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Décisions

CA Pau, 2e ch - sect. 1, 11 septembre 2024, n° 23/02687

PAU

Ordonnance

Autre

CA Pau n° 23/02687

11 septembre 2024

JP/VC

Numéro 24/ 2686

COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1

ORDONNANCE DU

11/09/2024

Dossier : N° RG 23/02687 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IU4L

Affaire :

[I] [F]

C/

[L] [V]

- O R D O N N A N C E -

Nous, Jeanne PELLEFIGUES, Magistrat de la mise en état de la 2ème Chambre civile - 1ère section, de la Cour d'Appel de Pau,

Assistée de Nathalène DENIS, greffière, présente à l'appel des causes à l'audience des incidents du 12 Juin 2024

Vu la procédure d'appel :

ENTRE :

Monsieur [I] [F]

né le 31 Octobre 1966 à [Localité 4]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 3] / FRANCE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C64445-2023-004715 du 15/11/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PAU)

Représenté par Me Sidi yaya TRAORE, avocat au barreau de Pau

ET :

Monsieur [L] [V]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Philippe BORDENAVE, avocat au barreau de Pau

* * *

Par jugement contradictoire du 7 septembre 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Pau :

- Déclare valide le congé pour vente délivré le 21 juin 2022 à monsieur [I] [F] ;

- Constate que monsieur [I] [F] est occupant sans droit ni titre de la maison située [Adresse 2] à [Localité 3] depuis le 31 décembre 2022 ;

- Accorde à monsieur [I] [F] un délai de six mois a compter de la notification de la présente décision pour libérer les lieux ;

- Dit qu'à défaut pour monsieur [I] [F] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, monsieur [L] [V] pourra, deux mois aprés la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique ;

- Condamne monsieur [I] [F] à verser à monsieur [L] [V] la somme de 2 214 € au titre de 1'arriéré de loyers restant dus au 31 décembre 2022 et celle de 374 € au titre de la taxe des ordures ménagères pour les années 2021 et 2022 ;

- Condamne monsieur [I] [F] à verser à monsieur [L] [V] une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer et charges à compter du 1er janvier2023 jusqu'a la libération effective des lieux ;

- Déboute monsieur [I] [F] de ses demandes ;

- Condamne monsieur [I] [F] à verser à monsieur [L] [V] une somme de 800 € au titre de 1'artic1e 700 du code de procédure civile ;

- Condamne monsieur [I] [F] aux dépens.

Par déclaration du 9 octobre 2023, [I] [F] a interjeté appel de la décision.

Par conclusions d'incident du 4 avril 2024, [L] [V] a sollicité qu soit :

Prononcée la radiation de l'affaire du rôle de la cour faute d'exécution du jugement du 7 septembre 2023 par Monsieur [F],

Condamné Monsieur [F] aux dépens de l'incident et à une indemnité de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

*

[I] [F] conclut à :

vu l'article 524 du code de procédure civile,

vu la jurisprudence,

vu les pièces versées aux débats

Juger que Monsieur [F] se trouve dans l'impossibilité d'exécuter le jugement entrepris

Débouter Monsieur [V] de sa demande de radiation du rôle

Condamner en conséquence Monsieur [V] à verser à Monsieur [F] la somme de 1200€ sur le fondement de l 'article 700 du Code de procédure civile.

SUR CE,

Suivant contrat du 1er janvier 2011, Monsieur [L] [V], a donné à bail à Monsieur [I] [F] une maison située [Adresse 2] à [Localité 3] moyennant paiement d'un loyer mensuel de 650 €.

Par acte du 21 juin 2022, [L] [V] a fait délivrer à [I] [F] un congé pour vente pour le 31 décembre 2022.

Suivant acte du 2 janvier 2023 [L] [V] a fait assigner [I] [F] devant le juge des contentieux de la protection de Pau en vue de valider le congé délivré le 21 juin 2022 ordonner l'expulsion de son locataire et le condamner au paiement de la somme de 2214 € au titre de l'arriéré de loyer au 31 décembre 2022 ainsi qu'à une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer et des charges jusqu'à la libération effective des lieux.

Par jugement dont appel le juge des contentieux de la protection a validé le congé pour vente, constaté qu'[I] [F] était occupant sans droit ni titre de la maison et lui a accordé un délai de 6 mois à compter de la notification de la décision pour libérer les lieux.

[L] [V] a saisi le conseiller de la mise en état d'un incident aux fins d'obtenir la radiation de l'affaire pour défaut d'exécution au motif qu'[I] [F] se maintient dans les lieux et n'a pas réglé les causes du jugement .

[I] [F] fait valoir qu'il est dans l'impossibilité d'exécuter le jugement entrepris.

En effet il a été déclaré recevable à une procédure de surendettement et son dossier a été orienté vers un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire. Ses seules ressources sont composées de l'allocation d'adulte handicapé et de l'allocation logement à hauteur de la somme de 1262 € avec des charges de 1436 € ; la commission, après examen du dossier, a retenu une mensualité de remboursement de zéro euro.

Il considère que [L] [V] ne démontre nullement la nécessité d'obtenir la condamnation litigieuse puisqu'il serait propriétaire de nombreux biens immobiliers et jouirait d'une retraite confortable. D'ailleurs il ne verse aux débats aucun élément permettant d'établir qu'il se trouve en difficulté financière alors qu'il est lui-même en difficulté financière malade et fragilisé socialement et psychologiquement.

Il a vainement essayé de se loger dans le parc social mais ces démarches n'aboutissent pas en raison de la faiblesse de ses ressources et de son impossibilité de produire auprès des bailleurs des quittances de loyers. En effet son bailleur ne lui a jamais délivré de quittances.

Il conteste avoir tenu les propos qui lui sont prêtés par son bailleur suivant lesquels il aurait dit disposer sur son compte bancaire de l'intégralité des sommes dues.

Aux termes de l'article 524 du code de procédure civile, « lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu'il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décidé à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel' à moins qu'il apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision ».

Il résulte du constat du 2 janvier 2023 d'état des lieux transformé en procès-verbal de difficultés, dressé suite au congé pour vente signifié au locataire le 21 juin 2022 et à la lettre de convocation à l'état des lieux de sortie notifiée en lettre recommandée avec accusé de réception du 30 novembre 2022, que le commissaire de justice n'a pu accéder à la maison occupée par [I] [F] qu'il a joint cependant par téléphone et qui lui a tenu ces propos : « M. [F] m'indique qu'il est malade et qu'il ne compte pas quitter les lieux car il n'a pas cherché d'autres logements. En suivant ce dernier a raccroché le téléphone et a coupé court à la conversation. Le locataire habite toujours les lieux. »

[L] [V] communique également une déclaration sur l'honneur établie par Monsieur [Y] [P] [R] indiquant qu'il avait entendu une conversation téléphonique entre [L] [V], qui avait mis le haut-parleur du téléphone lorsqu'il avait vu s'afficher le nom de son interlocuteur, et [I] [F], au cours de laquelle [I] [F] avait menacé [L] [V] et lui avait fait du chantage en lui annonçant qu'il ne partirait pas sauf s'il lui remettait la somme de 10'000 € en précisant qu'il ne payerait pas les loyers parce qu'il n'avait pas d'argent.

Les constatations d'un officier public ministériel et la déclaration sur l'honneur d'un témoin ne sont pas utilement mises en cause par [I] [F].

Ce dernier ne démontre pas l'impossibilité d'exécuter la décision alors qu'il perçoit une APL et que la modicité de ses revenus reste compatible avec un logement dans le parc social.

Les justificatifs qu'il produit, en l'occurrence une simple attestation d'un dépôt de demande auprès de la maison de l'habitat et du patrimoine, ne sont pas suffisants à démontrer qu'il a recherché activement à bénéficier d'un logement social et mis à profit le délai de grâce de six mois qui lui a été accordé par le tribunal pour se reloger.

Il tire prétexte de l'absence de délivrance de quittances sans qu'il soit établi que le bailleur ait manqué à cette obligation à son égard et qu'à défaut, il ait sollicité auprès de lui ces documents.

En réalité, il apparaît qu'[I] [F] n'a pas l'intention de libérer les lieux, au mépris de la décision de justice, considérant que sa situation matérielle difficile justifie cette occupation alors que le bailleur se trouverait plus avantagé que lui-même ce qui n'est d'ailleurs pas démontré, [L] [V] alléguant qu'il a besoin de vendre cet appartement pour vivre et aider sa fille.

Ainsi faute pour lui de démontrer l'impossibilité d'exécuter la décision et de tentatives réelles d'exécuter en tout ou partie la décision de justice et de se reloger, il y a lieu de faire droit à la demande de radiation de l'affaire.

La demande présentée par [L] [V] fondée sur l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée

PAR CES MOTIFS

le conseiller de la mise en état

Prononce la radiation du rôle de l'affaire N°23/02687

Rejette la demande de [L] [V] fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Dit [I] [F] tenu aux dépens de l'incident.

Fait à Pau, le 11 septembre 2024

Le Greffier, Le Magistrat de la mise en état,

Nathalène DENIS Jeanne PELLEFIGUES