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Décisions

CA Reims, ch. civ. sect. 1, 6 septembre 2022, n° 21/01937

REIMS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

EG Réfrigération (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mehl-Jungbluth

Conseillers :

Mme Maussire, M. Lecler

Avocats :

Me Basset, Me Duterme

T. com. Reims, du 7 sept. 2021

7 septembre 2021

FAITS PROCEDURE PRETENTIONS

M. [E] [O], exerçant sous l'enseigne 'Le Royal' a sollicité l'intervention de la société EG Réfrigération dans le cadre de l'aménagement d'une brasserie '[Adresse 3], pour la réalisation de travaux de plomberie sanitaire et ventilation.

Le 28 janvier 2020, la société EG Réfrigération a adressé un devis à M. [E] [O] d'un montant de 16.084,25 euros TTC.

La société EG Réfrigération a effectué certains travaux prévus au devis qu'elle a facturés le 28 mai 2020 pour la somme de 3 873 euros HT, soit 4 647,60 euros TTC.

M. [E] [O] ne s'en est pas acquittée malgré mise en demeure du 16 septembre 2020 de sorte que la société EG Réfrigération a déposé au greffe du tribunal de commerce de Reims le 30 novembre 2020 une requête aux fins d'obtenir une ordonnance d'injonction du maitre d'ouvrage de payer les travaux réalisés et facturés.

Par ordonnance en date du 30 novembre 2020, le président du tribunal de commerce de Reims a condamné M. [E] [O] à payer à la société EG Réfrigération la somme de 4 647,60 euros, outre intérêts au taux légal, frais accessoires et dépens.

L'ordonnance d'injonction de payer a été signifiée le 08 janvier 2021 par huissier de justice.

M. [E] [O] a formé opposition à ladite ordonnance par lettre recommandée avec AR reçue au greffe le 25 janvier 2021.

La société EG Réfrigération a conclu à sa condamnation à lui payer la somme en principal de 4.647,60 euros augmentée des intérêts à compter de la mise en demeure du 15 septembre 2020 outre la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture anticipée et abusive du marché de travaux.

M. [E] [O] a demandé au tribunal de constater que la facture présentée par la société EG Réfrigération était d'un montant excessif, de dire et juger que le prix des travaux réalisés par la société EG Réfrigération ne peut excéder la somme de 2.000 euros TTC et de débouter la société EG Réfrigération de ses demandes au-delà de 2 000 euros.

Par jugement du 7 septembre 2021, le tribunal de commerce de Reims a mis à néant l'ordonnance d'injonction de payer n°2020000474 rendue le 30 novembre 2020,

Et statuant à nouveau a,

-condamné M. [E] [O] à régler à la société EG Réfrigération la somme de 4.647,60 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2020, pour les causes sus énoncées,

-condamné M. [E] [O] à payer à la société EG Réfrigération la somme de 2.000 euros, à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale et abusive,

-condamné M. [E] [O] à verser à la société EG Réfrigération la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a estimé qu'il aurait été d'usage qu'il prévienne la société EG Réfrigération avant l'intervention d'une autre entreprise et du motif de la rupture du contrat de travaux conclu entre les parties ; que par ailleurs il devait paiement des travaux exécutés et facturés.

Par déclaration du 24 octobre 2021, M. [E] [O] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par jugement rendu le 6 janvier 2022, le tribunal de commerce de Châlons en Champagne a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société EG Réfrigération et a désigné la SCP Crozat-Barault-Maigrot, mandataire judiciaire, et la SCP Chanel-Bayle, administrateurs judiciaires associés, intervenants volontairement à l'instance.

Par conclusions déposées le 31 mai 2022, M. [E] [O] demande à la cour d'infirmer en tous points le jugement du 7 Septembre 2021

Statuant à nouveau,

A titre principal et avant toute défense au fond constater que les conclusions d'intimé ont été notifiées au-delà du délai fixé par l'article 909 du code de procédure civile de sorte qu'elles seront déclarées irrecevables.

Puis,

Vu les articles 1315 al 1 ancien du code civil, devenu article 1353 du code civil, 1240 du code civil,

Vu la loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances,

- de dire et juger que la société EG Réfrigération ne justifie pas de la production du devis signé par le maître d'ouvrage,

-dire et juger que la société EG Réfrigération ne rapporte pas la preuve de l'acceptation du devis au prix réclamé,

-débouter la société EG Réfrigération de ses demandes en paiement dirigées contre l'appelant,

Avant dire droit, concernant les désordres, des non façons et des malfaçons,

- ordonner une expertise judiciaire avec la mission habituelle en la matière et notamment :

- convoquer et entendre les parties,

- se rendre et visiter les lieux,

- se faire communiquer tous les documents et les pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission,

- examiner tous les désordres allégués, non conformités aux normes applicables, malfaçons en particulier ceux mentionnés dans les présentes écritures ainsi que les dommages,

- indiquer l'origine des désordres et/ou malfaçons constatés,

- dire s'il existe des désordres, des non façons et des malfaçons,

- fournir tous les éléments techniques et de fait, de nature à permettre à la juridiction éventuellement saisie de déterminer les responsabilités encourues et d'évaluer, s'il y a lieu les préjudices subis,

- déterminer le montant des préjudices subis et des dommages-intérêts éventuellement dus en raison de l'impossibilité d'accès aux toilettes et du temps à prévoir pour la remise aux normes, dans la mesure où du fait de son activité professionnelle, l'établissement de M. [E] [O] accueille du public et doit respecter les normes en vigueur,

- indiquer et évaluer les travaux nécessaires à la réfection, à la mise en conformité des toilettes aux normes et chiffrer, le cas échéant, le coût et le temps à prévoir pour la remise en état,

- indiquer et évaluer le montant qui pourrait être du par M. [E] [O] au titre de la prestation réalisée par la société EG Réfrigération,

- s'adjoindre en cas de besoin un sapiteur,

- faire le compte entre les parties,

- de tout dresser rapport.

Etant précisé, qu'il sera sollicité la compensation entre la somme qui pourrait être mise à la charge de la société EG Réfrigération et celle mise à sa charge,

-subsidiairement, si la cour ne faisait pas droit à la demande d'expertise, sur le fondement de l'article 1240 du code civil, condamner la société EG Réfrigération à payer à M. [E] [O] la somme de :

-13.759,15 euros TTC au titre de la réfaction des toilettes pour leur mise en conformité,

-10.000 euros au titre du préjudice subi par M. [E] [O] en raison de l'impossibilité d'accès aux toilettes durant la période des travaux du fait de la société EG Réfrigération et ceux à venir,

-fixer à la somme de 2 000 euros le montant des travaux qu'il pourrait devoir à la société EG Réfrigération du fait des travaux effectués qui n'ont pas à être repris, s'agissant notamment du sèche main.

Par conséquent, condamner la société EG Réfrigération à payer à M. [E] [O] la somme de :

-13.759,15 euros TTC au titre de la réfection des toilettes pour leur mise en conformité, compensation faite avec la somme due par M. [E] [O] à la société EG Réfrigération,

-10.000 euros au titre du préjudice subi par M. [E] [O] en raison de l'impossibilité d'accès aux toilettes durant la période des travaux du fait de la société EG Réfrigération et ceux à venir,

Subsidiairement, si par extraordinaire la cour retenait l'existence d'un contrat,

Vu les articles 1128, 1178 et 1240 du code civil,

Vu la loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances,

-débouter la société EG Réfrigération de l'ensemble ses demandes, fins et conclusions,

-constater l'absence d'accord des parties sur le prix de la prestation, élément essentiel du contrat,

-dire et juger que le contrat est nul en l'absence d'accord des parties sur les éléments essentiels du contrat,

-prononcer la nullité du contrat,

-dire et juger que les parties seront remises au statu quo ante,

-constater que M. [E] [O] a subi un préjudice du fait de la non-conformité des travaux aux normes en vigueur, et,

Avant dire droit, concernant les désordres, des non façons et des malfaçons,

-ordonner une expertise judiciaire reprenant la mission visée ci-dessus,

-subsidiairement, si la cour ne faisait pas droit à la demande d'expertise, sur le fondement de l'article 1240 du code civil, condamner la société EG Réfrigération à payer à M. [E] [O] la somme de :

-13.759,15 euros TTC au titre de la réfaction des toilettes pour leur mise en conformité,

-10.000 euros au titre du préjudice subi par M. [E] [O] en raison de l'impossibilité d'accès aux toilettes durant la période des travaux du fait de la société EG Réfrigération et ceux à venir,

-limiter à la somme de 2000 euros le montant des travaux qu'il pourrait devoir à la société EG Réfrigération du fait des travaux effectués qui n'ont pas à être repris, s'agissant notamment du sèche main.

-par conséquent, condamner la société EG Réfrigération à payer à M. [E] [O] la somme de :

-13.759,15 euros TTC au titre de la réfaction des toilettes pour leur mise en conformité, déduction faite par compensation avec la somme due par M. [E] [O] à la société EG Réfrigération,

-10.000 euros au titre du préjudice subi par M. [E] [O] en raison de l'impossibilité d'accès aux toilettes durant la période des travaux du fait de la société EG Réfrigération et ceux à venir,

A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la cour ne prononçait pas la nullité du contrat,

Vu l'article 1217 et 1231-1 du code civil - ancien article 1147 du code civil,

-dire et juger que la société EG Réfrigération a manqué à son obligation de résultat : les travaux n'étant pas conformes aux règles de l'art et à la législation en vigueur,

Avant dire droit, concernant les désordres, des non façons et des malfaçons,

-ordonner une expertise judiciaire reprenant la mission visée ci-dessus,

-subsidiairement, si la cour ne faisait pas droit à la demande d'expertise, sur le fondement de l'article 1240 du code civil, condamner la société EG Réfrigération à payer à M. [E] [O] la somme de :

- 13.759,15 euros TTC au titre de la réfaction des toilettes pour leur mise en conformité,

- 10.000 euros au titre du préjudice subi par M. [E] [O] en raison de l'impossibilité d'accès aux toilettes durant la période des travaux du fait de la société EG Réfrigération et ceux à venir,

-limiter à la somme de 2000 euros le montant des travaux qu'il pourrait devoir à la société EG Réfrigération du fait des travaux effectués qui n'ont pas à être repris, s'agissant notamment du sèche main.

-par conséquent, condamner la société EG Réfrigération à payer à M. [E] [O] la somme de :

- 13.759,15 euros TTC au titre de la réfaction des toilettes pour leur mise en conformité, déduction faite par compensation avec la somme due par M. [E] [O] à la société EG Réfrigération,

- 10.000 euros au titre du préjudice subi par M. [E] [O] en raison de l'impossibilité d'accès aux toilettes durant la période des travaux du fait de la société EG Réfrigération et ceux à venir,

En tout état de cause

-débouter la société EG Réfrigération de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

-constater la bonne foi de M. [E] [O],

-débouter la société EG Réfrigération de ses demandes au titre de la rupture brutale et abusive de M. [E] [O],

-dire et juger que la société EG Réfrigération supportera les dépens d'appel et versera à M. [E] [O] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Par conclusions déposées le 7 juin 2022, la société EG Réfrigération demande à la cour de :

A titre principal,

Vu les dispositions des articles 562 et 901 du code de procédure civile,

-dire que la déclaration d'appel déposée par M. [E] [O] ne dévolue à la Cour que les chefs critiqués du jugement attaqué,

-déclarer irrecevable M. [E] [O] en ses demandes,

Vu les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile,

-dire et juger que les demandes de M. [E] [O], à savoir :

- voir ordonner une expertise judiciaire,

- voir la société EG Réfrigération condamnée à lui payer les sommes de :

-13.759,15 euros TTC au titre de la réfaction des toilettes pour leur mise en conformité,

-10.000 euros au titre du préjudice subi par M. [E] [O] en raison de l'impossibilité d'accès aux toilettes durant la période des travaux du fait de la société EG Réfrigération et ceux à venir, constituent des demandes nouvelles devant la cour et par conséquent irrecevables,

A titre subsidiaire,

-dire et juger mal fondé M. [E] [O] en son appel,

En conséquence,

-l'en débouter.

En tout état de cause,

-condamner M. [E] [O] à payer à la société EG Réfrigération la somme de 2.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-déclarer commun et opposable l'arrêt à intervenir à la SCP Crozat-Barault-Maigrot, en-qualité de mandataire judiciaire, et à la SCP Chanel-Bayle, en qualité d'administrateur,

-condamner M. [E] [O] aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 juin 2022.

MOTIFS

Sur l'irrecevabilité des conclusions de l'intimée.

Sur le fondement des dispositions de l'article 902 du code de procédure civile l'appelant a signifié à la personne de l'intimée le 16 décembre 2021 sa déclaration d'appel du 24 octobre 2021 et ses conclusions d'appelant prévues à l'article 908 du dit code.

En application de l'article 909 du code de procédure civile l'intimée non constituée avant la signification des conclusions, disposait à peine d'irrecevabilité relevée d'office d'un délai de trois mois courant à compter de cette notification pour remettre ses conclusions au greffe et former le cas échéant appel incident ou provoqué, soit jusqu'au 16 mars 2022 sans que sa constitution ultérieure du 29 décembre 2021 n'ait d'incidence sur le délai de dépôt de ses conclusions et n'ait fait courir un nouveau délai de 3 mois.

Or ces conclusions d'intimé n'ont été notifiées que le 28 mars 2022 soit au delà du délai précité.

Dans des conclusions du 31 mai 2022 adressées à la cour M. [E] [O] entend voir juger que ces conclusions sont irrecevables parce que tardives sur le fondement de l'article 909 précité.

Mais à cette date la procédure n'était pas clôturée, la date de clôture initialement fixée le 17 mai 2022 ayant été repoussée à la demande de M. [E] [O] lui-même du 16 avril 2022 au 8 juin 2022.

Sur le fondement de l'article 914 du code de procédure civile M. [E] [O] devait dès lors présenter cet incident au conseiller de la mise en état seul compétent la cour ne disposant pas du pouvoir de relever d'office cette irrecevabilité.

Et après la clôture, sur le fondement de l'article précité, il n'aurait été recevable à invoquer l'irrecevabilité des conclusions devant la cour,qu'à la condition que la cause soit survenue ou n'ait été révélée que postérieurement à la clôture.

A défaut et en conséquence c'est à juste titre que la société EG Réfrigération a conclu à l'irrecevabilité de la demande de M. [E] [O] visant à voir déclarer irrecevables ses conclusions d'intimée du 28 mars 2022.

Sur l'effet dévolutif.

Sur le fondement de l'article 562 du code de procédure civile seul l'acte d'appel opère dévolution des chefs critiqués du jugement et lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugements qui sont critiqués l'effet dévolutif n'opère pas.

En l'espèce dans le cadre de la procédure de première instance la société EG Réfrigération a réclamé la condamnation de M. [E] [O] à lui payer le montant d'une facture de travaux que celui-ci trouvait excessif parce que les travaux réalisés auraient été sur facturés que la cuvette des toilettes été mal posée, sa position non conforme aux normes pour handicapés, outre des dommages intérêts pour rupture abusive du contrat et le tribunal a fait droit aux prétentions de la requérante.

Dans sa déclaration d'appel du 24 octobre 2021 M. [E] [O] a demandé l'infirmation du jugement en qu'il le condamnait à payer à la société EG Réfrigération la somme de 4 647, 50 euros en paiement de la facture litigieuse outre des dommages intérêts pour rupture brutale abusive du contrat.

Il en résulte que contrairement aux développements de la société EG Réfrigération l'effet dévolutif a opéré pour l'ensemble des dispositions du jugement critiqué.

Sur l'irrecevabilité des demandes nouvelles.

Sur le fondement des articles 564 à 567 du code de procédure civile, une demande n'est pas nouvelle si elle tend à opposer compensation; et une demande reconventionnelle est recevable en appel à la condition posée par l'article 70 de se rattacher aux prétentions originaires par un lien suffisant.

En outre des prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elle tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge mais sur des fondements juridiques différents, une défense au fond peut être invoquée en tout état de cause et enfin les parties peuvent produire toute nouvelle pièce le cas échéant réclamer l'organisation d'une expertise pour justifier du bien fondé de leur position.

En l'espèce la société EG Réfrigération reproche à M. [E] [O] d'avoir présenté à hauteur de cour des demandes qu'elle qualifie de nouvelles et visant d'une part à voir organiser une mesure d'expertise et d'autre part à la voir condamner à lui payer des travaux de réfection de désordres et des dommages et intérêts pour réparer les troubles de jouissance entraînés par la réparation de ces désordres.

Mais ces demandes visant à obtenir compensation avec les sommes éventuellement dues en exécution du contrat de louage d'ouvrage, à opposer une défense au fond aux prétentions à paiement de la facture de ces travaux et à obtenir réparation des désordres liés à l'exécution de ce contrat, entrent manifestement pour ces motifs dans le cadre des demandes nouvelles recevables en application des principes développés précédemment.

Aussi la société EG Réfrigération est déboutée de ses prétentions visant à voir juger irrecevables les prétentions de M. [E] [O] au motif qu'elles seraient nouvelles à hauteur d'appel.

Sur le fond.

Sur la rupture du contrat.

A titre principal M. [E] [O] demande à la cour de juger que la société EG Réfrigération ne justifie pas de l'acceptation du devis au prix réclamé, et donc conclut au débouté de l'intimée de ses demandes en paiement dirigées contre lui.

Mais sur le fondement de l'article 1787 du Code civil, le contrat d'entreprise est la convention par laquelle une personne charge un entrepreneur d'exécuter en toute indépendance un ouvrage.

C'est un contrat consensuel qui n'est soumis à aucune forme déterminée et il est présumé conclu à titre onéreux.

La preuve de l'existence et donc de la commande par une personne, de travaux qui ont été exécutés et facturés par l'entrepreneur et dont le paiement lui est réclamé, se fait par tout moyen.

Or en l'espèce par mail du 28 janvier 2020 19h37,la société EG Réfrigération faisant suite à un passage sur les lieux le matin même, a adressé à M. [E] [O] un devis détaillé concernant la fourniture et la pose d'éléments de plomberie sanitaire ventilation d'un montant total de 13'403,54 euros hors-taxes ( pose d'un réseau de distribution d'eau froide et chaude, d'un réseau d'évacuation des eaux usées de différents matériels:chauffe-eau électrique'WC, lavabo, lave mains, évier, ventilation, climatisation).

Le même jour à 20h17 M. [E] [O] a répondu «'Merci de faire petit à petit; on va commencer par les XV (lire WC d'un commun accord des parties) du rez de chaussée demain merci'».

Le lendemain la société EG Réfrigération a acquiescé à cette proposition en répondant à 8h36 «' je peux faire la dépose du WC et de l'auge en sous sol ainsi que l'équipement à neuf de ceux-ci pour permettre un point d'eau et WC de chantier'».

Il apparaît ainsi que les parties ont convenu d'un commun accord que la société EG Réfrigération exécuterait pour le compte de M. [E] [O] les travaux convenus s'agissant des WC du rez de chaussée.

Et M. [E] [O] ne conteste pas la commande de ces travaux spécifiques et leur réalisation «'ceci dit ils sont venus poser un évier, une toilette, un sèche main que je veux bien payer mais qui n'ont certainement pas la valeur demandée'»)

En conséquence la société EG Réfrigération apporte la preuve de l'accord de M. [E] [O] pour les travaux précités.

En revanche il ressort de la lecture du mail précité que le maître d'ouvrage entendait ne s'engager dans un premier temps que pour les travaux du local WC et aucun autre élément ne vient confirmer un quelconque engagement postérieur puisqu'au contraire M.[O] s'est adressé rapidement à une autre entreprise que la société EG Réfrigération reconnaît avoir croisée sur le chantier pendant qu'elle y travaillait.

Et à ce moment alors que M. [E] [O] ne lui avait pas adressé de courrier de rupture, ni notifié de manquement particulier, la société EG Réfrigération ne lui a pas reproché la présence de cette nouvelle entreprise poursuivant les mêmes prestations que celles incluses dans son devis du 28 janvier 2017 et s'est contenté de facturer les prestations qu'il lui avait commandées le 28 janvier 2017 et qu'elle avait réalisées.

Il faut en déduire que le contrat de louage d'ouvrage a été régulièrement conclu mais pas pour l'ensemble des prestations figurant au devis qui n'a pas été signé.

Aussi M. [E] [O] pouvait dès lors parfaitement et sans faute à l'égard de la société EG Réfrigération se tourner vers un autre prestataire que celle-ci pour poursuivre la suite de son projet de rénovation.

En conséquence c'est à tort que le premier juge a dit que le contrat de louage conclu entre M. [E] [O] et la société EG Réfrigération avait été rompu de manière d'abusive par M. [E] [O] et le jugement sera infirmé en ce qu'il condamne M. [E] [O] à payer à la société EG Réfrigération des dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat.

Sur le prix des prestations exécutées.

M. [E] [O] demande à la cour de fixer à la somme de 2 000 euros le montant des travaux qu'il pourrait devoir à la société EG Réfrigération du fait des travaux effectués.

La détermination du prix n'est pas une condition préalable à la formation du contrat de louage.

À défaut d'accord certain sur le montant cette détermination peut être fixée par le juge en fonction des éléments de la cause.

En l'espèce les travaux exécutés avec l'accord de M. [E] [O] ont été facturés le 28 mai 2020.

Leur prix est contesté par M. [E] [O] qui le trouve excessif en comparaison du prix du marché.

Ainsi il l'exprime dès son SMS du 20 juillet 2020 «'quand je vois le sèche cheveux c'est de l'abus d'autant que le devis global des toilettes plus du sous-sol devait se monter à ce montant comme vous n'avez pas fait le sous sol vous m'avez compté le sèche cheveux pour arriver au même montant'».

Mais la cour observe que le prix de ce sèche cheveux de 1 276 euros facturé le 28 mai 2020 est celui prévu au devis de sorte qu'à défaut pour M. [E] [O] de l'avoir discuté avant son acceptation de la prestation incluant sa fourniture et sa pose il fait la loi du contrat qui s'impose aux parties en application des dispositions de l'article 1103 du code civil et qui n'est pas nécessairement la loi du prix du marché.

Et tous les prix figurant sur cette facture du 28 mai 2020 sont d'une part conformes à ceux annoncés au devis et parfaitement distinguables sur celui-ci et d'autre part ne concernent que des prestations réalisées et listées (dépose des unités au RDC et des réseaux d'évacuation, pose d'un réseau de distribution, d'une cuvette suspendue, d'un bâti support, d'un mitigeur, sèche main, lavabo, barre de relevage)

En conséquence le paiement du prix total de 3 873 euros HT correspondant aux travaux convenus entre les parties est dû par M. [E] [O] qui a chargé la société EG Réfrigération de les faire et le jugement le condamnant au paiement à la société EG Réfrigération de cette somme est confirmé.

Sur les désordres.

Sur la mise en conformité des toilettes :

La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, impose aux établissements recevant du public la mise en accessibilité d'une partie du bâtiment dans lequel l'ensemble des prestations proposées habituellement doit pouvoir être fourni.

Et l'entrepreneur professionnel doit à son client une obligation de résultat et lui fournir une prestation conforme aux exigences légales et donc respectant les normes d'accessibilité des toilettes dans un local accueillant du public aux personnes handicapées, le cas échéant, s'il ne dispose pas d'assez d'espace pour mettre en oeuvre ces normes, de refuser de s'exécuter sauf à engager sa responsabilité contractuelle et risquer d'être condamnée à les modifier à ses frais.

En l'espèce la société EG Réfrigération a été chargée de poser des toilettes dans un local d'un restaurant et donc destiné à recevoir du public et devait donc s'assurer que leur utilisation était possible par des personnes handicapées.

M. [Y] attestant pour M. [E] [O] écrit «'j'ai constaté que l'implantation de la cuvette ne respecte pas les normes en vigueur . En effet l'axe de cette cuvette de WC se situe à 33,5 cm de la barre d'appui devrait se situer entre 40 et 45 centimètres'» et la société EG Réfrigération ne se prononce pas sur ce point.

S'il est possible de tirer de cet écrit sommaire d'un professionnel la conclusion que la responsabilité contractuelle de la société EG Réfrigération pourrait être engagée il n'est pas possible d'en déduire si elle l'est alors que ne manque que moins de 10 cm et dans quelle mesure et pour quel montant, et notamment si les travaux préconisés par M. [E] [O] sur la base d'un devis d'une entreprise «'travaux de rénovation bâtiment'» du 8 novembre 2020 pour un montant total de 11 465,96 euros sont réellement et tous nécessaires et si la barre d'appui ne peut pas simplement être déplacée sur un autre mur.

Néanmoins une mesure d'instruction longue et couteuse n'a pas pour objet de suppléer la charge de la preuve qui doit être amenée par tout moyen et il n'apparait pas à la cour en l'état du dossier que la démonstration à faire par les parties tenant à une description plus précise des lieux, à des mesures à faire et des explications à donner quant aux violations constatées et aux travaux indispensables pour y remédier, nécessite de l'organiser.

En conséquence et sur ce seul point la cour invite les parties à fournir des éléments complémentaires.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement

Confirme le jugement du 7 septembre 2021 du tribunal de commerce de Reims si ce n'est en ce qu'il a condamné M. [E] [O] à payer à la société EG Réfrigération la somme de 2.000 euros, à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale et abusive,

Statuant à nouveau sur ce point et ajoutant,

Déclare irrecevable la demande de M. [E] [O] visant à voir déclarer irrecevables les conclusions d'appel de l'intimé du 28 mars 2022,

Déclare recevables les demandes formées par M. [E] [O] à hauteur d'appel visant à voir constater une créance de dommages et intérêts à venir en compensation avec les sommes éventuellement dues en exécution du contrat de louage d'ouvrage et visant à réparer les désordres liés à l'exécution de ce contrat,

Déboute la société EG Réfrigération de sa demande de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice lié à la rupture du contrat

Déboute M. [E] [O] de sa demande visant à voir organiser une expertise pour chiffrer le cout des travaux qu'il estime nécessaires pour remédier aux désordres qu'il impute à la société EG Réfrigération

Avant dire droit et sur le seul point de cette demande en réparation de désordres touchant les travaux exécutés dans les toilettes,

Invite M. [E] [O] à produire au dossier des éléments précis de mesures et de configuration du local des WC visant à démontrer dans quelle mesure et quelle ampleur les travaux exécutés par la société EG Réfrigération ne respectent pas les normes légales obligatoires permettant l'accès aux personnes handicapées et le cas échéant de chiffrer le coût de ces travaux indispensables,

Invite la société EG Réfrigération à répondre à ces éléments et les parties à en débattre

Ordonne la clôture des débats au 8 novembre 2022.