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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 9, 2 mai 2024, n° 23/03936

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

DEMOS (S.A)

Défendeur :

NOVA PERFORMANCE (SAS), MJ SYNERGIE (SELARL), AJDE ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES (SELARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme PELIER-TETREAU

Conseiller :

Mme LACHEZE

Avocats :

Me ABRAMOV, Me POIDEVIN, Me D'OOGHE

CA PARIS, du 16 fév. 2023

16 février 2023

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 janvier 2024, la société Demos demande à la cour, au visa des articles 74, 542, 562, 908, 914, 916, et 954 du code de procédure civile, de :

- La déclarer recevable et bien fondée en son déféré ;

- Infirmer entièrement l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 16 février 2023 (RG n°22/15401, n° Portalis 35L7-V-B7G-CGK25), en ce qu'elle a débouté la société Demos de sa demande tendant à l'irrecevabilité de l'appel, et les a condamnés aux dépens de l'incident ;

Statuant à nouveau,

- Juger irrecevable comme étant tardif le second appel interjeté par la société Nova Performance et la SELARL MJ Synergie, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Nova Performance, selon déclaration d'appel en date du 26 mars 2021, dès lors que l'exception de nullité du procès-verbal de signification du jugement à Nova Performance en date du 8 février 2019 est irrecevable, faute d'avoir été présentée avant toute défense au fond ;

- A titre subsidiaire,

Juger irrecevable comme étant tardif le second appel interjeté par la société Nova Performance et la SELARL MJ Synergie, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Nova Performance, selon déclaration d'appel en date du 26 mars 2021, compte tenu de la nullité de la première déclaration d'appel en date du 28 février 2019 ;

- A titre très subsidiaire,

Juger irrecevable le second appel interjeté par la société Nova Performance et la SELARL MJ Synergie, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Nova Performance, selon déclaration d'appel en date du 26 mars 2021, compte tenu de l'autorité de chose jugée attachée à l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 6 janvier 2022 ;

- A titre infiniment subsidiaire,

Juger irrecevable le second appel interjeté par la société Nova Performance et la SELARL MJ Synergie, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Nova Performance, selon déclaration d'appel en date du 26 mars 2021, compte tenu du caractère régulier et opposable à la société Nova Performance de la signification à domicile du 8 février 2019 à la société Nova Performance du jugement du tribunal de commerce de Paris du 28 janvier 2019 ;

- En tout état de cause,

Condamner la SELARL MJ Synergie, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Nova Performance, la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre de la présente procédure ;

- Condamner la SELARL MJ Synergie, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Nova Performance, aux entiers dépens de l'incident.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 novembre 2023, la société Nova Performance et la SELARL MJ Synergie, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Nova Performance, demandent à la cour, au visa des articles 654 à 658, 693, 74 et 112 et suivants du code de procédure civile, de :

Juger les demandes de la société Demos irrecevables et non fondées ;

Confirmer l'ordonnance du 16 février 2023 (n° RG 22/15401) du conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Paris en toutes ses dispositions ;

Débouter la société Demos de l'ensemble de ses demandes ;

Condamner la société Demos à payer à la société Nova Performance la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre de la présente procédure ;

Condamner la société Demos en tous les frais et dépens.


MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'autorité de force jugée de l'ordonnance du 6 janvier 2022

La société Demos expose que l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 6 janvier 2022, qui a déclaré irrecevable l'exception de nullité de la signification du 8 février 2019, a force de chose jugée. Elle souligne que si, dans sa décision du 15 septembre 2022, la Cour a disjoint les deux procédures découlant du premier appel et du second appel, ces deux procédures étaient jointes jusqu'alors au sein d'une même instance, qu'ainsi l'ordonnance du 6 janvier 2022 vaut également, en tout état de cause, pour la procédure découlant du second appel.

La société Nova Performance et le liquidateur soutiennent que la question de la régularité de l'acte de signification n'a jamais été tranchée par la cour ; que la décision d'irrecevabilité prononcée par le conseiller de mise en état dans son ordonnance du 6 janvier 2022 n'interdit pas au conseiller de trancher ce litige, que le fait que l'arrêt du 15 septembre 2022 de la cour statuant en déféré d'une ordonnance autre que celle du 6 janvier 2022 indique que cette dernière décision est définitive, n'a pas d'influence sur le présent litige, que l'arrêt du 15 septembre 2022 statue en effet exclusivement sur la question de la régularisation de la première procédure d'appel, et que cette irrecevabilité prononcée par ordonnance du 6 janvier 2022 n'interdit aucunement au liquidateur de la société Nova Performance de soulever la nullité de l'assignation du jugement entrepris dans le cadre de la présente procédure. Ils exposent que, dans le cadre de la présente procédure, les conclusions justificatives d'appel du 16 juin 2021 reprennent en première argumentation la nullité de l'acte de signification, que ces conclusions justificatives d'appel précèdent l'ordonnance du 6 janvier 2022, que le conseiller de la mise en état de était donc saisi pour la première fois de cet incident et ce même avant qu'une juridiction ait déclaré la demande irrecevable dans le cadre d'une autre procédure.

Sur ce,

Ainsi que le conseiller de la mise en état l'a rappelé, une première déclaration d'appel a été formée par les organes de la procédure de la société Nova Performance.

L'intimé a soulevé la nullité et la caducité de l'appel ainsi que l'irrecevabilité des demandes pour défaut de qualité à agir des appelants, irrecevabilité à laquelle le conseiller de la mise en état a fait droit aux termes d'une ordonnance qui a fait l'objet d'un déféré.

Dans le cadre de cette procédure de déféré, la cour a rendu un premier arrêt confirmant l'ordonnance en ce qu'elle avait déclaré que l'acte d'appel était affecté d'une irrégularité de fond, mais - saisie d'un moyen tiré de la régularisation du vice de fond - a enjoint aux parties de communiquer l'acte de signification du jugement du 28 janvier 2019 ainsi que les actes de régularisation et de conclure sur la régularisation invoquée.

Postérieurement à cet arrêt, une seconde déclaration d'appel a été régularisée, laquelle est discutée devant la cour.

Dans le cadre de la procédure en déféré, une jonction a été ordonnée entre la procédure en déféré et la procédure découlant de la seconde déclaration d'appel. Or, cette jonction - procéduralement irrégulière dès lors que la cour en déféré n'est saisie que dans le périmètre de l'ordonnance du conseiller de la mise en état déférée, a été rapportée par l'arrêt du 15 septembre 2022 qui a ordonné la disjonction des instances et a permis l'enregistrement de la seconde déclaration d'appel.

Dans le cadre de la procédure en déféré, un incident au sein de l'incident déféré a été soulevé par l'appelant, défendeur à l'incident, s'agissant de la nullité de la signification du jugement critiqué.

Le conseiller de la mise en état a rendu une ordonnance le 6 janvier 2022 déclarant irrecevable la demande de la SAS Nova Performance et de la SELARL Jenner et associés, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Nova Performance, tendant à voir prononcer la nullité de l'acte de signification pour avoir été présentée dans des conclusions comportant également des moyens et demandes au fond, en violation des dispositions des articles 74 et 112 du code de procédure civile.

Il est acquis que cette ordonnance n'a pas été déférée à la cour. Toutefois, cette ordonnance de mise en état concerne uniquement la procédure en déféré ouverte après que le conseiller de la mise en état a rendu une ordonnance déclarant l'acte d'appel du 28 février 2019 irrecevable pour défaut de qualité à agir et d'intérêt à agir de l'appelant.

Les décisions qui ont statué sur la procédure dans le cadre du déféré dans le dossier enregistré sous le numéro de RG 20-43, ne sauraient avoir d'incidence sur une procédure engagée par une déclaration d'appel postérieure (par déclaration d'appel du 26 mars 2021) alors même que celle-ci aurait été jointe, à tort comme il a été vu, à la procédure au cours de laquelle lesdites décisions ont été rendues.

En outre, l'article 914 du code de procédure civile dispose dans son dernier alinéa que les ordonnances du conseiller de la mise en état statuant sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel, sur la caducité de celui-ci ou sur l'irrecevabilité des conclusions et des actes de procédure en application des articles 909, 910 et 930-1 ont autorité de la chose jugée au principal, ce qui a contrario signifie que les ordonnances du conseiller de la mise en état qui statuent sur des demandes qui ne relèvent pas des fins de non-recevoir, caducité et irrecevabilités visées par le texte n'ont pas autorité de la chose jugée.

En l'espèce, il est soulevé une exception de nullité de la signification du jugement du 28 janvier 2019 dont il a été fait appel.

Une exception de nullité de la signification n'est ni une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel, ni une caducité, ni une irrecevabilité touchant aux conclusions et aux actes de procédure en application des articles 909, 910 et 930-1 de sorte que l'ordonnance rendue le 6 janvier 2022 par le conseiller de la mise en état dans la procédure enregistrée sous le numéro RG 20-43 n'est pas assortie de l'autorité de la chose jugée.

En conséquence, c'est à bon droit que le conseiller de la mise en état a rejeté le moyen tiré de l'autorité de la chose jugée de l'ordonnance du 6 janvier 2022.

Sur l'irrecevabilité de l'exception de nullité de la signification du jugement

La société Demos reproche au conseiller de la mise en état d'avoir omis de se prononcer sur le caractère tardif de l'exception de nullité du procès-verbal soulevée par les appelants après de multiples défenses au fond ; que les conclusions régularisées en avril 2021 et juin 2021 par les appelants contenant, pour la première fois, l'exception de nullité du procès-verbal de signification ont été notifiés à la cour et non devant le conseiller la mise en état, de sorte que l'exception n'a pas pu être présentée devant la juridiction compétente (le conseiller de la mise en état) avant toute défense au fond. Elle soutient ainsi qu'en application des articles 74, 112 et 914 du code de procédure civile, et au regard du fait que les conclusions du 16 juin 2021 régularisées postérieurement au second appel interjeté le 26 mars 2021, mais également postérieurement à la jonction du premier et du second appels par ordonnance du 20 mai 2021, alors qu'elles développent des moyens de défense au fond, rendent irrecevables l'exception de nullité soulevée pour la première fois spécialement devant le conseiller de la mise en état le 18 octobre 2021.

La société Nova Performance et le liquidateur répliquent que le conseiller de la mise en état était saisi pour la première fois aux termes des conclusions justificatives d'appel du 16 juin 2021 - qui précèdent l'ordonnance du 6 janvier 2022 - de la nullité de la signification et ce même qu'avant qu'une juridiction ait déclaré la demande irrecevable dans le cadre d'une autre procédure ; que cet incident étant la raison même de l'appel interjeté le 26 mars 2021, l'appel ne peut être déclaré recevable que si la signification du jugement entrepris est déclarée nulle. Ils ajoutent que l'article 112 précise que la nullité des actes de procédure peut être invoquée au fur et à mesure de leur accomplissement et n'a donc pas à être invoquée in limine litis. Ils concluent qu'ils sont recevables à développer devant la cour la nullité de l'acte de signification du 8 février 2019.

Sur ce,

Ainsi qu'il a été examiné supra, les actes de procédure dans le cadre du déféré du premier appel dans le dossier enregistré sous le numéro de RG 20-43, sont indépendants de la procédure engagée à l'occasion de la seconde déclaration d'appel effectuée postérieurement, nonobstant la jonction prononcée par erreur.

Il s'ensuit que les conclusions des appelants des 6 avril et 21 juin 2021 régularisées dans le cadre de la procédure enregistrée sous le numéro RG 20-43 relatives au premier appel ne peuvent permettre à la société Demos de les invoquer dans le cadre du second appel objet de la présente procédure de déféré pour soutenir que l'exception d'irrecevabilité n'aurait pas été soulevée avant toute défense au fond en violation des articles 74, 112 et 914 du code de procédure civile.

Par conséquent, la cour constatera que les conclusions du 18 octobre 2021 spécialement adressées au conseiller de la mise en état, puis les conclusions du 14 décembre 2022, ont bien soulevé in limine litis avant toute défense au fond - et ce devant le magistrat procéduralement compétent en application de l'article 112 précité - l'exception de nullité de la signification du jugement.

Aussi, convient-il de confirmer l'ordonnance de ce chef.

Sur l'exception de nullité de la signification du jugement du tribunal de commerce

La société Nova Performance et le liquidateur judiciaire soutiennent qu'il résulte de l'acte de signification que celle-ci a été faite par remise à une personne présente, en l'occurrence une employée de la société Regus, au motif que la société Nova Performance bénéficierait d'une domiciliation de siège social dans les locaux de cette société ; que cette mention est inexacte, puisqu'au 16, avenue de l'Europe à [Localité 6], la société Nova Performance était locataire de plusieurs bureaux et que dans ces bureaux se trouvaient plusieurs salariés dont certains habilités à recevoir une assignation ; que la réceptionniste, salariée de la société Regus, ne se trouvait pas dans les locaux loués par la société Nova Performance et que c'est tort que l'huissier a mentionné qu'il n'y avait aucun représentant légal, fondé de pouvoir ou personne habilitée présent au siège de la société et a mentionné que la signification à personne était impossible. Ils exposent que cette irrégularité cause un grief à la société Nova Performance en ce qu'elle n'a pas été informée de la signification; que, par conséquent, l'acte de signification du 8 février 2019 doit être annulé en application de l'article 693 du code de procédure civile.

La société Demos réplique que la signification du jugement est régulière comme effectuée à l'adresse à laquelle la société Nova Performance occupait ses locaux s'agissant d'un espace de co-working mettant à disposition des locataires un personnel de réception en charge de l'accueil et de la gestion de son courrier ; que la salariée de la société Regus a valablement réceptionné l'acte de l'huissier en confirmant être habilitée à recevoir l'acte et que l'huissier, en conséquence, n'avait aucune autre diligence à accomplir s'agissant d'un procès-verbal obéissant aux dispositions de l'article 655 du code de procédure civile.

Sur ce,

L'article 654 du code de procédure civile dispose que la signification doit être faite à personne. La signification à une personne morale est faite à personne lorsque l'acte est délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier ou à toute autre personne habilitée à cet effet.

L'article 655 dispose que si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit à défaut de domicile connu à résidence.

L'huissier de justice doit relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification.

La copie peut être remise à toute personne présente au domicile ou à la résidence du destinataire.

La copie ne peut être laissée qu'à la condition que la personne présentée l'accepte et déclare ses nom, prénom et qualité.

L'huissier de justice doit laisser, dans tous ces cas, au domicile ou à la résidence du destinataire un avis de passage daté l'avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant, ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise.

Il résulte de ces dispositions que la signification à personne constitue le principe et qu'en cas d'impossibilité de signification à personne amenant une signification de l'acte à domicile, l'huissier doit relater les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une signification à personne.

En l'espèce, l'huissier indique s'être présenté à l'adresse de la société Nova Performance et a remis l'acte à l'agent d'accueil de la société Regus qui s'est dit habilité à le recevoir et s'est donc vu remettre le pli contenant la signification litigieuse.

La société Nova Performance occupait des locaux mis à sa disposition par la société Regus, aux termes d'un accord qui n'est pas communiqué à la cour, seul un 'renouvellement de contrat' pour un an est produit en pièce n°8 par les intimés au déféré, lequel document mentionne un prix par bureau (et non un loyer) ainsi que l'agrément préfectoral au profit de la société Regus pour l'exercice de l'activité de domiciliation, et qualifie la société Regus de 'fournisseur' de prestations. La cour en déduit qu'il s'agit d'un contrat de prestations de services classiques d'un centre d'affaires et/ou espaces de co-working s'analysant en un contrat de domiciliation, étant en tout état de cause observé que la société Nova Performance ne soutient pas qu'elle bénéficiait d'un contrat de sous-location ou d'un bail commercial.

Il s'en déduit nécessairement que le siège social de la société Nova Performance est situé dans le centre Regus sis [Adresse 1] à [Localité 6], conformément à ce qui est indiqué sur son extrait K-bis.

Il n'est pas utilement contesté que le service de mise à disposition de locaux proposé par la société Regus prévoit, pour l'ensemble de ses occupants, également la mise à disposition d'un personnel de réception professionnel destiné à assurer l'accueil des clients et invités et la réception et la gestion du courrier et des correspondances.

Dès lors, contrairement à ce qui est énoncé dans l'ordonnance déférée, la pièce n°8 précitée n'est pas de nature à établir que la société Nova Performance aurait conclu avec la société Regus un contrat de louage de bureaux et non un contrat de domiciliation.

L'agent d'accueil présent, employé de la société Regus, a indiqué à l'huissier instrumentaire que la société Nova Performance bénéficiait d'une domiciliation de son siège social, étant observé que le commissaire de justice n'est pas tenu de demander la production du contrat liant les sociétés Regus et Nova Performance pour vérifier l'exactitude de ce qui lui été déclaré par l'agent d'accueil, de même qu'il n'a pas l'obligation de vérifier l'habilitation à recevoir l'acte.

C'est donc à tort que le conseiller de la mise en état a fondé l'irrégularité de la signification sur l'absence de domiciliation entre les sociétés Regus et Nova Performance.

Par ailleurs, la société Nova Performance, demanderesse à l'exception de nullité de l'acte de signification, est défaillante - au regard de la pièce n°8 précitée et en l'absence de communication de tout contrat - à rapporter la preuve qu'elle bénéficiait d'un contrat de louage de bureaux et non d'un contrat de domiciliation.

En contrepoint, la société Demos démontre, en versant une capture d'écran du site internet de Regus, que les prestations de la société Regus s'accompagnaient de la mise à disposition par elle d'un personnel de réception en charge de l'accueil et de la gestion de son courrier pour son compte.

Il s'ensuit que la personne de l'accueil/réception de l'espace de travail partagé, qui a fait état de sa qualité, a confirmé le siège social de la société Nova Performance en ces lieux et a accepté de recevoir l'acte, était dûment habilitée à cet effet.

Ainsi, le commissaire de justice a pu valablement effectuer la signification du jugement à personne pouvant recevoir l'acte au siège social de la société Nova Performance, sans qu'aucune diligence supplémentaire soit à accomplir, s'agissant d'un procès-verbal obéissant aux dispositions de l'article 654 du code de procédure civile. Il ne saurait dès lors lui être reproché de ne pas s'être rendu dans les bureaux 201 à 210 occupés par la société Nova Performance.

Par conséquent, la signification à personne du jugement à laquelle a fait procéder la société Demos est régulière et n'est entachée d'aucune nullité.

Aussi, convient-il d'infirmer l'ordonnance de ce chef et de rejeter l'exception de nullité de la signification du jugement du 8 février 2019.

Sur l'irrecevabilité du second appel

La société Demos expose que la sanction d'un appel interjeté tardivement, après l'expiration du délai de recours, est le prononcé de l'irrecevabilité de l'appel.

La société Nova Performance et le liquidateur judiciaire répliquent que l'annulation de l'acte d'appel a pour conséquence que le délai d'appel à l'encontre du jugement du 28 janvier 2019 n'est pas expiré et que l'acte d'appel du 26 mars 2021 n'est donc pas tardif.

Sur ce,

La sanction d'un appel interjeté tardivement, après l'expiration du délai de recours d'un mois prévu à l'article 538 du code de procédure civile, est l'irrecevabilité de l'appel, qui doit être prononcée d'office par le juge.

En l'espèce, le jugement critiqué a été valablement signifié le 8 février 2019. La société Nova Performance, la SELARL MJ Synergie et la SELARL AJDE disposaient donc d'un délai expirant le 8 mars 2019 à peine de forclusion pour former appel.

La déclaration d'appel ayant été effectuée le 26 mars 2021, il convient de constater sa tardiveté et, partant, son irrecevabilité.

Aussi, convient-il d'infirmer l'ordonnance de ce chef, et de déclarer irrecevable le second appel de la société Nova Performance, la SELARL MJ Synergie et la SELARL AJDE.

Sur les autres demandes

Le sens du présent arrêt conduit à infirmer l'ordonnance déférée en ce qui concerne le sort des dépens de première instance et l'application qui y a été faite des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens du présent incident seront passés en frais privilégiés de procédure collective.

Il conviendra enfin de laisser à chaque partie la charge de ses propres frais non compris dans les dépens prévus à l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme l'ordonnance en ce qu'elle a :

- Rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée de l'autorité de la chose jugée attachée à l'ordonnance rendue le 6 janvier 2022 dans la procédure enregistrée sous le numéro de RG 20-43 ;

- Déclaré recevable l'exception de nullité de la signification du jugement du 28 janvier 2019 effectuée le 8 février 2019 ;

L'infirme en ce qu'elle a :

- Prononcé la nullité de la signification du jugement du 28 janvier 2019 effectuée le 8 février 2019 ;

- Rejeté la demande de la société Demos de voir déclarer irrecevable comme tardif l'appel interjeté par la société Nova Performance et la SELARL MJ Synergie le 26 mars 2021 ;

- Condamné la société Demos à payer à la société Nova Performance représentée par son liquidateur la SELARL MJ Synergie prise en la personne de Me Nicolas Flesh la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la société Demos aux dépens de l'incident.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Rejette la demande de nullité de la signification du jugement du 28 janvier 2019 effectuée le 8 février 2019 ;

- Déclare irrecevable comme tardif l'appel interjeté par la société Nova Performance et la SELARL MJ Synergie le 26 mars 2021 ;

- Laisse à chaque partie la charge de ses propres frais non compris dans les dépens prévus à l'article 700 du code de procédure civile exposés au titre de l'incident ;

- Dit que les dépens de l'incident seront passés en frais privilégiés de procédure collective.