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Décisions

CA Toulouse, 2e ch., 27 août 2024, n° 23/02867

TOULOUSE

Arrêt

Autre

CA Toulouse n° 23/02867

27 août 2024

27/08/2024

ARRÊT N° 297

N° RG 23/02867 - N° Portalis DBVI-V-B7H-PUBI

IMM / CD

Décision déférée du 25 Juillet 2023 - Tribunal de Commerce d'Albi - 2023 00035

M. VEZES

S.A.S. A2C

C/

[U] [W]

S.C.P. [Y] BRU

INFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT SEPT AOUT DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANTE

S.A.S. A2C

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par Me Jean IGLESIS, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

Madame [U] [W]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Loïc ALRAN de la SCP ALRAN PERES RENIER, avocat au barreau de TOULOUSE

PARTIE INTERVENANTE

S.C.P. [Y] BRU

prise en la personne de Maître [Y] [H], en qualité de mandataire judiciaire de la SAS A2C désignée par jugement du Tribunal d'Albi en date du 25 juillet 2023

[Adresse 5]

[Localité 1]

NON CONSTITUE

EN PRESENCE DU :

MP PG COMMERCIAL

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

31000 TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Juin 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant I. MARTIN DE LA MOUTTE, Conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseillère

M. NORGUET, conseillère

Greffier, lors des débats : A. CAVAN

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée et qui a fait connaître son avis le 29 Avril 2024.

ARRET :

- REPUTE CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par V. SALMERON, présidente, et par A. CAVAN, greffier de chambre.

Exposé des faits et procédure :

Selon acte sous-seing-privé du 28 décembre 2017, Madame [U] [W] a cédé à la société A2C la totalité des 500 parts sociales dont elle était propriétaire, qui composait l'entier capital de la Société Agroéquip, désormais Agroéquip diffusion au prix de 160 € par part, soit un total de 80 000 € qui devait être payé en 5 échéances annuelles successives de 16 000 € chacunepayables les 4 mai 2018, 4 mai 2019, 4 mai 2020, 4 mai 2021 et 4 mai 2022.

Les deux premières échéances exigibles au 4 mai 2018 et 4 mai 2019 n'ayant pas été réglées par la Société A2C, Madame [W] l'a, par courrier du 3 janvier 2020, mise en demeure de les régler, outre une somme de 6 000 € dont elle a fait l'avance au profit de la Société A2C.

Par exploit en date du 27 novembre 2020, Madame [W] a fait assigner la société A2C devant le tribunal de commerce d'Albi pour obtenir paiement des sommes dues au titre du prix de cession.

Par jugement du 23 mars 2022, le tribunal de commerce a :

- Rejeté la demande de sursis à statuer formée par la société A2C,

- Condamné la société A2C à payer à Madame [W] la somme de 64.000 €, assortie des intérêts au taux légal à compter du 03 janvier 2020, date de la mise en demeure,

- Déclaré l'intervention volontaire de la société Agroéquip Diffusion irrecevable,

- Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de provision formée par la SARL Agroéquip Diffusion,

- Dit n'y avoir lieu à statuer sur les demandes de la société A2C formées du chef de prétendues man'uvres dolosives et d'expertise,

- Condamné in solidum les sociétés A2C et Agroéquip Diffusion au paiement de la somme de 2.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens de l'instance.

Par déclaration du 23 mai 2022, la société A2C a relevé appel de ce jugement.

Par ordonnance en date du 10 novembre 2022, le conseiller de la mise en état a ordonné la radiation de l'affaire au rôle après avoir constaté le défaut d'exécution.

Par jugement en date du 25 juillet 2023, le tribunal de commerce d'Albi, saisi par Madame [W] a:

- Constaté l'état de cessation des paiements de l'entreprise et fixé la date de cessation des paiements au 25 juillet 2023,

- Prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SAS A2C.

Par déclaration en date du 02 août 2023, la société A2C a relevé appel de ce jugement.

La clôture est intervenue le 8 avril 2024

Prétentions et moyens des parties :

Vu les conclusions notifiées le 16 février 2024 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de la société A2C demandant de :

- Infirmer en son entier dispositif le jugement du tribunal de commerce d'Albi du 25 juillet 2023 dont appel,

- Débouter madame [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- Condamner madame [W] au paiement de la somme de 4 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Vu les conclusions notifiées le 29 avril 2024 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de Madame [U] [W] demandant à la cour au visa des articles L.631-1 et suivants et R.631-1 et suivants du Code du Commerce,

- Débouter la SAS A2C de l'intégralité de ses demandes,

Par conséquent,

- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 25 juillet 2023 par le Tribunal de commerce d'Albi,

- Condamner la société A2C au paiement d'une somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

La SCP [Y] Bru, appelée dans la cause par exploit signifié à personne morale n'a pas constitué avocat.

Par avis notifié aux parties par le RPVA le 29 avril 2024, le ministère public a solliicité la confirmation de la décision entreprise.

Motifs

L'article L631-1 du code de commerce conditionne l'ouverture de la procédure collective au constat de l'état de cessation des paiements défini comme l'impossibilité de faire face au passif exigible avec l'actif disponible.

Pour l'appréciation de l'état de cessation des paiements, doit être exclue du passif exigible une dette incertaine, telle la dette litigieuse résultant d'une décision faisant l'objet d'un recours devant la cour d'appel, cette décision eût-elle été assortie de l'exécution provisoire (Com., 2 mars 2022, pourvoi n° 20-22.021)

Madame [W] poursuit l'ouverture de la procédure collective de la société A2C en faisant valoir qu'elle n'a pu recouvrer le montant de sa créance au titre du prix de vente des parts sociales que la société a été condamnée à lui payer par jugement du tribunal de commerce d'Albi en date du 23 mars 2022

La société fait valoir qu'elle n'est pas en état de cessation des paiements et soutient que la créance invoquée par Madame [W], en ce qu'elle est contestée dans le cadre d'une instance actuellement pendante devant la cour d'appel, ne peut être prise en compte au titre du passif exigible.

La cour constate que la société A2C a relevé appel du jugement du tribunal de commerce d'Albi qui l'a condamnée à payer à Madame [W] la somme de 64 000 €. Cette procédure a été radiée en raison du défaut d'exécution de la condamnation par la société appelante. A ce jour, par conséquent, cette condamnation n'est pas définitive.

Pour s'opposer au paiement du prix de cession, la société A2C soutenait devant le tribunal de commerce et invoque dans le cadre de la présente action, avoir été victime d'un dol imputable à la venderesse qui lui a dissimulé des opérations irrégulières ; faux en écriture, vols et abus de confiance, réalisés au cours de l'exercice 2017 au préjudice de la société Agroéquip pour un montant d'au moins 80 000€.

Contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, dès lors que la société A2C qui a acquis de Madame [W] les parts de la société Agroéquip Diffusion invoque le comportement dolosif de la venderesse, la créance résultant du prix de vente de ces parts, contestée dans le cadre d'une instance qui n'a pas donné lieu à une décision définitive, n'est pas certaine.

Au soutien de cette contestation, la société relève d'ailleurs que par un jugement du tribunal correctionnel d'Albi du 16 novembre 2023, Madame [W] a bien été condamnée pour abus de confiance et escroquerie au préjudice de la société Agroéquip Diffusion. Dans le cadre de cette décision actuellement frappée d'appel, Madame [W] a en outre été condamnée à payer à la société Agroéquip, devenue par l'effet de la cession des titres, filiale à 100% de la société A2C, la somme de 42.019 €.

Ainsi, fut-elle assortie de l'exécution provisoire, la créance invoquée par Madame [W] demeure contestée et ne présente donc pas le caractère de certitude requis lorsqu'il s'agit d'apprécier le passif exigible.

Madame [W] qui supporte la charge de la démonstration de l'état de cessation des paiements, n'invoque aucune autre dette de la société A2C à laquelle cette dernière ne pourrait pas faire face.

La démonstration de l'état de cessation des paiements n'est donc pas rapportée. Le jugement sera en conséquence infirmé en toutes ses dispositions.

Partie perdante, Madame [W] supportera les dépens d'appel.

Elle devra indemniser la société A2C du montant des frais irrépétibles que cette dernière a été contrainte d'exposer pour les besoins de sa défense.

Par ces motifs

- Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

- Déboute Madame [W] de ses demandes,

- Dit qu'en application des dispositions de l'article R 661-7 du code de commerce, la copie du présent arrêt sera transmise par le greffier de la cour au greffier du tribunal pour l'accomplissement des mesures de publicité prévues à l'article R. 621-8 du code de commerce,

- Condamne Madame [W] aux dépens de première instance et d'appel,

- Condamne Madame [W] à payer à la société A2C la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier La présidente

.