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Décisions

CA Versailles, ch. soc., 4 septembre 2024, n° 24/00072

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Mediapro France (Sté), BTSG (Sté), CGEA IDF Ouest (Assoc)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Prache

Conseillers :

M. Baby, Mme Gautier

Avocats :

Me Larose Martins, Me Cormary

Versailles, ch. soc., du 18 déc. 2023, n…

18 décembre 2023

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Par jugement du 15 septembre 2021, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Mediapro France et a désigné la société SCP BTSG prise en la personne de Me [U], en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Mediapro France.

Le 12 novembre 2021, M. [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne -Billancourt aux fins de requalifier la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée, de voir dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Par jugement du 20 octobre 2022, notifié aux parties le 21 novembre 2022, le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt (section encadrement) a :

- Constaté la prescription biennale de la demande de requalification de M. [E] de sa relation de travail en contrat à durée indéterminée pour la période de 2012 au 16 novembre 2019

- dit et jugé que les conditions de recours au CDDU ont été respectées par la société Médiapro France

- Débouté M. [E] de sa demande de requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée sur le motif de recours au CDDU

- Débouté M. [E] de sa demande de requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée sur des irrégularités de forme

- Fixé le salaire de référence de M. [E] à 1 234, 06 euros brut mensuel

Par conséquent

- Débouté M. [E] de l'intégralité de ses demandes financières

- Débouté la société Médiapro France du surplus de ses demandes

- Débouté les AGS du surplus de ses demandes

- Dit qu'il n'y a pas lieu à article 700 du code de procédure civile et laissé ainsi les frais exposés par les parties à leur charge respective

- Condamné M. [E] aux dépens de l'instance.

Par déclaration adressée au greffe de la cour d'appel de Versailles le 15 décembre 2022, M. [E] a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance du 1er mars 2023, le juge-commissaire du tribunal de commerce de Nanterre a:

- déclaré la déclaration de la créance de M. [E] recevable,

- constaté que la créance déclarée par M. [E] fait l'objet d'une instance en cours à l'ouverture de la procédure,

- décidé de surseoir à statuer sur l'admission de la créance de M. [E],

- dit que cette mention de cette instance en cours doit être portée sur l'état des créances pour y être définitivement fixée sur production par la société Mediapro France de la décision mettant fin à cette instance, et de la justification de son caractère définitif .

Par ordonnance du 18 décembre 2023, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Versailles a :

- constaté la caducité de la déclaration d'appel formée à l'encontre de la société civile professionnelle BTSG ès qualités de mandataire liquidateur de la société par actions simplifiée Mediapro France et de l'association AGS CGEA Ile de France Ouest ;

- constaté l'extinction de l'instance ;

- condamné M. [O] [E] aux dépens.

Les motifs de l'ordonnance sont les suivants :

A l'égard du mandataire judiciaire, l'appelant a signifié ses conclusions hors du délai imparti.

A l'égard de l'association AGS CGEA : l'article 553 du code de procédure civile dit qu' 'en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel de l'une produit effet à l'égard des autres même si celles-ci ne se sont pas jointes à l'instance; l'appel formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance.'

L'article L.3253-8 du code du travail prévoit que l'AGS garantit les sommes dues au salarié au jour d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire et les créances salariales antérieures au jugement d'ouverture entrent dans ce champ.

Il ressort des dispositions combinées des articles L.3253-15, L.3253-19 et L.3253-20 du même code que l'AGS avance les sommes comprises dans le relevé établi par le mandataire judiciaire, notamment les créances salariales, et que si les créances ne peuvent être payées sur les fonds disponibles, le mandataire judiciaire demande sur présentation des relevés, l'avance des fonds nécessaires à l'AGS.

Si M. [E] fait égard à la procédure d'admission de sa créance devant le tribunal de commerce, toujours est-il que l'article L.625-1 du code de commerce précise que le mandataire judiciaire établit un relevé des créances salariales qui suit son régime propre, sans lien avec la procédure de déclaration puis d'admission des créances, dont l'article L.622-24 évince les salariés. Il ne peut donc en tirer argument pour dire que sa créance figurerait déjà sur l'état des créances.

En tout état de cause, le litige qui porte sur la requalification de contrats à durée déterminée consentis par une société désormais en liquidation judiciaire, en un contrat à durée indéterminée et en paiement, par suite, de diverses créances salariales susceptibles de donner lieu à des avances de somme par l'AGS au titre de sa garantie présente un caractère indivisible dès lors que la mise en cause de l'AGS repose sur les dispositions de l'article L.625-1 du code de commerce.'.

Par requête aux fins de déféré du 29 décembre 2023, M. [E] sollicite l'infirmation de l'ordonnance d'incident du 18 décembre 2023.

Par ordonnance du 23 janvier 2024 adressée à M. [E], à la SCP BTSG prise en la personne de Me [U], en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Mediapro France et à l'association AGS CGEA Ile de France, le président de la chambre 4-4 de la cour d'appel a fixé l'examen de la requête à l'audience du 16 mai 2024.

Par dernières conclusions notifiées le 14 mai 2024 à laquelle il est expressément renvoyé pour l'énoncé complet des moyens, M. [E] demande à la cour de :

- déclarer recevable la présente requête

- déclarer la présente requête fondée, par application des articles 369, 911-1 et 912 du Code de

procédure civile ;

- infirmer l'ordonnance de mise en état du 18 Décembre 2023 ;

- rejeter la demande formulée par les AGS au titre de l'article 700 du cpc,

A titre principal :

- déclarer que l'instance pendante devant la Cour d'appel a été interrompue par l'instance en cours devant le juge-commissaire,

- déclarer que les conclusions ont été signifiées à la SCP BTSG dans les délais légaux impartis,

- déclarer qu'aucune ordonnance de caducité n'a été rendue après réception des observations écrites,

- déclarer qu'aucun incident n'a été soulevé,

- déclarer que la décision du conseiller de la mise en état est fondée sur une argumentation nullement développée par l'intimée,

En conséquence :

- déclarer qu'aucune audience sur incident ne pouvait être tenue,

- déclarer que, à défaut, l'affaire ne pouvait plus être examinée après le 31 juillet 2023,

- déclarer que le principe du contradictoire n'a pas été respecté,

- déclarer que la caducité constituerait, dans ces circonstances, une atteinte disproportionnée à l'article 6 de la Convention Européenne des droits de l'Homme,

- confirmer que la déclaration d'appel de M. [E] n'est pas caduque,

A titre subsidiaire :

- prononcer la caducité partielle de la déclaration d'appel de M. [E] à l'égard de la seule SCP BTSG.

Il soutient que l'instance devant la cour d'appel a été interrompue par l'effet de la convocation de son conseil devant le juge-commissaire dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Mediapro France et par voie de conséquence a interrompu le délai de trois mois imparti à l'appelant pour conclure. Il explique que l'ordonnance du juge-commissaire, notifiée le 7mars 2023 et qu'il a réceptionnée le 8 mars 2023, a mis fin à la suspension du délai de trois mois fixé par l'article 908 du code de procédure civile de sorte qu'il disposait d'un délai jusqu'au 28 avril 2023 et que ses conclusions d'appelant ont été notifiées dans les délais requis par message électronique puis signifiées à Maître [U] le 1er mars 2023. Il ajoute que le conseiller de la mise en état a fondé sa décision sur des arguments qui n'ont pas été développés par les parties et notamment par l'AGS, et qu'il n'indique pas que les dispositions de l'article 369 ne s'appliquent pas à la procédure devant les chambres sociales. Il soutient que le conseiller de la mise en état a également organisé une audience qui ne devait pas se tenir alors qu'aucun incident n'a jamais été soulevé et qu'il devait examiner l'affaire en tout état de cause au plus tard le 31 juillet 2023.

Par conclusions du 13 mai 2024, l'association AGS CGEA Ile de France sollicite de :

- confirmer l'ordonnance rendue par le Conseiller de la mise en état du 18 décembre 2023

- juger que Monsieur [E] n'a pas signifié ses conclusions d'appelant dans les délais de l'article 911 du Code de procédure civile au mandataire liquidateur de la société Mediapro France

En conséquence,

- prononcer la caducité de la déclaration d'appel de Monsieur [E]

- juger que le litige est indivisible

En conséquence,

- juger que le constat de la caducité de la déclaration d'appel vaut pour toutes les parties

- prononcer la caducité totale de la déclaration d'appel

- condamner Monsieur [E] à régler à la concluante un article 700 du Code de procédure civile à hauteur de 1500 €

- condamner Monsieur [E] aux entiers dépens d'appel.

L'AGS réplique que les dispositions de l'article 369 du code de procédure civile n'ont pas vocation à contrecarrer les dispositions d'ordre public du code du commerce qui étaient dans le débat puisqu'elle les a visés expressément dans ses conclusions. Elle précise que si l'article 369 du code de procédure civile prévoit l'interruption de l'instance par l'effet d'un jugement ouvrant une procédure collective, cela ne signifie pas que les délais de la procédure d'appel sont interrompus par une procédure collective déjà ouverte. Elle ajoute que le sursis dont se prévaut le salarié concerne sa procédure commerciale sans qu'il puisse s'étendre à la procédure prud'homale. Elle indique que le délai de quinze jours prévu à l'article 912 du code de procédure civile n'est pas une condition de validité de l'incident soulevé devant le conseiller de la mise en état. Elle précise que la caducité de la déclaration d'appel concernant le mandataire liquidateur entraîne, en application de l'indivisibilité du litige, la caducité de la déclaration d'appel de l'AGS.

La société BTSG prise en la personne de Me [U], en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Mediapro France, à laquelle la déclaration au greffe a été régulièrement signifiée à personne morale le 8 février 2023, n'a pas constitué avocat et n'a pas conclu.

MOTIFS

Selon les dispositions de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Par ailleurs, aux termes de l'article 954, dernier alinéa, du même code, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs (Soc., 18 janvier 2023, pourvoi n° 21-23.796, publié).

Sur la caducité de l'appel et la caducité partielle à l'égard de la seule société SCP BTSG

Sur l'interruption de l'instance

Selon les dispositions de l'article 622-24 du code du commerce, à partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans des délais fixés par décret en Conseil d'État.

Selon les dispositions de l'article 625-4 du code du commerce, lorsque les institutions mentionnées à l'article L. 143-11-4 du code du travail refusent pour quelque cause que ce soit de régler une créance figurant sur un relevé des créances résultant d'un contrat de travail, elles font connaître leur refus au mandataire judiciaire qui en informe immédiatement le représentant des salariés et le salarié concerné. Ce dernier peut saisir du litige le conseil de prud'hommes. Le mandataire judiciaire, le débiteur et l'administrateur lorsqu'il a une mission d'assistance sont mis en cause.

Aux termes de l'article R.625-1 de ce code, au vu des documents ou à partir des informations fournies par les salariés, par le débiteur, par l'administrateur ainsi que par le représentant des salariés, le mandataire judiciaire vérifie les créances résultant d'un contrat de travail et en établit des relevés. Cette vérification a lieu même en l'absence de la vérification des créances chirographaires le débiteur tient à la disposition du représentant des salariés les éléments à partir desquels le mandataire judiciaire a établi les relevés et notamment le livre de paye et le registre du personnel. Le représentant des salariés appose sa signature sur les relevés en formulant au besoin des réserves ou observations. En l'absence de signature, le juge-commissaire entend le représentant des salariés.

Les relevés sont, à la diligence du mandataire judiciaire, visés par le juge-commissaire. Ils sont remis par le mandataire judiciaire aux institutions mentionnées à l'article L. 143-11-4 du code du travail avant l'expiration des délais prévus, pour chaque catégorie de créances, à l'article L. 143-11-7 du même code.

Aux termes de l'article 369 du code de procédure civile, l'instance est interrompue par :

- la majorité d'une partie ;

- la cessation de fonctions de l'avocat lorsque la représentation est obligatoire ;

- l'effet du jugement qui prononce la sauvegarde, le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire dans les causes où il emporte assistance ou dessaisissement du débiteur ;

- la conclusion d'une convention de procédure participative aux fins de mise en état y compris en cas de retrait du rôle ;

- la décision de convocation des parties à une audience de règlement amiable.

Par exception, selon l'article L. 625-3 du code de commerce, les instances en cours devant la juridiction prud'homale à la date du jugement d'ouverture sont poursuivies. Elles ne sont ni suspendues ni interrompues par l'ouverture de la procédure collective (Soc., 17 septembre 2003, n° 01-43.029, publié ; Soc., 7 juillet 2004, n° 02-47.653, publié ; Soc., 24 novembre 2004, n° 02-45.126, publié ; Soc., 12 avril 2005, n° 03-40.573, publié ; Soc., 1 er juillet 2015, n° 14-12.980, NP).

L'interruption de l'instance d'appel emporte celle du délai imparti pour conclure et fait courir un nouveau délai à compter de la reprise d'instance. Ainsi, encourt en conséquence la cassation l'arrêt qui, alors qu'il résulte de ses constatations que l'appelant a conclu moins de trois mois après la reprise de l'instance, retient que ses conclusions ont été déposées après l'expiration de la fraction du délai de l'article 908 du code de procédure civile restant à courir après déduction du temps écoulé entre la déclaration d'appel et l'interruption de l'instance ( cf .2e Civ., 4 juin 2015, pourvoi n° 13-27.218, publié).

Une action engagée postérieurement au jugement d'ouverture n'est pas une instance en cours (cf Com., 25 octobre 2023, pourvoi n° 22-18.075).

Au cas présent, le salarié se prévaut d'une interruption d'instance entre le 23 janvier 2023, date de convocation de son conseil devant le juge-commissaire à la suite de sa déclaration de créance prud'homale et le 7 mars 2023, date de réception de l'ordonnance du juge commissaire.

Toutefois, si l'instance est interrompue notamment par l'effet du jugement qui prononce la sauvegarde, le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire dans les causes où il emporte assistance ou dessaisissement du débiteur, cette règle n'est pas applicable aux instances en cours devant la juridiction prud'homale à la date du jugement d'ouverture et, en tout état de cause, l'appelant n'avait encore engagé aucune action devant le conseil de prud'hommes lorsque la liquidation judiciaire a été prononcée.

Par ailleurs, la déclaration de l'appelant en vue de l'admission de sa créance par le juge-commissaire dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire en cours et ouverte avant sa saisine du conseil de prud'hommes, ne constitue pas une instance en cours susceptible d'interrompre l'instance prud'homale, qui n'était en tout état de cause pas en cours.

En effet, les dispositions de l'article 369 du code de procédure civile prévoient de manière limitative les cas d'interruption d'instance et la situation de l'appelant ne correspond à aucun des cas énumérés par cet article.

En outre, la circonstance que le salarié ait fait le choix de déclarer sa créance salariale auprès du tribunal de commerce n'a pas d'effet sur l'instance prud'homale en cours devant la cour d'appel, d'une part en raison de l'application de l'article L.622-24 du code du commerce qui dispense le salarié de déclarer sa créance, d'autre part puisque seule la cour d'appel sera en mesure de fixer au passif de l'employeur, si besoin, la créance du salarié dont il déterminera l'existence, la nature et le montant. C'est pour cette raison que le juge commissaire a prononcé un sursis à statuer dans l'attente de la décision prud'homale.

Il ressort également de l'article R.625-1 de ce code que si le salarié ' n'est nullement évincé de la procédure de déclaration des créances' comme l'invoque M. [E], pour autant, aucune instance n'est prévue puisque les relevés sont, à la diligence du mandataire judiciaire, uniquement visés par le juge-commissaire.

Enfin, le salarié reproche au conseiller de la mise en état d'avoir visé des dispositions du code du commerce de sa propre initiative et développé un argument non soulevé par l'AGS.

Toutefois, le conseiller de la mise en état a tranché le litige conformément aux règles de droits qui lui sont applicables en application des dispositions de l'article 12 du code de procédure civile d'après l'ensemble des éléments au dossier auxquels toutes les parties avaient accès, y compris l'appelant, et notamment le jugement du juge-commissaire, pièce dont se prévaut l'appelant pour solliciter l'interruption de l'instance devant la cour d'appel.

Le conseiller de la mise en état a donc respecté le principe de la contradiction des débats.

Par conséquent, il convient de rejeter la demande de M. [E] tendant à constater que l'instance prud'homale a été suspendue entre le 23 janvier 2023 et le 7 mars 2023.

Sur l'office du conseiller de la mise en état

Selon l'article 911-1 du code de procédure civile, la caducité de la déclaration d'appel en application des articles 902 et 908 ou l'irrecevabilité des conclusions en application des articles 909 et 910 sont prononcées par ordonnance du conseiller de la mise en état qui statue après avoir sollicité les observations écrites des parties. L'ordonnance qui prononce la caducité ne peut être rapportée.

Selon l'article 912 de ce code, le conseiller de la mise en état examine l'affaire dans les quinze jours suivant l'expiration des délais pour conclure et communiquer les pièces. Il fixe la date de la clôture et celle des plaidoiries. Toutefois, si l'affaire nécessite de nouveaux échanges de conclusions, sans préjudice de l'article 910-4, il en fixe le calendrier, après avoir recueilli l'avis des avocats.

L'obligation faite aux parties, par l'article 912 du code de procédure civile, de déposer à la cour d'appel leurs dossiers, comprenant les copies des pièces visées dans les conclusions et numérotées dans l'ordre du bordereau récapitulatif, quinze jours avant la date fixée pour l'audience de plaidoiries, n'est pas sanctionnée par une irrecevabilité ou une exclusion des pièces non remises.( 2e Civ., 7 janvier 2016, pourvoi n° 14-29.019, publié).

Au cas présent, par avis préalable à caducité de la déclaration d'appel du 18 avril 2023, le greffe a demandé au conseil de l'appelant de lui adresser ses observations écrites dans le délai d'un mois au titre de l'absence de signification de ses conclusions au mandataire liquidateur; et l'audience d'incident s'est tenue le 6 novembre 2023.

D'abord, il résulte des articles 911-1, alinéa 2, du code de procédure civile et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que hors les cas où il décide, d'office, d'appeler les parties à une audience, le conseiller de la mise en état, qui statue sur la caducité de la déclaration d'appel ou l'irrecevabilité des conclusions, n'est pas tenu d'organiser une audience, sauf si les parties le lui demandent ( 2e Civ., 26 octobre 2023, pourvoi n° 21-22.315).

Dès lors, le conseiller de la mise en état était fondé à convoquer d'office les parties à une audience, aux fins de statuer sur la caducité de la déclaration d'appel,quand bien même l'AGS ne l'a pas sollicité.

Ensuite, aucune disposition légale ne prévoit une sanction si le conseiller de la mise en état rend sa décision au-delà du délai de quinze jour prévu par l'article 912 et cette situation ne peut conduire à l'infirmation de l'ordonnance querellée.

Sur le caractère disproportionné d'une éventuelle caducité

Selon les dispositions de l'article 911 du code de procédure civile, sous les sanctions prévues aux articles 908 à 910, les conclusions sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour. Sous les mêmes sanctions, elles sont signifiées aux parties qui n'ont pas constitué avocat au plus tard dans le mois suivant l'expiration des délais prévus à ces articles; cependant, si celles-ci constituent avocat avant la signification des conclusions, il est procédé par voie de notification à leur avocat.

Si l'appelant se prévaut de la connaissance par le mandataire liquidateur de la procédure d'appel en cours en invoquant sa présence lors de l'audience devant le juge-commissaire et le fait que le mandataire liquidateur lui a expressément indiqué qu'il allait se constituer, au regard de la décision du juge-commissaire, , il n'en justifie pas et il ne peut augurer que la société BTSG a considéré que l'instance en cours devant le juge-commissaire suspendait le délai imparti aux parties pour conclure, et reportait ainsi son délai pour se constituer.

En tout état de cause, et peu important que le mandataire liquidateur ait eu connaissance de l'existence de la déclaration de créance salariale et du litige devant le juge-commissaire, et alors que le principe de la contradiction a été respecté par le conseiller de la mise en état, comme indiqué précédemment, l'appelant n'a pas signifié au mandataire liquidateur la déclaration d'appel dans les délais requis prévus à l'article 911 du code de procédure civile, ayant été avisé préalablement par le greffe le 17 janvier 2023 de qu'il devait procéder par voie de signification en l'absence de constitution du mandataire liquidateur,qu'il n'a pas effectuée dans le délai d'un mois.

Sur la caducité partielle de la société SCP BTSG

Pour invoquer la divisibilité de la caducité d'appel et dire que si la caducité d'appel est confirmée, elle n'a pas à être étendue à l'AGS, le salarié soutient qu'en cas de décision rendue par la cour au fond, en présence de trésorerie suffisante, le paiement des créances salariales serait alors assuré sur les fonds encore disponibles de l'entreprise liquidée, la société Mediapro France, de sorte que la décision rendue ne serait pas opposable à l'AGS, ce qui démontre que le litige est divisible, ce que conteste l'AGS.

Il ressort des articles L. 3253-15, L.3263-20 du code du travail que la garantie de l'AGS est subsidiaire et n'intervient que sur présentation par le mandataire liquidateur d'un relevé.

Si en principe, dans l'hypothèse de caducité de la déclaration d'appel, l'irrégularité sanctionnée ne concerne que les rapports avec l'un des intimés, la caducité ne s'étend pas aux rapports avec les autres intimés, il en va autrement lorsque le litige est indivisible.

Par application de l'article 553 du code de procédure civile selon lequel 'en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel de l'une produit effet à l'égard des autres même si celles-ci ne se sont pas jointes à l'instance' et que 'l'appel formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance', l'absence de l'une des parties, y compris en raison de la caducité de la déclaration d'appel la concernant, doit être sanctionnée par l'irrecevabilité de l'appel.

Dès lors, l'appel formé par l'appelant à l'encontre de l'AGS n'est recevable que si l'appel contre le mandataire liquidateur est lui-même recevable, en raison de l'indivisibilité du litige résultant de l'interdépendance entre les demandes du salarié et la garantie de l'AGS, qui n'est possible qu'en présence du mandataire liquidateur.

Sans fixation de créance, au sujet de laquelle le juge-commissaire a sursis à statuer dans l'attende de la fixation par la cour d'appel de la créance salariale de l'appelant, l'anéantissement de l'appel interjeté à l'encontre de la société Mediapro France empêche l'intervention de l'AGS.

La caducité de la déclaration d'appel est donc encourue également à l'égard de cette seconde partie intimée, l'AGS.

En conséquence de tout ce qui précède, l'ordonnance sera en conséquence confirmée en toutes ses dispositions.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

M. [E], succombant en son déféré, en sera condamné aux dépens.

En revanche, l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :

CONFIRME en toutes ses dispositions l'ordonnance d'incident en date du 18 décembre 2023 du conseiller de la mise en état de la chambre 4-1,

Y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [E] aux dépens du déféré.