises à ces dispositions.

Dès lors c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté la fin de non-respect soulevée par la SELARL Ekip' en sa qualité de mandataire à la liquidation de la société Cigare SO.

2 - Sur la validité de l'augmentation de capital souscrite par Monsieur [V] :

Pour contester la validité de l'opération par laquelle il a souscrit à l'augmentation de capital de la société Cigare SO, [I] [V] prétend, à titre principal, à la nullité de l'acte de souscription des parts sociales et, à titre subsidiaire, au défaut de réalisation de l'opération à raison de la nullité de la décision de gérance du 5 mars 2021, du dol qui vicie son consentement et de la fraude afférente aux primes d'émission qu'il a réglées

2-1 - sur la validité de l'acte de souscription des parts sociales et l'erreur invoquée:

Monsieur [V] soutient que son consentement à l'augmentation de capital de la société Cigare SO par souscription de nouvelles parts sociales a été vicié par l'erreur sur leur valorisation car le bilan qui lui a été présenté ne reflétait pas sa situation comptable réelle. Il expose avoir ainsi acquis, au terme du procès-verbal des délibérations de la gérance en date du 5 mars 2021, des parts sociales de la société pour la somme de 120.000 euros alors qu'elle se trouvait en état de cessation des payements depuis le 31 décembre 2019, ce qu'il n'aurait pas fait s'il avait connu sa situation réelle.

Selon l'article 1130 du code civil, " L'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.

Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné".

Au cas présent, Monsieur [V] affirme que la présentation erronée du bilan est la cause de son erreur.

Cependant, pour étayer ses dires, il ne produit aucun élément permettant de retenir que, dans le cadre des négociations et de sa souscription des parts sociales nouvellement créées, la situation financière de la société lui aurait été présentée de manière inexacte ou incomplète au sens de la loi.

De même, il n'établit pas qu'il n'a pas eu accès à la comptabilité de la société et aux pièces dont il a pu solliciter la communication alors même que les échanges produits font état d'une collaboration de la société aux sollicitations formées par son directeur financier.

Enfin, il ne détaille pas le ou les renseignements et comportements de Monsieur [J], en ses qualités d'associés et de gérant de la société, et qui auraient été pour lui source d'une évaluation erronée de la situation de la société et de la valeur de ses parts sociales.

Or, le prix des parts sociales d'une société découle d'une libre négociation entre les parties, ce qui est caractérisé par les échanges produits.

En outre, les parties avaient la faculté de prévoir une clause dite de garantie du passif, laquelle n'a pas été prévue par elles ni même proposée par Monsieur [V] qui était pourtant assisté et conseillé dans les opérations ayant abouti à son engagement par le directeur Finance juridique du groupe qu'il dirige et par un cabinet d'avocats.

Et, il doit être relevé que Monsieur [V] dispose, dans le domaine des affaires, des connaissances et expériences de nature à lui permettre d'être conscient des risques inhérents à toute activité commerciale mais également de préserver ses intérêts, ce qu'il a fait en l'espèce par la rédaction d'actes tel que la convention de blocage du compte courant de [N] [S] et le contrat de cession de marque dont [D] [J] était le propriétaire au profit de la société.

Enfin, il ressort de ses propres écritures qu'il a décidé de souscrire à la convention en connaissant la fragilité de la société, laquelle était aussi de notoriété publique.

En effet, il a indiqué : "il est évident que si, en sa qualité d'homme d'affaires averti, [il] savait être en mesure de donner un nouveau souffle à une société financièrement fragile au regard notamment de ses fonds propres et de ses deux derniers exercices déficitaires et ce en apportant 120.000 euros de fonds propres supplémentaires et en exigeant le blocage du compte courant d'associée de Madame [S], ...".

Il convient toutefois de retenir que son investissement était commandé par la perspective de créer une synergie avec ceux qu'il avait réalisés sur la commune d'[Localité 11].

Ainsi, il ne peut être déduit du fait que, suivant déclaration en date du 8 avril 2021, la société Cigare SO a déclaré être en cessation de paiements et a sollicité l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire que son consentement a été vicié par une erreur présentant un caractère déterminant pour lui même si, par jugement en date du 13 avril 2021 du tribunal de commerce de Pau, la date de cessation des paiements a été fixée au 28 février 2021 avant d'être remontée à la date du 31 décembre 2019 par jugement du 1er février 2022.

En conséquence, Monsieur [V] sera débouté de sa demande en nullité de l'acte de souscription des parts sociales pour vice de son consentement.

2 -2 Sur la validité de l'augmentation de capital :

2-2-1 : sur la validité de l'opération :

A titre subsidiaire, et en premier lieu, [I] [V] affirme que le procès-verbal des décisions de la gérance du 05 mars 2021 doit être déclaré nul et de nul effet sur le fondement des articles L.235-1, L.223-27 et L.223-30 du code de commerce, la modification des statuts de la société Cigare SO, en ce qu'elle porte sur la réalisation de l'augmentation de capital, la modification de la répartition de son capital social et l'engagement social d'un nouvel associé, étant intervenue en violation des règles fixées à peine de nullité par ces dispositions.

A l'appui de ses dires, il soutient qu'en l'absence de dépôt préalable des fonds, deux assemblées générales extraordinaires des associés devaient statuer pour rendre régulière l'augmentation de capital de la société alors qu'il n'a pas été convoqué et n'a pas participé à une assemblée appelée à constater la réalisation de l'augmentation de capital et à décider de ces modifications statutaires. Il en résulte une irrégularité qui en tout état de cause ne peut être couverte à défaut de présence ou de représentation de tous les associés.

En outre, Monsieur [J] n'avait pas valablement reçu mandat de l'assemblée générale du 18 février 2021 pour constater par procès-verbal des décisions de la gérance la réalisation de l'augmentation de capital et modifier la disposition statutaire de répartition du capital social au regard du nouveau statut d'associé entrant qui lui était conféré.

Ainsi, si l'opération d'augmentation du capital a été régulièrement décidée par les anciens associés, elle n'a jamais été définitivement réalisée de telle sorte qu'il convient d'ordonner qu'il lui soit restitué la somme de 120.000 euros, ceci d'autant que les dispositions de l'article L.223-8 alinéa 2 du code de commerce prévoient la possibilité pour l'apporteur d'être judiciairement autorisé à retirer le montant de ses apports si l'augmentation de capital n'est pas réalisée dans un délai de six mois

[D] [J] lui oppose qu'aucun texte ne fait obligation de tenir une deuxième assemblée générale pour constater la réalisation de l'augmentation de capital d'une SARL et que Monsieur [V], avec le concours du directeur juridique du groupe [A] et son conseil, a dirigé l'opération dont il soutient désormais l'irrégularité. Il a en outre assisté à l'assemblée générale du 18 février 2021, alors même que sa participation était facultative puisqu'il n'avait pas encore la qualité d'associé, et qu'au terme de celle-ci il a valablement reçu mandat pour constater la réalisation définitive de l'opération critiquée laquelle a été constatée régulièrement par le procès-verbal de la gérance du 5 mars 2021 rédigé par les conseils de Monsieur [V] et signé par lui. Il a d'ailleurs, en sa qualité de co-gérant, ensuite procédé aux formalités subséquentes et transmis ledit procès-verbal à sa banque aux fins de libération des fonds. Il ne peut donc prétendre à une quelconque nullité de l'opération en l'absence de violation de dispositions légales, Monsieur [V] ayant par ailleurs, par sa signature du procès-verbal du 5 mars 2021, renouvelé et ratifié son consentement à la souscription des parts sociales nouvelles et à l'augmentation de capital.

La SELARL EKIP', agissant ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Cigare SO, fait valoir que la critique de Monsieur [V] du jugement qui l'a débouté de ses demandes n'est pas fondée en ce qu'il n'a acquis la qualité d'associé que le 5 mars 2021, date de tenue de l'assemblée générale qui a constaté, par procès-verbal signé par le gérant dûment habilité à cet effet par l'assemblée du 18 février 2021, que les 500 parts nouvelles qu'il a souscrites étaient libérées en totalité et déclaré que l'augmentation de capital décidée le 18 février 2021 se trouvait définitivement et régulièrement réalisée.

Dès lors, l'augmentation de capital décidée a bien été réalisée ainsi que cela ressort des formalités accomplies.

Au cas présent, le procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 18 février 2021, signé par [D] [J] et [I] [V], précise que les associés de la société se sont réunis sur convocation faite par le gérant et que [I] [V] assiste à l'assemblée sans voix délibérative.

A cette date, il n'avait pas la qualité d'associé.

Au cours de cette assemblée générale extraordinaire, dont l'ordre du jour était le suivant : "Augmentation de capital social par création de 500 parts nouvelles à souscrire et à libérer intégralement en numéraire, Agrément d'un nouvel associé, Nomination de Monsieur [I] [V] en qualité de co-gérant, Pouvoirs", les associés, à l'unanimité, ont décidé d'agréer [I] [V] en qualité d'associé et de lui permettre de souscrire les 500 parts nouvelles émises à l'occasion de cette augmentation de capital. Ils ont fixé les modalités de l'augmentation de capital, de constatation de sa réalisation et de modification corrélative des statuts et donné tous pouvoirs au gérant de la société afin de recueillir tous versements, déposer les sommes versées conformément à la loi, constater la souscription définitive ainsi que la libération de la souscription, constater, le cas échéant, la réalisation définitive de l'augmentation de capital ci-dessus et modifier les statuts en conséquence et d'une manière générale, remplir toutes formalités et faire tout ce qui sera nécessaire pour exécuter les présentes résolutions et rendre, le cas échéant, définitive l'augmentation de capital décidée ce jour.

[I] [V] a libéré les fonds le 19 février 2021 par virement de la somme de 120 000€ sur un compte nommé « augmentation de capital » ouvert auprès de la Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique selon attestation du 22 février 2021.

Et par procès-verbal du 5 mars 2021, [D] [J], en sa qualité de gérant et selon les modalités votées lors de l'assemblée générales des associés le 18 février 2021, a constaté que l'augmentation du capital a été définitivement réalisée et que les statuts devaient être modifiés en conséquence. Il y a pris acte de la nomination en qualité de gérant de Monsieur [V] pour une durée indéterminée à effet au 18 février 2021 et a donné tous pouvoirs au porteur d'un original, d'un extrait ou d'une copie de l'acte aux fins d'accomplir toutes les formalités légales de publicité.

A cette date, l'augmentation de capital est ainsi devenue définitive et [I] [V] a alors acquis la qualité d'associé étant précisé qu'il ressort des pièces communiquées qu'il a procédé aux formalités légales en sa qualité de co-gérant de la société Cigare SO (déclaration relative aux bénéficiaires effectifs d'une société, mise à jour des statuts)

En conséquence, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté la demande de [I] [V] en nullité du procès-verbal des décisions de la gérance en date du 5 mars 2021 et de retrait de l'apport fait au titre de l'augmentation de capital, en ce qu'il n'a acquis la qualité d'associé qu'au terme de ce procès-verbal et l'augmentation de capital querellée ayant été réalisée.

2-2-2 - Sur le manquement au devoir d'information précontractuelle loyale et silence dolosif relatifs à la situation de la société :

[I] [V] conclut à la réticence dolosive et à l'erreur ayant vicié son consentement du fait de la dissimulation intentionnelle par Monsieur [J] et la société Cigare SO d'informations dont ils savaient le caractère déterminant pour lui soit :

- les éléments découlant de la rupture définitive de toutes relations contractuelles avec l'EARL Bordelongue, son unique fournisseur de tabac, de l'existence de divers contentieux et condamnations judiciaires en cours de nature à absorber l'intégralité de son apport de 120.000 euros et du départ de la responsable de production.

- la cessation des payements à la date, fixée judiciairement, au 31 décembre 2019, soit plus d'un an avant sa souscription à l'augmentation du payement.

[D] [J] rappelle que [I] [V] est un homme d'affaires particulièrement averti qui a bâti un groupe de sociétés qu'il dirige et au sein duquel la société Cigare SO représente un confetti et qu'il a mobilisé pour les besoins de l'opération contestée le concours de ses collaborateurs et conseils financiers et juridiques.

Or, ils n'ont pas établi de contrat d'investissement ni prévu de convention de garantie d'actif et de passif à la charge des associés en place ni mené de véritable audit ou « dues diligences » comme cela est généralement le cas dans ce type d'opération de sorte qu'il estime que l'acquéreur a nécessairement considéré la situation de la société comme n'étant pas déterminante. En tout état de cause, il ne rapporte pas la preuve de man'uvres dolosives de sa part ou de la part de la société, les conditions de l'opération attestant à l'inverse de sa parfaite connaissance de sa fragilité et de sa volonté d'investir dans une société en vue de son retournement.

La SELARL Ekip', es qualités, conclut dans le même sens que Monsieur [J].

Cela posé, selon les dispositions de l'article 1112-1 du code civil : " Celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.

Néanmoins, ce devoir d'information ne porte pas sur l'estimation de la valeur de la prestation.

Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.

Il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie.

Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.

Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d'information peut entraîner l'annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants"

Selon l'article 1137 du même code, constitue un dol le fait d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges ainsi que la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il savait le caractère déterminant pour l'autre partie.

En l'espèce, l'argumentation de Monsieur [V] relative à l'état de cessation des payements de la société soutenue de manière identique pour invoquer l'erreur ayant vicié son consentement ci-dessus examinée sera, pour les mêmes motifs, écartée étant cependant ajouté que [I] [V], sur lequel repose la charge de la preuve de la réticence dolosive qu'il reproche à [D] [J], ne justifie pas que ce dernier avait connaissance que la société Cigare SO se trouvait en état de cessation des payements lors des négociations préalables à la réalisation de l'augmentation de capital et en particulier à la date de l'engagement qu'il a souscrit.

S'agissant de la situation tenant aux contrats et litiges en cours de la société Cigare SO, [D] [J] produit des échanges par courriel avec [H] [T] datant du 15 mars 2021précisant que le 26 janvier 2021, [I] [V] a sollicité des explications en lien avec l'autorisation des douanes afin de déplacer la production de la société, autorisation sans laquelle la production ne pouvait reprendre à [Localité 11].

A cette occasion, il lui a été explicitement indiqué que la société faisait l'objet d'une expulsion de ses locaux.

Il ne peut donc prétendre avoir ignoré le litige existant autour de cette situation.

S'agissant du contentieux relatif au départ d'une salariée, outre que [I] [V] n'indique pas la date à laquelle il en aurait été avisé, il n'établit pas qu'il n'ait pas été intégré dans les échanges portant sur le domaine social que l'acquéreur devait "reprendre en main" selon le courriel du 22 février 2021 ni qu'il était de nature à affecter le fonctionnement de la société.

Concernant la rupture des relations contractuelles avec l'EARL Bordelongue, outre les pièces analysées par les premiers juges, [D] [J] remet au débat un courriel du 8 mars 2021 comportant le message suivant "comme anticipé, je vous envoie les documents relatifs à la procédure contre la société Bordelongue reçu le mois de décembre 2019 et les conclusions de notre avocat".

Et il résulte des pièces communiquées que la société disposait d'un stock de tabac et produits de nature à assurer son activité pendant plusieurs mois ou années.

Ainsi, Monsieur [V], conseillé financièrement et juridiquement et sous l'égide duquel les négociations ont été conduites pendant plusieurs mois, n'établit pas que des informations déterminantes de son consentement à l'opération lui ont été intentionnellement dissimilées.

Il en résulte qu'il n'est pas démontré que le consentement de [I] [V] a été vicié par le défaut d'information et la réticence dolosive qu'il dénonce.

3 - Sur la fraude afférente aux primes d'émission réglées par Monsieur [V] :

En contrepartie de son apport de la somme de 120.000 euros, [I] [V] a reçu 500 parts sociales de la société Cigare SO, chacune assortie d'une prime d'émission de 230 euros.

Il affirme que la fixation de la prime d'émission relève de la liberté contractuelle mais doit être justifiée au regard de la santé financière de la société ou de son évolution prévisible. Or, il estime qu'il est apparu clairement, dès le 23 mars 2021, (date du jugement rendu dans l'instance opposant la société à l'EARL Bordelongue, fournisseur de tabac) que la SARL Cigare SO n'avait aucun espoir de survie et donc de développement, ce dont était conscient [D] [J] qui a déclaré l'état de cessation des payements de la société deux semaines plus tard.

[D] [J] rappelle que les modalités de l'augmentation de capital et de la souscription par l'appelant des parts sociales de la société ont donné lieu à des négociations qui ont permis à Monsieur [V] d'obtenir une réduction de 60% de la prime d'émission par rapport à la première proposition qu'il lui avait faite et cette valorisation a été retenue au regard des stocks de tabac brut et des synergies entre l'activité de la société et celles des sociétés détenues par Monsieur [V]. Il souligne également que ce dernier était particulièrement en mesure d'apprécier l'adéquation du prix de souscription et donc de la prime d'émission aux perspectives de la société.

Le mandataire à la liquidation ajoute que les comptes de l'exercice clos au 31 décembre 2019 ont été communiqués à Monsieur [V], qu'ils ne comportaient aucune dissimulation et que même s'il devait être considéré que le montant des primes d'émission a été surévalué, le montant concerné serait manifestement insuffisant pour que l'on puisse affirmer que les agissements qu'il dénonce l'ont trompé au point de lui faire souscrire des engagements qu'il n'aurait pas pris en l'absence de ces agissements.

De fait, Monsieur [V] convient qu'il n'ignorait pas la fragilité de la situation de la société Cigare SO lors des négociations comme à la date de l'augmentation de capital à laquelle il a souscrit après avoir obtenu le transfert des marques à la société, le blocage des comptes courants existants et une diminution des primes d'émission par rapport à la proposition qu'il avait initialement faite.

Il admet également que son investissement avait pour objet de maintenir la production de cigares, produits d'exception, et d'attirer une clientèle vers l'établissement hôtelier qu'il dirigeait, le Berria.

Dans ce contexte et alors que ses conseils ont présidé à la rédaction des actes ayant conduit à la réalisation de l'opération, Monsieur [V] ne prouve pas qu'une fraude a entaché la fixation du montant des primes d'émission des actions nouvelles créées dont la valeur tient à leur valeur comptable mais également aux perspectives de développement qu'il entendait donner à la société dont il est devenu le co-gérant.

Monsieur [V] sera dès lors débouté de sa demande en nullité de l'opération fondée l'existence d'une fraude.

4 - Sur les demandes de dommages et intérêts :

En l'espèce, la solution de litige conduit à débouter [I] [V] de sa demande formée au titre d'un préjudice moral résultant d'une tromperie dont il aurait été la victime mais qui n'est pas établie.

Aux termes des articles 32-1 et 559 du code de procédure civile, en cas de procédure dilatoire ou abusive, l'appelant peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros sans préjudice des dommages et intérêts qui lui seraient réclamés.

L'article 1240 du code civil permet de sanctionner une partie ayant sciemment introduit une action en justice de manière abusive.

Cependant, l'exercice d'un droit ne dégénère en abus qu'en cas de mauvaise foi ou de légèreté blâmable caractérisant une intention de nuire de son auteur.

S'agissant des demandes de [D] [J], la méprise de [I] [V] sur l'étendue de ses droits en intentant la présente action en justice ne suffit pas à caractériser l'abus de procédure allégué en l'absence de tout élément permettant de penser qu'il était animé d'une intention de nuire.

En outre, la condamnation au payement d'une amende civile ne peut se faire qu'au profit du Trésor public.

[D] [J] sera dès lors, en confirmation du jugement entrepris, débouté de ses demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive.

5 - Sur les demandes accessoires :

[I] [V] succombant, la cour confirme la décision déférée qui l'a condamné aux dépens et à payer [D] [J] et à la SELARL Ekip,' es-qualités, la somme de 2.000 € chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

A hauteur d'appel, la solution du litige commande de mettre à la charge de [I] [V] les dépens exposés avec droit de recouvrement au profit de Maître Estrade sur son affirmation de droit.

Et, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, il sera débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles et condamné à payer la somme supplémentaire de 2.000 euros à chacun des intimés.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement du 03 mai 2022 rendu par le tribunal de commerce de Bayonne en toutes ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

- déboute [I] [V] du surplus de ses demandes ;

- condamne [I] [V] aux dépens d'appel avec distraction au profit de Maître Camille Estrade en application de l'article 699 du code de procédure civile.

- condamne [I] [V] à payer la somme supplémentaire de 2.000 euros à [D] [J] et à la SELARL Ekip' es-qualités chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Madame GUIROY, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame SAYOUS, greffier suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,