Décisions
CA Rennes, ch. etrangers/hsc, 2 août 2024, n° 24/00329
RENNES
Ordonnance
Autre
COUR D'APPEL DE RENNES
N° 143/2024 - N° RG 24/00329 - N° Portalis DBVL-V-B7I-VASE
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
O R D O N N A N C E
article L 3211-12-4 du code de la santé publique
Catherine LEON, Présidente de chambre à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assistée de Patricia IBARA, greffière,
Statuant sur l'appel formé par courriel reçu le 21 Juillet 2024 à 15 heures 58 par :
[F] [A],
(auparavant nommée [J] [A] née le 16 Janvier 2004 à [Localité 3]
[Adresse 1],
hospitalisée au centre hospitalier [2] de [Localité 3]
ayant pour avocat désigné Me Elodie PRAUD, avocat au barreau de RENNES
d'une ordonnance rendue le 19 Juillet 2024 par le Juge des libertés et de la détention de RENNES qui a autorisé le maintien de la mesure d'hospitalisation complète ;
En présence de [F] [A], régulièrement avisée de la date de l'audience, assistée de Me Elodie PRAUD, avocat
En l'absence du tiers demandeur, Monsieur [T] [A], régulièrement avisé,
En l'absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur DELPERIE, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 22 juillet 2024 et le 30 juillet 2024 lesquels ont été mis à disposition des parties,
En l'absence du représentant de l'établissement de soins, régulièrement avisé,
Après avoir, le 30 Juillet 2024 à 14 H 00 renvoyé l'affaire à l'audience publique du 1er août 2024 à 11 heures et le 1er août 2024 entendu l'appelant et son avocat en leurs observations,
A mis l'affaire en délibéré et ce jour, par mise à disposition au greffe, a rendu la décision suivante :
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 11 juillet 2024, [F] [A] a été admise en soins psychiatriques à la demande de M. [T] [A], son père.
Le certificat médical du 10 juillet 2024 à 21h50 du Dr [I] [O] a établi la présence de troubles du comportement avec agitation, aggressivité, familiarité sous-tendus par des idées délirantes de thématique mégalomaniaque (idées de grandeur), mystiques (idées de possession) et de mécanisme interprétatif chez [F] [A]. Les troubles ne permettaient pas à [F] [A] d'exprimer un consentement. Le médecin a estimé que son hospitalisation devait être assortie d'une mesure de contrainte.
Le certificat médical du 10 juillet 2024 du Dr [P] [Y] a établi la présence d'idées délirantes, d'une tachypsychie, d'idées de persécution, d'idées de grandeur et de labilité d'humeur chez [F] [A]. Les troubles ne lui permettaient pas d'exprimer un consentement. Le médecin a estimé que son hospitalisation devait être assortie d'une mesure de contrainte.
Par une décision du 11 juillet 2024 du directeur du centre hospitalier [2],[F] [A] a été admis en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète.
Le certificat médical des '24 heures établi le 11 juillet 2024 à 17h30 par le Dr [R] [N] et le certificat médical des '72 heures établi le 12 juillet 2024 à 16h50 par le Dr [S] [D] ont préconisé la poursuite de l'hospitalisation complète.
Par décision du 12 juillet 2024, le directeur du centre hospitalier [2] a maintenu les soins psychiatriques de [F] [A] sous la forme d'une hospitalisation complète pour une durée d'un mois.
Le certificat médical de saisine du juge des libertés et de la détention établi le 16 juillet 2024 par le Dr [N] a expliqué que l'hospitalisation avait eu lieu suite à un virage de l'humeur. L'adhésion aux soins était fragile avec plusieurs demandes de sorties contre avis médical, mais le comportement restait adapté dans le service. Les soins sous contrainte ont été maintenus devant un fort risque de résurgence des symptômes maniaques en cas de sortie prématurée avec expositions à de multiples stimuli. Le suivi ambulatoire était à rediscuter avec la patiente qui ne souhaitait plus poursuivre son suivi libéral actuel. Un risque de rupture de soins imposait un temps supplémentaire pour étayer une future sortie.
Par requête reçue au greffe le 16 juillet 2024, le directeur du centre hospitalier [2] a saisi le tribunal judiciaire de Rennes afin qu'il soit statué sur la mesure d'hospitalisation complète.
Par ordonnance en date du 19 juillet 2024, le juge du tribunal judiciaire de Rennes a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète.
[F] [A] a interjeté appel de l'ordonnance du 19 juillet 2024 par email adressé au greffe de la cour d'appel de Rennes le 21 juillet 2024.
Le certificat médical de situation du 29 juillet 2024 du Dr [H] [M] a mentionné un bon contact, une thymie moins exaltée mais la verbalisation des idées noires. Le discours était cohérent, sans propos délirants ou hallucinatoires et le médecin n'a pas relevé d'instabilité motrice. La reconnaissance des troubles était partielle et l'adhésion aux soins fragile. Le médecin a conclu au maintien en hospitalisation complète.
Le ministère public a sollicité la confirmation de l'ordonnance.
A l'audience du 30 juillet 2024,l'intéressé n'a pas comparu, le centre hospitalier n'ayant pas prévu sa sortie.
Le dossier a fait l'objet d'un renvoi à l'audience du 01 août 2024.
Le centre hospitalier a fait parvenir un nouveau certificat médical de situation en date du 31 juillet 2024 rédigé par le Dr [H] [M] qui mentionne qu'à l'examen clinique du jour le patient est de bon contact, thymie moins exaltée ; qu'il verbalise des idées noires, que le discours est cohérent, sans propos délirants ou hallucinatoires, qu'on ne note pas d'instabilité motrice, que la reconnaissance des troubles est partielle et l'adhésion aux soins fragile d'où la conclusion que l'hospitalisation complète et continue sous contrainte doit être maintenue afin de permettre une observation clinique régulière et un réajustement thérapeutique.
A l' audience du 01 août 2024 [F] [A] a précisé que seul son prénom avait été modifié à l'état civil mais pas le changement de sexe et estimé que l'hospitalisation avait été abusive, que son père avait signé à la demande du psychiatre. Elle a affirmé n'être dangereuse ni pour elle ni pour les autres et que les idées noires évoquées par le médecin étaient liées à l'hospitalisation.
Son conseil a repris le moyen soulevé en première instance tiré de la tardiveté de la notification de la décision de maintien et a souligné d'une manière générale le manque d'informations données à son client ce qui ne favorise pas sa confiance pour être compliant aux soins.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'appel :
Aux termes de l'article R. 3211-18 du code de la santé publique, le délai d'appel est de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance.
Selon l'article R. 3211-19, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure.
En l'espèce, [F] [A] a formé le 21 juillet 2024 un appel de la décision du juge du tribunal judiciaire de Rennes du 19 juillet 2024.
Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.
Sur la régularité de la procédure :
Aux termes de l'article L. 3216-1 du Code de la Santé publique, la régularité des décisions administratives peut être contestée devant le juge, et en cas d'irrégularité, celle-ci n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet.
La saisine du juge prévue par l'article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique doit être accompagnée des avis et pièces tel que prévu par les articles R. 3211-12, -24 et -26 du même code afin de permettre au juge judiciaire de contrôler la régularité des décisions administratives et le cas échéant de statuer sur leur contestation.
En l'espèce, il ressort des avis et pièces mentionnés dans l'exposé des faits et de la procédure que celle-ci est contestée.
Sur le défaut de notification de la décision de maintien du 16 juillet 2024 :
Aux termes de l'article L. 3211-3 du Code de la santé publique : 'Lorsqu'une personne atteinte de troubles mentaux fait l'objet de soins psychiatriques en application des dispositions des chapitres II et III du présent titre ou est transportée en vue de ces soins, les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en 'uvre du traitement requis. En toutes circonstances, la dignité de la personne doit être respectée et sa réinsertion recherchée.
Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état.
En outre, toute personne faisant l'objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale est informée :
a) Le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état, de la décision d'admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;
b) Dès l'admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l'article L. 3211-12-1.
L'avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible.
En tout état de cause, elle dispose du droit :
1° De communiquer avec les autorités mentionnées à l'article L. 3222-4 ;
2° De saisir la commission prévue à l'article L. 3222-5 et, lorsqu'elle est hospitalisée, la commission mentionnée à l'article L. 1112-3 ;
3° De porter à la connaissance du Contrôleur général des lieux de privation de liberté des faits ou situations susceptibles de relever de sa compétence ;
4° De prendre conseil d'un médecin ou d'un avocat de son choix ;
5° D'émettre ou de recevoir des courriers ;
6° De consulter le règlement intérieur de l'établissement et de recevoir les explications qui s'y rapportent ;
7° D'exercer son droit de vote ;
8° De se livrer aux activités religieuses ou philosophiques de son choix.
Ces droits, à l'exception de ceux mentionnés aux 5°, 7° et 8°, peuvent être exercés à leur demande par les parents ou les personnes susceptibles d'agir dans l'intérêt du malade .
Cette obligation d'information correspond à un droit essentiel du patient, celui d'être avisé d'une situation de soins contraints et des droits en découlant, étant ici rappelé que le juge européen assimile l'hospitalisation d'office à une arrestation et lui applique donc les obligations de l'article 5, § 2, de la Convention européenne des droits de l'homme, relatif au droit d'information de la personne détenue.
En l'espèce, la décision du 12 juillet 2024 de maintien des soins en hospitalisation complète a été notifiée à [F] [A] le 14 juillet 2024.
Toutefois le certificat dit des 72 h qui préconise la poursuite de l'hospitalisation et qui a fait l'objet d'une information à [F] [A] a été horodaté à 16 h 50.
Par conséquent la décision de maintien n'a pu être prise qu'en suivant de sorte que la notification intervenue le 14 juillet 2024 l'a été moins de 48 h après la décision.
Ce délai peut être considéré comme raisonnable et ne constitue pas une irrégularité.
En tout état de cause comme l'a rappelé le premier juge, alors que le contrôle du juge des libertés et de la détention est intervenu régulièrement dans le délai prévu à l'article L 3211-12-1 I 1° du code de la santé publique et que les certificats médicaux circonstanciés versés aux débats s'accordent sur la nécessité pour le patient de poursuivre les soins sous la forme d'une hospitalisation complète et continue, il ne peut être retenu de grief du fait pour l'intéressé d'avoir eu connaissance plus tôt de la décision de maintien compte tenu de sa connaissance très rapide de la décision d'admission en hospitalisation complète et des droits qui s'attachent à la mesure de soins psychiatriques sans consentement et de la nécessité, au vu des éléments précités, de protéger la santé et la sécurité du patient malgré les restrictions à sa liberté justifiées par son état psychique.
Le moyen sera rejeté.
Sur le fond :
Aux termes du I de l'article L. 3212-1 du Code de la santé publique, «une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;
2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1».
Il convient de rappeler, qu'en application de l'article L3212-1 I du Code de la santé publique, le juge statue sur le bien fondé de la mesure et sur la poursuite de l'hospitalisation complète au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués, sans substituer sa propre appréciation des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins, à celle des médecins.
En l'espèce, il ressort du certificat médical initial que [F] [A] présentait des troubles du comportement avec agitation, aggressivité, familiarité sous-tendus par des idées délirantes de thématique mégalomaniaque (idées de grandeur), mystiques (idées de possession) et de mécanisme interprétatif, troubles qui ne lui permettaient pas d'exprimer un consentement.
Les certificats de situation du Dr [H] [M] des 29 et 31 juillet 2024 notent un bon contact, une thymie moins exaltée mais la verbalisation des idées noires et ajoutent que si le discours était cohérent, sans propos délirants ou hallucinatoires et que le médecin n'a pas relevé d'instabilité motrice, la reconnaissance des troubles est partielle et l'adhésion aux soins fragile.
Ainsi, il résulte suffisamment de ce qui précède que l'état mental de [F] [A] imposait des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, que ses troubles rendaient impossible son consentement et qu'il existait un risque grave d'atteinte à son intégrité ; à ce jour l'état de santé mentale de l'intéressé s'étant amélioré mais pas suffisamment stabilisé, la mesure d'hospitalisation sous contrainte demeure nécessaire.
En effet le consentement aux soins, bien que proclamé par [F] [A] lors de l'audience, mérite encore d'être évalué, même si le patient paraît être sur la bonne voie.
Ainsi, il résulte suffisamment de ce qui précède que la mesure d'hospitalisation sous contrainte demeure encore nécessaire malgré une amélioration.
Les conditions légales posées par l'article L. 3212-1 du Code de la santé publique pour la poursuite de l'hospitalisation se trouvant réunies, la décision déférée sera confirmée.
Sur les dépens :
Les dépens seront laissés à la charge du trésor public.
PAR CES MOTIFS
Catherine LEON, présidente de chambre, statuant publiquement, et en dernier ressort, en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,
Reçoit [F] [A] en son appel,
Confirme l'ordonnance entreprise,
Laisse les dépens à la charge du trésor public.
Fait à Rennes, le 02 août 2024 à 11 heures.
LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,
Catherine LEON, Présidente
Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à [F] [A], à son avocat, au CH et ARS/tiers demandeur/curateur-tuteur,
Le greffier,
Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.
Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et JLD,
Le greffier,
N° 143/2024 - N° RG 24/00329 - N° Portalis DBVL-V-B7I-VASE
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
O R D O N N A N C E
article L 3211-12-4 du code de la santé publique
Catherine LEON, Présidente de chambre à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l'article L 3211-12-4 du code de la santé publique, assistée de Patricia IBARA, greffière,
Statuant sur l'appel formé par courriel reçu le 21 Juillet 2024 à 15 heures 58 par :
[F] [A],
(auparavant nommée [J] [A] née le 16 Janvier 2004 à [Localité 3]
[Adresse 1],
hospitalisée au centre hospitalier [2] de [Localité 3]
ayant pour avocat désigné Me Elodie PRAUD, avocat au barreau de RENNES
d'une ordonnance rendue le 19 Juillet 2024 par le Juge des libertés et de la détention de RENNES qui a autorisé le maintien de la mesure d'hospitalisation complète ;
En présence de [F] [A], régulièrement avisée de la date de l'audience, assistée de Me Elodie PRAUD, avocat
En l'absence du tiers demandeur, Monsieur [T] [A], régulièrement avisé,
En l'absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur DELPERIE, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 22 juillet 2024 et le 30 juillet 2024 lesquels ont été mis à disposition des parties,
En l'absence du représentant de l'établissement de soins, régulièrement avisé,
Après avoir, le 30 Juillet 2024 à 14 H 00 renvoyé l'affaire à l'audience publique du 1er août 2024 à 11 heures et le 1er août 2024 entendu l'appelant et son avocat en leurs observations,
A mis l'affaire en délibéré et ce jour, par mise à disposition au greffe, a rendu la décision suivante :
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 11 juillet 2024, [F] [A] a été admise en soins psychiatriques à la demande de M. [T] [A], son père.
Le certificat médical du 10 juillet 2024 à 21h50 du Dr [I] [O] a établi la présence de troubles du comportement avec agitation, aggressivité, familiarité sous-tendus par des idées délirantes de thématique mégalomaniaque (idées de grandeur), mystiques (idées de possession) et de mécanisme interprétatif chez [F] [A]. Les troubles ne permettaient pas à [F] [A] d'exprimer un consentement. Le médecin a estimé que son hospitalisation devait être assortie d'une mesure de contrainte.
Le certificat médical du 10 juillet 2024 du Dr [P] [Y] a établi la présence d'idées délirantes, d'une tachypsychie, d'idées de persécution, d'idées de grandeur et de labilité d'humeur chez [F] [A]. Les troubles ne lui permettaient pas d'exprimer un consentement. Le médecin a estimé que son hospitalisation devait être assortie d'une mesure de contrainte.
Par une décision du 11 juillet 2024 du directeur du centre hospitalier [2],[F] [A] a été admis en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète.
Le certificat médical des '24 heures établi le 11 juillet 2024 à 17h30 par le Dr [R] [N] et le certificat médical des '72 heures établi le 12 juillet 2024 à 16h50 par le Dr [S] [D] ont préconisé la poursuite de l'hospitalisation complète.
Par décision du 12 juillet 2024, le directeur du centre hospitalier [2] a maintenu les soins psychiatriques de [F] [A] sous la forme d'une hospitalisation complète pour une durée d'un mois.
Le certificat médical de saisine du juge des libertés et de la détention établi le 16 juillet 2024 par le Dr [N] a expliqué que l'hospitalisation avait eu lieu suite à un virage de l'humeur. L'adhésion aux soins était fragile avec plusieurs demandes de sorties contre avis médical, mais le comportement restait adapté dans le service. Les soins sous contrainte ont été maintenus devant un fort risque de résurgence des symptômes maniaques en cas de sortie prématurée avec expositions à de multiples stimuli. Le suivi ambulatoire était à rediscuter avec la patiente qui ne souhaitait plus poursuivre son suivi libéral actuel. Un risque de rupture de soins imposait un temps supplémentaire pour étayer une future sortie.
Par requête reçue au greffe le 16 juillet 2024, le directeur du centre hospitalier [2] a saisi le tribunal judiciaire de Rennes afin qu'il soit statué sur la mesure d'hospitalisation complète.
Par ordonnance en date du 19 juillet 2024, le juge du tribunal judiciaire de Rennes a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète.
[F] [A] a interjeté appel de l'ordonnance du 19 juillet 2024 par email adressé au greffe de la cour d'appel de Rennes le 21 juillet 2024.
Le certificat médical de situation du 29 juillet 2024 du Dr [H] [M] a mentionné un bon contact, une thymie moins exaltée mais la verbalisation des idées noires. Le discours était cohérent, sans propos délirants ou hallucinatoires et le médecin n'a pas relevé d'instabilité motrice. La reconnaissance des troubles était partielle et l'adhésion aux soins fragile. Le médecin a conclu au maintien en hospitalisation complète.
Le ministère public a sollicité la confirmation de l'ordonnance.
A l'audience du 30 juillet 2024,l'intéressé n'a pas comparu, le centre hospitalier n'ayant pas prévu sa sortie.
Le dossier a fait l'objet d'un renvoi à l'audience du 01 août 2024.
Le centre hospitalier a fait parvenir un nouveau certificat médical de situation en date du 31 juillet 2024 rédigé par le Dr [H] [M] qui mentionne qu'à l'examen clinique du jour le patient est de bon contact, thymie moins exaltée ; qu'il verbalise des idées noires, que le discours est cohérent, sans propos délirants ou hallucinatoires, qu'on ne note pas d'instabilité motrice, que la reconnaissance des troubles est partielle et l'adhésion aux soins fragile d'où la conclusion que l'hospitalisation complète et continue sous contrainte doit être maintenue afin de permettre une observation clinique régulière et un réajustement thérapeutique.
A l' audience du 01 août 2024 [F] [A] a précisé que seul son prénom avait été modifié à l'état civil mais pas le changement de sexe et estimé que l'hospitalisation avait été abusive, que son père avait signé à la demande du psychiatre. Elle a affirmé n'être dangereuse ni pour elle ni pour les autres et que les idées noires évoquées par le médecin étaient liées à l'hospitalisation.
Son conseil a repris le moyen soulevé en première instance tiré de la tardiveté de la notification de la décision de maintien et a souligné d'une manière générale le manque d'informations données à son client ce qui ne favorise pas sa confiance pour être compliant aux soins.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l'appel :
Aux termes de l'article R. 3211-18 du code de la santé publique, le délai d'appel est de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance.
Selon l'article R. 3211-19, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d'appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l'heure.
En l'espèce, [F] [A] a formé le 21 juillet 2024 un appel de la décision du juge du tribunal judiciaire de Rennes du 19 juillet 2024.
Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.
Sur la régularité de la procédure :
Aux termes de l'article L. 3216-1 du Code de la Santé publique, la régularité des décisions administratives peut être contestée devant le juge, et en cas d'irrégularité, celle-ci n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet.
La saisine du juge prévue par l'article L. 3211-12-1 du Code de la santé publique doit être accompagnée des avis et pièces tel que prévu par les articles R. 3211-12, -24 et -26 du même code afin de permettre au juge judiciaire de contrôler la régularité des décisions administratives et le cas échéant de statuer sur leur contestation.
En l'espèce, il ressort des avis et pièces mentionnés dans l'exposé des faits et de la procédure que celle-ci est contestée.
Sur le défaut de notification de la décision de maintien du 16 juillet 2024 :
Aux termes de l'article L. 3211-3 du Code de la santé publique : 'Lorsqu'une personne atteinte de troubles mentaux fait l'objet de soins psychiatriques en application des dispositions des chapitres II et III du présent titre ou est transportée en vue de ces soins, les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en 'uvre du traitement requis. En toutes circonstances, la dignité de la personne doit être respectée et sa réinsertion recherchée.
Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état.
En outre, toute personne faisant l'objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale est informée :
a) Le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état, de la décision d'admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;
b) Dès l'admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l'article L. 3211-12-1.
L'avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible.
En tout état de cause, elle dispose du droit :
1° De communiquer avec les autorités mentionnées à l'article L. 3222-4 ;
2° De saisir la commission prévue à l'article L. 3222-5 et, lorsqu'elle est hospitalisée, la commission mentionnée à l'article L. 1112-3 ;
3° De porter à la connaissance du Contrôleur général des lieux de privation de liberté des faits ou situations susceptibles de relever de sa compétence ;
4° De prendre conseil d'un médecin ou d'un avocat de son choix ;
5° D'émettre ou de recevoir des courriers ;
6° De consulter le règlement intérieur de l'établissement et de recevoir les explications qui s'y rapportent ;
7° D'exercer son droit de vote ;
8° De se livrer aux activités religieuses ou philosophiques de son choix.
Ces droits, à l'exception de ceux mentionnés aux 5°, 7° et 8°, peuvent être exercés à leur demande par les parents ou les personnes susceptibles d'agir dans l'intérêt du malade .
Cette obligation d'information correspond à un droit essentiel du patient, celui d'être avisé d'une situation de soins contraints et des droits en découlant, étant ici rappelé que le juge européen assimile l'hospitalisation d'office à une arrestation et lui applique donc les obligations de l'article 5, § 2, de la Convention européenne des droits de l'homme, relatif au droit d'information de la personne détenue.
En l'espèce, la décision du 12 juillet 2024 de maintien des soins en hospitalisation complète a été notifiée à [F] [A] le 14 juillet 2024.
Toutefois le certificat dit des 72 h qui préconise la poursuite de l'hospitalisation et qui a fait l'objet d'une information à [F] [A] a été horodaté à 16 h 50.
Par conséquent la décision de maintien n'a pu être prise qu'en suivant de sorte que la notification intervenue le 14 juillet 2024 l'a été moins de 48 h après la décision.
Ce délai peut être considéré comme raisonnable et ne constitue pas une irrégularité.
En tout état de cause comme l'a rappelé le premier juge, alors que le contrôle du juge des libertés et de la détention est intervenu régulièrement dans le délai prévu à l'article L 3211-12-1 I 1° du code de la santé publique et que les certificats médicaux circonstanciés versés aux débats s'accordent sur la nécessité pour le patient de poursuivre les soins sous la forme d'une hospitalisation complète et continue, il ne peut être retenu de grief du fait pour l'intéressé d'avoir eu connaissance plus tôt de la décision de maintien compte tenu de sa connaissance très rapide de la décision d'admission en hospitalisation complète et des droits qui s'attachent à la mesure de soins psychiatriques sans consentement et de la nécessité, au vu des éléments précités, de protéger la santé et la sécurité du patient malgré les restrictions à sa liberté justifiées par son état psychique.
Le moyen sera rejeté.
Sur le fond :
Aux termes du I de l'article L. 3212-1 du Code de la santé publique, «une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;
2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1».
Il convient de rappeler, qu'en application de l'article L3212-1 I du Code de la santé publique, le juge statue sur le bien fondé de la mesure et sur la poursuite de l'hospitalisation complète au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués, sans substituer sa propre appréciation des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins, à celle des médecins.
En l'espèce, il ressort du certificat médical initial que [F] [A] présentait des troubles du comportement avec agitation, aggressivité, familiarité sous-tendus par des idées délirantes de thématique mégalomaniaque (idées de grandeur), mystiques (idées de possession) et de mécanisme interprétatif, troubles qui ne lui permettaient pas d'exprimer un consentement.
Les certificats de situation du Dr [H] [M] des 29 et 31 juillet 2024 notent un bon contact, une thymie moins exaltée mais la verbalisation des idées noires et ajoutent que si le discours était cohérent, sans propos délirants ou hallucinatoires et que le médecin n'a pas relevé d'instabilité motrice, la reconnaissance des troubles est partielle et l'adhésion aux soins fragile.
Ainsi, il résulte suffisamment de ce qui précède que l'état mental de [F] [A] imposait des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, que ses troubles rendaient impossible son consentement et qu'il existait un risque grave d'atteinte à son intégrité ; à ce jour l'état de santé mentale de l'intéressé s'étant amélioré mais pas suffisamment stabilisé, la mesure d'hospitalisation sous contrainte demeure nécessaire.
En effet le consentement aux soins, bien que proclamé par [F] [A] lors de l'audience, mérite encore d'être évalué, même si le patient paraît être sur la bonne voie.
Ainsi, il résulte suffisamment de ce qui précède que la mesure d'hospitalisation sous contrainte demeure encore nécessaire malgré une amélioration.
Les conditions légales posées par l'article L. 3212-1 du Code de la santé publique pour la poursuite de l'hospitalisation se trouvant réunies, la décision déférée sera confirmée.
Sur les dépens :
Les dépens seront laissés à la charge du trésor public.
PAR CES MOTIFS
Catherine LEON, présidente de chambre, statuant publiquement, et en dernier ressort, en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,
Reçoit [F] [A] en son appel,
Confirme l'ordonnance entreprise,
Laisse les dépens à la charge du trésor public.
Fait à Rennes, le 02 août 2024 à 11 heures.
LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION,
Catherine LEON, Présidente
Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à [F] [A], à son avocat, au CH et ARS/tiers demandeur/curateur-tuteur,
Le greffier,
Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.
Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et JLD,
Le greffier,