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Décisions

CA Rennes, 3e ch. com., 10 septembre 2024, n° 23/00984

RENNES

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

MCBP 35 (SARL)

Défendeur :

Appli'Thermic (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Contamine

Conseillers :

Mme Clément, Mme Jeorger-Le Gac

Avocats :

Me Ermeneux, Me Le Berre Boivin, Me Azincourt

CA Rennes n° 23/00984

9 septembre 2024

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Damon Energies a débuté son activité le 15 mars 2017. Elle exerçait sous le nom commercial de Damon Energies. Le 31 mars 2017 elle a acquis un fonds artisanal de travaux d'électricité plomberie et chauffage de la société Vincent Damon. Le 7 décembre 2018 elle a changé de dénomination et de nom commercial pour celui d'Appli'Thermic.

M. [C] est associé et co-gérant, avec M. [P], de la société à Appli'Thermic. Cette société exerce une activité de travaux d'installation, d'entretien et de maintenance dans les domaines des énergies renouvelables, de la plomberie et du chauffage, et d'électricité.

M. [C] était également gérant de la société à responsabilité limitée Applic'Froid qui détenait un fonds de vente, installation, dépannage de matériel frigorifique, de chauffage et matériel de chauffage et de cuisine professionnelle exploité dans son établissement de la zone artisanale de la Bougeoire à [Localité 8].

Le 30 août 2019, la société Applic'Froid a cédé ce fonds à la société MCBP 35 comprenant le nom commercial « Applic'Froid », la clientèle, le ficher clientèle, les droits de propriété intellectuelle résultant de son site internet applic-froid.fr, des éléments matériels et le bénéfice des contrats en cours.

L'acte de cession du fonds artisanal par la société Applic'Froid comportait en son article 4 une obligation de non concurrence engageant tant la société Applic'Froid , cédante, que son gérant à titre personnel, M. [C].

M. [C] est associé unique et gérant de la société Nactitech dont l'objet est la prise de participation financière dans toutes entreprises.

La société Applic'Froid a été dissoute à compter du 26 mai 2020 suite à la réunion de toutes les parts sociales au profit d'un associé unique, la société Nactitech. La société a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 13 août 2020.

Estimant que la société Appli'Thermic et M. [C] avaient violé la clause de non concurrence, la société MCBP 35 les a assignés en paiement de dommages-intérêts.

Par jugement du10 novembre 2022, le tribunal de commerce de Rennes a :

- Constaté la violation de l'obligation contractuelle de non concurrence par M. [C],

- Jugé que l'obligation de non concurrence est inopposable à la société Appli'Thermic et débouté en conséquence la société MCBP 35 de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de celle-ci formulées à ce titre,

- Condamné M. [C] à respecter la clause de non-concurrence sous astreinte provisoire de 500 euros par jour à compter du 15ème jour de la signification de la décision et ce pendant un délai de 30 jours, après quoi il devra à nouveau y être fait droit,

- Condamné M. [C] à verser à la société MCBP 35 une indemnité d'un montant de 15.000 euros au titre du préjudice moral,

- Débouté M. [C] et la société Appli'Thermic de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- Débouté la société MCBP 35 de sa demande à l'encontre de M. [C] de règlement de la somme de 15.441, 99 euros au titre de factures impayées,

- Débouté la société MCBP 35 de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Débouté la société MCBP 35 de sa demande condamnation aux dépens incluant les frais de constat,

- Débouté la Société MCBP 35 du surplus de ses demandes, fins et conclusions,

- Dit que l'exécution provisoire du présent jugement n'est pas écartée.

La société MCBP a interjeté appel le 14 février 2023.

Les dernières conclusions de la société MCBP sont en date du 16 avril 2024. Les dernières conclusions de M. [C] et de la société Appli-Thermic sont en date du 16 avril 2024.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 avril 2024.

PRETENTIONS ET MOYENS :

La société MCBP demande à la cour de :

- Confirmer le jugement en ce qu'il :

- A constaté la violation de l'obligation contractuelle de non-concurrence par M. [C],

- S'est réservé le droit de liquider l'astreinte conformément aux dispositions de l'article 491 du code de procédure civile,

- A reconnu l'existence d'un risque de confusion constitutif de concurrence déloyale,

- A débouté M. [C] et la société Appli'Thermic de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- Réformer le jugement en ce qu'il a :

- Jugé que l'obligation de non concurrence est inopposable à la société Appli'Thermic et débouté en conséquence la société MCBP 35 de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de celle-ci formulées à ce titre,

- Condamné M. [C] à respecter la clause de non-concurrence sous astreinte provisoire de 500 euros par jour à compter du 15 ème jour de la signification de la décision et ce pendant un délai de 30 jours, après quoi il devra à nouveau y être fait droit,

- Condamné M. [C] à verser à la société MCBP 35 une indemnité d'un montant de 15.000 euros au titre du préjudice moral,

- Débouté la société MCBP 35 de sa demande à l'encontre de M. [C] de règlement de la somme de 15.441, 99 euros au titre de factures impayées,

- Débouté la société MCBP 35 de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Débouté la société MCBP 35 de sa demande condamnation aux dépens incluant les frais de constat,

- Débouté la Société MCBP 35 du surplus de ses demandes, fins et conclusions et notamment celles tendant à voir :

- Ordonner la cessation de l'activité de M. [C] en tant que gérant de la société Appli'Thermic,

- Condamné M. [C] et la société Appli'Thermic à respecter la clause de non-concurrence et à cesser l'activité de pompe à chaleur dans les 48 heures du jugement à peine d'astreinte définitive de 1.500 euros par jour de retard,

- Ordonné le changement de dénomination sociale de la société Appli'Thermic sous astreinte définitive de 1.500 euros par jour de retard dans le délai d'1 mois à compter de la signification du jugement,

- Ordonné la publication de la décision à intervenir par extrait dans 3 journaux au choix de la société MCBP 35 aux frais de la société Appli'Thermic sans que chaque insertion ne puisse excéder la somme de 2.500 euros HT,

- Condamné M. [C] et la société Appli'Thermic in solidum à verser à la société MCBP 35 la somme de 30.000 euros à titre de dommages intérêts,

Et, statuant à nouveau en cause d'appel :

A titre principal :

- Constater la violation de l'obligation de non-concurrence par M. [C] et la société Appli'Thermic,

En conséquence :

- Ordonner la cessation de l'activité de M. [C] en tant que gérant de la société Appli'Thermic,

- Condamner M. [C] et la société Appli'Thermic à respecter la clause de non-concurrence et à cesser l'activité de pompe à chaleur, dans les 15 jours de l'arrêt à intervenir, à peine d'astreinte définitive de 1.500 euros par jour de retard,

- Constater que M. [C] et la société Appli'Thermic ont commis des actes de concurrence déloyale,

En conséquence :

- Ordonner le changement de dénomination sociale de la société « Appli'Thermic » sous astreinte définitive de 1.500 euros par jour de retard, dans le délai d'un mois à compter de la signification,

- Condamner M. [C] et la société Appli'Thermic in solidum à verser à la société MCBP 35 la somme de 30.000 euros, au titre de dommages et intérêts,

- Condamner M. [C] et la société Appli'Thermic in solidum à verser à la société MCBP 35 la somme de 15.000 euros, au titre du préjudice moral et dans tous les cas Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [C] à verser la somme de 15.000 euros à titre de dommages intérêts,

- Constater que M. [C] a engagé sa responsabilité personnelle en sa qualité de dirigeant de la société Applic'Froid et s'est rendu coupable de détournements de fond,

- Constater que M. [C] s'était engagé personnellement à rembourser des refacturations effectuées par la société MCBP 35 ainsi que le salaire de septembre 2019 de Mme [V],

- Condamner M. [C] à payer à la société MCBP 35 la somme de 16.752.27 euros TTC avec intérêts à compter de la délivrance de l'assignation,

- Ordonner la publication de la décision à intervenir par extrait, au choix de la société MCBP35, dans 3 journaux de son choix, au frais de la société Appli'Thermic et de M. [C] sans que chaque insertion ne puisse excéder la somme de 2.500 euros HT,

- Débouter M. [C] et la société Appli'Thermic de l'intégralité de leurs demandes,

- Condamner M. [C] et la société Appli'Thermic in solidum à verser la somme de 25.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'instance et d'appel, incluant les frais de constat,

- Dire que les dépens d'appel seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

M. [C] et la société Appli'Thermic demandent à la cour de :

- Confirmer le jugement en ce qu'il a :

- Constaté l'inopposabilité de la clause de non-concurrence contractuelle à la société Appli'Thermic,

- Constaté l'absence de quelque acte de concurrence déloyale que ce soit de la part de la société Appli'Thermic,

- Constaté l'absence de faute de nature à engager la responsabilité contractuelle de la société Appli'Thermic,

- Constaté l'absence de faute de nature à engager la responsabilité délictuelle de la société Appli'Thermic,

Et par conséquent :

- Débouter purement et simplement la société MCBP 35, exerçant sous le nom commercial « Applic'Froid », de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, comme n'étant ni fondées, ni justifiées ni caractérisées, que ce soit tant en droit qu'en fait à l'encontre de la société Appli'Thermic,

- Débouter purement et simplement la société MCBP 35, exerçant sous le nom commercial « Applic'Froid », ses demandes financières formulées à l'encontre de M. [C] comme étant mal dirigées donc irrecevables,

Infirmer le jugement en ce qu'il a :

- Constaté la violation de la clause de non-concurrence contractuelle par M. [C],

- Condamné M. [C] à respecter la clause de non-concurrence et ce, sous astreinte provisoire de 500 euros par jour à compter du 15 ème jour de la signification de la décision à intervenir et ce, pendant 30 jours, après quoi, il devra à nouveau y être fait droit,

- Condamné M. [C] à verser à la société MCBP 35 une indemnité d'un montant de 15.000 euros, au titre du préjudice moral,

- Débouté M. [C] et la société Appli'Thermic de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

Et, statuant à nouveau sur ces points :

- Constater l'absence de violation de la clause de non-concurrence contractuelle par M. [C],

- Constater l'absence de quelque acte de concurrence déloyale de la part de M. [C],

En conséquence,

- Constater l'absence de faute de nature à engager la responsabilité contractuelle de M. [C],

- Constater l'absence de faute de nature à engager la responsabilité délictuelle de M. [C],

Par conséquent :

- Débouter purement et simplement la société MCBP 35, exerçant sous le nom commercial «Applic'Froid », de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, comme n'étant ni fondées, ni justifiées ni caractérisées, que ce soit tant en droit qu'en fait, dirigées et formulées à l'encontre de M. [C],

Au surplus :

- Condamner la société MCBP 35, exerçant sous le nom commercial « Applic'Froid » à régler à M. [C], ainsi qu'à la société Appli'Thermic, chacun, la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'instance et d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.

DISCUSSION :

Les demandes de constat ne sont pas des demandes en justice. Elles ne seront examinées que comme moyens.

Sur la violation de la clause de non concurrence :

L'acte de cession de fonds artisanal mentionne que le fonds vendu est un fonds artisanal de vente, installation, dépannage de matériel frigorifique, de chauffage et matériel de chauffage et de cuisine professionnelle actuellement exploité dans son établissement de [Localité 8].

Cet acte comporte une clause de non concurrence :

Le vendeur et Monsieur [S] [C], pris en sa personne, s'interdisent expressément :

(i) la faculté de créer ou faire valoir directement ou indirectement, aucun fonds de commerce similaire comme aussi d'être intéressé, dans un fonds de cette nature ou une société exploitant un fonds de cette nature, pendant une durée de 7 ans, à compter du jour d'entrée en jouissance de l'acquéreur sur le territoire de l'Ille et Vilaine ainsi que dans un rayon de 50 km autour de [Localité 8] à peine de tous dommages et intérêts envers l'acquéreur ou ses ayants cause sans préjudice du droit qu'il aurait de faire cesser cette contravention et de faire fermer l'établissement ouvert et exploité au mépris de la présente clause.

Il est expressément convenu entre les parties que cet engagement de non-concurrence n'inclut pas les postes de salariés que Monsieur [S] [C] pourrait exercer.

Il n'est pas établi que M. [C] ait été autorisé à s'intéresser à un fonds commercialisant des pompes à chaleur. L'interdiction de concurrence ne prévoyait en outre pas que des activités exercées par ailleurs dans ce domaine par M. [C] antérieurement à la cession pourraient se poursuivre.

Le fait qu'à quelques occasions, postérieurement à la cession, la société MCBP 35 soit intervenue sur des chantiers de la société Appli'Thermic ne vaut pas non plus renoncement de la première à se prévaloir de la clause de non concurrence.

Il résulte de la fiche technique du matériel commercialisé par la société Appli'Thermic que les pompes à chaleur qu'elle fournie peuvent être utilisées en mode chaud ou en mode rafraîchissement.

Il résulte ainsi du devis n°1325 de la société Appli'Thermic qu'il vise la climatisation réversible pour un rez de chaussée. La société MCBP 35 produit également deux autres devis établis par la société Appli-Thermic visant une climatisation réversible. Le simple fait pour la société Appli-Termic d'établir ces devis constitue une violation de la clause de non concurrence, même si les travaux concernés n'ont pas été réalisés.

Il importe peu que le code NAF de classification de l'activité de la société Appli'Thermic ne vise pas cette activité dès lors qu'il apparaît qu'elle est effectivement exercée.

La technologie utilisée pour obtenir le froid ou le chaud, air ou hydraulique, importe peu, seul l'effet chaud ou froid ayant été visé par la clause de non concurrence.

La société Appli-Thermic a son siège social a près de 3 km de celui de la société MCBP 35. Les devis produits visent des installations dans la zone couverte par la clause de non concurrence.

Cette activité de fourniture de pompes à chaleur vise donc des prestations de chauffage et réfrigérantes objets du fonds de commerce cédé et donc visées par la clause de non concurrence.

M. [C] est co-gérant et associé de la société Appli'Thermic. Du seul fait de ces fonctions des gérant et de sa qualité d'associé il est donc intéressé dans l'exploitation de ce fonds au sens des dispositions de la clause de non concurrence, en violation de ses obligations contractuelles.

La société Appli'Thermic, représentée notamment par son gérant M. [C], ne pouvait ignorer qu'il violait ainsi la clause de non concurrence à travers l'activité de la société Appli'Thermic. Elle a engagé sa responsabilité quasi délictuelle.

Sur la concurrence déloyale :

La société MCBP, exerçant sous le nom commercial d'Applic'Froid, fait valoir que la la société d'Appli'Thermic aurait commis un acte de concurrence déloyale en créant un risque de confusion afin d'opérer un détournement de clientèle à son profit. Elle se prévaut en ce sens d'une similitude entre les signes Applic'Froid et Appli'Thermic.

Il apparaît que les signes en question sont similaires et peuvent prêter à confusion. Ces deux signes préexistaient cependant à la cession.

La société Damon Energie avait changé de dénomination sociale et de nom commercial pour celui d'Appli-Thermic le 7 décembre 2018. Ces changements avaient été publiés au BODACC et mentionnés au registre du commerce et des sociétés. A supposer même que le nom d'Appli-Thermic n'ait pas été utilisé dès décembre 2018, la société Appli-Thermic avait adopté cette dénomination avant la cession et il ne peut pas utilement lui être reproché d'avoir utilisé cette dénomination.

Le site internet applic-froid.fr a fait l'objet de la cession du fonds de commerce. Il n'est pas justifié que M. [C] ou la société Appli'Thermic ait continué à l'utiliser après la cession. La société MCBP 35 étant titulaire des droits sur ce site, c'est à elle qu'il revenait d'intervenir pour le faire le cas échéant modifier. Le fonctionnement de ce site après la cession ne peut être imputé à la société Appli'Thermic.

Le commissaire de justice commis par la société MCBP 35 n'a pas constaté le 6 octobre 2021 puis le 13 octobre 2023 de référence à la société Applic-Froid sur le site de la société Appli'Thermic.

Il résulte d'une capture d'écran du site archive.org en date du 12 octobre 2020 que la société Appli'Thermic se présentait comme offrant les services de deux entreprises, « Applic'Froid Appli Thermic » et « Damon Energies Appli-Thermic ». S'agissant d'un site d'archives, et non du site même de la société Appli-Thermic, cette pièce ne permet pas d'établir qu'à la date du 12 octobre 2020 la société Appli-Thermic continuait à utiliser le nom d'Applic'Froid.

Le fait que le site Google maps présente une photographie d'un bâtiment sur lequel figure le nom d'Applic'Froid ne peut être imputé à la société Appli-Thermic qui n'est pas responsable de la prise de vues sur la voie publique ni de leur utilisation dans le temps. La photographie en question n'est pas datée et il n'est pas justifiée qu'elle ait été prise après la date de la cession litigieuse.

Il apparaît ainsi qu'il n'est pas établi que la société Appli-Thermic ait cherché après la cession litigieuse à créer une confusion dans l'esprit de la clientèle. Elle a poursuivi une activité qui préexistait sous un même nom.

La société MCPB 35 fait valoir que la société Appli-Thermic interviendrait sur des pompes à chaleur sans détenir l'attestation de capacité à manipuler les fluides frigorigène ce qui constituerait un acte de concurrence déloyale.

La société Appli-Thermic reconnaît qu'elle ne détient pas cette attestation de capacité. Elle justifie par la production de factures qu'elle fait appel à des sociétés bénéficiant de cette attestation lorsqu'elle met en service une pompe à chaleur. Les dernières factures ainsi produites datent d'octobre 2022 mais la société MCPB 35 ne justifie pas que la société Appli-Thermic soit intervenue sur des mises en service de pompes à chaleur sans avoir recours à la prestation d'une personne habilitée.

Aucun acte de concurrence déloyale n'est établi à l'encontre de la société Appli-Thermic ou de M. [C]. Les demandes y afférentes seront rejetées.

Sur la responsabilité personnelle de M. [C] :

La société MCPB 35 fait valoir que M. [C] aurait engagé sa responsabilité personnelle en détournant des sommes payées par erreur par des clients sur le compte bancaire de la société Applic'Froid qu'il n'avait pas clôturé entre la date de la cession, 30 août 2019, et la date de la radiation de la société Applic'Froid, 13 août 2020.

M. [C] fait valoir que la demande de paiement serait prescrite.

L'action en responsabilité dirigée par un tiers contre un dirigeant de Sarl se prescrit par trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation. La dissimulation. dissimulation implique un comportement intentionnel :

Article L 223-23 du code de commerce :

Les actions en responsabilité prévues aux articles L. 223-19 et L. 223-22 se prescrivent par trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation. Toutefois, lorsque le fait est qualifié crime, l'action se prescrit par dix ans

S'il y a eu volonté de dissimulation, la révélation s'apprécie à l'égard de la personne qui exerce l'action.

Les agissements allégués auraient pris fin le 13 août 2020. La société MCBP 35 se prévaut d'encaissements par la société Applic'Froid de paiements de la part de clients qui auraient du être adressés à la société MCBP 35.

La société MCBP 35 produit les relevés du compte litigieux pour l'année 2020. Elle indique qu'elle a continué à recevoir à la suite d'un défaut d'indication du changement d'adresse à la banque. Il en résulte que loin d'être dissimulés, les erreurs de paiement de certains clients étaient adressées à la société MCBP 35. La société MCBP 35 n'indique pas par quel comportement M. [C] aurait dissimulé ces paiements ou aurait dissimulé que certains clients n'avaient pas payé les sommes dues à la société MCBP 35. Elle n'explique pas comment elle est restée plusieurs mois ou plusieurs années sans s'inquiéter de ne pas percevoir certains paiements ni en quoi M.[C] aurait eu la volonté de dissimuler cette absence de paiement.

Les devis produits en pièces 7, 8 et 9 par la société MCBP 35 sont postérieurs à la période litigieuse et sont sans lien avec les paiements effectués par erreur sur le mauvais compte. Ils n'ont pas pu valoir révélation et ne permettent pas d'établir une dissimulation sur les erreurs de paiement.

Ces erreurs de paiement, et de perception, relèvent d'une négligence mais n'ont pas été assortis d'une dissimulation.

La société Applic'Froid a présenté une demande de paiement des sommes en question dans ses conclusions du 25 octobre 2023. Faisant valoir que les encaissements litigieux ont pris fin au 13 août 2020, la société Applic'Froid est prescrite en sa demande formée contre M. [C] au titre des fautes qu'il aurait commises dans la gestion de la société Applic'Froid.

Sur les engagements de remboursement :

La société MCBP 35 fait valoir que M. [C] se serait engagé à lui rembourser certaines sommes.

Ce dernier conteste s'être engagé personnellement à régler les sommes invoquées par la société MCBP 35.

Il résulte des échanges de courriels du 4 novembre 2019 que M. [C] a indiqué être disposé à régler ce qu'il devait à la société MCBP 35. Il soumettait cependant ce paiement à des réponses quant aux engagements pris et signés dans le protocole. Il ne s'agit donc pas d'un engagement de paiement ferme.

En outre, il résulte des termes utilisés dans ces messages que M. [C] y parle en qualité de dirigeant de la société Applic'Froid, société cédante, et non pas à titre personnel. Il fait ainsi notamment référence à la nécessité de clôturer l'opération de vente, opération à laquelle il n'a pas participé en son nom personnel n'étant pas propriétaire à titre personnel du fonds cédé. Un éventuel engagement de sa part, à le supposer avéré, ne l'aurait ainsi engagé qu'en sa qualité de gérant.

Il n'est donc pas justifié d'un engagement de paiement de la part de M. [C]. Les demandes formées à ce titre seront rejetées.

Sur le montant du préjudice :

Comme il a été vu supra, il apparaît ainsi que la société MCBP 35 ne peut se prévaloir que d'une violation de la clause de non concurrence par M. [C], la société Appli'Thermic ayant permis cette violation.

La société MCBP 35 se prévaut d'un gain manqué et d'un détournement de clientèle.

Elle ne justifie cependant pas d'un chiffrage du gain manqué ni de l'importance de la clientèle alléguée comme perdue. Elle ne produit aucun élément comptable sur l'évolution du chiffre d'affaires, et des marges, de l'activité cédée après la date de la cession.

La violation de la clause de non concurrence lui a cependant nécessairement occasionné un préjudice matériel qu'il y a lieu de fixer à la somme de 15.000 euros au vu des montant de chiffre d'affaire de l'activité cédée et des quelques devis et factures produits aux débats.

La société MCBP 35 ne justifie d'aucune atteinte à sa renommée, d'aucun dénigrement. Elle ne justifie pas d'un préjudice moral. Sa demande formée à ce titre sera rejetée.

Il y a donc lieu de condamner la société Appli'Thermic et M. [C] à payer à la société MCBP 35 la somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts indemnisant son préjudice matériel.

Sur les interdictions et mises en conformité :

Comme il a été vu supra, l'utilisation du nom d'Appli'Thermic n'est pas fautif. Il y a donc lieu de rejeter la demande tendant à la modification du nom de la société.

Ce n'est pas le fait que la société Appli'Thermic intervienne dans le domaine de l'activité cédée qui caractérise en soi une violation de la clause de non concurrence mais le fait que M. [C] soit intéressé, en qualités d'associé et de gérant, dans la société Appli-Thermic.

Ainsi, soit M. [C] devra se désintéresser de la société, soit cette dernière devra cesser toute activité visée par la clause de non concurrence. Il n'appartient pas à la cour de mettre fin par elle même aux fonctions de M. [C].

Il y a donc lieu d'enjoindre à la société Appli'Thermic et à M. [C] de se mettre en conformité avec les termes de la clause de non concurrence dans le mois de la signification de la présente décision, sous astreinte passé ce délai de 300 euros par jours pendant une durée de 30 jours.

Sur la publication de la décision :

Il n'apparaît pas opportun, ni même utile, de procéder à la publication de la présente décision. La demande formée en ce sens sera rejetée.

Sur les frais et dépens :

Il y a lieu de condamner la société Appli'Thermic et M. [C] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et de rejeter les demandes formées en appel au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les frais de constats ne sont pas compris dans les dépens d'instance et la demande de les y inclure sera rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La cour :

- Infirme le jugement en ce qu'il a :

- Jugé que l'obligation de non concurrence est inopposable à la société Appli'Thermic et débouté en conséquence la société MCBP 35 de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de celle-ci formulées à ce titre,

- Condamné M. [C] à respecter la clause de non-concurrence sous astreinte provisoire de 500 euros par jour à compter du 15ème jour de la signification de la décision et ce pendant un délai de 30 jours, après quoi il devra à nouveau y être fait droit,

- Condamné M. [C] à verser à la société MCBP 35 une indemnité d'un montant de 15.000 euros au titre du préjudice moral,

- Débouté M. [C] et la société Appli'Thermic de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- Débouté la Société MCBP 35 du surplus de ses demandes, fins et conclusions.

- Confirme le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

- Condamne la société Appli'Thermic et M. [C] à payer à la société MCBP 35 la somme globale de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts en indemnisation du préjudice matériel résultant de la violation de la clause de non concurrence comprise dans l'acte de cession du 30 août 2019,

- Condamne la société Appli'Thermic et M. [C] à se mettre en conformité avec la clause de non concurrence comprise dans l'acte de cession du 30 août 2019, soit pour la première en cessant toute activité visées par ladite clause, soit pour le second à justifier qu'il n'a plus d'intérêt dans la société Appli-Thermic,

- Dit que cette mise en conformité devra intervenir dans le délai de 30 jours passé la signification de la présente décision et sous astreinte, passé ce délai, de 300 euros par jour de retard pendant 30 jours,

- Rejette les autres demandes des parties,

- Condamne la société Appli'Thermic et M. [C] aux dépens d'appel qui seront recouvrés en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.