Cass. 3e civ., 29 mai 2013, n° 11-24.156
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Terrier
Avocats :
Me Foussard, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boutet, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Laugier et Caston, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Odent et Poulet
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 mai 2011), qu'en 1992, la société Fromagerie Berthaut a entrepris des travaux d'extension de son usine, sous la maîtrise d'oeuvre de la société Cabinet BFA, aujourd'hui en liquidation judiciaire, assurée par la société Axa France IARD, venue aux droits de la société Axa courtage ; que sont intervenues dans la construction la société Travisol, chargée du lot isolation, assurée par la société Mutuelles du Mans assurances (MMA), et la société Plasteurop qui a fabriqué et fourni les panneaux d'isolation thermique, assurée au titre d'une police responsabilité civile professionnelle par la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) et au titre d'une police responsabilité civile "produits après livraison" par les sociétés Zürich international France et Axa CSA ; que la Société financière et industrielle du Peloux (SFIP) aujourd'hui en liquidation judiciaire, est venue aux droits de la société Plasteurop, dont la maison mère, la société Recticel avait souscrit pour le compte de ses filiales une police responsabilité civile "produits après livraison" auprès des sociétés d'assurances belges Axa Royale belge, Zürich assurances, Fortis corporate insurance, ACE et Gerling konzern Belgique ; qu'après réception des travaux, des désordres ayant affecté les panneaux d'isolation, la société MMA , après expertises amiables et judiciaire, a assigné la SFIP et la SMABTP en garantie ; que la société Fromagerie Berthaut a assigné M. X..., la société Axa courtage, la société Travisol, la société MMA et la SFIP en paiement d'une provision à titre de dommages-intérêts ; que la SFIP a appelé en garantie la SMABTP, les sociétés Zürich international France, Axa CSA, et les assureurs belges ; que la société Fromagerie Berthaut a assigné M. Y..., liquidateur judiciaire de la SFIP ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, pris en leurs troisième, quatrième, cinquième, sixième et septième branches, réunis :
Attendu que les sociétés Zürich insurance Ireland limited et HDI Gerling assurances font grief à l'arrêt de les condamner à garantir la société Travisol, la société Axa France IARD et la société MMA des condamnations prononcées au titre des dommages immatériels subis par la société Fromagerie Berthaut et au paiement de sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors, selon le moyen :
1°/ que l'action fondée sur le droit spécial de la responsabilité des fabricants de l'article 1792-4 du code civil est exclusive de toute autre action fondée sur le droit commun de la responsabilité ou des contrats ; que l'entrepreneur, coobligé in solidum avec le fabricant d'un produit défectueux, à réparer sur le fondement de l'article 1792-4 du code civile, le dommage subi par le maître de l'ouvrage dispose d'une action en contribution à la dette contre le fabricant, sur le fondement exclusif de l'article 1792-4 du code civil ; que dès lors, en affirmant que la société Travisol, solidairement responsable avec la société SFIP-Plasteurop du dommage subi par la société Fromagerie Berthaut, pouvait non seulement exercer un recours subrogatoire, fondé sur le droit spécial de la responsabilité des fabricants de l'article 1792-4, mais aussi un recours personnel, fondé sur le droit commun de la vente, directement contre les assureurs de la société SFIP-Plasteurop, la cour d'appel a violé les articles 1251, 3°,1641 et 1792-4 du code civil, ensemble les articles L. 121-12 et L.124-3 du code des assurances ;
2°/ que de même, l'assureur de l'entrepreneur, coobligé in solidum avec le fabricant d'un produit défectueux, à réparer sur le fondement de l'article 1792-4 du code civil le dommage subi par le maître de l'ouvrage dispose d'une action en contribution à la dette contre le fabricant sur le fondement exclusif de l'article 1792-4 du code civil ; que dès lors, en affirmant que la société Axa France, assureur du cabinet BFA alimentaire solidairement responsable avec la société SFIP-Plasteurop et que la société MMA, assureur de la société Travisol également solidairement responsable avec la société SFIP-Plasteurop, pouvaient non seulement exercer un recours subrogatoire, fondé sur le droit spécial de la responsabilité des fabricants de l'article 1792-4 du code civil, mais aussi un recours subrogatoire, fondé pour la première sur le droit commun de la responsabilité civile et pour la seconde sur le droit commun de la vente, la cour d'appel a violé les articles 1251, 3°, 1641 et 1792-4 du code civil, ensemble les articles L.121-12 et L. 124-3 du code des assurances ;
3°/ que le co-responsable, exerçant après indemnisation de la victime un recours contre l'assureur du co-responsable, intégralement chargé du poids définitif de la réparation, dispose uniquement d'une option, exclusive de tout cumul, entre un recours subrogatoire et un recours personnel, lorsque l'un des recours est susceptible, à lui seul, de mettre à la charge du co-responsable l'intégralité de l'indemnisation ; dès lors en affirmant que la société Travisol, solidairement responsable avec la société SFIP-Plasteurop du dommage subi par la société Fromagerie Berthaut, pouvait non seulement exercer un recours subrogatoire, fondé sur le droit spécial de la responsabilité des fabricants de l'article 1792-4, mais aussi un recours personnel, fondé sur le droit commun de la vente, directement contre les assureurs de la société SFIP-Plasteurop, la cour d'appel a violé les articles 1251, 3°, 1641 et 1792-4 du code civil, ensemble les articles L. 121-12 et L. 124-3 du code des assurances ;
4°/ que l'assureur du co-responsable, exerçant après indemnisation de la victime un recours contre l'assureur du co-responsable, intégralement chargé du poids définitif de la réparation, dispose uniquement d'une option, exclusive de tout cumul, entre un recours, fondé sur une subrogation dans les droits de son assuré, et un recours, fondé sur une subrogation dans les droits de la victime, lorsque l'un des recours est susceptible, à lui seul, de mettre à la charge du co-responsable l'intégralité de l'indemnisation ; que dès lors, en affirmant que la société Axa France, assureur du cabinet BFA alimentaire solidairement responsable de la société SFIP-Plasteurop, et que la société MMA, assureur de la société Travisol également solidairement responsable de la société SFIP-Plasteurop, pouvaient non seulement exercer un recours subrogatoire, fondé sur le droit spécial de la responsabilité des fabricants de l'article 1792-4 du code civil, mais aussi un recours subrogatoire, fondé pour la première sur le droit commun de la responsabilité civile et pour la seconde sur le droit commun de la vente, la cour d'appel a violé les articles 1251, 3°, 1641 et 1792-4 du code civil, ensemble les articles L. 121-12 et L. 124-3 du code des assurances ;
5°/ que l'assureur du co-responsable, non lié par contrat avec un co-responsable intégralement chargé du poids définitif de la réparation, ne dispose après indemnisation de la victime que d'un recours fondé sur une subrogation dans les droits de la victime, dans la mesure où il ne peut se prévaloir d'une subrogation dans une action personnelle de son assuré, fondée sur la responsabilité délictuelle du co-responsable à son égard, en l'absence de préjudice légitime et direct et de lien de causalité avec le fait générateur reproché ; que dès lors, en affirmant que la société Axa France, assureur du cabinet BFA alimentaire solidairement responsable de la société SFIP-Plasteurop, pouvait non seulement exercer un recours subrogatoire, fondé sur le droit spécial de la responsabilité des fabricants de l'article 1792-4 du code civil, mais aussi un recours subrogatoire, fondé sur le droit commun de la responsabilité civile, la cour d'appel a violé les articles 1251, 3° et 1382 du code civil, ensemble les articles L. 121-12 et L. 124-3 du code des assurances ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la responsabilité de la société SFIP-Plasteurop, fabricant d'EPERS, était engagée sur le fondement de l'article 1792-4 du code civil, que celles du maître d'oeuvre et de l'entreprise Travisol l'étaient sur le fondement de la garantie décennale, la cour d'appel a, abstraction faite d'un motif surabondant relatif à la possibilité d'exercer un recours subrogatoire sur le fondement de la garantie décennale, exactement retenu, d'une part, que la société Travisol ne pouvait exercer son recours contre ses co-obligés et leurs assureurs que sur le fondement de l'article 1641 du code civil et, d'autre part, que le cabinet BFA alimentaire, n'étant pas lié par contrat avec un co-responsable, la société Axa, après indemnisation de la victime, disposait contre les co-responsables et leurs assureurs d'un recours fondé sur la responsabilité délictuelle ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal pris en sa huitième branche, ci-après annexé :
Attendu que le moyen, qui, pris en sa huitième branche, vise un motif erroné mais surabondant, n'est pas fondé ; Sur le moyen unique du pourvoi principal pris en ses dixième et onzième branches et le moyen unique du pourvoi incident, pris en ses huitième et neuvième branches, réunis, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant retenu que le fait générateur qui conditionnait la mise en jeu des garanties des panneaux défectueux, se situait dans la période de validité des polices souscrites et que s'agissant d'un sinistre sériel, la première réclamation avait été formulée dans les deux années suivant l'extinction du contrat, la cour d'appel a pu déclarer non écrite la clause dite de réclamation, qui tendait à réduire la durée de garantie de l'assureur à un temps inférieur à la durée de responsabilité de l'assuré ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses première, deuxième et neuvième branches et le moyen unique du pourvoi incident, pris en ses première et deuxième branches, qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission des pourvois ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.