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Décisions

CA Rouen, ch. civ. et com., 29 août 2024, n° 22/03972

ROUEN

Arrêt

Autre

CA Rouen n° 22/03972

29 août 2024

N° RG 22/03972 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JHSE

COUR D'APPEL DE ROUEN

CH. CIVILE ET COMMERCIALE

ARRET DU 29 AOÛT 2024

DÉCISION DÉFÉRÉE :

17/00727

Tribunal judiciaire du Havre du 06 octobre 2022

APPELANTE :

S.A.S. FONDS COMMUN DE TITRISATION HUGO CREANCES III ayant pour société de gestion, la société EQUITIS GESTION SAS représenté par son recouvreur la société MCS ET ASSOCIES

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Mathieu LECLERC, avocat au barreau du HAVRE

INTIMEE :

Madame [Z] [N] épouse [P]

née le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 7]

[Adresse 5]

[Localité 4]

représentée par Me Claude AUNAY de la SCP AUNAY, avocat au barreau du HAVRE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 14 mars 2024 sans opposition des avocats devant Mme MENARD-GOGIBU, conseillère, rapporteur.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

Mme FOUCHER-GROS, présidente

M. URBANO, conseiller

Mme MENARD-GOGIBU, conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme RIFFAULT, greffière

DEBATS :

A l'audience publique du 14 mars 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 16 mai 2024 puis prorogé à ce jour.

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 29 août 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme FOUCHER-GROS, présidente et par Mme RIFFAULT, greffière.

*

* *

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Par acte sous seing privé du 24 avril 2009, la SARL Publi Concept Services a ouvert dans les livres de la Bred Banque Populaire un compte professionnel [XXXXXXXXXX06].

Par acte sous seing privé du 19 juin 2009, Madame [Z] [N] épouse [P] s'est portée caution solidaire de cette société au titre du compte courant dans la limite de 18.000 euros couvrant le paiement du principal, les intérêts et le cas échéant les pénalités ou intérêts de retard pour une période de trente mois.

Par jugement du 1er octobre 2010, le tribunal de commerce du Havre a ouvert à l'encontre de la société Publi Concept Services une procédure de liquidation judiciaire. Maître [L] a été désignée en qualité de mandataire judiciaire.

Le 16 novembre 2010, la Bred Banque Populaire a procédé à la déclaration de sa créance au titre du solde débiteur du compte [XXXXXXXXXX06], pour la somme de 24.623,83 euros.

Par correspondance du 24 novembre 2010, la Bred Banque Populaire a écrit à Madame [N] pour l'informer avoir procédé à la déclaration de sa créance entre les mains du mandataire liquidateur de la SARL Publi Concept Services et l'a mise en demeure de régler la somme de 18.000 euros au titre de ses engagements de caution.

Par correspondance du 15 décembre 2010, la Bred Banque Populaire a accepté la proposition de Madame [N] d'un règlement de 300 euros mensuel à compter du 15 janvier 2011 jusqu'au 15 décembre 2011 inclus.

Le 15 avril 2012, les époux [P] ont écrit à la Bred Banque Populaire pour maintenir un règlement mensuel à hauteur de 300 euros.

A compter du mois d'avril 2014, Madame [N] a cessé de procéder au règlement des échéances mensuelles convenues.

Le 19 novembre 2014, la société Bred Banque Populaire a écrit à Madame [N] pour lui rappeler ses engagements.

Le 1er juillet 2015, une convention de cession de créances portant notamment sur la créance détenue par l'organisme bancaire à l'encontre de la SARL Publi Concept Services a été régularisée entre la société Bred Banque Populaire et le Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III (ci-après FCT).

Par courrier du 10 décembre 2015, Madame [N] a été mise en demeure de procéder, sous huit jours, au règlement de la somme de 13.404,08 euros.

Une requête aux fins d'injonction de payer a été déposée le 26 décembre 2016 devant le président du tribunal de grande instance du Havre.

Par ordonnance du 20 février 2017, Madame [N] a été enjointe de procéder au règlement de la somme de 9.803,64 euros.

Cette ordonnance lui a été signifiée le 1er mars 2017.

Madame [N] a formé opposition le 30 mars 2017.

Par jugement du 6 octobre 2022, le tribunal judiciaire du Havre a :

- rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir,

- déclaré les demandes du Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III ayant pour société de gestion la société Equitis Gestion recevables,

- débouté [Z] [N] de sa demande visant à ordonner la production d'un listing complet des agios, frais débités du compte depuis la dernière information, avec les relevés de compte de la société Publi Concept Services,

- débouté le Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III ayant pour société de gestion la société Equitis Gestion de sa demande en paiement,

- condamné le Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III ayant pour société de gestion la société Equitis Gestion à régler à [Z] [N] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III ayant pour société de gestion la société Equitis Gestion aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Le Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 9 décembre 2022.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 mars 2024.

EXPOSE DES PRETENTIONS

Vu les conclusions du 31 août 2023, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens du Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III qui demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

- déclaré les demandes du Fonds Commun de Titrisation Hugo Créances III ayant pour société de gestion, la Société Equitis Gestion recevables,

- débouté Madame [Z] [N] de sa demande visant à ordonner la production d'un listing complet des agios, frais débités du compte depuis les dernières informations, avec les relevés de compte de la Société Publi Concept Services,

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

- débouté le Fonds Commun de Titrisation Hugo Créances III ayant pour Société de Gestion la Société Equitis Gestion de sa demande en paiement de 13 956,96 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2017 jusqu'au jour du parfait paiement,

- condamné le Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III ayant pour Société de Gestion la Société Equitis Gestion à régler à Madame [Z] [N] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III ayant pour Société de Gestion la Société Equitis Gestion aux dépens.

Statuant à nouveau :

- condamner Madame [Z] [N] épouse [P] à payer au Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III représenté par la société GTI Asset Management, la somme de 13 956,96 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2017 jusqu'au jour du parfait paiement,

- ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

- débouter Madame [Z] [P] de son appel incident tendant à voir déclaré irrecevable le Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III venant aux droits de la Bred Banque Populaire irrecevable et à ce que soit ordonné avant-dire droit un listing complet des agios, frais débités du compte depuis la dernière information avec les relevés du compte de la Société Publi Concept Services,

- condamner Madame [Z] [P] au paiement d'une somme de 2 500,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions du 6 juin 2023, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de Madame [Z] [N] épouse [P] qui demande à la cour de :

- ordonner la jonction des instances 22/03979 (Monsieur [P]) et 22/03972 (Madame [P]),

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III de ses demandes tendant à la condamnation de Monsieur et Madame [P] au paiement de 13 956,96 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2017 jusqu'au jour du parfait paiement et l'a condamné à payer à chacun des défendeurs la somme de 1 500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

Subsidiairement, recevant les époux [P] en leur appel,

- infirmer le jugement entrepris,

- dire et juger le Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III, venant aux droits de la Bred Banque Populaire, irrecevable en ses demandes,

- ordonner avant-dire droit au Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III, de produire un listing complet des agios, frais débités du compte depuis la dernière information, avec les relevés de compte de la société Publi Concept Services, (en l'espèce depuis le 19 juin 2009) qui seront imputés au découvert allégué, seulement à l'égard de la caution, sauf à ce que les agios et autres frais, sur une longue période, dépassent déjà le capital pouvant être réclamé à la caution.

Y ajoutant,

- le condamner au paiement de la somme de 3 000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à chacun des intimés ainsi qu'aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Il n'y a pas lieu d'ordonner la jonction des procédures n° 22/03972 et n° 22/03979 qui ne conernent pas les mêmes parties.

A titre liminaire, la cour relève que Madame [N] sollicite la confirmation du jugement qui a débouté le Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III de sa demande en paiement. Elle a «subsidiairement » formé un appel incident demandant l'infirmation du jugement entrepris, et elle sollicite, en premier lieu, que les demandes du Fonds Commun de Titrisation Hugo Créances III soient dites irrecevables, et en deuxième lieu, qu'il lui soit ordonné, avant-dire droit, de produire un listing complet des agios, frais débités du compte depuis la dernière information, avec les relevés de compte de la société Publi Concept Services.

Quand bien même l'appel incident est formé ''subsidiairement'' et dès lors qu'il porte sur la fin de non-recevoir rejetée par les premiers juges, il convient de statuer en premier lieu sur cette demande.

Sur la fin de non-recevoir tiré du défaut de qualité à agir du fonds de titrisation Hugo Créances III

Moyens des parties

Madame [N] soutient que :

* l'acte de cession ne mentionne que des numéros, sans mention d'un montant de créance, une origine, une date, le nom des cautions ;

* les époux [P] ne sont pas en mesure de savoir si une convention a été passée avec une société chargée de la gestion du fonds de titrisation lui donnant qualité ou si la Bred continue a avoir seule qualité pour assurer le recouvrement des créances ;

* l'information de la cession de créance du 1er juillet 2015 a été faite le 21 novembre 2018 ce qui interroge sur la régularité de la procédure ; cette notification informe les époux [P] que la société Bred a cédé la créance au FCT représenté par GTI AM, que la Bred n'assure plus le recouvrement de la créance, que GTI AM a désigné la société MCS pour assurer le suivi et le recouvrement de la créance ;

* tant l'ordonnance du 4 octobre 2017 que la loi Pacte du 22 mai 2019 sont postérieures aux faits de l'espèce.

Le FCT réplique que :

* conformément aux dispositions de l'article 126 du code de procédure civile, il convient de se placer au jour où le juge statue pour déterminer si la représentation du fonds est conforme aux dispositions de l'article L 214-172 du code monétaire et financier ;

* les modifications législatives intervenues au visa de ce texte, modifié par l'ordonnance du 4 octobre 2017 puis la loi du 22 mai 2019 d'application immédiate à la présente espèce, confèrent à la société de gestion qualité légale pour assurer le recouvrement des créances cédées sans avoir à justifier d'une convention lui transférant le droit de poursuivre le recouvrement judiciaire des créances cédées ;

* depuis le 30 juin 2020, la société Equitis Gestion est la société de gestion du fonds de titrisation Hugo Créances III et elle a donné mandat à la société MCS & associés qui la représente dans la présente instance ce dont Madame [P] a été informée par courrier du 8 juillet 2020.

Réponse de la cour

L'article 122 du code de procédure civile dispose que ''constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.''

Aux termes de l'article 126 alinéa 1 de ce code, '' Dans le cas où la situation donnant lieu à une fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue.''

En application de ce texte lorsqu'une loi, entrée en vigueur en cours d'instance, confère qualité à agir à une partie qui en était initialement dépourvue, la fin de non-recevoir doit être écartée car régularisée, au moment où le juge statue.

Au soutient de la fin de non-recevoir, Madame [N] expose que l'acte de cession ne mentionne que ''des numéros, sans mention d'un montant de créance, une origine, une date, le nom des cautions'' ce qui est relatif à l'identification de la créance et à son existence et non à la qualité à agir du fonds de titrisation de sorte qu'il convient d'écarter ce moyen inopérant à démontrer un défaut de qualité à agir.

Le fonds commun de titrisation Hugo Créances III n'est pas doté de la personnalité morale. Aux termes de l'article L 214-183 du code monétaire et financier, il est géré par une société de gestion qui le représente à l'égard des tiers et dans toute action en justice.

Il résultait des dispositions combinées des articles L.214-46, L.214-49-4 et L214-49-7 du code monétaire et financier, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2013-676 du 25 juillet 2013, que la société de gestion d'un fonds de titrisation n'avait pas qualité pour agir en recouvrement des créances qui avaient été cédées à celui-ci par bordereau, sauf si elle avait été désignée à cet effet et si le débiteur en avait été informé par lettre simple, ce dont il résultait qu'en l'absence de l'une de ces conditions, l'action de la société de gestion, contre le débiteur cédé, était irrecevable.

L'article L. 214-172 du code monétaire et financier entré en vigueur le 3 janvier 2018 confère à la société de gestion, en tant que représentant légal du fonds, qualité légale pour assurer, y compris par la voie d'une action en justice, directement ou confiée par elle à une autre entité désignée à cet effet tout ou partie du recouvrement des créances transférées dès lors que le débiteur en est informé par lettre simple.

Cette qualité légale de la société de gestion pour assurer le recouvrement des créances directement ou confiée par elle à une autre entité est reprise dans ce même article dans sa version en vigueur depuis le 24 mai 2019 dans les termes qui suivent :

'' Lorsque des créances, autres que des instruments financiers, sont transférées à l'organisme de financement, leur recouvrement continue d'être assuré par le cédant ou par l'entité qui en était chargée avant leur transfert dans des conditions définies soit par une convention passée avec la société de gestion de l'organisme, soit par l'acte dont résultent les créances transférées lorsque l'organisme devient partie à cet acte du fait du transfert desdites créances. Toutefois, à tout moment, tout ou partie du recouvrement de ces créances peut être assuré directement par la société de gestion en tant que représentant légal de l'organisme ou peut être confié par elle, par voie de convention, à une autre entité désignée à cet effet.

(')

En cas de changement de toute entité chargée du recouvrement en application des premier et deuxième alinéas, chaque débiteur concerné est informé de ce changement par tout moyen, y compris par acte judiciaire ou extrajudiciaire.

(...)

Par dérogation au premier alinéa de l'article L. 214-183, dans tous les cas où tout ou partie de la gestion ou du recouvrement de tout élément d'actif n'est pas effectué directement par la société de gestion mais par une entité tierce en application du présent article, cette entité peut représenter directement l'organisme dans toutes les actions en justice liées à la gestion et au recouvrement de l'actif, y compris toute déclaration de créance et toute mesure d'exécution, sans qu'il soit besoin qu'elle obtienne un mandat spécial à cet effet ni qu'elle mentionne la société de gestion dans les actes. La société de gestion, en sa qualité de représentant légal de l'organisme, conserve la faculté d'agir au nom et pour le compte de l'organisme, en demande ou en défense, au titre de ces actions ou d'accomplir tout acte ou de signer tout document avec tout tiers, y compris les débiteurs ou les emprunteurs, en relation avec la gestion ou le recouvrement sans qu'il soit nécessaire de résilier ou de dénoncer au préalable le mandat de gestion ou de recouvrement ou d'en informer quelque tiers que ce soit.(...)''

Il résulte de ce texte que la société de gestion d'un fonds commun de titrisation qui a qualité légale pour assurer tout ou partie du recouvrement des créances cédées à ce fonds, ou en le confiant à une autre entité désignée à cet effet doit en informer chaque débiteur par tout moyen, cette information pouvant résulter de l'assignation délivrée au débiteur aux fins de recouvrement et elle n'a pas à être communiquée préalablement au recouvrement.

L'irrecevabilité de l'action de la société de gestion d'un fonds de titrisation tirée de l'absence de désignation expresse et d'information du débiteur peut en application des dispositions de l'article 126 du code de procédure civile, donner lieu à régularisation par la seule entrée en vigueur de la disposition légale précitée.

La société de gestion qui a dès lors qualité légale pour assurer ou faire assurer le recouvrement n'a pas à être spécialement désignée à cette fin.

Cet article dans sa nouvelle version s'applique au cas présent en ce que l'instance en recouvrement engagée par la requête en injonction de payer du 26 décembre 2016 est toujours en cours.

Cette requête en injonction de payer dirigée contre Madame [N] émane du FCT, représenté par la société de gestion GTI et son mandataire la société MCS.

Par acte extra-judiciaire du 1er mars 2017, l'ordonnance du 20 février 2017 portant injonction de payer a été signifiée à la demande de FCT Hugo Créances III représenté par la société de gestion GTI à Madame [N], ordonnance dont il a fait opposition.

Par lettre du 21 novembre 2018, la société GTI a informé Madame [N] de la cession de la créance détenue par la banque Populaire Bred au FCT représenté par GTI AM en qualité de société de gestion et de la désignation de la société MCS et Associés chargée de la mission de recouvrement de la créance.

Puis par lettre du 8 juillet 2020, la société Equitis Gestion a informé Madame [N] en ces termes : '' (') la société Equitis gestion est depuis le 30 juin 2020 la société de gestion du FCT Hugo Créances III en lieu et place de la société GTI Asset. Nous vous informons en outre que, conformément à l'article 214-172 alinéa 6 du code monétaire et financier, la société MCS et Associés est désignée en qualité de recouvreur du FCT Hugo Créances III. A ce titre, la société MCS et Associés peut représenter seule et directement le fonds dans tous les actes liés à la gestion et au recouvrement des créances cédées au fonds, ainsi que toute action en justice et mesure d'exécution (').

Ces courriers font ainsi ressortir l'existence d'une convention confiant à la société MCS & associés le recouvrement des créances cédées au FCT Hugo Créances III.

Il s'ensuit qu'au cours de la présente procédure engagée le 26 décembre 2016 et pendante devant la cour, la société GTI Asset puis la société Equitis représentant le FCT ont été dotées de la qualité légale pour assurer en tout ou partie le recouvrement des créances cédées et pour le confier à une autre entité soit à la société MCS & Associés ce dont Madame [N] a été informée par les courriers des 21 novembre 2018 et 8 juillet 2020 portant tant sur la cession de créance que sur le nom de l'entité chargée du recouvrement de sorte que la fin de non-recevoir pour défaut de qualité à agir a disparu avant qu'il ne soit statué. Ainsi la signification le 1er mars 2017 de l'ordonnance du 20 février 2017 est parfaitement valable.

Par conséquent le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir

Sur la fin de non-recevoir tiré de la prescription

Moyens des parties

Madame [N] soutient que :

* les ordonnances du 20 février 2017 sont dépourvues d'effet interruptif de prescription puisque leur signification n'est pas régulière ; elles n'ont pas pu faire renaître une créance prescrite ;

* le FCT ne justifie pas de l'admission de la déclaration de créance de la Bred, de son rejet, de la dispense de vérification en sorte qu'il est encore irrecevable ; la déclaration est toujours requise si le créancier entend percevoir au moins une partie de sa créance ; une créance rejetée doit être considérée comme dépourvue d'existence ;

* la règle de l'arrêt des poursuites individuelles posée par l'article L. 622-21 du code de commerce est sans application à l'encontre de la caution ; l'interruption de l'instance engagée contre le débiteur, du fait de son jugement d'ouverture, n'emportera pas interruption de l'instance engagée contre la caution ;

* la suspension des actions contre les cautions n'existe que pendant la période d'observation ; en l'espèce, le débiteur a été placé immédiatement et directement en liquidation judiciaire ;

* le paiement de mensualités par les cautions ne vaut reconnaissance que des mensualités payées et non de la dette.

Le FCT réplique que :

* La Bred Banque Populaire a déclaré sa créance au passif de la procédure collective, son effet interruptif à l'égard de la caution se poursuit jusqu'à la date de clôture de la procédure collective ; la Banque n'est tenue que de procéder à la déclaration ;

* Madame [N] ne justifie aucunement d'une éventuelle décision de rejet de la créance déclarée par la Bred ;

* l'ordonnance d'injonction de payer du 20 février 2017 signifiée le 1er mars 2017 ne portait aucunement sur une créance prescrite ;

* Monsieur et Madame [P] ont effectué des règlements jusqu'au 16 avril 2014 ; ils ont reconnu leurs obligations à l'égard de leur créancier ce qui a interrompu la prescription.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 2224 du code civil, ''les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.''

Aux termes de l'article 2240 de ce code, ''la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription.''

Aux termes de l'article 2241 du même code, ''la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription (')''

Aux termes de l'article 2242 du même code, '' L'interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance.''

A l'appui de cette fin de non-recevoir, Madame [N] soutient que le FCT ne justifie pas de l'admission de la déclaration de créance de la Bred, de son rejet, de la dispense de vérification, ce qui n'est pas relatif à la prescription de la créance mais à son existence de sorte qu'il convient d'écarter ce moyen inopérant.

La déclaration de créance au passif de la liquidation judiciaire du débiteur principal interrompt la prescription à l'égard de la caution sans qu'il soit besoin d'une notification.

La déclaration de créance équivaut à une demande en justice dont l'effet interruptif se poursuit jusqu'à la date de clôture de la procédure collective.

Le fait que le passif déclaré n'ait pas fait l'objet d'une vérification et par suite d'une décision d'admission est indifférente sur la validité de la créance de la Banque qui n'est tenue que de procéder à sa déclaration.

Par ailleurs, la suspension des poursuites à l'encontre de la caution qui prend fin à l'issue de la période d'observation n'a aucune incidence sur l'interruption de la prescription par la déclaration de la créance et la reprise du cours de la prescription à la date de la clôture de la procédure collective.

La Société Publi Concept Services a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce du Havre du 1er octobre 2010.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 16 novembre 2010 reçu le 19 novembre 2010 par le mandataire judiciaire, la Bred Banque Populaire a déclaré sa créance au passif de la procédure collective de la société Publi Concept au titre du solde débiteur du compte professionnel pour la somme de 24.623,83 euros ce qui a eu pour effet d'interrompre le délai de prescription de la créance de la banque à l'égard de Madame [N] et ceci jusqu'à la clôture de la procédure collective prononcée le 10 octobre 2012 ainsi qu'il ressort de la publication faite au BODACC le 30 octobre 2012 marquant ainsi un nouveau point de départ du délai de prescription de cinq ans à compter du 10 octobre 2012 s'achevant le 10 octobre 2017.

Avant même l'ouverture de ce nouveau délai de prescription de cinq ans, Madame [N] a par un courrier recommandé du 15 avril 2012 avec pour objet intitulé ''remboursement caution Publi concept service'' sollicité le maintien de l'échéancier accordé par la Banque Bred par mensualités de 300 euros et il est mentionné sur le décompte arrêté au 14 avril 2017 produit par le FCT que des versements ont été effectués jusqu'au 16 avril 2014. Il en résulte que Madame [N] a reconnu son obligation à l'égard de la banque et elle a effectué des versements réguliers jusqu'à cette dernière date qui a eu pour effet d'interrompre là encore la prescription quinquennale marquant un nouveau point de départ du délai de prescription de cinq ans s'achevant le 16 avril 2019 et ceci pour la totalité de la créance de la banque.

Par ailleurs, l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 20 février 2017 a été signifiée à Madame [N] le 1er mars 2017 ce qui équivaut à une citation en justice ayant eu pour effet d'interrompre la prescription et de faire courir un nouveau délai de prescription de cinq ans à compter de cette date pour s'achever le 1er mars 2022.

Et Madame [N] a formé opposition contre cette ordonnance du 20 février 2017 par lettre de son conseil du 30 mars 2017 ainsi que mentionné dans l'exposé du litige du jugement entrepris.

Il s'ensuit que le 15 avril 2012, le délai de prescription de cinq ans a été interrompu par la reconnaissance par Madame [N] du droit de FCT en procédant à des paiements jusqu'au 16 avril 2014 faisant courir un nouveau délai de prescription de cinq ans jusqu'au 16 avril 2019, délai au cours duquel sont intervenus d'autres actes interruptifs de prescription soit le 1er mars 2017 par la signification de l'ordonnance d'injonction de payer du 20 février 2017, puis le 30 mars 2017 par l'opposition à l'encontre de cette ordonnance qui a donné lieu au jugement entrepris du 6 octobre 2022 de sorte que l'instance étant toujours en cours, la créance de FCT n'est pas prescrite.

Par conséquent, le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré les demandes du Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III ayant pour société de gestion la société Equitis Gestion recevables.

Sur l'obligation d'information de la caution et le montant de créance du FCT

Moyens des parties

FCT soutient que :

* la créance réclamée tient compte des sanctions édictées par l'article L313-22 du code monétaire et financier ; il est produit l'historique et les modalités d'imputation des règlements effectués laquelle est conforme aux dispositions de l'article L 313-22 du code monétaire et financier ;

* les règlements ont été imputés sur le principal, déduction faite des intérêts au taux légal dont Madame [P] est redevable ;

* la question de savoir si des agios et des frais ont été intégrés au solde débiteur du compte est totalement indifférente dès lors que la sanction du non-respect de l'obligation d'information annuelle porte exclusivement sur la déchéance des intérêts conventionnels ;

* le compte courant a été clôturé lors de la liquidation judiciaire du 1er octobre 2010 ; seul le solde débiteur a été réclamé, sans mention des intérêts si bien qu'aucun intérêt conventionnel n'a été mis à la charge de la caution, hormis les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure que la banque est en droit d'obtenir ;

* le montant de l'engagement de caution de Madame [N] s'élevait à 18.000 euros ; selon le décompte arrêté à la date du 14 avril 2017, la créance s'élève à la somme de 13.956,96 euros.

Madame [N] réplique que :

* il n'y a eu aucune information annuelle des cautions ;

* la règle relative à la déchéance des intérêts pour non-respect de l'obligation annuelle d'information portant sur le montant des encours est applicable aux agios ; sur un découvert en compte, il convient d'imputer sur le solde débiteur réclamé à la caution tous les agios inscrits au débit du compte pendant la période pendant laquelle l'information prescrite a fait défaut ;

* l'inobservation de l'information de la caution avant le 31 mars de chaque année est aussi sanctionnée par l'affectation de tous les paiements effectués par le débiteur principal, dans les rapports entre la caution et l'établissement prioritairement au règlement du principal de la dette ;

* en cas de cautionnement limité d'un compte courant, les agios dont le créancier est déchu s'imputent sur le montant de l'engagement de la caution et non sur le solde débiteur du compte.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 2293 du code civil dans sa version en vigueur du 24 mars 2006 au 1er janvier 2022 , '' le cautionnement indéfini d'une obligation principale s'étend à tous les accessoires de la dette, même aux frais de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution.

Lorsque ce cautionnement est contracté par une personne physique, celle-ci est informée par le créancier de l'évolution du montant de la créance garantie et de ces accessoires au moins annuellement à la date convenue entre les parties ou, à défaut, à la date anniversaire du contrat, sous peine de déchéance de tous les accessoires de la dette, frais et pénalités.''

Madame [N] s'est engagée le 19 juin 2019 comme caution solidaire envers la banque au titre du compte courant professionnel ouvert par la société Publi Concept Services dans la limite de 18 000 euros couvrant le paiement du principal, les intérêts et le cas échéant les pénalités ou intérêts de retard pour une période de trente mois.

Son engagement n'étant pas un engagement indéfini, elle ne peut valablement se prévaloir de l'article 2293 alinéa 2 du code civil et de la sanction spécifique qui s'y attachant.

Il résulte des dispositions des articles L 341-6 du code de la consommation en vigueur du 5 février 2004 au 1er juillet 2016 et L 332-2 et L 343-6 de ce code dans leur version en vigueur au 1er juillet 2016 jusqu'au 1er janvier 2022 que ''le créancier professionnel est tenu de faire connaître à la caution, personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente, au titre de l'obligation garantie ainsi que le terme de cet engagement. A défaut, la caution

ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information.''

Il résulte des dispositions de l'article L 313-22 du code monétaire et financier dans ses versions applicables du 7 mai 2005 au 1er janvier 2022 que cette même obligation d'information à l'égard de la caution pèse dans les mêmes conditions sur les établissements de crédit et depuis le 1er janvier 2014 sur les sociétés de financement, la sanction étant la déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Par ailleurs, il est prévu que les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.

L'engagement de caution datant du 19 juin 2009, l'obligation annuelle d'information devait intervenir pour la première fois avant le 31 mars 2010. Or aucune information au sens des dispositions précitées n'a été communiquée à Madame [N] par la banque puis par le FCT ce qu'admet l'appelante dès lors qu'elle conclut avoir tenu compte des sanctions édictées par les dispositions précitées et ne pas réclamer d'intérêts conventionnels en soutenant qu'elle le démontre par l'historique et les modalités d'imputation des règlements effectués.

Il s'ensuit que le FCT encourt l'ensemble des sanctions ci-dessus citées, les paiements le cas échéant faits par le débiteur principal, à savoir la société Publi Concept Services, devant par ailleurs s'imputer sur le principal de sa dette et non sur le solde débiteur du compte

Aux termes de l'article 1315 ancien du Code civil, ''Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.''

La pièce produite par le FCT pour justifier de sa créance et prétendre ne pas réclamer les intérêts conventionnels intitulée ''Décompte des sommes dues en euros par [Z] [N] en votre qualité de caution'' mentionne, au titre du compte bancaire de la société Publi Concept Services ([XXXXXXXXXX06]), un solde débiteur de 21 037,86 euros au 27 mars 2012. Ce document mentionne également les versements effectués par la caution d'un montant total de 7500 euros entre le 26 avril 2012 et le 16 avril 2014 et un solde débiteur de 13 654,18 euros arrêtés le 14 avril 2017.

Il s'agit d'un document établi par le seul FCT et non d'un relevé du compte bancaire de la société Publi Concept établi antérieurement à sa clôture le 1er octobre 2010, date indiquée dans la déclaration de créances du 16 novembre 2020 et qui aurait permis de connaître la composition du solde débiteur alors déclaré de 24.623,83 euros et notamment : d'une part les agios qui sont des intérêts débiteurs contractuels et frais y étant le cas échéant inclus ; d'autre part, les versements ayant pu être faits par la société Publi Concept depuis l'ouverture du compte courant le 29 avril 2009, les dits versements devant, dans les rapports entre la caution et l'établissement, être imputés sur le principal de la dette de ladite société et non sur le solde débiteur du compte.

Il s'ensuit que le FCT, qui ne produit pas de relevé bancaire de la société Publi Concept comportant un historique du compte courant retraçant les opérations de débit et de crédit et leur nature permettant de faire ressortir la composition de ce qui est réclamé au titre du solde débiteur du compte, ne démontre pas par le seul document établi unilatéralement et arrêté le 14 avril 2017 le bien-fondé de sa créance à l'égard de Madame [N].

C'est à bon droit que le tribunal a dit qu'il ne lui incombait pas de suppléer la carence du FCT dans l'administration de la preuve du bien-fondé de sa créance en ordonnant avant-dire droit la communication de pièces sollicitées par Madame [N].

Dès lors le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté [Z] [N] de sa demande visant à ordonner la production d'un listing complet des agios, frais débités du compte depuis la dernière information, avec les relevés de compte de la société Publi Concept Services et débouté le FCT de sa demande en paiement.

Pour le surplus de ses dispositions, le jugement sera confirmé.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne le Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III aux dépens de l'appel,

Condamne le Fonds Commun De Titrisation Hugo Créances III à payer à Madame [Z] [N] épouse [P] la somme de 2000 euros au titre de ses frais irrépétibles exposés en appel.

La greffière, La présidente,