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CA Lyon, 3e ch. a, 3 septembre 2024, n° 23/08678

LYON

Ordonnance

Autre

CA Lyon n° 23/08678

3 septembre 2024

N° RG 23/08678 - N° Portalis DBVX-V-B7H-PJXD

décision du Tribunal de Commerce de LYON du 27 septembre 2023

2022j00260

S.A.S. SAINT PRIEST MEUBLES ET DECORATION

C/

S.A.S. COFEL INDUSTRIES

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ORDONNANCE DU CONSEILLER

DE LA MISE EN ETAT DU 03 Septembre 2024

APPELANTE :

S.A.S. SAINT PRIEST MEUBLES ET DECORATION au capital de 137.484 €, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON sous le numéro 395 345 531, agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547, postulant et par Me Frédéric GUTTON de la SELARLU Law Dicé, avocat au barreau de LYON

Plaidant à l'audience par Me CAMBON, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

S.A.S.U. COFEL INDUSTRIES anciennement dénommée COPIREL, au capital de 39.951.600 euros, immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 443 681 903, prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475, postulant et par Me Charlotte BELLET de la SCP BOURGEON MERESSE GUILLIN BELLET & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

Audience tenue par Patricia GONZALEZ, Présidente chargée de la mise en état de la 3ème chambre A de la cour d'appel de Lyon, assistée de Clémence RUILLAT, Greffière,

Les conseils des parties entendus ou appelés à notre audience du 25 Juin 2024, ceux-ci ayant eu connaissance de la date du délibéré au 03 Septembre 2024 ;

Signée par Patricia GONZALEZ, Présidente chargée de la mise en état de la 3ème chambre A de la cour d'appel de Lyon, assistée de Clémence RUILLAT, Greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE : Contradictoire

* * * * *

EXPOSE DU LITIGE

Par jugement du 27 septembre 2023, le tribunal de commerce de Lyon a principalement :

- condamné la société [Localité 3] meubles décoration (ci-après SMD) à payer à la société Cofel industries la somme de 38.980,76 euros TTC, outre les intérêts courant à compter du 30 novembre 2018, date de la mise en demeure, et porté à dix fois le montant de l'intérêt légal, par application de l'article 8.5 des Conditions générales de vente,

- condamné la société SMD à payer à la société Cofel industries la somme forfaitaire de 40 euros par facture impayée, soit 920 € pour 23 factures,

- condamné la société SMD à payer à la société Cofel industries -la somme de 5.847,11 euros,

- enjoint à la société SMD de communiquer à la société Cofel industries une facture d'un montant de 8.392,26 euros TTC et un avoir du montant de la facture de 10.849,92 euros TTC qu'elle avait adressée à la société Copirel, devenue Cofel industries, et ce, sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter du 30 ème jour suivant la signification du présent jugement, - jugé que la société Cofel industries, au regard des factures impayées par la société SMD) était et est fondée à mettre fin aux conditions de paiement différé et à exiger le paiement immédiat de toutes commandes postérieures aux factures impayées,

- rejeté l'ensemble des demandes de la société SMD,

- débouté la société Cofel industries de sa demande de dommages intérêts pour résistance abusive et fautive,

- condamné la société à payer à la société Cofel industries la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société SMD aux dépens de l'instance.

La société SMD a formé appel de ce jugement par déclaration d'appel du 20 novembre 2023.

Par conclusions d'incident du 24 mai 2024, la société Cofel industries a saisi le conseiller de la mise en état aux fins d'incompétence et lui demande par dernières conclusions du 21 juin 2024 de :

Vu l'article L. 442-6, III du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2019-

359 du 24 avril 2019

Vu l'article D. 442-3 du Code de commerce dans sa rédaction applicable à la cause,

Vu l'article 367 du Code de procédure civile,

- juger que la société SMD, appelante, demande à la cour de réformer le jugement entrepris en ce que celui-ci a rejeté ses demandes indemnitaires reconventionnelles fondées sur l'article L. 442-6 du Code de commerce au titre d'une rupture brutale de relations commerciales établies et, statuant à nouveau, de faire droit à ces mêmes demandes,

- juger que seule la cour d'appel de Paris, en application des articles L. 442-6, III et D. 442-3 du Code de commerce dans leur rédaction applicable à la cause, peut connaître de telles demandes,

En conséquence,

A titre principal :

- déclarer la cour de céans incompétente pour trancher ces demandes,

- inviter la société SMD à mieux se pourvoir en saisissant le cas échéant la cour d'appel de Paris de ses demandes formées sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce,

A titre subsidiaire :

- déclarer irrecevables les demandes indemnitaires reconventionnelles formées devant la cour de céans par la société SMD sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce au titre de la rupture brutale de relations commerciales établies qu'elle allègue,

En tout état de cause :

- limiter la portée de la décision d'incompétence ou d'irrecevabilité aux seules demandes de la société SMD,

- déclarer que la cour de céans demeure saisie des demandes formées par elle,

- débouter la société SMD de ses demandes contraires aux demandes de la concluante,

- condamner la société SMD à lui payer la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens du présent incident.

Par conclusions d'incident en réponse du 20 juin 2024, la société SMD demande au conseiller de la mise en état de :

Vu l'article 680 du Code de procédure civile,

Vu l'article 367 du Code de procédure civile,

' juger nul l'acte de notification du jugement du 14 novembre 2023, en raison de la mention erronée de la Cour d'appel territorialement compétente pour connaître de son appel relatif à la demande reconventionnelle au titre de la rupture des relations commerciales établies ;

En conséquence,

' juger que le délai d'appel n'a pas commencé à courir ;

' limiter la portée de la décision d'incompétence à la seule demande reconventionnelle de la société SMD au titre de la rupture des relations commerciales établies ;

' juger que la cour d'appel de Lyon demeure compétente pour juger de son appel au titre de sa condamnation au paiement de factures, à savoir sur les chefs de jugement suivants :

'- condamne la société [Localité 3] meubles décoration (ci-après SMD) à payer à la société Cofel industries la somme de 38.980,76 euros TTC, outre les intérêts courant à compter du 30 novembre 2018, date de la mise en demeure, et porté à dix fois le montant de l'intérêt légal, par application de l'article 8.5 des Conditions générales de vente,

- condamne la société SMD à payer à la société Cofel industries la somme forfaitaire de 40 euros par facture impayée, soit 920 € pour 23 factures,

- condamne la société SMD à payer à la société Cofel industries -la somme de 5.847,11 euros,

- enjoint à la société SMD de communiquer à la société Cofel industries une facture d'un montant de 8.392,26 euros TTC et un avoir du montant de la facture de 10.849,92 euros TTC qu'elle avait adressée à la société Copirel, devenue Cofel industries, et ce, sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter du 30 ème jour suivant la signification du présent jugement, - juge que la société Cofel industries, au regard des factures impayées par la société SMD) était et est fondée à mettre fin aux conditions de paiement différé et à exiger le paiement immédiat de toutes commandes postérieures aux factures impayées,

- condamne la société à payer à la société Cofel industries la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la société SMD aux dépens de l'instance'.

' débouter la société Cofel industries de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

' condamner la société Cofel industries à payer à la société SMD la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

' condamner la même aux entiers dépens.

SUR CE :

Sur la nullité de l'acte de signification du jugement

Aux termes de l'article 680 du code de procédure civile, 'L'acte de notification d'un jugement à une partie doit indiquer de manière très apparente le délai d'opposition, d'appel ou de pourvoi en cassation dans le cas où l'une de ces voies de recours est ouverte, ainsi que les modalités selon lesquelles le recours peut être exercé ; il indique, en outre, que l'auteur d'un recours abusif ou dilatoire peut être condamné à une amende civile et au paiement d'une indemnité à l'autre partie'.

Constitue une modalité du recours au sens de l'article 680 du code de procédure civile le lieu où celui-ci doit être exercé.

La société appelante se prévaut de la nullité de l'acte de signification du jugement en l'absence de mention de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités et plus précisément en l'espèce de la cour d'appel territorialement compétente.

Il est constant que l'acte de signification ne précise qu'un appel devant la cour d'appel de Lyon et non devant la cour d'appel de Paris.

Il appartient cependant à l'appelante de démontrer que l'absence de mention de la cour d'appel de Paris comme juridiction d'appel lui cause grief pour obtenir l'annulation de l'acte. Or, la société SMD ne fait valoir aucun grief aux termes de ses conclusions mais uniquement que le délai d'appel n'a pas couru, ce qui n'est pas un grief de sorte qu'il n'y a pas lieu d'annuler l'acte pour vice de forme.

Par ailleurs, le fait que le délai d'appel n'ait pas couru sur ce point est sans effet sur le présent litige, la société SMD n'en tirant d'ailleurs aucune conséquence dans le cadre de la présente instance d'incident.

Sur la compétence

Il résulte des termes du jugement querellé que le tribunal de commerce a été saisi d'une demande reconventionnelle en paiement de dommages intérêts de la société SMD au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies au visa de l'article L 442-6 du code de commerce et qu'il a rejeté cette demande ; il ressort des conclusions d'appel de la société SMD que cette dernière a maintenu en appel sa demande de dommages intérêts sur ce fondement devant la présente cour.

Les deux parties s'accordent sur le fait que la présente cour n'est pas compétente, pour connaître en appel de cette demande qui relève de la seule cour d'appel de Paris, en application des dispositions de l'article D 442-3 du code de commerce, ce qui est constant.

En conséquence, et suite à la dernière jurisprudence de la Cour de cassation, (Com 18 octobre 2023 21.15.378), l'appel formé devant une autre cour d'appel que celle de Paris n'est plus sanctionné d'une fin de non recevoir mais la juridiction saisie à tort doit se déclarer incompétente au profit de la cour d'appel de Paris.

Il convient donc dire que la présente cour est incompétente au profit de celle de Paris s'agissant de la demande de dommages intérêts pour rupture brutale des relations commerciales établies devant la cour d'appel de Paris.

Sur les autres chefs de jugement critiqués

Les deux parties s'accordent pour reconnaître qu'il n'existe pas de connexité ni d'indivisibilité entre la demande en paiement des factures de la société Cofel industries et la demande sur le fondement de l'article L 442-6 ancien du code de commerce présentée à titre reconventionnel en première instance par la société SMD qui exigerait qu'elles soient jugées ensemble, en l'absence de risques de contrariété de décisions, ce qui n'est pas contestable.

En conséquence, la présente cour restera saisie des autres chefs de jugement expressément critiqués.

Il est équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à ce stade du litige.

Le sort des dépens de l'incident est lié à celui des dépens au fond.

PAR CES MOTIFS

Par ordonnance susceptible de déféré dans un délai de 15 jours,

Rejetons la demande de nullité de l'acte de signification du jugement.

Disons que le délai d'appel n'a pas couru s'agissant de la rupture brutale des relations commerciales établies.

Disons que la cour d'appel de Lyon n'a pas compétence pour trancher la demande de dommages intérêts au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies présentée par la société Saint Priest Meubles et décoration et renvoyons ce seul chef de jugement critiqué devant la cour d'appel de Paris.

Disons que la cour d'appel de Lyon reste compétente sur tous les autres chefs du jugement expressément critiqués.

Rejetons les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Lions le sort des dépens de l'incident à celui des dépens au fond.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE CHARGEE DE LA MISE EN ETAT