Décisions
CA Douai, ch. 1 sect. 1, 5 septembre 2024, n° 21/05023
DOUAI
Arrêt
Autre
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 05/09/2024
****
N° de MINUTE :
N° RG 21/05023 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T3MU
Jugement (N° 1118000406)
rendu le 10 septembre 2021 par le tribunal de proximité de Maubeuge
APPELANT
Monsieur [G] [V]
né le 21 juin 1969 à [Localité 9]
demeurant [Adresse 4]
[Localité 7]
représenté par Me Jonathan Daré, avocat au barreau de Valenciennes, avocat constitué
INTIMÉES
La SASU Flat Lease Group
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
La SARL Feelback
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège social Synergie Park -[Adresse 1]e
[Localité 6]
représentée par Me Eric Delfly, avocat au barreau de Lille, avocat constitué substitué par Me Jacques-Eric Martinot, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant
La SA BNP Paribas Lease Group
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 2]
[Localité 8]
représentée par Me Alice Dhonte, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
DÉBATS à l'audience publique du 28 mars 2024, tenue par Bruno Poupet magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Bruno Poupet, président de chambre
Samuel Vitse, président de chambre
Céline Miller, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 05 septembre 2024 après prorogation du délibéré en date du 13 juin 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 02 novembre 2023
****
Vu le jugement du 10 septembre 2021 par lequel le tribunal de proximité de Maubeuge a :
- débouté M. [G] [V] de sa demande d'opposabilité du jugement à la société BNP Paribas Lease Group ainsi que de sa demande formulée à l'encontre de la société Flat Lease Group en restitution de la somme de 4 879,68 euros,
- condamné M. [V] à verser à cette dernière les sommes suivantes, montants arrêtés en mai 2020, augmentés des indemnités trimestrielles prévues audit contrat jusqu'à parfaite restitution du matériel objet du contrat, outre intérêts au taux légal par mois à compter de la mise en demeure du 21 mai 2018, avec capitalisation jusqu'à parfait paiement :
- au titre du contrat n° 2011FEEL4078, 4 601,20 euros,
- au titre du contrat n° 2011FEEL5243, 3 881,20 euros,
- une indemnité forfaitaire de 14,40 euros HT par trimestre à compter d'avril 2018 (date du premier impayé) pour chaque échéance impayée et pour les deux contrats, outre intérêts au taux légal à compter de la décision,
- condamné M. [V] à restituer à la société Flat Lease Group les matériels objets des contrats n° 2011FEEL4078 et 2011FEEL5243, aux frais du locataire, franco de port et d'emballage, en bon état d'entretien, en tout lieu convenu entre les parties ou, à défaut d'entente, celui indiqué par le loueur et ce dans un délai de huit jours à compter de la signification du jugement,
- condamné M. [V] à verser à ladite société la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts,
- déclaré que la décision était assortie d'une astreinte pour inexécution à hauteur de 10 euros par jour de retard à compter du jugement, en application des dispositions de l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution, et réservé au tribunal saisi le pouvoir de statuer sur la liquidation de l'astreinte provisoire,
- condamné M. [V] aux dépens et à verser aux sociétés Flat Lease Group et BNP Paribas la somme de 1 500 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté M. [V] de sa demande indemnitaire formulée au titre dudit article 700,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement.
Vu l'appel interjeté par M. [V] le 27 septembre 2021 et ses dernières conclusions remises le 15 juin 2022 aux termes desquelles il demande à la cour, au visa des articles 325 et suivants du code de procédure civile, et des articles 1302 et 1231-5 du code civil, de :
- infirmer ledit jugement en toutes ses dispositions,
- dire bien fondé l'appel en garantie formulé à l'encontre de la société Feelback,
- débouter la société Flat Lease Group de l'ensemble de ses demandes et de son appel incident,
- subsidiairement, si des condamnations étaient prononcées à son encontre, condamner la société Feelback à le garantir desdites condamnations,
- à titre reconventionnel, condamner la société Flat Lease Group à lui verser la somme de 4 879,68 euros au titre des sommes indûment perçues,
en toute hypothèse,
- débouter la société BNP Paribas Lease Group de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Flat Lease Group aux dépens de première instance et d'appel et à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement dudit article 700.
Vu les dernières conclusions remises le 21 mars 2022 par lesquelles la société Flat Lease Group demande à la cour de :
- débouter l'appelant de son appel et de l'ensemble de ses demandes,
- confirmer le jugement entrepris sur le principe des condamnations mais l'infirmer sur leur montant,
au titre du contrat n° 2011FEEL4078 :
- condamner l'appelant à lui verser les sommes suivantes :
* 691,20 euros au titre des loyers de prolongation, outre intérêts au taux légal par mois à compter de la mise en demeure du 21 mai 2018, avec capitalisation jusqu'à parfait paiement par application de l'article 1343-2 du code civil ;
* 3 456 euros au titre des indemnités d'utilisation, montant arrêté à octobre 2021, augmentée des indemnités trimestrielles jusqu'à parfaite restitution du matériel objet du contrat, outre intérêts au taux légal par mois à compter de la mise en demeure du 21 mai 2018, avec capitalisation jusqu'à parfait paiement par application de l'article 1343-2 du code civil ;
* une indemnité forfaitaire de 14,40 euros par trimestre à compter d'avril 2018 pour chaque échéance impayée, outre intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir ;
* 190 euros au titre des frais de rejet et des frais de recouvrement, outre intérêts au taux légal à compter de la décision intervenir,
au titre du contrat n° 2011FEEL5243 :
- condamner l'appelant à lui verser les sommes suivantes :
* 1 353,60 euros au titre des loyers de prolongation, outre intérêts au taux légal par mois à compter de la mise en demeure du 21 mai 2018, avec capitalisation jusqu'à parfait paiement par application de l'article 1343-2 du code civil,
* 3 168 euros au titre des indemnités d'utilisation, montant arrêté à octobre 2021, augmentée des indemnités trimestrielles jusqu'à parfaite restitution du matériel objet du contrat, outre intérêts au taux légal par mois à compter de la mise en demeure du 21 mai 2018, avec capitalisation jusqu'à parfait paiement par application de l'article 1343-2 du code civil,
* une indemnité forfaitaire de 14,40 euros par trimestre à compter d'avril 2018 pour chaque échéance impayée, outre intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
* 160 euros au titre des frais de rejet et des frais de recouvrement, outre intérêts au taux légal à compter de la décision intervenir,
- condamner l'appelant à lui verser la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1231-1 et suivants du code civil,
- le condamner aux dépens d'instance et d'appel et à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et celle de 1 700 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.
Vu les conclusions du 17 mars 2022 aux termes desquelles la société Feelback demande à la cour, au visa des articles 1103 et 1104 du code civil, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, débouter l'appelant de l'ensemble de ses demandes formulées à son encontre et condamner ce dernier, outre aux entiers dépens, à lui verser la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les conclusions remises le 16 mars 2022 par lesquelles la société BNP Paribas Lease Group demande à la cour, au visa de l'article 367 du code de procédure civile, de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'appelant à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter ce dernier de l'ensemble de ses demandes formulées à son encontre,
- écarter, en cas de restitution du matériel objet des contrats de location conclus entre M. [V] et la société Flat Lease Group, toute restitution du matériel Waybox objet du contrat de location conclu le 20 novembre 2015 avec l'appelant ou ordonner la restitution du matériel entre ses mains exclusivement ;
- condamner l'appelant, outre aux dépens de première instance et d'appel, à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et qu'ils doivent être exécutés de bonne foi.
En 2011, M. [G] [V], architecte, a souhaité bénéficier, pour son activité professionnelle, des services de la SARL Feelback, prestataire informatique proposant aux entreprises un service intitulé « Waybox » qui permet l'externalisation et la sauvegarde automatique de données sur des sites distants et sécurisés par le biais d'un contrat d'abonnement.
Le 17 juin 2011, il a signé avec la société Flat Lease Group (ci-après Flat Lease) un contrat de location de longue durée, portant la référence 2011FEEL4078, d'une durée de 63 mois, prenant effet le 1er juillet 2011, portant sur un équipement Waybox 20 Go fourni par la société Feelback, moyennant le paiement de 21 loyers trimestriels d'un montant de 216 euros HT.
Peu après, il a conclu avec Flat Lease un deuxième contrat, n° 2011FEEL5243, aux mêmes conditions, avec effet au 1er janvier 2012.
Ces contrats sont intervenus en raison de l'existence d'une convention de collaboration conclue préalablement, le 15 mars 2011, entre Feelback et Flat Lease, destinée à assurer le financement par la seconde des prestations et du matériel proposés par la première.
Sur les demandes en paiement de la société Flat Lease Group
Chacun des contrats susvisés stipule que, sous condition suspensive de l'exécution ponctuelle des engagements en résultant, la location est poursuivie par tacite reconduction au terme de la durée irrévocable prévue aux conditions particulières, sauf si le locataire notifie au loueur par courrier recommandé avec accusé de réception, au moins six mois avant le terme de cette durée irrévocable, sa décision de ne pas poursuivre la location ; qu'en cas de tacite reconduction, la location se poursuit avec le loueur d'origine par périodes successives de 12 mois renouvelables par tacite reconduction, aux conditions en vigueur à la date d'expiration initialement prévue, avec la faculté pour le locataire d'y mettre fin dans les mêmes formes et préavis.
Il n'est pas contesté que M. [V] n'a pas notifié à Flat Lease de décision de ne pas poursuivre la location, de sorte qu'à l'issue des périodes initialement convenues, soit les 30 septembre 2016 et 31 mars 2017, l'exécution des contrats s'est poursuivie par tacite reconduction, M. [V] ayant d'ailleurs remis le 20 décembre 2016 au loueur un nouveau mandat de prélèvement et continué à s'acquitter des loyers.
Il n'est pas davantage contesté qu'il a cessé de régler ceux-ci à partir du deuxième trimestre 2018 et n'a pas satisfait aux mises en demeure de régulariser sa situation qui lui ont été adressées par la suite, raison pour laquelle la société Flat Lease lui a fait délivrer l'assignation à l'origine de la présente procédure.
Pour contester les demandes de Flat Lease, M. [V] soutient en premier lieu qu'il a appris que Feelback avait cessé sa collaboration avec celle-ci en 2014, que ses contrats ont alors été cédés à BNP Paribas Lease Group à l'initiative de Feelback, que depuis lors, il a réglé les loyers aux deux sociétés pour un même objet, que par conséquent, non seulement il ne devait plus rien à Flat Lease mais que celle-ci lui était redevable d'un indu.
Il produit un courriel du 8 février 2018 par lequel Feelback lui confirme qu'elle a cessé sa collaboration avec Flat Lease en 2014 mais il n'y est pas question d'un « rachat de contrat ».
S'il apparaît qu'un contrat distinct a été conclu en 2015 entre M. [V] et BNP Paribas Lease Group, celui-ci ne s'est pas substitué aux deux contrats originels dont les conditions générales ne prévoient leur éventuelle cession que par Flat Lease ; aucune cession de cet ordre, aucune novation par changement de créancier n'est établie, de sorte que l'exécution de ces deux contrats s'est effectivement poursuivie dans les conditions exposées ci-desssus.
M. [V] se prévaut en deuxième lieu d'une interdépendance des contrats pour conclure que la rupture de la convention unissant Feelback à Flat Lease a entraîné la rupture des contrats l'unissant lui-même à Flat Lease.
Or, l'interdépendance reconnue par la jurisprudence et, depuis le 1er octobre 2016, par l'article 1186 du code civil, concerne l'hypothèse où l'exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d'une même opération et où la disparition de l'un d'eux rend impossible l'exécution de l'autre ou des autres, ce qui est le cas par exemple d'un contrat de maintenance d'un équipement rendu impossible par la disparition du contrat de location de celui-ci, mais n'est pas l'hypothèse de l'espèce, la disparition de la convention Feelback/Flat Lease ne mettant pas obstacle à la poursuite du contrat Flat Lease/[V]. C'est à juste titre que par lettre du 23 avril 2018, en réponse à une réclamation d'indu de sa part, Flat Lease a rappelé à M. [V] l'historique des contrats les liant et lui a précisé que la rupture de la collaboration entre elle-même et Feelback n'avait aucune incidence sur les contrats en cours, et qu'elle vise, dans le cadre de la présente procédure, l'article 9 de la convention en question qui stipule qu'en cas de dénonciation de celle-ci, ses dispositions continueront à s'appliquer à tous les contrats de financement en cours jusqu'à leur terme.
M. [V] soutient encore que Flat Lease ne serait plus en droit de lui réclamer le paiement des loyers au motif qu'elle ne se serait pas acquittée de toutes les sommes qu'elle devait à Feelback, ce qui serait la cause de son litige avec cette dernière, de sorte qu'elle ne serait pas propriétaire du matériel objet de la location. Cette assertion ne repose sur aucune pièce, étant observé que le non-respect par Flat Lease de ses obligations à l'égard de Feelback n'entraîne pas nécessairement l'anéantissement du contrat de vente conclu entre elles et que Feelback n'en fait nullement état.
Enfin, M. [V] évoque une procédure collective dont Flat Lease a fait l'objet mais dont il n'explique pas les conséquences qu'il en tire et qui s'avère inopérante dès lors que cette dernière justifie de ce qu'elle a fait l'objet d'une mesure de sauvegarde ayant donné lieu à l'établissement d'un plan de redressement, n'ayant pas entraîné de dessaisissement de ses dirigeants ni d'interruption des contrats en cours, et rappelle qu'aux termes de l'article L 622-13 du code de commerce, nonobstant toute disposition légale ou toute clause contractuelle, aucune indivisibilité, résiliation ou résolution d'un contrat en cours ne peut résulter du seul fait de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde et que le cocontractant doit remplir ses obligations malgré le défaut d'exécution par le débiteur d'engagements antérieurs au jugement d'ouverture.
C'est dès lors à bon droit que Flat Lease a considéré l'interruption du paiement des loyers par M. [V] comme un manquement à ses obligations dans le cadre de contrats en cours.
L'article 15-2 des conditions générales des contrats dispose que le contrat est résilié, si bon semble au vendeur, huit jours calendaires après l'envoi au locataire d'une lettre de mise en demeure recommandée avec avis de réception restée en tout ou partie sans effet pendant ce délai, et ce en cas d'inexécution par le locataire de ses obligations au titre dudit contrat, notamment, non-paiement, même partiel, d'un loyer ou d'une prime d'assurance à son échéance.
Il est établi que M. [V] a cessé de régler les loyers à partir du deuxième trimestre 2018, que Flat Lease lui a adressé une mise en demeure par lettre recommandée remise à celui-ci le 23 mai 2018 et qu'elle s'est prévalue de la résiliation du contrat au 26 juin 2018.
L'article 15-4 desdites conditions générales stipule que dès la résiliation du contrat, le locataire doit immédiatement restituer le matériel loué et verser au loueur :
- les sommes impayées au jour de la résiliation du contrat,
- en outre :
* d'une part, une indemnité en réparation du préjudice subi égale au montant HT des loyers restant à échoir à la date de résiliation majorée de 10 %, (...),
* d'autre part, une clause pénale de 15 % des sommes impayées et du montant total des loyers HT restant à échoir à la date de la résiliation.
Il ajoute que ces sommes seront majorées des frais et honoraires éventuels, même non « répétables », rendus nécessaires pour obtenir la restitution du matériel loué et/ou assurer le recouvrement des sommes dues au loueur.
Par ailleurs, aux termes de l'article 14, tout retard de plus de huit jours dans la restitution du matériel loué, soit au terme du contrat, soit après résiliation, entraînera l'exigibilité d'une indemnité d'utilisation correspondant au terme locatif moyen calculé sur une base trimestrielle (toute période commencée étant due en totalité).
Il est acquis au débat que :
- compte tenu des tacites reconductions annuelles intervenues, le terme du contrat n° 2011FEEL4078 était le 30 septembre 2018 et celui du contrat n° 2011FEEL5243 était le 31 mars 2019,
- M. [V] a restitué les équipements correspondants les 19 et 25 octobre 2021.
La présentation des demandes financières de Flat Lease (pages 7 à 10 de ses conclusions) ne correspond pas exactement aux termes des articles précités qu'il convient de suivre pour déterminer les sommes susceptibles de lui être dues :
1) les sommes impayées au jour de la résiliation du contrat : il ne peut s'agir que des loyers échus et impayés au 26 juin 2018, à savoir le loyer du deuxième trimestre 2018, soit :
- contrat n° 2011FEEL4078 : 287,04 euros TTC,
- contrat n° 2011FEEL5243 : 287,04 euros TTC,
2) une indemnité égale au montant HT des loyers restant à échoir à la date de résiliation majorée de 10 %, soit :
- contrat n° 2011FEEL4078 (résiliation 26 juin 2018, terme du contrat 30 septembre 2018) :
un trimestre : 216 + (216 x 10 %) = 237,60 euros,
- contrat n° 2011FEEL5243 (résiliation 26 juin 2018, terme du contrat 31 mars 2019) :
3 trimestres : 648 + (648 x 10 %) = 712,80 euros,
3) 15 % des sommes impayées et du montant total des loyers HT restant à échoir à la date de la résiliation :
- contrat n° 2011FEEL4078 : (287,04 + 216) x 15 % = 75,45 euros,
- contrat n° 2011FEEL5243 : (287,04 + 648) x 15 % = 140,25 euros,
4) indemnité d'utilisation correspondant au terme locatif moyen calculé sur une base trimestrielle :
- contrat n° 2011FEEL4078 (résiliation 26 juin 2018, restitution 19 octobre 2021, 13 trimestres) :
287,04 x 13 = 3731,52 euros,
- contrat n° 2011FEEL5243 : (résiliation 26 juin 2018, restitution 25 octobre 2021, idem) :
287,04 x 13 = 3731,52 euros.
Il convient de préciser à ce titre que, si la cour prend en compte plus de trimestres à échoir (13) que Flat Lease (12 et 11), c'est que, conformément aux conditions générales, elle a pris la date de résiliation et non le terme normal du contrat pour distinguer les sommes impayées (loyers) des indemnités d'utilisation, et a donc retenu en revanche moins de loyers impayés (1 et 3) que Flat Lease (2 et 4).
Les calculs figurant ci-dessus déterminent des sommes dues par M. [V] se montant à 4331,61 euros au titre du premier contrat et 4871,61 au titre du second contrat, supérieures aux sommes demandées par Flat Lease aux mêmes titres, soit 4147,20 et 4521,60 euros, de sorte qu'il sera fait droit aux demandes de cette dernière.
L'article 2-6° des conditions générales stipule en outre une indemnité forfaitaire de 5 % du montant HT du loyer, majorée de la TVA, pour tout retard de paiement d'un « loyer ». Ainsi que cela a été dit supra, dans le cadre de chaque contrat, seul un terme de loyer a été impayé, avant la résiliation, après laquelle seules des indemnités ont été exigibles, et les échéanciers annexés aux contrats ne précisent pas le taux de TVA applicable, de sorte qu'il n'y a lieu de faire droit à la demande de Flat Lease qu'à concurrence de deux indemnités forfaitaires de 10,80 euros (216 x 5 %), soit 21,60 euros.
Si M. [V] sollicite la réduction de l'éventuelle créance de Flat Lease au visa de l'article 1231-5 du code civil, qui autorise le juge à modérer ou augmenter, même d'office, la pénalité stipulée par une clause pénale si elle est manifestement excessive ou dérisoire, seules les indemnités examinées ci-dessus sous les numéros 2 et 3 et celle qui est prévue par l'article 2-6° des conditions générales peuvent être considérées comme de telles pénalités, or celles-ci n'apparaissent pas manifestement excessives, de sorte qu'il n'y a pas lieu à réduction.
L'article 7 prévoit la facturation d'une indemnité de 15 euros par rejet de prélèvement, les pièces produites par l'intimée (14 et 15) ne permettent d'identifier que 8 rejets, de sorte que 120 euros sont dus à ce titre.
Enfin, Flat Lease est bien fondée à demander une indemnité forfaitaire de 40 euros par contrat sur le fondement de l'article D 441-5 du code de commerce.
Les intérêts au taux légal sur les sommes dues ne peuvent courir à compter de la mise en demeure du 23 mai 2018 que sur les loyers du deuxième trimestre 2018 alors exigibles (574,08 euros) et courent à compter de l'assignation sur les autres sommes, à l'exception des indemnités d'utilisation sur lesquelles ils courent à compter de la date d'exigibilité de chacune d'elles, cette date étant dans la majorité des cas postérieure à l'assignation.
Compte tenu de ce que la restitution du matériel est intervenue, les demandes relatives à celle-ci (injonction de restitution, astreinte, poursuite du versement de l'indemnité d'utilisation) n'ont plus d'objet.
Il y a lieu d'infirmer le jugement sur les condamnations pécuniaires pour statuer à nouveau en les actualisant ou les corrigeant selon les développements qui précèdent.
Sur la demande de restitution de l'indu présentée par M. [V]
Pour les motifs exposés ci-dessus, cette demande est mal fondée et le jugement ne peut qu'être confirmé de ce chef.
Sur l'appel en garantie de la société Feelback par M. [V]
L'article 954 du code de procédure civile dispose notamment que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
M. [V], qui demande que Feelback soit condamnée à le garantir des condamnations éventuellement prononcées à son encontre au profit de Flat Lease, n'évoque comme motif de cette demande (page 6 de ses conclusions) que le fait que Feelback assure l'exécution des contrats et que, l'opération étant globale et indivisible, elle ne peut en aucun cas être financée deux fois par lui, sans développer ces éléments.
Or, un appel en garantie constitue l'exercice d'une action en responsabilité, ce qui suppose donc, en l'espèce, que l'appelant définisse et démontre une faute de Feelback, contractuelle ou délictuelle, ainsi qu'un lien de causalité entre celle-ci et le préjudice dont il demande à être indemnisé, à savoir sa condamnation au profit de Flat Lease, ce dont il s'abstient. Il n'incombe pas à la cour de se substituer à lui et de relever les éléments du dossier susceptibles de permettre d'envisager une telle responsabilité.
Il ne peut dès lors être fait droit à sa demande.
Sur les autres demandes
Flat Lease ne motive pas sa demande de dommages et intérêts qui ne peut donc qu'être rejetée.
Il incombe à M. [V], partie perdante, de supporter la charge des dépens, conformément à l'article 696 du code de procédure civile, et de ses autres frais.
Il n'est pas inéquitable, en revanche et vu l'article 700 du même code, de laisser aux autres parties la charge de leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour
infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a :
- débouté M. [G] [V] de sa demande d'opposabilité du jugement à la société BNP Paribas Lease Group, de sa demande de restitution de la somme de 4 879,68 euros formulée à l'encontre de la société Flat Lease Group et de sa demande d'indemnité pour frais irrépétibles,
- condamné celui-ci aux dépens,
statuant à nouveau,
condamne M. [V] à payer à la société Flat Lease Group les sommes suivantes :
- au titre du contrat n° 2011FEEL4078, 4147,20 euros,
- au titre du contrat n° 2011FEEL5243, 4521,60 euros,
- 21,60 euros en tout au titre de l'indemnité forfaitaire de 5 % du montant HT du loyer prévue par l'article 2-6° des conditions générales des contrats,
- 120 euros en tout au titre des indemnités de rejet,
- 80 euros en tout en application de l'article D 441-5 du code de commerce,
dit que ces sommes portent intérêts au taux légal :
- à compter du 23 mai 2018 sur la somme de 574,08 euros,
- pour les indemnités d'utilisation, à compter de l'exigibilité de chacune d'elles,
- à compter de l'assignation introductive d'instance sur les autres sommes,
et ce avec capitalisation dans les conditions prévues par l'article 1343-2 du code civil,
déboute les parties de leurs demandes de première instance et d'appel fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
condamne M. [V] aux dépens.
Le greffier Le président
Delphine Verhaeghe Bruno Poupet
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 05/09/2024
****
N° de MINUTE :
N° RG 21/05023 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T3MU
Jugement (N° 1118000406)
rendu le 10 septembre 2021 par le tribunal de proximité de Maubeuge
APPELANT
Monsieur [G] [V]
né le 21 juin 1969 à [Localité 9]
demeurant [Adresse 4]
[Localité 7]
représenté par Me Jonathan Daré, avocat au barreau de Valenciennes, avocat constitué
INTIMÉES
La SASU Flat Lease Group
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
La SARL Feelback
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège social Synergie Park -[Adresse 1]e
[Localité 6]
représentée par Me Eric Delfly, avocat au barreau de Lille, avocat constitué substitué par Me Jacques-Eric Martinot, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant
La SA BNP Paribas Lease Group
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège social [Adresse 2]
[Localité 8]
représentée par Me Alice Dhonte, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
DÉBATS à l'audience publique du 28 mars 2024, tenue par Bruno Poupet magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Bruno Poupet, président de chambre
Samuel Vitse, président de chambre
Céline Miller, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 05 septembre 2024 après prorogation du délibéré en date du 13 juin 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 02 novembre 2023
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Vu le jugement du 10 septembre 2021 par lequel le tribunal de proximité de Maubeuge a :
- débouté M. [G] [V] de sa demande d'opposabilité du jugement à la société BNP Paribas Lease Group ainsi que de sa demande formulée à l'encontre de la société Flat Lease Group en restitution de la somme de 4 879,68 euros,
- condamné M. [V] à verser à cette dernière les sommes suivantes, montants arrêtés en mai 2020, augmentés des indemnités trimestrielles prévues audit contrat jusqu'à parfaite restitution du matériel objet du contrat, outre intérêts au taux légal par mois à compter de la mise en demeure du 21 mai 2018, avec capitalisation jusqu'à parfait paiement :
- au titre du contrat n° 2011FEEL4078, 4 601,20 euros,
- au titre du contrat n° 2011FEEL5243, 3 881,20 euros,
- une indemnité forfaitaire de 14,40 euros HT par trimestre à compter d'avril 2018 (date du premier impayé) pour chaque échéance impayée et pour les deux contrats, outre intérêts au taux légal à compter de la décision,
- condamné M. [V] à restituer à la société Flat Lease Group les matériels objets des contrats n° 2011FEEL4078 et 2011FEEL5243, aux frais du locataire, franco de port et d'emballage, en bon état d'entretien, en tout lieu convenu entre les parties ou, à défaut d'entente, celui indiqué par le loueur et ce dans un délai de huit jours à compter de la signification du jugement,
- condamné M. [V] à verser à ladite société la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts,
- déclaré que la décision était assortie d'une astreinte pour inexécution à hauteur de 10 euros par jour de retard à compter du jugement, en application des dispositions de l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution, et réservé au tribunal saisi le pouvoir de statuer sur la liquidation de l'astreinte provisoire,
- condamné M. [V] aux dépens et à verser aux sociétés Flat Lease Group et BNP Paribas la somme de 1 500 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté M. [V] de sa demande indemnitaire formulée au titre dudit article 700,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement.
Vu l'appel interjeté par M. [V] le 27 septembre 2021 et ses dernières conclusions remises le 15 juin 2022 aux termes desquelles il demande à la cour, au visa des articles 325 et suivants du code de procédure civile, et des articles 1302 et 1231-5 du code civil, de :
- infirmer ledit jugement en toutes ses dispositions,
- dire bien fondé l'appel en garantie formulé à l'encontre de la société Feelback,
- débouter la société Flat Lease Group de l'ensemble de ses demandes et de son appel incident,
- subsidiairement, si des condamnations étaient prononcées à son encontre, condamner la société Feelback à le garantir desdites condamnations,
- à titre reconventionnel, condamner la société Flat Lease Group à lui verser la somme de 4 879,68 euros au titre des sommes indûment perçues,
en toute hypothèse,
- débouter la société BNP Paribas Lease Group de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Flat Lease Group aux dépens de première instance et d'appel et à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement dudit article 700.
Vu les dernières conclusions remises le 21 mars 2022 par lesquelles la société Flat Lease Group demande à la cour de :
- débouter l'appelant de son appel et de l'ensemble de ses demandes,
- confirmer le jugement entrepris sur le principe des condamnations mais l'infirmer sur leur montant,
au titre du contrat n° 2011FEEL4078 :
- condamner l'appelant à lui verser les sommes suivantes :
* 691,20 euros au titre des loyers de prolongation, outre intérêts au taux légal par mois à compter de la mise en demeure du 21 mai 2018, avec capitalisation jusqu'à parfait paiement par application de l'article 1343-2 du code civil ;
* 3 456 euros au titre des indemnités d'utilisation, montant arrêté à octobre 2021, augmentée des indemnités trimestrielles jusqu'à parfaite restitution du matériel objet du contrat, outre intérêts au taux légal par mois à compter de la mise en demeure du 21 mai 2018, avec capitalisation jusqu'à parfait paiement par application de l'article 1343-2 du code civil ;
* une indemnité forfaitaire de 14,40 euros par trimestre à compter d'avril 2018 pour chaque échéance impayée, outre intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir ;
* 190 euros au titre des frais de rejet et des frais de recouvrement, outre intérêts au taux légal à compter de la décision intervenir,
au titre du contrat n° 2011FEEL5243 :
- condamner l'appelant à lui verser les sommes suivantes :
* 1 353,60 euros au titre des loyers de prolongation, outre intérêts au taux légal par mois à compter de la mise en demeure du 21 mai 2018, avec capitalisation jusqu'à parfait paiement par application de l'article 1343-2 du code civil,
* 3 168 euros au titre des indemnités d'utilisation, montant arrêté à octobre 2021, augmentée des indemnités trimestrielles jusqu'à parfaite restitution du matériel objet du contrat, outre intérêts au taux légal par mois à compter de la mise en demeure du 21 mai 2018, avec capitalisation jusqu'à parfait paiement par application de l'article 1343-2 du code civil,
* une indemnité forfaitaire de 14,40 euros par trimestre à compter d'avril 2018 pour chaque échéance impayée, outre intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
* 160 euros au titre des frais de rejet et des frais de recouvrement, outre intérêts au taux légal à compter de la décision intervenir,
- condamner l'appelant à lui verser la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1231-1 et suivants du code civil,
- le condamner aux dépens d'instance et d'appel et à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et celle de 1 700 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.
Vu les conclusions du 17 mars 2022 aux termes desquelles la société Feelback demande à la cour, au visa des articles 1103 et 1104 du code civil, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, débouter l'appelant de l'ensemble de ses demandes formulées à son encontre et condamner ce dernier, outre aux entiers dépens, à lui verser la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les conclusions remises le 16 mars 2022 par lesquelles la société BNP Paribas Lease Group demande à la cour, au visa de l'article 367 du code de procédure civile, de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'appelant à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter ce dernier de l'ensemble de ses demandes formulées à son encontre,
- écarter, en cas de restitution du matériel objet des contrats de location conclus entre M. [V] et la société Flat Lease Group, toute restitution du matériel Waybox objet du contrat de location conclu le 20 novembre 2015 avec l'appelant ou ordonner la restitution du matériel entre ses mains exclusivement ;
- condamner l'appelant, outre aux dépens de première instance et d'appel, à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits et qu'ils doivent être exécutés de bonne foi.
En 2011, M. [G] [V], architecte, a souhaité bénéficier, pour son activité professionnelle, des services de la SARL Feelback, prestataire informatique proposant aux entreprises un service intitulé « Waybox » qui permet l'externalisation et la sauvegarde automatique de données sur des sites distants et sécurisés par le biais d'un contrat d'abonnement.
Le 17 juin 2011, il a signé avec la société Flat Lease Group (ci-après Flat Lease) un contrat de location de longue durée, portant la référence 2011FEEL4078, d'une durée de 63 mois, prenant effet le 1er juillet 2011, portant sur un équipement Waybox 20 Go fourni par la société Feelback, moyennant le paiement de 21 loyers trimestriels d'un montant de 216 euros HT.
Peu après, il a conclu avec Flat Lease un deuxième contrat, n° 2011FEEL5243, aux mêmes conditions, avec effet au 1er janvier 2012.
Ces contrats sont intervenus en raison de l'existence d'une convention de collaboration conclue préalablement, le 15 mars 2011, entre Feelback et Flat Lease, destinée à assurer le financement par la seconde des prestations et du matériel proposés par la première.
Sur les demandes en paiement de la société Flat Lease Group
Chacun des contrats susvisés stipule que, sous condition suspensive de l'exécution ponctuelle des engagements en résultant, la location est poursuivie par tacite reconduction au terme de la durée irrévocable prévue aux conditions particulières, sauf si le locataire notifie au loueur par courrier recommandé avec accusé de réception, au moins six mois avant le terme de cette durée irrévocable, sa décision de ne pas poursuivre la location ; qu'en cas de tacite reconduction, la location se poursuit avec le loueur d'origine par périodes successives de 12 mois renouvelables par tacite reconduction, aux conditions en vigueur à la date d'expiration initialement prévue, avec la faculté pour le locataire d'y mettre fin dans les mêmes formes et préavis.
Il n'est pas contesté que M. [V] n'a pas notifié à Flat Lease de décision de ne pas poursuivre la location, de sorte qu'à l'issue des périodes initialement convenues, soit les 30 septembre 2016 et 31 mars 2017, l'exécution des contrats s'est poursuivie par tacite reconduction, M. [V] ayant d'ailleurs remis le 20 décembre 2016 au loueur un nouveau mandat de prélèvement et continué à s'acquitter des loyers.
Il n'est pas davantage contesté qu'il a cessé de régler ceux-ci à partir du deuxième trimestre 2018 et n'a pas satisfait aux mises en demeure de régulariser sa situation qui lui ont été adressées par la suite, raison pour laquelle la société Flat Lease lui a fait délivrer l'assignation à l'origine de la présente procédure.
Pour contester les demandes de Flat Lease, M. [V] soutient en premier lieu qu'il a appris que Feelback avait cessé sa collaboration avec celle-ci en 2014, que ses contrats ont alors été cédés à BNP Paribas Lease Group à l'initiative de Feelback, que depuis lors, il a réglé les loyers aux deux sociétés pour un même objet, que par conséquent, non seulement il ne devait plus rien à Flat Lease mais que celle-ci lui était redevable d'un indu.
Il produit un courriel du 8 février 2018 par lequel Feelback lui confirme qu'elle a cessé sa collaboration avec Flat Lease en 2014 mais il n'y est pas question d'un « rachat de contrat ».
S'il apparaît qu'un contrat distinct a été conclu en 2015 entre M. [V] et BNP Paribas Lease Group, celui-ci ne s'est pas substitué aux deux contrats originels dont les conditions générales ne prévoient leur éventuelle cession que par Flat Lease ; aucune cession de cet ordre, aucune novation par changement de créancier n'est établie, de sorte que l'exécution de ces deux contrats s'est effectivement poursuivie dans les conditions exposées ci-desssus.
M. [V] se prévaut en deuxième lieu d'une interdépendance des contrats pour conclure que la rupture de la convention unissant Feelback à Flat Lease a entraîné la rupture des contrats l'unissant lui-même à Flat Lease.
Or, l'interdépendance reconnue par la jurisprudence et, depuis le 1er octobre 2016, par l'article 1186 du code civil, concerne l'hypothèse où l'exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d'une même opération et où la disparition de l'un d'eux rend impossible l'exécution de l'autre ou des autres, ce qui est le cas par exemple d'un contrat de maintenance d'un équipement rendu impossible par la disparition du contrat de location de celui-ci, mais n'est pas l'hypothèse de l'espèce, la disparition de la convention Feelback/Flat Lease ne mettant pas obstacle à la poursuite du contrat Flat Lease/[V]. C'est à juste titre que par lettre du 23 avril 2018, en réponse à une réclamation d'indu de sa part, Flat Lease a rappelé à M. [V] l'historique des contrats les liant et lui a précisé que la rupture de la collaboration entre elle-même et Feelback n'avait aucune incidence sur les contrats en cours, et qu'elle vise, dans le cadre de la présente procédure, l'article 9 de la convention en question qui stipule qu'en cas de dénonciation de celle-ci, ses dispositions continueront à s'appliquer à tous les contrats de financement en cours jusqu'à leur terme.
M. [V] soutient encore que Flat Lease ne serait plus en droit de lui réclamer le paiement des loyers au motif qu'elle ne se serait pas acquittée de toutes les sommes qu'elle devait à Feelback, ce qui serait la cause de son litige avec cette dernière, de sorte qu'elle ne serait pas propriétaire du matériel objet de la location. Cette assertion ne repose sur aucune pièce, étant observé que le non-respect par Flat Lease de ses obligations à l'égard de Feelback n'entraîne pas nécessairement l'anéantissement du contrat de vente conclu entre elles et que Feelback n'en fait nullement état.
Enfin, M. [V] évoque une procédure collective dont Flat Lease a fait l'objet mais dont il n'explique pas les conséquences qu'il en tire et qui s'avère inopérante dès lors que cette dernière justifie de ce qu'elle a fait l'objet d'une mesure de sauvegarde ayant donné lieu à l'établissement d'un plan de redressement, n'ayant pas entraîné de dessaisissement de ses dirigeants ni d'interruption des contrats en cours, et rappelle qu'aux termes de l'article L 622-13 du code de commerce, nonobstant toute disposition légale ou toute clause contractuelle, aucune indivisibilité, résiliation ou résolution d'un contrat en cours ne peut résulter du seul fait de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde et que le cocontractant doit remplir ses obligations malgré le défaut d'exécution par le débiteur d'engagements antérieurs au jugement d'ouverture.
C'est dès lors à bon droit que Flat Lease a considéré l'interruption du paiement des loyers par M. [V] comme un manquement à ses obligations dans le cadre de contrats en cours.
L'article 15-2 des conditions générales des contrats dispose que le contrat est résilié, si bon semble au vendeur, huit jours calendaires après l'envoi au locataire d'une lettre de mise en demeure recommandée avec avis de réception restée en tout ou partie sans effet pendant ce délai, et ce en cas d'inexécution par le locataire de ses obligations au titre dudit contrat, notamment, non-paiement, même partiel, d'un loyer ou d'une prime d'assurance à son échéance.
Il est établi que M. [V] a cessé de régler les loyers à partir du deuxième trimestre 2018, que Flat Lease lui a adressé une mise en demeure par lettre recommandée remise à celui-ci le 23 mai 2018 et qu'elle s'est prévalue de la résiliation du contrat au 26 juin 2018.
L'article 15-4 desdites conditions générales stipule que dès la résiliation du contrat, le locataire doit immédiatement restituer le matériel loué et verser au loueur :
- les sommes impayées au jour de la résiliation du contrat,
- en outre :
* d'une part, une indemnité en réparation du préjudice subi égale au montant HT des loyers restant à échoir à la date de résiliation majorée de 10 %, (...),
* d'autre part, une clause pénale de 15 % des sommes impayées et du montant total des loyers HT restant à échoir à la date de la résiliation.
Il ajoute que ces sommes seront majorées des frais et honoraires éventuels, même non « répétables », rendus nécessaires pour obtenir la restitution du matériel loué et/ou assurer le recouvrement des sommes dues au loueur.
Par ailleurs, aux termes de l'article 14, tout retard de plus de huit jours dans la restitution du matériel loué, soit au terme du contrat, soit après résiliation, entraînera l'exigibilité d'une indemnité d'utilisation correspondant au terme locatif moyen calculé sur une base trimestrielle (toute période commencée étant due en totalité).
Il est acquis au débat que :
- compte tenu des tacites reconductions annuelles intervenues, le terme du contrat n° 2011FEEL4078 était le 30 septembre 2018 et celui du contrat n° 2011FEEL5243 était le 31 mars 2019,
- M. [V] a restitué les équipements correspondants les 19 et 25 octobre 2021.
La présentation des demandes financières de Flat Lease (pages 7 à 10 de ses conclusions) ne correspond pas exactement aux termes des articles précités qu'il convient de suivre pour déterminer les sommes susceptibles de lui être dues :
1) les sommes impayées au jour de la résiliation du contrat : il ne peut s'agir que des loyers échus et impayés au 26 juin 2018, à savoir le loyer du deuxième trimestre 2018, soit :
- contrat n° 2011FEEL4078 : 287,04 euros TTC,
- contrat n° 2011FEEL5243 : 287,04 euros TTC,
2) une indemnité égale au montant HT des loyers restant à échoir à la date de résiliation majorée de 10 %, soit :
- contrat n° 2011FEEL4078 (résiliation 26 juin 2018, terme du contrat 30 septembre 2018) :
un trimestre : 216 + (216 x 10 %) = 237,60 euros,
- contrat n° 2011FEEL5243 (résiliation 26 juin 2018, terme du contrat 31 mars 2019) :
3 trimestres : 648 + (648 x 10 %) = 712,80 euros,
3) 15 % des sommes impayées et du montant total des loyers HT restant à échoir à la date de la résiliation :
- contrat n° 2011FEEL4078 : (287,04 + 216) x 15 % = 75,45 euros,
- contrat n° 2011FEEL5243 : (287,04 + 648) x 15 % = 140,25 euros,
4) indemnité d'utilisation correspondant au terme locatif moyen calculé sur une base trimestrielle :
- contrat n° 2011FEEL4078 (résiliation 26 juin 2018, restitution 19 octobre 2021, 13 trimestres) :
287,04 x 13 = 3731,52 euros,
- contrat n° 2011FEEL5243 : (résiliation 26 juin 2018, restitution 25 octobre 2021, idem) :
287,04 x 13 = 3731,52 euros.
Il convient de préciser à ce titre que, si la cour prend en compte plus de trimestres à échoir (13) que Flat Lease (12 et 11), c'est que, conformément aux conditions générales, elle a pris la date de résiliation et non le terme normal du contrat pour distinguer les sommes impayées (loyers) des indemnités d'utilisation, et a donc retenu en revanche moins de loyers impayés (1 et 3) que Flat Lease (2 et 4).
Les calculs figurant ci-dessus déterminent des sommes dues par M. [V] se montant à 4331,61 euros au titre du premier contrat et 4871,61 au titre du second contrat, supérieures aux sommes demandées par Flat Lease aux mêmes titres, soit 4147,20 et 4521,60 euros, de sorte qu'il sera fait droit aux demandes de cette dernière.
L'article 2-6° des conditions générales stipule en outre une indemnité forfaitaire de 5 % du montant HT du loyer, majorée de la TVA, pour tout retard de paiement d'un « loyer ». Ainsi que cela a été dit supra, dans le cadre de chaque contrat, seul un terme de loyer a été impayé, avant la résiliation, après laquelle seules des indemnités ont été exigibles, et les échéanciers annexés aux contrats ne précisent pas le taux de TVA applicable, de sorte qu'il n'y a lieu de faire droit à la demande de Flat Lease qu'à concurrence de deux indemnités forfaitaires de 10,80 euros (216 x 5 %), soit 21,60 euros.
Si M. [V] sollicite la réduction de l'éventuelle créance de Flat Lease au visa de l'article 1231-5 du code civil, qui autorise le juge à modérer ou augmenter, même d'office, la pénalité stipulée par une clause pénale si elle est manifestement excessive ou dérisoire, seules les indemnités examinées ci-dessus sous les numéros 2 et 3 et celle qui est prévue par l'article 2-6° des conditions générales peuvent être considérées comme de telles pénalités, or celles-ci n'apparaissent pas manifestement excessives, de sorte qu'il n'y a pas lieu à réduction.
L'article 7 prévoit la facturation d'une indemnité de 15 euros par rejet de prélèvement, les pièces produites par l'intimée (14 et 15) ne permettent d'identifier que 8 rejets, de sorte que 120 euros sont dus à ce titre.
Enfin, Flat Lease est bien fondée à demander une indemnité forfaitaire de 40 euros par contrat sur le fondement de l'article D 441-5 du code de commerce.
Les intérêts au taux légal sur les sommes dues ne peuvent courir à compter de la mise en demeure du 23 mai 2018 que sur les loyers du deuxième trimestre 2018 alors exigibles (574,08 euros) et courent à compter de l'assignation sur les autres sommes, à l'exception des indemnités d'utilisation sur lesquelles ils courent à compter de la date d'exigibilité de chacune d'elles, cette date étant dans la majorité des cas postérieure à l'assignation.
Compte tenu de ce que la restitution du matériel est intervenue, les demandes relatives à celle-ci (injonction de restitution, astreinte, poursuite du versement de l'indemnité d'utilisation) n'ont plus d'objet.
Il y a lieu d'infirmer le jugement sur les condamnations pécuniaires pour statuer à nouveau en les actualisant ou les corrigeant selon les développements qui précèdent.
Sur la demande de restitution de l'indu présentée par M. [V]
Pour les motifs exposés ci-dessus, cette demande est mal fondée et le jugement ne peut qu'être confirmé de ce chef.
Sur l'appel en garantie de la société Feelback par M. [V]
L'article 954 du code de procédure civile dispose notamment que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
M. [V], qui demande que Feelback soit condamnée à le garantir des condamnations éventuellement prononcées à son encontre au profit de Flat Lease, n'évoque comme motif de cette demande (page 6 de ses conclusions) que le fait que Feelback assure l'exécution des contrats et que, l'opération étant globale et indivisible, elle ne peut en aucun cas être financée deux fois par lui, sans développer ces éléments.
Or, un appel en garantie constitue l'exercice d'une action en responsabilité, ce qui suppose donc, en l'espèce, que l'appelant définisse et démontre une faute de Feelback, contractuelle ou délictuelle, ainsi qu'un lien de causalité entre celle-ci et le préjudice dont il demande à être indemnisé, à savoir sa condamnation au profit de Flat Lease, ce dont il s'abstient. Il n'incombe pas à la cour de se substituer à lui et de relever les éléments du dossier susceptibles de permettre d'envisager une telle responsabilité.
Il ne peut dès lors être fait droit à sa demande.
Sur les autres demandes
Flat Lease ne motive pas sa demande de dommages et intérêts qui ne peut donc qu'être rejetée.
Il incombe à M. [V], partie perdante, de supporter la charge des dépens, conformément à l'article 696 du code de procédure civile, et de ses autres frais.
Il n'est pas inéquitable, en revanche et vu l'article 700 du même code, de laisser aux autres parties la charge de leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour
infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a :
- débouté M. [G] [V] de sa demande d'opposabilité du jugement à la société BNP Paribas Lease Group, de sa demande de restitution de la somme de 4 879,68 euros formulée à l'encontre de la société Flat Lease Group et de sa demande d'indemnité pour frais irrépétibles,
- condamné celui-ci aux dépens,
statuant à nouveau,
condamne M. [V] à payer à la société Flat Lease Group les sommes suivantes :
- au titre du contrat n° 2011FEEL4078, 4147,20 euros,
- au titre du contrat n° 2011FEEL5243, 4521,60 euros,
- 21,60 euros en tout au titre de l'indemnité forfaitaire de 5 % du montant HT du loyer prévue par l'article 2-6° des conditions générales des contrats,
- 120 euros en tout au titre des indemnités de rejet,
- 80 euros en tout en application de l'article D 441-5 du code de commerce,
dit que ces sommes portent intérêts au taux légal :
- à compter du 23 mai 2018 sur la somme de 574,08 euros,
- pour les indemnités d'utilisation, à compter de l'exigibilité de chacune d'elles,
- à compter de l'assignation introductive d'instance sur les autres sommes,
et ce avec capitalisation dans les conditions prévues par l'article 1343-2 du code civil,
déboute les parties de leurs demandes de première instance et d'appel fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
condamne M. [V] aux dépens.
Le greffier Le président
Delphine Verhaeghe Bruno Poupet