Décisions
CA Aix-en-Provence, ch. 3-2, 29 août 2024, n° 20/12410
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-2
ARRÊT AU FOND
DU 29 AOUT 2024
N° 2024/189
Rôle N° RG 20/12410 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGUNL
G.I.E. EVEN DISTRIBUTION
C/
SOCIETE PHOCEOR
SAS LES MANDATAIRES
SELAS JFAJ
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Joseph MAGNAN
Me Sébastien BADIE
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Juge commissaire de [Localité 4] en date du 26 Novembre 2020 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2019M08816.
APPELANTE
G.I.E. EVEN DISTRIBUTION
dont le siège social est sis [Adresse 5], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité audit siège,
représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
INTIMEES
SOCIETE PHOCEOR
immatriculée au RCS de Marseille sous le n° 381 053 339 dont le siège social est sis [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité audit siège,
représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
SAS LES MANDATAIRES
Prise en la personne de Me [T] [F], agissant en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SA PHOCEOR, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
SELAS JFAJ
Représenté par Maître [H] [N], agissant en sa qualité d'administrateur judiciaire au redressement judiciaires de la SA PHOCEOR
demeurant Administrateurs Judiciaires - [Adresse 1]
représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 05 Juin 2024 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre
Madame Muriel VASSAIL, Conseiller
Madame Agnès VADROT, Conseiller rapporteur
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Août 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Août 2024,
Signé par Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre et Madame Chantal DESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par jugement en date du 19 juin 2019, le tribunal de commerce de Marseille a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SA PHOCEOR. La SAS LES MANDATAIRES représentée par Maître [T] [F] a été désignée en qualité de mandataire judiciaire et la SELARL JFAJ, en qualité d'administrateur judiciaire.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 juillet 2019, le GIE EVEN DISTRIBUTION a déclaré à titre chirographaire une créance de 15 534 euros se décomposant comme suit :
- 1 200 euros au titre d'une facture n° 9853597 du 12 avril 2019,
- 9 047,62 euros au titre d'une facture n° 9854192 du 26 avril 2019,
- 5 286,38 euros au titre d'une facture n° 9855905 du 26 juillet 2019.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 octobre 2019, Maître [F] ès qualités a informé le GIE EVEN DISTRIBUTION de l'existence d'une contestation au motif qu'il avait été procédé au règlement de la créance par compensation, sans autorisation du juge commissaire.
Le GIE EVEN DISTRIBUTION a maintenu sa déclaration de créance en expliquant :
- que la société PHOCEOR avait signé des contrats cadre aux termes desquels il était expressément permis au GIE de procéder au recouvrement direct, par compensation de toutes sommes que pourrait devoir le fournisseur audit GIE,
- que c'est à ce titre qu'il entendait, ainsi que ses membres, se prévaloir de la compensation intervenue entre les différentes créances connexes,
- qu'il résultait de la jurisprudence constante que le créancier qui souhaitait invoquer la compensation des créances devait avoir, préalablement, effectué une déclaration de créance.
Par ordonnance en date du 5 mars 2020, le juge commissaire a rejeté la requête du GIE EVEN DISTRIBUTION tendant à voir constater qu'il avait valablement déclaré sa créance au passif de la procédure collective de la société PHOCEOR, l'existence de contrats-cadres entre les parties prévoyant expressément la compensation entre les créances réciproques, la connexité entre les créances respectives s'inscrivant dans un courant d'affaires régulier et aux fins d'autoriser la compensation pratiquée par ses soins dans les conditions dans lesquelles elle est intervenue.
Il a motivé sa décision par le fait qu'aucun accord du juge commissaire n'avait été préalablement donné à cette compensation qui n'était pas une compensation légale s'appuyant sur la réciprocité des relations personnelles entre les parties mais reposait sur le seul lien d'interdépendance reliant les créances connexes.
Par ordonnance en date du 26 novembre 2020, le juge commissaire du tribunal de commerce de Marseille, saisi de la contestation, a rejeté la créance déclarée par le GIE EVEN DISTRIBUTION pour un montant de 15 534 euros au passif de la procédure collective de la SA PHOCEOR au motif que celle-ci avait fait l'objet d'une compensation irrégulière rejetée par le juge commissaire en date du 5 mars 2020 et non remboursée à la SA PHOCEOR.
Par déclaration en date du 11 décembre 2020, le GIE EVEN DISTRIBUTION a interjeté appel de cette décision.
Par ordonnance d'incident en date du 17 novembre 2022, le conseiller de la mise en état a rejeté l'exception d'irrecevabilité de l'appel soulevée par la SA PHOCEOR, la SAS LES MANDATAIRES et la SELAS JFAJ ès qualités.
Par conclusions déposées et notifiées par RPVA en date du 29 juillet 2021, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, le GIE EVEN DISTRIBUTION demande à la cour, au visa des articles L.622-7, L.622-27, L.624-2, L.641-3, R.624-1 du code de commerce, 1347 et suivants du code civil, de :
- réformer l'ordonnance du juge commissaire au redressement judiciaire de la société PHOCEOR du 26 novembre 2020 ;
- fixer sa créance au passif du redressement judiciaire de la société PHOCEOR à la somme de 15 534 euros à titre chirographaire ;
- constater l'existence de contrats-cadre entre les parties prévoyant la compensation ;
- dire et juger que la compensation légale s'est opérée entre les créances connexes réciproques;
Subsidiairement,
- prononcer cette compensation ;
- débouter la SAS LES MANDATAIRES ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société PHOCEOR, la SELARL JFAJ ès qualités d'administrateur judiciaire de la société PHOCEOR de toutes prétentions contraires et de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;
- condamner la société PHOCEOR et la SELARL JFAJ ès qualités d'administrateur judiciaire de cette société à lui verser une indemnité de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non répétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ;
- condamner la société PHOCEOR et la SELARL JFAJ ès qualités aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés par Maître MAGNAN, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Après avoir rappelé que l'ordonnance du juge commissaire du 5 mars 2020 avait fait l'objet d'un recours toujours pendant devant le tribunal de commerce de Marseille, l'appelant soutient que la compensation contestée s'est bien opérée entre les créances connexes et réciproques.
Il expose ainsi que des contrats cadres et leurs annexes d'application ont été signés pour les années 2018 et 2019 par la société PHOCEOR laquelle a donc expressément accepté le mécanisme de la compensation qu'ils prévoyaient; qu'en l'espèce, la compensation s'est opérée régulièrement sans qu'il n'y ait à solliciter l'autorisation préalable du juge commissaire.
Il rappelle les dispositions de l'article L. 622-7 I alinéa 1, dont il résulte que le jugement d'ouverture de la procédure collective emporte interdiction de payer les créances nées antérieurement, à l'exception du paiement par compensation des créances connexes et déduit de la jurisprudence existante en cette matière que c'est à bon droit qu'il a sollicité l'admission de sa créance au passif du redressement judiciaire de la société PHOCEOR puis que soit reconnue la compensation entre les créances connexes en application des contrats-cadre.
Par conclusions déposées et notifiées par RPVA en date du 02 décembre 2022, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, la SA PHOCEOR, la SAS LES MANDATAIRES et la SELAS JFAJ ès qualités de mandataire et d'administrateur au redressement judiciaire de la SA PHOCEOR demandent à la cour de :
- confirmer l'ordonnance du juge commissaire du tribunal de commerce de Marseille en date du 26 novembre 2020 ;
- rejeter la créance de EVEN DISTRIBUTION inscrite sous le n°21 sur la liste des créances déposées au greffe de 15 534 euros à titre chirographaire échu ;
- condamner la société EVEN DISTRIBUTION à 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Les intimés soutiennent que la créance déclarée a fait l'objet d'une compensation irrégulière. Ils exposent ainsi que celle-ci, qui a eu lieu avant d'être autorisée par le juge commissaire, n'est pas une compensation légale qui s'appuie sur la réciprocité des relations personnelles entre les parties à la compensation et où chacune d'elle est à la fois créancier et débiteur de l'autre, mais d'une compensation qui repose sur le seul lien d'interdépendance qui relie les créances connexes et qui permet leur extinction commune dès lors qu'elles sont réciproques à l'égard d'une seule et même partie.
Ils relèvent que l'ordonnance en date du 5 mars 2020 ayant rejeté la requête du GIE EVEN DISTRIBUTION, faute d'accord préalable du juge commissaire, n'a fait l'objet d'aucun recours et que le GIE EVEN DISTRIBUTION n'a pas procédé au remboursement de la somme due à la société PHOCEOR.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 mai 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Dans son ordonnance du 26 novembre 2020, sur lequel porte l'appel dont la cour est saisie, le juge commissaire du tribunal de commerce de Marseille a rejeté la créance déclarée par le GIE EVEN DISTRIBUTION pour un montant de 15 534 euros au motif que celle-ci avait fait l'objet d'une compensation irrégulière, rejetée par le juge commissaire dans son ordonnance en date du 5 mars 2020.
Il résulte des éléments de la procédure que cette ordonnance a fait l'objet d'un recours devant le tribunal de commerce de Marseille lequel a, dans son jugement du 3 mars 2021, ordonné le retrait du rôle à la demande conjointes des parties ayant invoqué des discussions en cours.
Il n'est justifié d'aucun rétablissement de l'affaire.
Les intimés versent en revanche aux débats un certificat de non recours délivré le 29 août 2022 par le greffier du tribunal de commerce de Marseille lequel certifie que l'ordonnance n°2020M00881 rendue le 5 mars 2020 n'a fait l'objet d'aucun recours dans le délai imparti à l'article R.621-21 du code de commerce.
Il s'en déduit que l'argumentation développée par l'appelant se heurte à l'autorité de la chose jugée.
En tout état de cause, la cour statuant dans les limites de la compétence du juge commissaire saisi en matière de vérification des créances, n'a pas le pouvoir d'apprécier, comme il le lui est demandé, la régularité de la compensation, objet de l'instance ayant donné lieu à l'ordonnance du 5 mars 2020, dont le caractère définitif résulte du certificat de non recours délivré par le greffe.
L'ordonnance rendue le 26 novembre 2020 par le juge commissaire du tribunal de commerce de Marseille, sera en conséquence confirmée.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Le GIE EVEN DISTRIBUTION qui succombe sera condamné aux dépens.
Il se trouve ainsi infondé en ses prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Au vu des circonstances de l'espèce, il serait inéquitable de laisser supporter à la SA PHOCEOR l'intégralité des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.
Le GIE EVEN DISTRIBUTION sera condamné à lui verser la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,
CONFIRME l'ordonnance rendue par le juge commissaire du tribunal de Marseille en date du 26 novembre 2020 ;
DÉCLARE le GIE EVEN DISTRIBUTION infondé en ses prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE le GIE EVEN DISTRIBUTION à verser à la SA PHOCEOR la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE le GIE EVEN DISTRIBUTION aux dépens lesquels seront distraits au profit de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats, par application de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
Chambre 3-2
ARRÊT AU FOND
DU 29 AOUT 2024
N° 2024/189
Rôle N° RG 20/12410 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGUNL
G.I.E. EVEN DISTRIBUTION
C/
SOCIETE PHOCEOR
SAS LES MANDATAIRES
SELAS JFAJ
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Joseph MAGNAN
Me Sébastien BADIE
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Juge commissaire de [Localité 4] en date du 26 Novembre 2020 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2019M08816.
APPELANTE
G.I.E. EVEN DISTRIBUTION
dont le siège social est sis [Adresse 5], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité audit siège,
représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
INTIMEES
SOCIETE PHOCEOR
immatriculée au RCS de Marseille sous le n° 381 053 339 dont le siège social est sis [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité audit siège,
représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
SAS LES MANDATAIRES
Prise en la personne de Me [T] [F], agissant en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SA PHOCEOR, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
SELAS JFAJ
Représenté par Maître [H] [N], agissant en sa qualité d'administrateur judiciaire au redressement judiciaires de la SA PHOCEOR
demeurant Administrateurs Judiciaires - [Adresse 1]
représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 05 Juin 2024 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre
Madame Muriel VASSAIL, Conseiller
Madame Agnès VADROT, Conseiller rapporteur
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Août 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Août 2024,
Signé par Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre et Madame Chantal DESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par jugement en date du 19 juin 2019, le tribunal de commerce de Marseille a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SA PHOCEOR. La SAS LES MANDATAIRES représentée par Maître [T] [F] a été désignée en qualité de mandataire judiciaire et la SELARL JFAJ, en qualité d'administrateur judiciaire.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 juillet 2019, le GIE EVEN DISTRIBUTION a déclaré à titre chirographaire une créance de 15 534 euros se décomposant comme suit :
- 1 200 euros au titre d'une facture n° 9853597 du 12 avril 2019,
- 9 047,62 euros au titre d'une facture n° 9854192 du 26 avril 2019,
- 5 286,38 euros au titre d'une facture n° 9855905 du 26 juillet 2019.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 octobre 2019, Maître [F] ès qualités a informé le GIE EVEN DISTRIBUTION de l'existence d'une contestation au motif qu'il avait été procédé au règlement de la créance par compensation, sans autorisation du juge commissaire.
Le GIE EVEN DISTRIBUTION a maintenu sa déclaration de créance en expliquant :
- que la société PHOCEOR avait signé des contrats cadre aux termes desquels il était expressément permis au GIE de procéder au recouvrement direct, par compensation de toutes sommes que pourrait devoir le fournisseur audit GIE,
- que c'est à ce titre qu'il entendait, ainsi que ses membres, se prévaloir de la compensation intervenue entre les différentes créances connexes,
- qu'il résultait de la jurisprudence constante que le créancier qui souhaitait invoquer la compensation des créances devait avoir, préalablement, effectué une déclaration de créance.
Par ordonnance en date du 5 mars 2020, le juge commissaire a rejeté la requête du GIE EVEN DISTRIBUTION tendant à voir constater qu'il avait valablement déclaré sa créance au passif de la procédure collective de la société PHOCEOR, l'existence de contrats-cadres entre les parties prévoyant expressément la compensation entre les créances réciproques, la connexité entre les créances respectives s'inscrivant dans un courant d'affaires régulier et aux fins d'autoriser la compensation pratiquée par ses soins dans les conditions dans lesquelles elle est intervenue.
Il a motivé sa décision par le fait qu'aucun accord du juge commissaire n'avait été préalablement donné à cette compensation qui n'était pas une compensation légale s'appuyant sur la réciprocité des relations personnelles entre les parties mais reposait sur le seul lien d'interdépendance reliant les créances connexes.
Par ordonnance en date du 26 novembre 2020, le juge commissaire du tribunal de commerce de Marseille, saisi de la contestation, a rejeté la créance déclarée par le GIE EVEN DISTRIBUTION pour un montant de 15 534 euros au passif de la procédure collective de la SA PHOCEOR au motif que celle-ci avait fait l'objet d'une compensation irrégulière rejetée par le juge commissaire en date du 5 mars 2020 et non remboursée à la SA PHOCEOR.
Par déclaration en date du 11 décembre 2020, le GIE EVEN DISTRIBUTION a interjeté appel de cette décision.
Par ordonnance d'incident en date du 17 novembre 2022, le conseiller de la mise en état a rejeté l'exception d'irrecevabilité de l'appel soulevée par la SA PHOCEOR, la SAS LES MANDATAIRES et la SELAS JFAJ ès qualités.
Par conclusions déposées et notifiées par RPVA en date du 29 juillet 2021, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, le GIE EVEN DISTRIBUTION demande à la cour, au visa des articles L.622-7, L.622-27, L.624-2, L.641-3, R.624-1 du code de commerce, 1347 et suivants du code civil, de :
- réformer l'ordonnance du juge commissaire au redressement judiciaire de la société PHOCEOR du 26 novembre 2020 ;
- fixer sa créance au passif du redressement judiciaire de la société PHOCEOR à la somme de 15 534 euros à titre chirographaire ;
- constater l'existence de contrats-cadre entre les parties prévoyant la compensation ;
- dire et juger que la compensation légale s'est opérée entre les créances connexes réciproques;
Subsidiairement,
- prononcer cette compensation ;
- débouter la SAS LES MANDATAIRES ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société PHOCEOR, la SELARL JFAJ ès qualités d'administrateur judiciaire de la société PHOCEOR de toutes prétentions contraires et de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;
- condamner la société PHOCEOR et la SELARL JFAJ ès qualités d'administrateur judiciaire de cette société à lui verser une indemnité de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non répétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ;
- condamner la société PHOCEOR et la SELARL JFAJ ès qualités aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés par Maître MAGNAN, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Après avoir rappelé que l'ordonnance du juge commissaire du 5 mars 2020 avait fait l'objet d'un recours toujours pendant devant le tribunal de commerce de Marseille, l'appelant soutient que la compensation contestée s'est bien opérée entre les créances connexes et réciproques.
Il expose ainsi que des contrats cadres et leurs annexes d'application ont été signés pour les années 2018 et 2019 par la société PHOCEOR laquelle a donc expressément accepté le mécanisme de la compensation qu'ils prévoyaient; qu'en l'espèce, la compensation s'est opérée régulièrement sans qu'il n'y ait à solliciter l'autorisation préalable du juge commissaire.
Il rappelle les dispositions de l'article L. 622-7 I alinéa 1, dont il résulte que le jugement d'ouverture de la procédure collective emporte interdiction de payer les créances nées antérieurement, à l'exception du paiement par compensation des créances connexes et déduit de la jurisprudence existante en cette matière que c'est à bon droit qu'il a sollicité l'admission de sa créance au passif du redressement judiciaire de la société PHOCEOR puis que soit reconnue la compensation entre les créances connexes en application des contrats-cadre.
Par conclusions déposées et notifiées par RPVA en date du 02 décembre 2022, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, la SA PHOCEOR, la SAS LES MANDATAIRES et la SELAS JFAJ ès qualités de mandataire et d'administrateur au redressement judiciaire de la SA PHOCEOR demandent à la cour de :
- confirmer l'ordonnance du juge commissaire du tribunal de commerce de Marseille en date du 26 novembre 2020 ;
- rejeter la créance de EVEN DISTRIBUTION inscrite sous le n°21 sur la liste des créances déposées au greffe de 15 534 euros à titre chirographaire échu ;
- condamner la société EVEN DISTRIBUTION à 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Les intimés soutiennent que la créance déclarée a fait l'objet d'une compensation irrégulière. Ils exposent ainsi que celle-ci, qui a eu lieu avant d'être autorisée par le juge commissaire, n'est pas une compensation légale qui s'appuie sur la réciprocité des relations personnelles entre les parties à la compensation et où chacune d'elle est à la fois créancier et débiteur de l'autre, mais d'une compensation qui repose sur le seul lien d'interdépendance qui relie les créances connexes et qui permet leur extinction commune dès lors qu'elles sont réciproques à l'égard d'une seule et même partie.
Ils relèvent que l'ordonnance en date du 5 mars 2020 ayant rejeté la requête du GIE EVEN DISTRIBUTION, faute d'accord préalable du juge commissaire, n'a fait l'objet d'aucun recours et que le GIE EVEN DISTRIBUTION n'a pas procédé au remboursement de la somme due à la société PHOCEOR.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 mai 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Dans son ordonnance du 26 novembre 2020, sur lequel porte l'appel dont la cour est saisie, le juge commissaire du tribunal de commerce de Marseille a rejeté la créance déclarée par le GIE EVEN DISTRIBUTION pour un montant de 15 534 euros au motif que celle-ci avait fait l'objet d'une compensation irrégulière, rejetée par le juge commissaire dans son ordonnance en date du 5 mars 2020.
Il résulte des éléments de la procédure que cette ordonnance a fait l'objet d'un recours devant le tribunal de commerce de Marseille lequel a, dans son jugement du 3 mars 2021, ordonné le retrait du rôle à la demande conjointes des parties ayant invoqué des discussions en cours.
Il n'est justifié d'aucun rétablissement de l'affaire.
Les intimés versent en revanche aux débats un certificat de non recours délivré le 29 août 2022 par le greffier du tribunal de commerce de Marseille lequel certifie que l'ordonnance n°2020M00881 rendue le 5 mars 2020 n'a fait l'objet d'aucun recours dans le délai imparti à l'article R.621-21 du code de commerce.
Il s'en déduit que l'argumentation développée par l'appelant se heurte à l'autorité de la chose jugée.
En tout état de cause, la cour statuant dans les limites de la compétence du juge commissaire saisi en matière de vérification des créances, n'a pas le pouvoir d'apprécier, comme il le lui est demandé, la régularité de la compensation, objet de l'instance ayant donné lieu à l'ordonnance du 5 mars 2020, dont le caractère définitif résulte du certificat de non recours délivré par le greffe.
L'ordonnance rendue le 26 novembre 2020 par le juge commissaire du tribunal de commerce de Marseille, sera en conséquence confirmée.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Le GIE EVEN DISTRIBUTION qui succombe sera condamné aux dépens.
Il se trouve ainsi infondé en ses prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Au vu des circonstances de l'espèce, il serait inéquitable de laisser supporter à la SA PHOCEOR l'intégralité des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.
Le GIE EVEN DISTRIBUTION sera condamné à lui verser la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,
CONFIRME l'ordonnance rendue par le juge commissaire du tribunal de Marseille en date du 26 novembre 2020 ;
DÉCLARE le GIE EVEN DISTRIBUTION infondé en ses prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE le GIE EVEN DISTRIBUTION à verser à la SA PHOCEOR la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE le GIE EVEN DISTRIBUTION aux dépens lesquels seront distraits au profit de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocats, par application de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE