CA Besançon, 1re ch., 13 août 2024, n° 23/00018
BESANÇON
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
BNP Paribas Personal Finance (SA), Solution Eco Energie (SAS)
Défendeur :
BNP Paribas Personal Finance (SA), Solution Eco Énergie (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Wachter
Conseillers :
Mme Willm, M. Maurel
Avocats :
Me Alves, Me Giacomoni
EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCEDURE ET DES PRETENTIONS
Le 6 avril 2016, dans le cadre d'un démarchage à domicile, M. [V] [G] a signé avec la SAS Solution Eco Energie un bon de commande portant sur l'installation d'un système de panneaux photovoltaïques et d'isolation d'un montant de 35 000 euros, pour son habitation située [Adresse 5] à [Localité 7].
Un contrat de crédit accessoire à l'installation a été passé le même jour par M. [V] [G] auprès de la SA BNP Paribas Personal Finance pour le même montant, remboursable en 132 mensualités de 355,02 euros, au taux de 4,70 %.
L'attestation de fin de travaux a été signée par M. [V] [G] le 25 avril 2016.
Le contrat de crédit a été soldé par anticipation le 23 mars 2018 pour un montant de 35 116 euros.
Par jugement du 28 mai 2019, le tribunal d'instance de Besançon a dit la société Solution Eco Energie responsable contractuellement des désordres de la centrale photovoltaïque acquise par M. [G] et condamné celle-ci à lui payer des sommes au titre de la perte de production électrique, et au titre de l'acquisition et de la pose d'un onduleur.
La liquidation judiciaire de la SAS Solution Eco Energie a été prononcée par jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 19 mai 2021.
Par actes des 7 et 12 avril 2021, M. [V] [G] a fait assigner la SA BNP Personal Finance (la banque) et la société Solution Eco Energie devant le tribunal judiciaire de Besançon en nullité des contrats de vente et de prêt.
Il a en outre fait assigner Maître [M] [H], liquidateur de la société Solution Eco Energie.
Par jugement rendu le 13 septembre 2022, le tribunal a :
- prononcé la jonction du dossier RG 11 22-295 avec le dossier RG 11 21-303,
- dit que l'action en nullité du contrat de vente pour violation des dispositions du code de la consommation était prescrite,
- dit que l'action en nullité du contrat de vente fondée sur le dol formée par M. [G] était recevable,
- rejeté la demande de la SA BNP Paribas Personal Finance en irrecevabilité pour absence de mise de cause des organes de la procédure collective,
- rejeté la demande en irrecevabilité formée par la SA BNP Paribas Personal Finance pour absence de déclarations de créance,
- déclaré recevables les demandes d'indemnisation de M. [G] au titre du préjudice moral,
- rejeté la demande en nullité du contrat de vente conclu entre M. [V] [G] et la société Solution Eco Energie,
- dit que que les sommes versées par M. [V] [G] à la SA BNP Paribas Personal Finance au titre du remboursement anticipé du capital du contrat de crédit resteront acquises à la SA BNP Paribas Personal Finance,
- rejeté la demande formée par M. [G] au titre de son préjudice moral,
- condamné M. [V] [G] à verser à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [V] [G] aux dépens,
- rejeté les demandes de M. [V] [G] pour le surplus,
- rejeté les demandes de la SA BNP Paribas Personal Finance pour le surplus.
Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu :
Sur l'irrecevabilité des demandes pour cause de prescription
- que M. [G] fondait son assignation en nullité du contrat de vente sur le non respect des dispositions du code de la consommation et le dol,
- que s'agissant du code de la consommation, il apparaissait que la plupart des griefs se rapportaient à des mentions obligatoires du contrat de démarchage à domicile prescrites à peine de nullité,
- que les contrat de vente et de crédit ayant été signés le 6 avril 2016, l'action en nullité du contrat de vente pour violation des dispositions du code de la consommation était prescrite depuis
le 6 avril 2021, soit antérieurement à la délivrance de l'assignation du 7 avril 2021,
- que s'agissant du dol, il ressortait du jugement du 28 mai 2019 que M. [G] avait informé la société Solution Eco Energie des dysfonctionnements de l'installation dès le 18 août 2018,
- que celle-ci avait été condamnée sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil à verser à M. [G] la somme de 415,25 euros au titre de la perte de production électrique pour la période de septembre 2017 à septembre 2018, la somme de 1 024 euros pour la période de septembre 2018 à mai 2019, 500 euros au titre de l'acquisition d'un onduleur et 300 euros pour sa pose,
- que le point de départ du délai de prescription étant alors fixé au 18 août 2018, l'action en nullité fondée sur le dol était recevable ;
Sur l'irrecevabilité concernant l'absence de mise en cause des organes de la procedure collective
- qu'il était produit l'assignation en intervention forcée du 26 avril 2022 par laquelle M. [V] [G] avait saisi le tribunal judiciaire d'une demande dirigée contre Maître [M] [H] es qualité de mandataire liquidateur de la SAS Solution Eco Energie ;
Sur l'irrecevabilité concernant l'absence de déclaration de créance
- qu'il ressortait des dernières écritures que M. [G] sollicitait, au visa des articles L 221-5 et suivants du code de la consommation et L 111-1 et R 111-1 du code de la consommation, la nullité du contrat de vente conclu avec la société Solution Eco Energie ainsi que la nullité du contrat de prêt affecté,
- qu'il sollicitait également la condamnation de la SA BNP Paribas Personal Finance au paiement de différentes sommes d'argent,
- qu'il n'était pas demandé de condamnation du vendeur au paiement d'une somme d'argent ni même la restitution du prix de vente,
- que dès lors la demande en irrecevabilité pour absence de déclaration de créance devait être rejetée ;
Sur l'irrecevabilité des demandes d'indemnisation du préjudice
- que l'autorité de la chose jugée n'avait lieu qu'à l'égard de ce qui avait fait l'objet du jugement,
- qu'il fallait que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause et entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité,
- que le jugement du 28 mai 2019 avait reconnu la responsabilité contractuelle de la société Solution Eco Energie au titre de pertes de production liées à un dysfonctionnement de l'onduleur,
- que dans le cadre de cette nouvelle instance, M. [G] mettait dans la cause la société venderesse et l'établissement de crédit sur le fondement du dol, du non respect des dispositions du code de la consommation et de la faute de l'établissement de crédit,
- qu'il n'y avait dès lors ni identité de cause, ni de parties au litige,
- que les demandes n'étaient donc pas frappées de l'autorité de chose jugée,
- que la demande d'indemnisation de M. [G] au titre du préjudice moral était en conséquence recevable ;
Sur la nullité du contrat de vente pour dol
- qu'il ne ressortait pas des pièces que l'autofinancement de l'installation photovoltaïque à l'aide des revenus retirés de la revente d'électricité à EDF était entré dans le champ contractuel du contrat de vente de l'installation photovoltaïque,
- que le document manuscrit présenté par M. [G] comme une simulation commerciale ne pouvait être considéré d'une part comme un document contractuel dès lors qu'il n'était pas signé par les parties ni annexé au contrat de vente, et d'autre part comme ayant déterminé le consentement de M. [G],
- que la preuve du dol n'était pas rapportée ;
Sur le contrat de crédit affecté
- que le contrat de vente et le contrat de crédit avaient été signés le même jour,
- que l'établissement de crédit avait remis les fonds entre les mains du vendeur suite à la signature de la réception des travaux et à l'appel de fonds du 25 avril 2016,
- que les contrats de vente et de crédit étant interdépendants et la demande en nullité du contrat de vente ayant été rejetée, les sommes versées par M. [G] à la banque au titre du remboursement anticipé du capital du contrat de crédit restaient acquises à la BNP Paribas Personal Finance ;
Sur la demande d'indemnisation au titre du préjudice moral
- que la demande était rejetée du fait du rejet de la demande en nullité du contrat de vente.
- oOo-
Par déclaration du 6 janvier 2023, M. [V] [G] a relevé appel du jugement en ce qu'il :
- a dit que l'action en nullité du contrat de vente pour violation des dispositions du code de la consommation était prescrite,
- a rejeté la demande en nullité du contrat de vente,
- a dit que les sommes versées par lui à la SA BNP Paribas Personal Finance au titre du remboursement anticipé du capital du contrat de crédit resteraient acquises à celle-ci,
- a rejeté sa demande au titre de son préjudice moral,
- l'a condamné à verser à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- l'a condamné aux dépens,
- a rejeté ses demandes pour le surplus.
Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 25 septembre 2023, il demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :
. a dit que l'action en nullité du contrat de vente pour violation des dispositions du code de la consommation était prescrite,
. a rejeté la demande en nullité du contrat de vente,
. a dit que les sommes versées par lui à la SA BNP Paribas Personal Finance au titre du remboursement anticipé du capital du contrat de crédit resteraient acquises à celle-ci,
. a rejeté sa demande au titre de son préjudice moral,
. l'a condamné à verser à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
. l'a condamné aux dépens,
. a rejeté ses demandes pour le surplus;
- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il :
. a dit que l'action en nullité du contrat de vente fondée sur le dol était recevable,
. a rejeté la demande de la SA Paribas Personal Finance en irrecevabilité pour l'absence de mise en cause des organes de la procédure collective,
. a rejeté la demande en irrecevabilité formée par la SA BNP Paribas Personal Finance pour l'absence de déclaration de créance,
. a déclaré recevables ses demandes d'indemnisation au titre du préjudice moral,
. a rejeté les demandes de la SA BNP Paribas Personal Finance pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant
- de déclarer ses demandes recevables et bien fondées,
- de prononcer la nullité du contrat de vente conclu entre lui et la société Solution Eco Energie,
- de mettre à la charge de la liquidation judiciaire de la société Solution Eco Energie à procéder à ses frais à l'enlèvement de l'installation litigieuse et la remise en état de l'immeuble,
- de prononcer en conséquence la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre lui et la société BNP Paribas Personal Finance,
- de constater que la société BNP Paribas Personal Finance a commis une faute dans le déblocage des fonds à son préjudice et doit dès lors être privée de sa créance de restitution du capital emprunté, et la condamner à procéder au remboursement de l'ensemble des sommes versées par lui au titre de l'exécution normale du contrat de prêt litigieux,
- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance à lui verser l'intégralité des sommes suivantes :
- 35 000 euros correspondant à l'intégralité du prix de vente de l'installation
- 16 249,30 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par lui en exécution du prêt souscrit
- 5 000 euros au titre du préjudice moral
- 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de débouter la société BNP Paribas Personal Finance et la société Solution Eco Energie de l'intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions contraires,
- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance à supporter les dépens de l'instance, en ce compris ceux de première instance et d'appel.
- oOo-
Aux termes de ses uniques conclusions transmises le 3 juillet 2023, la SAS BNP Paribas Personal Finance demande à la cour :
A titre principal
- de dire et juger que M. [V] [G] est irrecevable en ses demandes pour cause de prescription,
- de dire et juger que M. [V] [G] est irrecevable en ses demandes en l'absence de mise en cause des organes de la procédure collective de la société Solution Eco Energie, co-contractant principal,
- de dire et juger que M. [V] [G] est irrecevable en ses demandes en l'absence de déclaration de créances,
- de dire et juger que la demande d'indemnisation formulée par M. [V] [G] au titre du préjudice moral est irrecevable,
- de dire et juger que les conditions de nullité des contrats de vente et de crédit ne sont pas réunies,
- de dire et juger que M. [V] [G] ne peut plus invoquer la nullité du contrat de vente, et donc du contrat de prêt du fait de l'exécution volontaire des contrats, de sorte que l'action est irrecevable en application de l'article 1338 alinéa 2 du code civil,
- de dire et juger qu'elle n'a commis aucune faute,
En conséquence
- de confirmer le jugement rendu le 13 septembre 2022 par le tribunal judiciaire de Besançon sauf en ce qu'il a :
. dit que l'action en nullité du contrat de vente fondée sur le dol formée par M. [G] est recevable,
. rejeté sa demande en irrecevabilité pour absence de mise en cause des organes de la procédure collective,
. rejeté sa demande en irrecevabilité pour absence de déclaration de créance,
. déclaré recevables les demandes d'indemnisation de M. [G] au titre du préjudice moral,
Statuant à nouveau sur ces seuls chefs de jugement critiqués
- de débouter M. [V] [G] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
A titre subsidiaire et dans l'hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée
- de débouter M. [V] [G] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- de dire et juger que l'absence de faute de l'établissement de crédit laisse perdurer les obligations de restitutions réciproques,
- de dire et juger que les sommes versées par M. [V] [G] au titre du remboursement anticipé du capital du crédit lui resteront acquises,
- de fixer au passif de la liquidation de la société Solution Eco Energie, prise en la personne de son liquidateur, Maître [M] [H], la somme de 11 862,64 euros au titre des intérêts perdus,
A titre infiniment subsidiaire et dans l'hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée et une faute des établissements de crédit retenue
- de débouter M. [V] [G] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- de condamner M. [V] [G] au paiement de la somme de 35 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- de fixer au passif de la liquidation de la société Solution Eco Energie, prise en la personne de son liquidateur, Maître [M] [H], la somme de 46 862,64 euros au titre du capital et des intérêts perdus,
En tout état de cause
- de condamner M. [V] [G] à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner M. [V] [G] aux entiers dépens.
- oOo-
La déclaration d'appel a été signifiée à domicile à Maître [M] [H] ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS Solution Eco Energie par acte du 28 février 2023.
Maître [M] [H] n'a pas constitué avocat.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 avril 2024.
L'affaire a été appelée à l'audience du 14 mai 2024 et elle a été mise en délibéré au 13 août 2024.
Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR
I. Sur la prescription de l'action en nullité du contrat de vente
M. [V] [G] conclut à la nullité du contrat de vente passé avec la société Solution Eco Energie en soutenant que font notamment défaut, sur le bon de commande, la marque et la puissance de l'onduleur, la marque et les caractéristiques du kit d'intégration au bâti des panneaux, la marque, le type, l'épaisseur et les caractéristiques thermiques de l'isolant, le prix unitaire des biens commandés, la ventilation entre le coût des biens et le coût de la main-d''uvre, la date de livraison et d'installation des panneaux photovoltaïques, et le montant de l'assurance emprunteur. Il ajoute que la réalisation de multiples actes après la signature du bon de commande ne saurait caractériser une volonté non équivoque de sa part de couvrir les irrégularités affectant le contrat.
La banque soutient que l'action en nullité ou en résolution de contrat formée par M. [V] [G] est prescrite en ce que les contrats de vente et de crédit ont été signés le 6 avril 2016, soit plus de 5 ans avant l'assignation du 7 avril 2021, faisant valoir que la prescription court à compter de la date de signature du contrat. Elle ajoute que le bon de commande précise la puissance de la centrale, le nombre de panneaux, la puissance de chaque panneau et les accessoires fournis, fait valoir qu'aucun texte ne définit les caractéristiques essentielles des panneaux photovoltaïques, que les modalités d'exécution de la prestation de service ne sont pas exigées par les textes, que le délai de livraison est indiqué en ce qu'il est écrit que l'installation interviendra dans les 4 mois suivant la signature du bon de commande, et que M. [G] a été informé des modalités de financement de l'opération lorsqu'il a signé le bon de commande puisqu'il a souscrit le même jour un contrat de crédit affecté, indiquant la nature du crédit, son montant, le taux conventionnel, la durée de remboursement et le montant des mensualités. Elle ajoute qu'en exécutant volontairement les contrats, M. [G] a couvert les nullités évoquées.
M. [V] [G] conclut à la recevabilité de ses demandes en expliquant que l'action qu'il avait engagée et qui avait donné lieu au jugement du 28 mai 2019 et à la reconnaissance de responsabilité de la société Solution Eco Energie a été interruptive de prescription. Il précise qu'aucune prescription ne saurait lui être opposée dès lors qu'il n'était pas en mesure de déterminer, au moment de la signature du bon de commande, les irrégularités liées aux mentions obligatoires prescrites par le code de la consommation.
Réponse de la cour :
Sur la prescription de l'action en nullité pour dol
L'article 2224 du code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
Par ailleurs, selon l'article 2240 alinéa 1er dudit code : 'La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.'
En l'espèce, il résulte des éléments versés aux débats que le 4 janvier 2019, M. [V] [G] a saisi le tribunal d'instance de Besançon d'une demande d'indemnisation formée à l'encontre de la société Solution Eco Energie fondée sur une perte de rentabilité de son installation en raison d'un dysfonctionnement de la centrale photovoltaïque, et la responsabilité de la société a été reconnue par jugement définitif du 28 mai 2019.
La prescription a donc été été interrompue le 4 janvier 2019, de sorte que l'action en nullité du contrat de vente formée sur le dol engagée par assignation du 12 avril 2021 n'est pas prescrite.
Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé sur ce point.
Sur la prescription de l'action en nullité fondée sur le code de la consommation
Aux termes de l'article L.121-18-1 du code de la consommation dans sa version applicable au litige : 'Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties. Ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l'article L. 121-17. Le contrat mentionne, le cas échéant, l'accord exprès du consommateur pour la fourniture d'un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l'expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l'exercice de son droit de rétractation. Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° du I de l'article L. 121-17.'
L'article L.121-17 du même code, dans sa version en vigueur du 14 juin 2014 au 1er juillet 2016, prévoit que :
'I.- Préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat ;
3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;
4° L'information sur l'obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d'un contrat de prestation de services, de distribution d'eau, de fourniture de gaz ou d'électricité et d'abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l'exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l'article L. 121-21-5 ;
5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l'article L. 121-21-8, l'information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;
6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l'utilisation de la technique de communication à distance, à l'existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'Etat.
II.-Si le professionnel n'a pas respecté ses obligations d'information concernant les frais supplémentaires mentionnés au I de l'article L. 113-3-1 et au 3° du I du présent article, le consommateur n'est pas tenu au paiement de ces frais.
III.-La charge de la preuve concernant le respect des obligations d'information mentionnées à la présente sous-section pèse sur le professionnel.'
Il incombe en conséquence au professionnel de communiquer au consommateur, de manière lisible et compréhensible, un certain nombre d'informations pour lui permettre de conclure en connaissance de cause et pour utiliser correctement le produit ou bénéficier du service, et de rapporter la preuve de la régularité du contrat au regard des mentions légales devant y figurer à peine de nullité.
En l'espèce, il est constaté que la marque des équipements photovoltaïques composant l'installation vendue n'est pas mentionnée sur le bon de commande du 6 avril 2016, et il en est de même pour l'onduleur, ces éléments constituant des caractéristiques essentielles des produits concernés.
Par ailleurs, s'il figure au verso du bon de commande une mention pré-imprimée selon laquelle l'installation interviendra au plus tard dans les 4 mois suivant la signature du bon de commande, cette indication n'est pas suffisante pour répondre aux exigences de l'article L.111-1, 3 du code de la consommation dès lors qu'il n'est pas distingué entre le délai de pose des panneaux et celui de réalisation des prestations à caractère administratif (démarches administratives, mise en conformité CONSUEL, raccordement ERDF au réseau national).
Le contrat de vente encourt en conséquence la nullité.
Si la violation du formalisme prescrit par les dispositions du code de la consommation, qui a pour finalité la protection des intérêts de l'acquéreur démarché, est sanctionnée par une nullité relative à laquelle il peut renoncer par une exécution volontaire de son engagement irrégulier, la confirmation tacite d'un acte nul est subordonnée à la double condition que son auteur ait eu connaissance du vice l'affectant et qu'il ait eu l'intention de le réparer.
Sur ce point, il est désormais jugé que la reproduction même lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat.
En l'espèce, la cour constate que les conditions générales figurant au verso du bon de commande reprennent des dispositions du code de la consommation qui n'étaient plus applicables à la date de conclusion du contrat.
Par ailleurs, aucune pièce ne démontre que M. [V] [G] ait pu avoir conscience des irrégularités affectant le bon de commande au moment de sa souscription ou de son exécution.
Ainsi, le défaut d'exercice de la faculté de rétractation, la réception sans réserve des travaux, les remboursements des échéances et le règlement du prêt par anticipation ne sauraient être interprétés comme une confirmation tacite de l'obligation entachée de nullité.
Compte-tenu de ces éléments, desquels il ressort que la connaissance, par M. [V] [G], des mentions contractuelles exigées à peine de nullité du contrat permettant de faire courir le délai de prescription n'est pas établie, la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action en nullité fondée sur les dispositions du code de la consommation sera rejetée et le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.
II. Sur l'irrecevabilité des demandes tirée de l'absence de mise en cause des organes de la procédure collective
La banque fait valoir que l'assignation est irrégulière en ce que M. [V] [G] a assigné la société Solution Eco Energie sans viser les représentants légaux désignés par le jugement de liquidation judiciaire.
M. [V] [G] indique que lorsqu'il a engagé son action, la société Eco Solution Energie ne se trouvait pas en liquidation judiciaire, et précise avoir régularisé la procédure en attrayant le mandataire liquidateur dans la cause.
Réponse de la cour :
Il n'est pas discuté que la liquidation judiciaire de la société Solution Eco Energie a été prononcée le 19 mai 2021, soit postérieurement à l'assignation qui lui a été délivrée le 12 avril 2021.
Son mandataire liquidateur ayant été mis dans la cause par assignation du 26 avril 2022, la procédure à son égard a donc été régularisée, de sorte que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté l'irrecevabilité tirée de l'absence de mise de cause des organes de la procédure collective.
III. Sur l'irrecevabilité des demandes tirée de l'absence de déclaration de créances
La banque fait valoir que l'absence de déclaration de créance par M. [V] [G] entraîne nécessairement l'irrecevabilité de la demande formée à l'encontre du mandataire liquidateur du vendeur pour le contrat principal, et par voie de conséquence la demande élevée à son encontre relative au contrat de crédit.
M. [V] [G] indique qu'il lui était impossible de déclarer une créance dont il n'avait pas connaissance, et rappelle que le fondement de son action porte sur la nullité du contrat de vente et la responsabilité de l'établissement bancaire, et non sur une demande en paiement d'une somme d'argent.
Réponse de la cour :
Par application de l'article L.622-21 du code de commerce, le jugement d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire interrompt ou interdit toute action en justice tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.
L'article L.622-22 prévoit que les instances en cours sont interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance.
En l'espèce, si la société Solution Eco Energie fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, il est constaté que M. [V] [G] ne forme pas de demande de condamnation pécuniaire à son encontre, mais une demande principale tendant à voir prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté, peu important que cette action puisse entraîner des restitutions.
L'absence de déclaration de créance au passif de la procédure collective de la société Solution Eco Energie par M. [V] [G] est donc indifférente à la recevabilité de son action.
Aucune irrecevabilité n'est enconséquence encourue de ce chef et le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
IV. Sur la nullité du contrat de vente
Il a été jugé supra que le bon de commande du 6 avril 2016 se trouve affecté d'irrégularités encourant la nullité et qu'aucune confirmation de l'acte nul n'est caractérisée.
La nullité du contrat de vente sera en conséquence prononcée et le jugement déféré infirmé de ce chef.
La demande de nullité du contrat de vente fondée sur le dol devient ainsi sans objet, et il sera fait droit à la demande de M. [V] [G] de mettre à la charge de la liquidation judiciaire de la société Solution Eco Energie de procéder à ses frais à l'enlèvement de l'installation litigieuse et la remise en état de l'immeuble.
V. Sur la nullité du contrat de prêt
M. [V] [G] fait valoir que l'annulation du contrat principal emporte l'annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la société BNP Paribas Personal Finance. Il reproche à celle-ci d'avoir commis une faute dans le déblocage des fonds en ne relevant pas les anomalies du bon de commande, précise que l'attestation de livraison et l'appel de fonds ne mentionnent ni les biens et travaux commandés et financés, ni la date et les références du bon de commande litigieux, et indique que ces omissions auraient dû conduire la banque à le contacter pour obtenir toutes les précisions utiles préalablement au déblocage des fonds.
La banque fait valoir que n'étant pas partie au contrat, il ne lui appartenait pas de s'assurer de la conformité du bon de commande au code de la consommation. Elle indique qu'elle était fondée à considérer que la signature de l'attestation de fin de travaux et la demande de paiement manifestaient l'intention de M. [V] [G] de couvrir la nullité.
Réponse de la cour :
En application du principe de l'interdépendance des contrats consacré par l'article L.311-32 du code dela consomation dans sa version applicable à l'espèce, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Le contrat de financement étant l'accessoire du contrat de vente, l'annulation de celui-ci entraîne en conséquence de plein droit celle de l'autre.
La nullité du contrat de prêt affecté conclu entre M. [V] [G] sera prononcée.
VI. Sur les restitutions et le préjudice moral
M. [V] [G] demande que les sommes versées en exécution de la vente lui soient restituées, et qu'il soit dédommagé des frais bancaires engagés. Il fait valoir qu'en raison de sa faute, la banque doit être privée de sa créance de restitution du capital emprunté, explique que son préjudice tiré de la violation des dispositions du code de la consommation doit être réparé intégralement et qu'il en est de même du préjudice découlant du défaut de rendement de l'installation, soutenant que son préjudice est aggravé par la liquidation judiciaire de la société Solution Eco Energie dans la mesure où il ne pourra pas recouvrer le prix de vente.
La banque s'oppose à la demande en indiquant que M. [G] conserve une installation en parfait état de fonctionnement. Elle précise que le préjudice résulterait tout au plus de la perte d'une chance de ne pas contracter, laquelle ne peut donner lieu à réparation intégrale. Subsidiairement, si une faute devait être retenue à son égard, elle demande que son préjudice, causé par le fait qu'elle perdrait son droit à obtenir le remboursement des sommes financées, soit fixé au passif du vendeur. Elle ajoute que son dommage est également lié au fait qu'elle ne peut plus solliciter la restitution des sommes versées à la société Eco Solution Energie qui est en liquidation judiciaire.
Réponse de la cour :
L'annulation des contrats implique la remise des parties en l'état qui était le leur avant la conclusion.
En ne relevant pas les irrégularités affectant le bon de commande au regard des dispositions protectrices du code de la consommation, la banque a commis une faute. Toutefois, le seul fait pour le prêteur d'avoir commis un tel manquement est insuffisant pour le priver de sa créance de restitution, et il appartient à l'emprunteur d'établir que cette faute lui a causé un préjudice actuel et certain, qui constitue la mesure de la privation du droit à restitution du capital. En l'espèce, étant rappelé au demeurant que le crédit a d'ores et déjà été intégralement remboursé, du fait de la liquidation judiciaire du vendeur, qui rend peu probable la reprise de possession de l'équipement et la remise en état des lieux, M. [G] reste en possession d'une installation de production d'électricité fonctionnelle, dont il a, dans le cadre d'une précédente instance, été indemnisé du rendement jugé insuffisant, ce dont il résulte l'absence de démonstration d'un préjudice réel.
M. [V] [G] sera dès lors débouté de sa demande de condamnation de la banque à lui régler la somme de 35 000 euros.
Il n'est pas plus fait la preuve de l'existence d'un préjudice de nature morale.
Cependant, l'annulation du contrat de financement oblige la banque à restituer à M. [V] [G] les intérêts et frais s qu'il a engagés à l'occasion du remboursement du crédit, soit la somme justifiée de 16 118 euros au titre des intérêts (11 729 euros) et de l'assurance (4 389 euros), ainsi qu'il ressort de l'expertise sur investissement qu'il produit en pièce N°7.
La banque sera en conséquence condamnée au paiement de cette somme.
VII. Sur la demande de la banque de fixation au passif de la liquidation de la somme de 11 862,64 euros au titre des intérêts perdus
L'annulation du contrat de financement liée à l'irrégularité du contrat de vente faisant perdre à la banque les intérêts du prêt qu'elle se trouve contrainte de reverser à M. [V] [G], il sera fait droit à la demande et la somme de 11 729 euros sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société Solution Eco Energie.
VIII. Sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile
Le jugement entrepris sera infirmé sur les dépens et sur les frais irrépétibles.
Les dépens de première instance et d'appel seront partagés par moitié entre Maître [M] [H], ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS Solution Eco Energie, et la SA BNP Paribas Personal Finance.
La SA BNP Paribas Personal Finance sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à M. [V] [G] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt de défaut, après débats en audience publique,
CONFIRME le jugement rendu le 13 septembre 2022 par le tribunal judiciaire de Besançon en ce qu'il a :
- prononcé la jonction du dossier RG 11 22-295 avec le dossier RG 11 21-303,
- dit que l'action en nullité du contrat de vente fondée sur le dol formée par M. [G] était recevable,
- rejeté la demande de la SA BNP Paribas Personal Finance en irrecevabilité pour absence de mise de cause des organes de la procédure collective,
- rejeté la demande en irrecevabilité formée par la SA BNP Paribas Personal Finance pour absence de déclarations de créance,
- déclaré recevables les demandes d'indemnisation de M. [G] au titre du préjudice moral,
- rejeté la demande formée par M. [G] au titre de son préjudice moral,
L'INFIRME pour le surplus ;
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT
DECLARE recevable l'action en nullité du contrat de vente fondée sur les dispositions du code de la consommation ;
PRONONCE la nullité du contrat de vente passé entre M. [V] [G] et la SAS Solution Eco Energie ;
MET à la charge de la liquidation judiciaire de la SAS Solution Eco Energie l'enlèvement, à ses frais, de l'installation litigieuse et à la remise en état de l'immeuble ;
PRONONCE la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre M. [V] [G] et la SA BNP Paribas Personal Finance ;
CONDAMNE la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [V] [G] la somme de 16 118 euros au titre des intérêts et de l'assurance du prêt ;
FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Solution Eco Energie, prise en la personne de son liquidateur, la somme de 11 862,64 euros au titre des intérêts perdus pour la SA BNP Paribas Personal Finance ;
PARTAGE par moitié les dépens de première instance et d'appel entre Maître [M] [H], ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS Solution Eco Energie, et la SA BNP Paribas Personal Finance ;
CONDAMNE la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [V] [G] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE la SA BNP Paribas Personal Finance de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;