Décisions
CA Paris, Pôle 6 - ch. 8, 5 septembre 2024, n° 21/03139
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 8
ARRET DU 05 SEPTEMBRE 2024
(n° , 13 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03139 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDONP
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Mars 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 13/17753
APPELANTE
SARL ACP ARCHITECTURE
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945
INTIMÉ
Monsieur [G] [W]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Marc ROBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : C580
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 23 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Nathalie FRENOY, présidente de chambre
Mme Isabelle MONTAGNE, présidente de chambre
Madame Sandrine MOISAN, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Nathalie FRENOY, présidente, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Madame Nathalie FRENOY, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Après avoir exécuté en son sein une mission d'étude HMO (habilitation à la maîtrise d'oeuvre) du 8 novembre 2011 au 8 mai 2012, Monsieur [G] [W] a été engagé par la société ACP Architecture par contrat à durée indéterminée du 21 mai 2012 en qualité de chef de projet - dessinateur projeteur, niveau III, position 1, coefficient 320 de la convention collective nationale des entreprises d'architecture.
Le 31 mai 2013, la société ACP Architecture a convoqué Monsieur [W] à un entretien préalable fixé au 10 juin suivant et par courrier du 13 juin 2013, lui a notifié son licenciement pour faute grave.
Contestant la rupture de son contrat de travail et réclamant le paiement de diverses sommes, Monsieur [W] a saisi le 9 décembre 2013 le conseil de prud'hommes de Paris qui, par jugement du 5 mars 2021, notifié aux parties le même jour, a :
- déclaré recevables les différentes demandes de Monsieur [G] [W],
- condamné la SARL ACP Architecture à lui payer les sommes suivantes :
- 2 600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 260 euros au titre des congés payés y afférents,
- 390 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 8 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,
- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,
- 7 251,89 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires,
- 725,18 euros au titre des congés payés y afférents,
- 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rappelé que les condamnations de nature contractuelle et/ou conventionnelle produisent intérêts à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et celles de nature indemnitaire à compter de la décision,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- débouté Monsieur [G] [W] du surplus de ses demandes,
- déclaré irrecevable l'intervention volontaire du Syndicat national des professions de l'architecture et de l'urbanisme CFDT,
- débouté la SARL ACP Architecture de ses demandes reconventionnelles,
- condamné la SARL Architecture aux entiers dépens de l'instance.
Par déclaration du 26 mars 2021, la société ACP Architecture a interjeté appel de ce jugement.
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 10 janvier 2022, la société ACP Architecture demande à la cour :
à titre principal :
- de déclarer nul et non avenu le jugement du 5 mars 2021,
à titre subsidiaire :
- de réformer le jugement querellé en ce qu'il a :
* déclaré recevables les différentes demandes de Monsieur [G] [W],
* condamné la SARL ACP Architecture à lui payer les sommes suivantes :
- 2 600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 260 euros au titre des congés payés y afférents,
- 390 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 8 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,
- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,
- 7 251,89 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 725,18 euros au titre des congés payés y afférents,
- 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* rappelé que les condamnations de nature contractuelle et/ou conventionnelle produisent intérêts à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et celles de nature indemnitaire à compter de la décision,
* débouté la SARL ACP Architecture de ses demandes reconventionnelles,
* condamné la SARL ACP Architecture aux entiers dépens de l'instance,
- de déclarer irrecevable l'action de Monsieur [W],
- de déclarer le licenciement de Monsieur [W] fondé,
en conséquence :
- de débouter Monsieur [W] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
en tout état de cause :
- de dire et juger que les faux documents apportés au débat constituent un délit d'escroquerie au jugement,
- de condamner Monsieur [G] [W] à la somme de 30 000 euros au titre du préjudice moral pour harcèlement,
- de condamner Monsieur [G] [W] à la somme de 30 000 euros au titre du préjudice pour escroquerie,
- de condamner Monsieur [G] [W] à une amende civile d'un montant de 3 000 euros au titre du préjudice résultant du caractère abusif de la procédure,
en toutes hypothèses :
- de condamner Monsieur [W] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 18 octobre 2021, Monsieur [W] demande à la cour :
- de débouter le demandeur (sic) de ses demandes, fin de non-recevoir et demandes de nullité,
- de déclarer l'intimé recevable,
- de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a :
* déclaré recevables les différentes demandes de Monsieur [G] [W],
* condamné la SARL ACP Architecture à lui payer les sommes suivantes :
- 2 600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 260 euros au titre des congés payés y afférents,
- 390 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,
- 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,
- 7 251,89 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 725,18 euros au titre des congés payés y afférents,
* rappelé que les condamnations de nature contractuelle et/ou conventionnelle produisent intérêts à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et celles de nature indemnitaire à compter de la décision,
* ordonné l'exécution provisoire de la décision,
* débouté la SARL ACP Architecture de ses demandes reconventionnelles,
* condamné la SARL ACP Architecture aux entiers dépens de l'instance,
- de débouter la société ACP Architecture de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,
- de réformer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [W] de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
et statuant à nouveau :
- de condamner la société ACP Architecture à verser à Monsieur [W] la somme de
13 230,84 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
- de condamner la Société ACP Architecture à verser à Monsieur [W] la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 mars 2024 et l'audience de plaidoiries a été fixée au 23 mai 2024.
Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure, ainsi qu'aux conclusions susvisées pour l'exposé des moyens des parties devant la cour.
MOTIFS DE L'ARRET
Sur la nullité du jugement :
La société ACP Architecture soutient que Monsieur [W], ayant obtenu un sursis à statuer dans l'attente de la décision de la commission paritaire des architectes qu'il avait dit avoir saisie, aurait dû produire la décision de ladite commission pour que l'instance reprenne, ce qu'il n'a pas fait, que le sursis n'était pas expiré et qu'aucune décision n' a révoqué ce sursis de sorte que le jugement du 15 mars 2018 est toujours en vigueur. L'appelante conclut que les premiers juges n'ont pas été régulièrement saisis et que le jugement du 5 mars 2021 encourt la nullité.
Subsidiairement, la société ACP Architecture estime que Monsieur [W] est irrecevable en sa demande de sursis à statuer. L'appelante soulève enfin l'irrecevabilité des demandes sur le fondement de l'estoppel et du principe de cohérence procédurale dans la mesure où le salarié se contredit, soutenant désormais qu'il n'y avait pas lieu de saisir la commission paritaire des architectes.
Monsieur [W] soutient que son action est recevable, qu' il n'est pas architecte inscrit à l'Ordre de sorte que la saisine du Conseil régional de l'Ordre des architectes aux fins de conciliation n'était pas obligatoire à titre préalable et qu'à défaut de toute saisine de la commission paritaire de la branche, l'instance prud'homale pouvait régulièrement se poursuivre.
Selon l'article 378 du code de procédure civile, la décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine.
L'article 379 du même code dispose: ' le sursis à statuer ne dessaisit pas le juge. A l'expiration du sursis, l'instance est poursuivie à l'initiative des parties ou à la diligence du juge, sauf la faculté d'ordonner, s'il y a lieu, un nouveau sursis.
Le juge peut, suivant les circonstances, révoquer le sursis ou en abréger le délai.'
En l'espèce, le syndicat national des professions de l'architecture et de l'urbanisme (SYNATPAU) a informé l'employeur le 19 mars 2013 de la saisine, le même jour, de la commission paritaire régionale d'Ile de France des entreprises d'architecture et le salarié a obtenu un sursis à statuer dans l'attente de la décision de cette commission, par jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 15 janvier 2018.
Cependant, le jugement de première instance déféré à la Cour a constaté que par courrier du 27 avril 2018, le secrétariat de la commission paritaire régionale d'Ile de France avait fait état de l'absence de saisine de cette commission et de l'absence de toute procédure pendante devant elle.
Aux termes de l'article 25 du décret n° 80-217 du 20 mars 1980 portant code des devoirs professionnels des architectes, il est énoncé que « tout litige entre architectes concernant l'exercice de la profession doit être soumis au Conseil régional de l'Ordre aux fins de conciliation, avant la saisine de la juridiction compétente. »
Alors que le litige en cause ne porte pas sur l'exercice par les architectes de leur profession, mais sur les relations de travail d'un salarié avec son employeur, peu important leur qualité respectivement de chef de projet dessinateur-projeteur et de société d'architecture, qu'aucune clause de conciliation préalable n'a été stipulée au contrat de travail et qu' une procédure de conciliation est déclenchée lors de la saisine de la juridiction prud'homale, il convient de relever qu'aucune fin de non-recevoir ne saurait être valablement tirée de l'absence de saisine du Conseil régional de l'Ordre des architectes en l'espèce, étant précisé que cette saisine n'a pas été effective non plus de la part de l'employeur, ni même tentée à la suite du courrier du 27 avril 2018 adressé par les instances ordinales.
Par ailleurs, les dispositions de l'article 62 du Règlement intérieur de l'Ordre des architectes prévoyant qu''en cas de différend entre architectes ou entre architectes et maîtres d'ouvrage ou tiers, le Conseil régional peut être saisi. Il organise une conciliation ou émet un avis sur l'objet du différend ou organise une procédure de règlement amiable' ne sauraient valablement être invoquées par la société ACP Architecture dans la mesure où la saisine de cette instance n'est qu'optionnelle.
Au surplus, le jugement de première instance, visant spécifiquement les articles 378 et suivants du code de procédure civile et la possibilité pour le juge de révoquer le sursis à statuer suivant les circonstances, a relevé que la soumission du différend de l'espèce à une instance paritaire régionale n'était qu'une possibilité, sans préjudice du droit de saisir du conflit la juridiction de droit commun compétente, a déclaré recevables les demandes de Monsieur [W] et tranché le litige, mettant fin ainsi au sursis à statuer litigieux.
Enfin, il ne résulte pas des pièces produites un changement de position, en droit, de nature à induire la société ACP Architecture en erreur sur les intentions du salarié, celui-ci s'étant simplement mépris sur le caractère contraignant d'une procédure préalable à la saisine du conseil de prud'hommes et le jugement de première instance en ayant tiré toutes conséquences sur la poursuite de son action.
Les moyens d'irrecevabilité de l'action de Monsieur [W], exposés par la société ACP Architecture, ne sauraient donc prospérer.
Sur le licenciement :
La lettre de licenciement adressée le 13 juin 2013 à Monsieur [W] contient les motifs suivants, strictement reproduits :
[...] 'Vous sont ainsi reprochés votre comportement lors de réunions avec des clients (1), votre non-respect des consignes logistiques (2), vos accusations graves et mensongères envers votre hiérarchie (3) ainsi que votre attitude réfractaire (4).
1. Sur votre comportement lors de réunions avec des clients
Il vous est reproché votre attitude inacceptable lors de réunions avec des clients. En effet, lors de deux réunions avec des représentants de la société FRG, M. [D] et Mme [O] les 2 et 4 avril 2013, ces derniers nous ont fait part de votre manque de professionnalisme au cours de ces réunions. Ils se sont notamment plaints de votre refus de participer et de votre absence de prise de notes. Ces éléments dénotent une mauvaise volonté de votre part, manifestement incompatible avec vos fonctions.
2. Sur le non-respect des consignes d'ordre logistique
A plusieurs reprises, votre supérieur M. [M] [R] vous a demandé lors de l'utilisation du logiciel AUTOCAD de sauvegarder les fichiers d'une façon intelligible, de manière incorporée à l'arborescence du serveur mis en place au sein de la société ACP , et ce afin que vos collègues puissent trouver les fichiers sur lesquels vous travailliez rapidement, puisque tous respectent la nomenclature et l'arborescence mise en place au sein de la société ACP.
Par ailleurs, il vous est également reproché le fait d'avoir enregistré des fichiers avec AUTOCAD qui pesaient trop lourd alors que cela n'était pas nécessaire.
Cela a eu des conséquences nuisibles sur le matériel informatique et sur la productivité de l'agence et a conduit la société ACP à faire intervenir un expert pour procéder à un grand nettoyage au sein des fichiers.
Ces manquements ont notamment été constatés sur les dossiers DCE de CFH [Localité 6] et PC de FRG [Localité 5].
3. Sur les accusations graves et mensongères envers votre hiérarchie
Vous avez proféré des menaces graves à l'égard de votre hiérarchie en la personne de M. [M] [R] auprès d'une tierce personne. En effet, vous avez accusé M. [R] de harcèlement, de façon totalement abusive et calomnieuse, et ce après avoir proféré des menaces à de multiples reprises.
4. Sur les troubles engendrés par votre attitude réfractaire
Nous constatons une attitude désobligeante, à la limite de l'impolitesse, qui se matérialise par une mauvaise volonté, pénalisante pour l'entreprise.
Nous relevons, à titre d'exemple que le 10 juin, malgré nos consignes, vous refusiez d'effectuer des recherches de documents.
La reproduction de ces documents, que vous avez choisi librement d'effectuer a nécessité du temps de travail, mais de surcroît, [M] [R] a pu par la suite retrouver ces fichiers, présents de manière ostentatoire sur nos systèmes informatiques. Ceci a pu permettre d'éviter que vous ne passiez la matinée sur cette tâche faisant perdre de la productivité à l'agence.
Par la présente, nous avons le regret de vous signifier votre licenciement pour faute grave, vous privant de votre indemnité de licenciement, de votre préavis et de son indemnité'.
La société ACP Architecture soutient que le licenciement de Monsieur [W] est fondé sur une faute grave, plus précisément justifié par les quatre griefs énoncés, montrant la mauvaise volonté du salarié, manifestement incompatible avec ses fonctions, mais aussi ses menaces ayant instauré un climat de violence et de chantage au sein de l'agence. Elle fait en outre état de nombreux retards et des erreurs commises dans l'exécution de sa prestation de travail.
Elle critique la position du juge départiteur dans le jugement de première instance.
Monsieur [W] conteste toute faute grave et soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Il estime que les griefs que lui reproche son employeur ne sont pas démontrés, son manque de participation aux réunions étant concomitant à un harcèlement moral qui l'a conduit à un état anxiodépressif, l'exécution d'une tâche non nécessaire ne pouvant être fautive, aucune menace n'ayant été proférée à l'encontre de l'employeur et les faits prétendument commis le 10 juin - date de l'entretien préalable et du début de son arrêt de travail- n'étant pas démontrés.
Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
La faute grave, qui seule peut justifier une mise à pied conservatoire, résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise; il appartient à l'employeur d'en rapporter la preuve.
Il convient de relever en premier lieu que les retards et erreurs non cités dans la lettre de licenciement ne sauraient être valablement reprochés au salarié, comme le fait l'entreprise dans ses conclusions.
Pour démontrer la réalité, l'imputabilité au salarié et la gravité des faits reprochés dans la lettre de licenciement, la société ACP Architecture verse aux débats le courriel de Monsieur [D] ayant 'remarqué pendant notre réunion un manque certain d'intérêt de sa part sur le projet. À plusieurs reprises, j'ai noté qu'il a fallu une intervention de votre part pour qu'il prenne note des remarques formulées tant par la maîtrise d'ouvrage que par notre AMO', ainsi que le courriel de Madame [H] ayant trouvé les collaborateurs de Monsieur [R] 'éteints, tendus, absents et très peu participatifs'.
Ces commentaires de clients sont subjectifs et ne sauraient suffire à caractériser la faute grave reprochée à Monsieur [W], dans la mesure où ils ne concernent qu'une réunion, et alors que l'intéressé produit son carnet de travail attestant de sa prise de notes notamment pour le dossier FRG [Localité 5], lors de la réunion à laquelle se trouvait présente Madame [H].
Relativement au grief n°2 de la lettre de licenciement, la société ACP Architecture verse également aux débats un document présenté comme relatif aux 'consignes logistiques' au sein de l'entreprise ainsi que la facture de 540 € qu'elle a dû acquitter pour la résolution des 'problèmes fichiers et organisation'.
Force est de constater que la pièce 23 du dossier de l'employeur contient une page manuscrite mentionnant divers points dans la rubrique ' nettoyer les fichiers' et trois feuillets dactylographiés portant mention d'intitulés de dossiers clients en cours ; ce document ne saurait être qualifié de liste des consignes logistiques applicables. En tout état de cause, il n'est nullement justifié qu'il ait été notifié à Monsieur [W].
Par ailleurs, la facture et la pièce 23 ne contiennent intrinsèquement aucune donnée objective permettant d'imputer les faits reprochés et le coût d'une prestation informatique à Monsieur [W].
Ce grief ne saurait donc être retenu à son encontre.
Sont produits, au titre des accusations graves et mensongères envers la hiérarchie du salarié, la déclaration de main courante du 4 mars 2013 de Monsieur [R] se plaignant d'avoir reçu une lettre du syndicat CFDT SYNATPAU le menaçant de déposer plainte à son encontre au nom d'une de ses salariés pour des faits de harcèlement moral et sexuel s'il ne payait pas la somme réclamée et faisant état d'un chantage à son encontre, ainsi que la déclaration de main courante du 18 mai 2013 dans laquelle il fait état d'un nouveau courrier de ce syndicat le menaçant de poursuites en cas de non-paiement des indemnités de licenciement de ses salariés et faisant état de son ressenti résultant de ce 'chantage'.
La société verse également l'attestation de Madame [Y] [A], présente dans les locaux lors de l'entretien préalable, affirmant avoir été témoin de ce que Monsieur [W] a dit 'd'un ton sec, arrogant et menaçant « puisque c'est comme ça, je vais chez le médecin ».'
Or, dans la défense de ses droits, le salarié ne peut se voir opposer une communication indue de documents syndicaux relatifs à ses droits, pas plus que la décision - que Monsieur [W] explique en l'espèce par le choc subi à l'annonce des griefs faits lors de l'entretien préalable - de consulter un médecin.
Au surplus, en l'état des éléments produits par le salarié (diverses attestations d'anciens collaborateurs de l'agence, de stagiaires architectes et de partenaires professionnels) établissant des faits pouvant laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre de la part du gérant de la société ACP Architecture, la recherche de soutien mais également de soins - alors qu' un état anxieux est documenté en l'espèce- ne saurait lui être reprochée.
Enfin, au sujet de l'attitude réfractaire du salarié, la société ACP Architecture ne produit aucune pièce pour l'établir, ni même pour contrer les documents adverses montrant un investissement professionnel et un travail appliqué de la part de l'intimé, d'ailleurs souvent félicité par Monsieur [R] au vu des résultats obtenus.
C'est par conséquent, à juste titre, que le jugement de première instance , après avoir rappelé qu'un employeur ne peut valablement reprocher à un salarié dans une lettre de licenciement la dénonciation de faits de harcèlement moral dès lors que la mauvaise foi dudit salarié n'est pas démontrée, a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, retenant d'ailleurs le caractère contradictoire des manquements professionnels allégués alors que dans le même temps, les pièces produites montrent que Monsieur [W] se voyait confier la gestion de nombreux projets professionnels d'importance.
Eu égard à l'ancienneté du salarié, à son âge (27 ans) au jour du licenciement et à sa situation professionnelle postérieure à la rupture, il y a lieu de confirmer le jugement de première instance qui a fait une juste estimation de l'indemnisation lui revenant pour ce licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
En l'état de la qualification retenue pour cette rupture de la relation de travail, il convient de confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a mis à la charge de la société ACP Architecture une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés y afférents et une indemnité de licenciement à hauteur des montants retenus, qui ne sont pas strictement contestés par l'appelant et dont la confirmation est demandée par l'intimé.
Sur les heures supplémentaires :
Face à Monsieur [W] qui soutient avoir effectué de nombreuses heures supplémentaires restées non rémunérées, accomplies le soir à des horaires tardifs, certains jours fériés et même pendant ses vacances ou à l'occasion de dossiers urgents à traiter, la société ACP Architecture conclut à l'infirmation du jugement entrepris.
Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2, alinéa 1, L. 3171-3 du code du travail , dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des
exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des
pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l'accord de l'employeur, soit s'il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.
À l'appui de sa demande de rappel de salaire pour des heures supplémentaires non rémunérées, le salarié verse aux débats plusieurs SMS faisant état de son travail à des horaires particulièrement tardifs '[M] nous sommes partis on est vraiment mort de la charrette d'hier', 'salut [M] je préférerais samedi car j'ai des trucs à faire dimanche. De toute manière si tu veux profiter de samedi tu peux me laisser des notes sur ce que tu veux que j'avance', 'Bonjour [G], excuse mon dérangement je me souviens plus si BETOM et CAPTERRE ont envoyé leurs références [...] tu profites bien de ces vacances', une liste des courriels envoyés avec leurs date et horaire, ainsi qu'une pièce 43 récapitulant jusqu'en mai 2013, mois par mois, les heures supplémentaires effectuées (jours fériés et dimanches compris).
Le salarié présente donc des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
La société ACP Architecture soutient qu'il existe au sein de l'agence un système de comptabilisation des heures supplémentaires directement renseigné par le personnel, estime que le salarié ne démontre pas l'existence d' heures supplémentaires restées non rémunérées, celles effectivement accomplies par Monsieur [W] ayant été constatées par huissier et payées. Elle critique le contenu du tableau produit par le salarié, indûment modifié par lui après la rupture du contrat de travail et contenant de nombreuses incohérences.
La société appelante verse aux débats la copie du procès-verbal du 7 mars 2013 d'un huissier de justice intervenu sur la page informatique ' feuille d'heures' d'un ordinateur de l'agence, comportant une date de modification de la veille, un tableau comparatif montrant les heures constatées par cet huissier le 7 mars 2013 et leur différence avec le tableau produit par l'intimé, ainsi qu'une synthèse du différentiel mis à jour et les bulletins de salaire.
Ces éléments permettent de relever des anomalies dans certaines des réclamations du salarié relativement à son temps de travail, en l'état des paiements effectués et de compensations prises consécutivement à des journées de travail chargées, mais ils ne constituent pas la preuve des horaires effectivement accomplis par l'intéressé.
Il convient donc de retenir le principe d'heures supplémentaires restant non rémunérées, de confirmer le jugement de première instance de ce chef, mais de l'infirmer relativement au rappel de salaire fixé.
Il y a lieu de retenir, au vu des éléments versés aux débats, une somme de 2 900,75 € restant due à ce titre, ainsi que les congés payés y afférents.
Sur le travail dissimulé :
Selon l'article L.8221-5 du code du travail dans sa version applicable au litige, 'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.'
L'article L.8223-1 du code du travail dispose qu' 'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.'
Le caractère intentionnel de la dissimulation ne peut se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.
En l'absence de toute démonstration du caractère intentionnel de la dissimulation d'emploi alléguée, la demande doit être rejetée, par confirmation du jugement entrepris de ce chef.
Sur l'obligation de sécurité :
La société ACP Architecture fait valoir qu'elle n'a pas manqué à son obligation de sécurité, que le salarié ne parvient pas à caractériser un quelconque manquement de sa part et reproche au conseil de prud'hommes de s'être prononcé sur un harcèlement moral qui n'a jamais été invoqué par l'intéressé.
Monsieur [W] soutient avoir été victime d'une situation d'agression morale de la part de son employeur, de conditions de travail dégradées , fait valoir n'avoir pu bénéficier de visite médicale et sollicite la confirmation du jugement de première instance qui a fixé à 5 000 € la réparation de son préjudice à ce titre.
Selon l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1) des actions de prévention des risques professionnels,
2) des actions d'information et de formation,
3) la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.
L'article L. 4121-2 du code du travail détermine les principes généraux de prévention sur le fondement desquels ces mesures doivent être mises en oeuvre.
Il en résulte que constitue une faute contractuelle engageant la responsabilité de l'employeur le fait d'exposer un salarié à un danger ou risque sans avoir pris toutes les mesures prévues par les textes susvisés.
Monsieur [W] invoque des débordements verbaux de la part de son employeur, diverses altercations, humiliations et des reproches en lien avec son orientation sexuelle.
Il produit en ce sens l'attestation de Monsieur [B], prestataire, rapportant les cris de l'employeur, celle de Madame [L], stagiaire à l'agence ACP Architecture en mars 2012, affirmant avoir été témoin de 'l'état de rage' de Monsieur [R] 'tel qu'il a jeté et cassé le combiné de téléphone de l'agence. Il est parti en claquant la porte et est revenu une demi-heure plus tard avec une bouteille de champagne et des flûtes, nous a servi des verres dans le but de se faire pardonner sans toutefois s'expliquer concrètement sur ses actes' ou celles d'autres stagiaires témoins des mêmes débordements et d'une incapacité 'à faire la part des choses entre la vie professionnelle et la vie privée' ou 'j'ai également vu M. [R] hurler sur [S] [N], [G] [W] et [Z] [F], à plusieurs reprises sans qu'ils aient commis de faute ayant une conséquence sur le travail de l'agence[...] Il était impossible pour eux d'exprimer un avis différent de celui de M. [R] sans que celui-ci ne les insulte ou ne les tourne en dérision'.
Le salarié verse également aux débats plusieurs avis d'arrêt de travail.
Il n'est pas justifié au surplus de l'adhésion de la société ACP Architecture à un service de médecine du travail.
Les éléments versés aux débats par l'employeur relatifs à une bonne ambiance régnant au sein de l'agence, aux relations respectueuses entretenues, et même à la générosité du gérant qui invitait régulièrement le personnel de l'agence au restaurant pour déjeuner n'apparaissent que ponctuels et non informatifs de la réalité des conditions générales de travail, certaines des attestations produites émanant de tiers ayant un point de vue extérieur et fugace.
Ainsi décrites et établies, ces conditions de travail marquées par une violence verbale manifeste et des intrusion brutales dans la sphère privée du salarié par l'employeur sont constitutives de manquements de ce dernier à son obligation de sécurité, comme d'ailleurs l'absence de toute investigation sur la charge de travail imposée, alors que le sujet était évoqué dans divers SMS relatifs à des 'charrettes' importantes.
Au vu des éléments de préjudice produits, il convient de confirmer le jugement de première instance qui a fait une juste évaluation de la réparation de ces manquements à l'obligation de sécurité.
Sur le harcèlement moral:
La société ACP Architecture soutient que Monsieur [W] a harcelé son supérieur hiérarchique. Elle estime apporter les éléments permettant de démontrer les comportements inappropriés adoptés par le salarié qui a adressé un courriel insultant à Monsieur [R] et a participé aux menaces du personnel en vue d'obtenir des paiements et avantages indus. L'appelante ajoute que l'intimé a réalisé un chantage se matérialisant par des dénonciations calomnieuses auprès de divers organes professionnels afin de lui soutirer de l'argent. Elle réclame 30'000 € au titre du harcèlement moral subi par son gérant.
Elle invoque l'orchestration par Monsieur [W] d'une fronde au sein de l'agence pour obtenir des paiements indus et des avantages, sous la menace.
Elle produit différentes pièces telles qu'un e-mail contenant un logo ' goodbye 20...' les deux chiffres suivants étant figurés par des doigts d'honneur, la déclaration de main courante du 4 mars 2013 de son gérant faisant état d'une lettre du syndicat CFDT SYNATPAU et de menaces de dépôt de plainte à son encontre, la déclaration de main courante du 18 mai 2013 au sujet d'un nouveau courrier du même syndicat le menaçant de poursuites en cas de non-paiement des indemnités de licenciement dans laquelle son gérant indique ressentir 'un chantage' de la part du personnel.
Plusieurs autres attestations sont produites au sujet du malaise du gérant de l'entreprise face au comportement de ses employés, lesquels ont travaillé ensemble consécutivement à la rupture de la relation de travail de l'espèce.
Si le message produit par la société ACP Architecture sort de la convenance due dans des relations professionnelles normales, il ne saurait suffire à laisser présumer un harcèlement moral à l'encontre du gérant de l'entreprise.
Par ailleurs, dans la défense de ses droits, le salarié ne peut se voir opposer une communication indue de documents syndicaux relatifs à ses droits.
Le jugement de première instance, qui a rejeté la demande d'indemnisation d'un harcèlement moral, doit donc être confirmé de ce chef.
Sur la tentative d'escroquerie au jugement :
La société ACP Architecture considère que le salarié a versé de faux documents aux débats, tentant ainsi de commettre une escroquerie au jugement et d'obtenir d'elle des sommes indues. Elle réclame que Monsieur [W] soit condamné à la somme de 30'000 €.
La pièce 43 du dossier du salarié qui est arguée de faux par l'employeur consiste en la déclaration de Monsieur [W] au titre des heures supplémentaires qu'il estime avoir accomplies sans en être rémunéré, soumise à la juridiction. Dans la mesure où le constat fait par l'huissier de justice ne permet pas de dire fautive la modification du tableau des heures de travail et de l'imputer à l'intéressé , ce document ne saurait donc être considéré comme ayant été le moyen d'une tentative d'escroquerie au jugement, la juridiction étant à même d'en apprécier la valeur, dûment informée par les dires des parties à son sujet.
La demande doit donc être rejetée et le jugement de première instance confirmé.
Sur la procédure abusive :
La société ACP Architecture réclame la condamnation de son adversaire à la somme de 3 000 euros pour procédure abusive sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile.
Selon ce texte, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10'000 € sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
La teneur du présent arrêt, accueillant en partie les demandes du salarié, permet de retenir l'absence de toute intention abusive ou fautive de sa part dans l'action entamée et dans sa défense en cause d'appel.
La demande doit donc être rejetée, par confirmation du jugement entrepris de ce chef.
Sur les intérêts:
Conformément aux dispositions des articles 1153, 1153-1 (anciens), 1231-6 et 1231-7 (nouveaux) du Code civil et R.1452-5 du code du travail, les intérêts au taux légal courent sur les créances de sommes d'argent dont le principe et le montant résultent du contrat ou de la loi ( rappels de salaire, indemnités compensatrices de préavis et de congés payés sur préavis, indemnité de licenciement) à compter de l'accusé de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation et d'orientation, sur les créances indemnitaires confirmées à compter du jugement de première instance et sur les autres sommes à compter du présent arrêt.
Sur les dépens et les frais irrépétibles:
L'employeur, qui succombe, doit être tenu aux dépens de première instance, par confirmation du jugement entrepris, et d'appel.
L'équité commande de confirmer le jugement de première instance relativement aux frais irrépétibles, de faire application de l'article 700 du code de procédure civile également en cause d'appel et d'allouer à ce titre la somme de 2 500 € au profit du salarié.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe à une date dont les parties ont été avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement déféré, sauf en ses dispositions relatives au montant des heures supplémentaires et des congés payés y afférents,
Statuant sur les chefs infirmés et y ajoutant,
CONDAMNE la société ACP Architecture à payer à Monsieur [G] [W] les sommes de :
- 2 900,75 € au titre des heures supplémentaires,
- 290,07 € au titre des congés payés y afférents,
- 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
DIT que les intérêts au taux légal sont dus à compter de l'accusé de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation et d'orientation pour les créances de sommes d'argent dont le principe et le montant résultent du contrat ou de la loi, à compter du jugement de première instance pour les sommes indemnitaires confirmées et à compter du présent arrêt pour le surplus,
REJETTE les autres demandes des parties,
CONDAMNE la société ACP Architecture aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 8
ARRET DU 05 SEPTEMBRE 2024
(n° , 13 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03139 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDONP
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Mars 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 13/17753
APPELANTE
SARL ACP ARCHITECTURE
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945
INTIMÉ
Monsieur [G] [W]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Marc ROBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : C580
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 23 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Nathalie FRENOY, présidente de chambre
Mme Isabelle MONTAGNE, présidente de chambre
Madame Sandrine MOISAN, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Nathalie FRENOY, présidente, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Madame Nathalie FRENOY, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Après avoir exécuté en son sein une mission d'étude HMO (habilitation à la maîtrise d'oeuvre) du 8 novembre 2011 au 8 mai 2012, Monsieur [G] [W] a été engagé par la société ACP Architecture par contrat à durée indéterminée du 21 mai 2012 en qualité de chef de projet - dessinateur projeteur, niveau III, position 1, coefficient 320 de la convention collective nationale des entreprises d'architecture.
Le 31 mai 2013, la société ACP Architecture a convoqué Monsieur [W] à un entretien préalable fixé au 10 juin suivant et par courrier du 13 juin 2013, lui a notifié son licenciement pour faute grave.
Contestant la rupture de son contrat de travail et réclamant le paiement de diverses sommes, Monsieur [W] a saisi le 9 décembre 2013 le conseil de prud'hommes de Paris qui, par jugement du 5 mars 2021, notifié aux parties le même jour, a :
- déclaré recevables les différentes demandes de Monsieur [G] [W],
- condamné la SARL ACP Architecture à lui payer les sommes suivantes :
- 2 600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 260 euros au titre des congés payés y afférents,
- 390 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 8 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,
- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,
- 7 251,89 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires,
- 725,18 euros au titre des congés payés y afférents,
- 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rappelé que les condamnations de nature contractuelle et/ou conventionnelle produisent intérêts à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et celles de nature indemnitaire à compter de la décision,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- débouté Monsieur [G] [W] du surplus de ses demandes,
- déclaré irrecevable l'intervention volontaire du Syndicat national des professions de l'architecture et de l'urbanisme CFDT,
- débouté la SARL ACP Architecture de ses demandes reconventionnelles,
- condamné la SARL Architecture aux entiers dépens de l'instance.
Par déclaration du 26 mars 2021, la société ACP Architecture a interjeté appel de ce jugement.
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 10 janvier 2022, la société ACP Architecture demande à la cour :
à titre principal :
- de déclarer nul et non avenu le jugement du 5 mars 2021,
à titre subsidiaire :
- de réformer le jugement querellé en ce qu'il a :
* déclaré recevables les différentes demandes de Monsieur [G] [W],
* condamné la SARL ACP Architecture à lui payer les sommes suivantes :
- 2 600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 260 euros au titre des congés payés y afférents,
- 390 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 8 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,
- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,
- 7 251,89 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 725,18 euros au titre des congés payés y afférents,
- 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* rappelé que les condamnations de nature contractuelle et/ou conventionnelle produisent intérêts à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et celles de nature indemnitaire à compter de la décision,
* débouté la SARL ACP Architecture de ses demandes reconventionnelles,
* condamné la SARL ACP Architecture aux entiers dépens de l'instance,
- de déclarer irrecevable l'action de Monsieur [W],
- de déclarer le licenciement de Monsieur [W] fondé,
en conséquence :
- de débouter Monsieur [W] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
en tout état de cause :
- de dire et juger que les faux documents apportés au débat constituent un délit d'escroquerie au jugement,
- de condamner Monsieur [G] [W] à la somme de 30 000 euros au titre du préjudice moral pour harcèlement,
- de condamner Monsieur [G] [W] à la somme de 30 000 euros au titre du préjudice pour escroquerie,
- de condamner Monsieur [G] [W] à une amende civile d'un montant de 3 000 euros au titre du préjudice résultant du caractère abusif de la procédure,
en toutes hypothèses :
- de condamner Monsieur [W] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 18 octobre 2021, Monsieur [W] demande à la cour :
- de débouter le demandeur (sic) de ses demandes, fin de non-recevoir et demandes de nullité,
- de déclarer l'intimé recevable,
- de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a :
* déclaré recevables les différentes demandes de Monsieur [G] [W],
* condamné la SARL ACP Architecture à lui payer les sommes suivantes :
- 2 600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 260 euros au titre des congés payés y afférents,
- 390 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,
- 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,
- 7 251,89 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 725,18 euros au titre des congés payés y afférents,
* rappelé que les condamnations de nature contractuelle et/ou conventionnelle produisent intérêts à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et celles de nature indemnitaire à compter de la décision,
* ordonné l'exécution provisoire de la décision,
* débouté la SARL ACP Architecture de ses demandes reconventionnelles,
* condamné la SARL ACP Architecture aux entiers dépens de l'instance,
- de débouter la société ACP Architecture de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,
- de réformer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [W] de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
et statuant à nouveau :
- de condamner la société ACP Architecture à verser à Monsieur [W] la somme de
13 230,84 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
- de condamner la Société ACP Architecture à verser à Monsieur [W] la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 mars 2024 et l'audience de plaidoiries a été fixée au 23 mai 2024.
Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure, ainsi qu'aux conclusions susvisées pour l'exposé des moyens des parties devant la cour.
MOTIFS DE L'ARRET
Sur la nullité du jugement :
La société ACP Architecture soutient que Monsieur [W], ayant obtenu un sursis à statuer dans l'attente de la décision de la commission paritaire des architectes qu'il avait dit avoir saisie, aurait dû produire la décision de ladite commission pour que l'instance reprenne, ce qu'il n'a pas fait, que le sursis n'était pas expiré et qu'aucune décision n' a révoqué ce sursis de sorte que le jugement du 15 mars 2018 est toujours en vigueur. L'appelante conclut que les premiers juges n'ont pas été régulièrement saisis et que le jugement du 5 mars 2021 encourt la nullité.
Subsidiairement, la société ACP Architecture estime que Monsieur [W] est irrecevable en sa demande de sursis à statuer. L'appelante soulève enfin l'irrecevabilité des demandes sur le fondement de l'estoppel et du principe de cohérence procédurale dans la mesure où le salarié se contredit, soutenant désormais qu'il n'y avait pas lieu de saisir la commission paritaire des architectes.
Monsieur [W] soutient que son action est recevable, qu' il n'est pas architecte inscrit à l'Ordre de sorte que la saisine du Conseil régional de l'Ordre des architectes aux fins de conciliation n'était pas obligatoire à titre préalable et qu'à défaut de toute saisine de la commission paritaire de la branche, l'instance prud'homale pouvait régulièrement se poursuivre.
Selon l'article 378 du code de procédure civile, la décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine.
L'article 379 du même code dispose: ' le sursis à statuer ne dessaisit pas le juge. A l'expiration du sursis, l'instance est poursuivie à l'initiative des parties ou à la diligence du juge, sauf la faculté d'ordonner, s'il y a lieu, un nouveau sursis.
Le juge peut, suivant les circonstances, révoquer le sursis ou en abréger le délai.'
En l'espèce, le syndicat national des professions de l'architecture et de l'urbanisme (SYNATPAU) a informé l'employeur le 19 mars 2013 de la saisine, le même jour, de la commission paritaire régionale d'Ile de France des entreprises d'architecture et le salarié a obtenu un sursis à statuer dans l'attente de la décision de cette commission, par jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 15 janvier 2018.
Cependant, le jugement de première instance déféré à la Cour a constaté que par courrier du 27 avril 2018, le secrétariat de la commission paritaire régionale d'Ile de France avait fait état de l'absence de saisine de cette commission et de l'absence de toute procédure pendante devant elle.
Aux termes de l'article 25 du décret n° 80-217 du 20 mars 1980 portant code des devoirs professionnels des architectes, il est énoncé que « tout litige entre architectes concernant l'exercice de la profession doit être soumis au Conseil régional de l'Ordre aux fins de conciliation, avant la saisine de la juridiction compétente. »
Alors que le litige en cause ne porte pas sur l'exercice par les architectes de leur profession, mais sur les relations de travail d'un salarié avec son employeur, peu important leur qualité respectivement de chef de projet dessinateur-projeteur et de société d'architecture, qu'aucune clause de conciliation préalable n'a été stipulée au contrat de travail et qu' une procédure de conciliation est déclenchée lors de la saisine de la juridiction prud'homale, il convient de relever qu'aucune fin de non-recevoir ne saurait être valablement tirée de l'absence de saisine du Conseil régional de l'Ordre des architectes en l'espèce, étant précisé que cette saisine n'a pas été effective non plus de la part de l'employeur, ni même tentée à la suite du courrier du 27 avril 2018 adressé par les instances ordinales.
Par ailleurs, les dispositions de l'article 62 du Règlement intérieur de l'Ordre des architectes prévoyant qu''en cas de différend entre architectes ou entre architectes et maîtres d'ouvrage ou tiers, le Conseil régional peut être saisi. Il organise une conciliation ou émet un avis sur l'objet du différend ou organise une procédure de règlement amiable' ne sauraient valablement être invoquées par la société ACP Architecture dans la mesure où la saisine de cette instance n'est qu'optionnelle.
Au surplus, le jugement de première instance, visant spécifiquement les articles 378 et suivants du code de procédure civile et la possibilité pour le juge de révoquer le sursis à statuer suivant les circonstances, a relevé que la soumission du différend de l'espèce à une instance paritaire régionale n'était qu'une possibilité, sans préjudice du droit de saisir du conflit la juridiction de droit commun compétente, a déclaré recevables les demandes de Monsieur [W] et tranché le litige, mettant fin ainsi au sursis à statuer litigieux.
Enfin, il ne résulte pas des pièces produites un changement de position, en droit, de nature à induire la société ACP Architecture en erreur sur les intentions du salarié, celui-ci s'étant simplement mépris sur le caractère contraignant d'une procédure préalable à la saisine du conseil de prud'hommes et le jugement de première instance en ayant tiré toutes conséquences sur la poursuite de son action.
Les moyens d'irrecevabilité de l'action de Monsieur [W], exposés par la société ACP Architecture, ne sauraient donc prospérer.
Sur le licenciement :
La lettre de licenciement adressée le 13 juin 2013 à Monsieur [W] contient les motifs suivants, strictement reproduits :
[...] 'Vous sont ainsi reprochés votre comportement lors de réunions avec des clients (1), votre non-respect des consignes logistiques (2), vos accusations graves et mensongères envers votre hiérarchie (3) ainsi que votre attitude réfractaire (4).
1. Sur votre comportement lors de réunions avec des clients
Il vous est reproché votre attitude inacceptable lors de réunions avec des clients. En effet, lors de deux réunions avec des représentants de la société FRG, M. [D] et Mme [O] les 2 et 4 avril 2013, ces derniers nous ont fait part de votre manque de professionnalisme au cours de ces réunions. Ils se sont notamment plaints de votre refus de participer et de votre absence de prise de notes. Ces éléments dénotent une mauvaise volonté de votre part, manifestement incompatible avec vos fonctions.
2. Sur le non-respect des consignes d'ordre logistique
A plusieurs reprises, votre supérieur M. [M] [R] vous a demandé lors de l'utilisation du logiciel AUTOCAD de sauvegarder les fichiers d'une façon intelligible, de manière incorporée à l'arborescence du serveur mis en place au sein de la société ACP , et ce afin que vos collègues puissent trouver les fichiers sur lesquels vous travailliez rapidement, puisque tous respectent la nomenclature et l'arborescence mise en place au sein de la société ACP.
Par ailleurs, il vous est également reproché le fait d'avoir enregistré des fichiers avec AUTOCAD qui pesaient trop lourd alors que cela n'était pas nécessaire.
Cela a eu des conséquences nuisibles sur le matériel informatique et sur la productivité de l'agence et a conduit la société ACP à faire intervenir un expert pour procéder à un grand nettoyage au sein des fichiers.
Ces manquements ont notamment été constatés sur les dossiers DCE de CFH [Localité 6] et PC de FRG [Localité 5].
3. Sur les accusations graves et mensongères envers votre hiérarchie
Vous avez proféré des menaces graves à l'égard de votre hiérarchie en la personne de M. [M] [R] auprès d'une tierce personne. En effet, vous avez accusé M. [R] de harcèlement, de façon totalement abusive et calomnieuse, et ce après avoir proféré des menaces à de multiples reprises.
4. Sur les troubles engendrés par votre attitude réfractaire
Nous constatons une attitude désobligeante, à la limite de l'impolitesse, qui se matérialise par une mauvaise volonté, pénalisante pour l'entreprise.
Nous relevons, à titre d'exemple que le 10 juin, malgré nos consignes, vous refusiez d'effectuer des recherches de documents.
La reproduction de ces documents, que vous avez choisi librement d'effectuer a nécessité du temps de travail, mais de surcroît, [M] [R] a pu par la suite retrouver ces fichiers, présents de manière ostentatoire sur nos systèmes informatiques. Ceci a pu permettre d'éviter que vous ne passiez la matinée sur cette tâche faisant perdre de la productivité à l'agence.
Par la présente, nous avons le regret de vous signifier votre licenciement pour faute grave, vous privant de votre indemnité de licenciement, de votre préavis et de son indemnité'.
La société ACP Architecture soutient que le licenciement de Monsieur [W] est fondé sur une faute grave, plus précisément justifié par les quatre griefs énoncés, montrant la mauvaise volonté du salarié, manifestement incompatible avec ses fonctions, mais aussi ses menaces ayant instauré un climat de violence et de chantage au sein de l'agence. Elle fait en outre état de nombreux retards et des erreurs commises dans l'exécution de sa prestation de travail.
Elle critique la position du juge départiteur dans le jugement de première instance.
Monsieur [W] conteste toute faute grave et soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Il estime que les griefs que lui reproche son employeur ne sont pas démontrés, son manque de participation aux réunions étant concomitant à un harcèlement moral qui l'a conduit à un état anxiodépressif, l'exécution d'une tâche non nécessaire ne pouvant être fautive, aucune menace n'ayant été proférée à l'encontre de l'employeur et les faits prétendument commis le 10 juin - date de l'entretien préalable et du début de son arrêt de travail- n'étant pas démontrés.
Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
La faute grave, qui seule peut justifier une mise à pied conservatoire, résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise; il appartient à l'employeur d'en rapporter la preuve.
Il convient de relever en premier lieu que les retards et erreurs non cités dans la lettre de licenciement ne sauraient être valablement reprochés au salarié, comme le fait l'entreprise dans ses conclusions.
Pour démontrer la réalité, l'imputabilité au salarié et la gravité des faits reprochés dans la lettre de licenciement, la société ACP Architecture verse aux débats le courriel de Monsieur [D] ayant 'remarqué pendant notre réunion un manque certain d'intérêt de sa part sur le projet. À plusieurs reprises, j'ai noté qu'il a fallu une intervention de votre part pour qu'il prenne note des remarques formulées tant par la maîtrise d'ouvrage que par notre AMO', ainsi que le courriel de Madame [H] ayant trouvé les collaborateurs de Monsieur [R] 'éteints, tendus, absents et très peu participatifs'.
Ces commentaires de clients sont subjectifs et ne sauraient suffire à caractériser la faute grave reprochée à Monsieur [W], dans la mesure où ils ne concernent qu'une réunion, et alors que l'intéressé produit son carnet de travail attestant de sa prise de notes notamment pour le dossier FRG [Localité 5], lors de la réunion à laquelle se trouvait présente Madame [H].
Relativement au grief n°2 de la lettre de licenciement, la société ACP Architecture verse également aux débats un document présenté comme relatif aux 'consignes logistiques' au sein de l'entreprise ainsi que la facture de 540 € qu'elle a dû acquitter pour la résolution des 'problèmes fichiers et organisation'.
Force est de constater que la pièce 23 du dossier de l'employeur contient une page manuscrite mentionnant divers points dans la rubrique ' nettoyer les fichiers' et trois feuillets dactylographiés portant mention d'intitulés de dossiers clients en cours ; ce document ne saurait être qualifié de liste des consignes logistiques applicables. En tout état de cause, il n'est nullement justifié qu'il ait été notifié à Monsieur [W].
Par ailleurs, la facture et la pièce 23 ne contiennent intrinsèquement aucune donnée objective permettant d'imputer les faits reprochés et le coût d'une prestation informatique à Monsieur [W].
Ce grief ne saurait donc être retenu à son encontre.
Sont produits, au titre des accusations graves et mensongères envers la hiérarchie du salarié, la déclaration de main courante du 4 mars 2013 de Monsieur [R] se plaignant d'avoir reçu une lettre du syndicat CFDT SYNATPAU le menaçant de déposer plainte à son encontre au nom d'une de ses salariés pour des faits de harcèlement moral et sexuel s'il ne payait pas la somme réclamée et faisant état d'un chantage à son encontre, ainsi que la déclaration de main courante du 18 mai 2013 dans laquelle il fait état d'un nouveau courrier de ce syndicat le menaçant de poursuites en cas de non-paiement des indemnités de licenciement de ses salariés et faisant état de son ressenti résultant de ce 'chantage'.
La société verse également l'attestation de Madame [Y] [A], présente dans les locaux lors de l'entretien préalable, affirmant avoir été témoin de ce que Monsieur [W] a dit 'd'un ton sec, arrogant et menaçant « puisque c'est comme ça, je vais chez le médecin ».'
Or, dans la défense de ses droits, le salarié ne peut se voir opposer une communication indue de documents syndicaux relatifs à ses droits, pas plus que la décision - que Monsieur [W] explique en l'espèce par le choc subi à l'annonce des griefs faits lors de l'entretien préalable - de consulter un médecin.
Au surplus, en l'état des éléments produits par le salarié (diverses attestations d'anciens collaborateurs de l'agence, de stagiaires architectes et de partenaires professionnels) établissant des faits pouvant laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre de la part du gérant de la société ACP Architecture, la recherche de soutien mais également de soins - alors qu' un état anxieux est documenté en l'espèce- ne saurait lui être reprochée.
Enfin, au sujet de l'attitude réfractaire du salarié, la société ACP Architecture ne produit aucune pièce pour l'établir, ni même pour contrer les documents adverses montrant un investissement professionnel et un travail appliqué de la part de l'intimé, d'ailleurs souvent félicité par Monsieur [R] au vu des résultats obtenus.
C'est par conséquent, à juste titre, que le jugement de première instance , après avoir rappelé qu'un employeur ne peut valablement reprocher à un salarié dans une lettre de licenciement la dénonciation de faits de harcèlement moral dès lors que la mauvaise foi dudit salarié n'est pas démontrée, a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, retenant d'ailleurs le caractère contradictoire des manquements professionnels allégués alors que dans le même temps, les pièces produites montrent que Monsieur [W] se voyait confier la gestion de nombreux projets professionnels d'importance.
Eu égard à l'ancienneté du salarié, à son âge (27 ans) au jour du licenciement et à sa situation professionnelle postérieure à la rupture, il y a lieu de confirmer le jugement de première instance qui a fait une juste estimation de l'indemnisation lui revenant pour ce licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
En l'état de la qualification retenue pour cette rupture de la relation de travail, il convient de confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a mis à la charge de la société ACP Architecture une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés y afférents et une indemnité de licenciement à hauteur des montants retenus, qui ne sont pas strictement contestés par l'appelant et dont la confirmation est demandée par l'intimé.
Sur les heures supplémentaires :
Face à Monsieur [W] qui soutient avoir effectué de nombreuses heures supplémentaires restées non rémunérées, accomplies le soir à des horaires tardifs, certains jours fériés et même pendant ses vacances ou à l'occasion de dossiers urgents à traiter, la société ACP Architecture conclut à l'infirmation du jugement entrepris.
Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2, alinéa 1, L. 3171-3 du code du travail , dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des
exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des
pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l'accord de l'employeur, soit s'il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.
À l'appui de sa demande de rappel de salaire pour des heures supplémentaires non rémunérées, le salarié verse aux débats plusieurs SMS faisant état de son travail à des horaires particulièrement tardifs '[M] nous sommes partis on est vraiment mort de la charrette d'hier', 'salut [M] je préférerais samedi car j'ai des trucs à faire dimanche. De toute manière si tu veux profiter de samedi tu peux me laisser des notes sur ce que tu veux que j'avance', 'Bonjour [G], excuse mon dérangement je me souviens plus si BETOM et CAPTERRE ont envoyé leurs références [...] tu profites bien de ces vacances', une liste des courriels envoyés avec leurs date et horaire, ainsi qu'une pièce 43 récapitulant jusqu'en mai 2013, mois par mois, les heures supplémentaires effectuées (jours fériés et dimanches compris).
Le salarié présente donc des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
La société ACP Architecture soutient qu'il existe au sein de l'agence un système de comptabilisation des heures supplémentaires directement renseigné par le personnel, estime que le salarié ne démontre pas l'existence d' heures supplémentaires restées non rémunérées, celles effectivement accomplies par Monsieur [W] ayant été constatées par huissier et payées. Elle critique le contenu du tableau produit par le salarié, indûment modifié par lui après la rupture du contrat de travail et contenant de nombreuses incohérences.
La société appelante verse aux débats la copie du procès-verbal du 7 mars 2013 d'un huissier de justice intervenu sur la page informatique ' feuille d'heures' d'un ordinateur de l'agence, comportant une date de modification de la veille, un tableau comparatif montrant les heures constatées par cet huissier le 7 mars 2013 et leur différence avec le tableau produit par l'intimé, ainsi qu'une synthèse du différentiel mis à jour et les bulletins de salaire.
Ces éléments permettent de relever des anomalies dans certaines des réclamations du salarié relativement à son temps de travail, en l'état des paiements effectués et de compensations prises consécutivement à des journées de travail chargées, mais ils ne constituent pas la preuve des horaires effectivement accomplis par l'intéressé.
Il convient donc de retenir le principe d'heures supplémentaires restant non rémunérées, de confirmer le jugement de première instance de ce chef, mais de l'infirmer relativement au rappel de salaire fixé.
Il y a lieu de retenir, au vu des éléments versés aux débats, une somme de 2 900,75 € restant due à ce titre, ainsi que les congés payés y afférents.
Sur le travail dissimulé :
Selon l'article L.8221-5 du code du travail dans sa version applicable au litige, 'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.'
L'article L.8223-1 du code du travail dispose qu' 'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.'
Le caractère intentionnel de la dissimulation ne peut se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.
En l'absence de toute démonstration du caractère intentionnel de la dissimulation d'emploi alléguée, la demande doit être rejetée, par confirmation du jugement entrepris de ce chef.
Sur l'obligation de sécurité :
La société ACP Architecture fait valoir qu'elle n'a pas manqué à son obligation de sécurité, que le salarié ne parvient pas à caractériser un quelconque manquement de sa part et reproche au conseil de prud'hommes de s'être prononcé sur un harcèlement moral qui n'a jamais été invoqué par l'intéressé.
Monsieur [W] soutient avoir été victime d'une situation d'agression morale de la part de son employeur, de conditions de travail dégradées , fait valoir n'avoir pu bénéficier de visite médicale et sollicite la confirmation du jugement de première instance qui a fixé à 5 000 € la réparation de son préjudice à ce titre.
Selon l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1) des actions de prévention des risques professionnels,
2) des actions d'information et de formation,
3) la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.
L'article L. 4121-2 du code du travail détermine les principes généraux de prévention sur le fondement desquels ces mesures doivent être mises en oeuvre.
Il en résulte que constitue une faute contractuelle engageant la responsabilité de l'employeur le fait d'exposer un salarié à un danger ou risque sans avoir pris toutes les mesures prévues par les textes susvisés.
Monsieur [W] invoque des débordements verbaux de la part de son employeur, diverses altercations, humiliations et des reproches en lien avec son orientation sexuelle.
Il produit en ce sens l'attestation de Monsieur [B], prestataire, rapportant les cris de l'employeur, celle de Madame [L], stagiaire à l'agence ACP Architecture en mars 2012, affirmant avoir été témoin de 'l'état de rage' de Monsieur [R] 'tel qu'il a jeté et cassé le combiné de téléphone de l'agence. Il est parti en claquant la porte et est revenu une demi-heure plus tard avec une bouteille de champagne et des flûtes, nous a servi des verres dans le but de se faire pardonner sans toutefois s'expliquer concrètement sur ses actes' ou celles d'autres stagiaires témoins des mêmes débordements et d'une incapacité 'à faire la part des choses entre la vie professionnelle et la vie privée' ou 'j'ai également vu M. [R] hurler sur [S] [N], [G] [W] et [Z] [F], à plusieurs reprises sans qu'ils aient commis de faute ayant une conséquence sur le travail de l'agence[...] Il était impossible pour eux d'exprimer un avis différent de celui de M. [R] sans que celui-ci ne les insulte ou ne les tourne en dérision'.
Le salarié verse également aux débats plusieurs avis d'arrêt de travail.
Il n'est pas justifié au surplus de l'adhésion de la société ACP Architecture à un service de médecine du travail.
Les éléments versés aux débats par l'employeur relatifs à une bonne ambiance régnant au sein de l'agence, aux relations respectueuses entretenues, et même à la générosité du gérant qui invitait régulièrement le personnel de l'agence au restaurant pour déjeuner n'apparaissent que ponctuels et non informatifs de la réalité des conditions générales de travail, certaines des attestations produites émanant de tiers ayant un point de vue extérieur et fugace.
Ainsi décrites et établies, ces conditions de travail marquées par une violence verbale manifeste et des intrusion brutales dans la sphère privée du salarié par l'employeur sont constitutives de manquements de ce dernier à son obligation de sécurité, comme d'ailleurs l'absence de toute investigation sur la charge de travail imposée, alors que le sujet était évoqué dans divers SMS relatifs à des 'charrettes' importantes.
Au vu des éléments de préjudice produits, il convient de confirmer le jugement de première instance qui a fait une juste évaluation de la réparation de ces manquements à l'obligation de sécurité.
Sur le harcèlement moral:
La société ACP Architecture soutient que Monsieur [W] a harcelé son supérieur hiérarchique. Elle estime apporter les éléments permettant de démontrer les comportements inappropriés adoptés par le salarié qui a adressé un courriel insultant à Monsieur [R] et a participé aux menaces du personnel en vue d'obtenir des paiements et avantages indus. L'appelante ajoute que l'intimé a réalisé un chantage se matérialisant par des dénonciations calomnieuses auprès de divers organes professionnels afin de lui soutirer de l'argent. Elle réclame 30'000 € au titre du harcèlement moral subi par son gérant.
Elle invoque l'orchestration par Monsieur [W] d'une fronde au sein de l'agence pour obtenir des paiements indus et des avantages, sous la menace.
Elle produit différentes pièces telles qu'un e-mail contenant un logo ' goodbye 20...' les deux chiffres suivants étant figurés par des doigts d'honneur, la déclaration de main courante du 4 mars 2013 de son gérant faisant état d'une lettre du syndicat CFDT SYNATPAU et de menaces de dépôt de plainte à son encontre, la déclaration de main courante du 18 mai 2013 au sujet d'un nouveau courrier du même syndicat le menaçant de poursuites en cas de non-paiement des indemnités de licenciement dans laquelle son gérant indique ressentir 'un chantage' de la part du personnel.
Plusieurs autres attestations sont produites au sujet du malaise du gérant de l'entreprise face au comportement de ses employés, lesquels ont travaillé ensemble consécutivement à la rupture de la relation de travail de l'espèce.
Si le message produit par la société ACP Architecture sort de la convenance due dans des relations professionnelles normales, il ne saurait suffire à laisser présumer un harcèlement moral à l'encontre du gérant de l'entreprise.
Par ailleurs, dans la défense de ses droits, le salarié ne peut se voir opposer une communication indue de documents syndicaux relatifs à ses droits.
Le jugement de première instance, qui a rejeté la demande d'indemnisation d'un harcèlement moral, doit donc être confirmé de ce chef.
Sur la tentative d'escroquerie au jugement :
La société ACP Architecture considère que le salarié a versé de faux documents aux débats, tentant ainsi de commettre une escroquerie au jugement et d'obtenir d'elle des sommes indues. Elle réclame que Monsieur [W] soit condamné à la somme de 30'000 €.
La pièce 43 du dossier du salarié qui est arguée de faux par l'employeur consiste en la déclaration de Monsieur [W] au titre des heures supplémentaires qu'il estime avoir accomplies sans en être rémunéré, soumise à la juridiction. Dans la mesure où le constat fait par l'huissier de justice ne permet pas de dire fautive la modification du tableau des heures de travail et de l'imputer à l'intéressé , ce document ne saurait donc être considéré comme ayant été le moyen d'une tentative d'escroquerie au jugement, la juridiction étant à même d'en apprécier la valeur, dûment informée par les dires des parties à son sujet.
La demande doit donc être rejetée et le jugement de première instance confirmé.
Sur la procédure abusive :
La société ACP Architecture réclame la condamnation de son adversaire à la somme de 3 000 euros pour procédure abusive sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile.
Selon ce texte, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10'000 € sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
La teneur du présent arrêt, accueillant en partie les demandes du salarié, permet de retenir l'absence de toute intention abusive ou fautive de sa part dans l'action entamée et dans sa défense en cause d'appel.
La demande doit donc être rejetée, par confirmation du jugement entrepris de ce chef.
Sur les intérêts:
Conformément aux dispositions des articles 1153, 1153-1 (anciens), 1231-6 et 1231-7 (nouveaux) du Code civil et R.1452-5 du code du travail, les intérêts au taux légal courent sur les créances de sommes d'argent dont le principe et le montant résultent du contrat ou de la loi ( rappels de salaire, indemnités compensatrices de préavis et de congés payés sur préavis, indemnité de licenciement) à compter de l'accusé de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation et d'orientation, sur les créances indemnitaires confirmées à compter du jugement de première instance et sur les autres sommes à compter du présent arrêt.
Sur les dépens et les frais irrépétibles:
L'employeur, qui succombe, doit être tenu aux dépens de première instance, par confirmation du jugement entrepris, et d'appel.
L'équité commande de confirmer le jugement de première instance relativement aux frais irrépétibles, de faire application de l'article 700 du code de procédure civile également en cause d'appel et d'allouer à ce titre la somme de 2 500 € au profit du salarié.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe à une date dont les parties ont été avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement déféré, sauf en ses dispositions relatives au montant des heures supplémentaires et des congés payés y afférents,
Statuant sur les chefs infirmés et y ajoutant,
CONDAMNE la société ACP Architecture à payer à Monsieur [G] [W] les sommes de :
- 2 900,75 € au titre des heures supplémentaires,
- 290,07 € au titre des congés payés y afférents,
- 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
DIT que les intérêts au taux légal sont dus à compter de l'accusé de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation et d'orientation pour les créances de sommes d'argent dont le principe et le montant résultent du contrat ou de la loi, à compter du jugement de première instance pour les sommes indemnitaires confirmées et à compter du présent arrêt pour le surplus,
REJETTE les autres demandes des parties,
CONDAMNE la société ACP Architecture aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE