CA Paris, Pôle 4 ch. 5, 11 septembre 2024, n° 23/02691
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Isopan Spa (Sté)
Défendeur :
Axa France Iard (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Jariel
Conseillers :
Mme Delacourt, Mme Szlamovicz
Avocats :
Me Regnier, Me Arigoni, Me Moulaï, Me Bari, Me Bellaiche, Me Haigar
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
La société Holding Garnung, aux droits de laquelle est venue la société De l'Airal, a, en tant que maître de l'ouvrage, fait construire un bâtiment à usage industriel sis [Adresse 1] à [Localité 7] (33).
A été confié à la société BATI VB, aux droits de laquelle est venue la société Vergne construction, assurée auprès de la société AXA France IARD (la société Axa), le lot n° 3 " charpente béton bardage couverture zinguerie étanchéité serrurerie ". Pour sa réalisation, le constructeur a installé des panneaux de couverture Isopan Isorife Roof 120 mm, vendus par la société Soferac, devenue [K] [X], et fabriqué par la société de droit italien Isopan SpA.
Le maître de l'ouvrage a souscrit une police dommages-ouvrage (DO) auprès de la société Gan assurances.
Le 7 septembre 2017, l'ouvrage a été réceptionné.
Le 16 février 2018, la société De l'Airal a dénoncé des infiltrations en provenance de la couverture du bâtiment à la société Gan assurances, laquelle a mandaté le cabinet Saretec construction pour effectuer une expertise DO.
Le 7 août 2018, une note a été adressée aux parties en cause et, les 27 septembre 2018, 15 octobre 2018 et 15 février 2019, trois rapports d'expertise ont été établis par ce cabinet.
Par actes des 21 août et 30 septembre 2020, la société Axa, en sa qualité d'assureur de la société BATI VB, agissant à titre principal sur le fondement de l'article 1641 du code civil et, à titre subsidiaire, sur le fondement de la responsabilité de droit commun, a sollicité la condamnation in solidum des sociétés Isopan Italy, Isopan France et [K] [X] à la relever et garantir indemne des sommes versées à la société Gan assurances.
La société Isopan SpA est intervenue volontairement à l'instance et a présenté des conclusions d'incident. La société [K] [X] a également présenté des conclusions d'incident.
Par ordonnance du 17 janvier 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris a statué en ces termes :
Déclare irrecevables les exceptions d'incompétence soulevées par les sociétés Isopan SpA et Isopan France,
Rejette l'exception de nullité de l'assignation délivrée à l'encontre de la société Isopan Italy,
Donne acte à la société Isopan SpA de son intervention volontaire,
Déclare irrecevables les demandes formées par les sociétés Axa et [K] [X] à l'encontre de la société Isopan France,
Rejette les fins de non-recevoir tirées du défaut d'intérêt et de qualité à agir à l'encontre de la société Isopan SpA,
Rejette la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la société Axa au titre de son recours subrogatoire,
Rejette les fins de non-recevoir tirées de la prescription des actions fondées sur la garantie des vices cachés,
Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et rejette les demandes fondées de ce chef,
Reserve les dépens en fin d'instance,
Renvoie l'examen de l'affaire à l'audience de mise en état du 27 février 2023 à 13h45 pour les conclusions au fond en réponse de la société Axa.
Par déclaration en date du 1er février 2023, la société Isopan SpA a interjeté appel de l'ordonnance, intimant devant la cour :
- la société Axa,
- la société [K] [X].
EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 10 mai 2024, la société Isopan SpA demande à la cour de :
Infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle :
Déclare irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par la société Isopan SpA,
Rejette les fins de non-recevoir tirées de la prescription des actions fondées sur la garantie des vices cachés.
Et, statuant à nouveau :
Sur l'appel en garantie de la société [K] [X]
In limine litis
Se déclarer incompétente pour statuer sur l'appel en garantie de la société [K] [X] à l'encontre de la société Isopan SpA au profit du tribunal italien de Vérone ;
Inviter la société [K] [X] à mieux se pourvoir ;
En conséquence
Ordonner la disjonction de (i) l'appel en garantie de la société [K] [X] et (ii) des demandes de Axa dirigées à l'encontre de la société Isopan SpA
Subsidiairement,
En conséquence de l'application du droit italien régissant le contrat de vente entre la société [K] [X] et la société Isopan SpA,
Juger l'appel en garantie de la société [K] [X] sur le fondement du droit français de la garantie des vices cachés à l'encontre de la société Isopan SpA irrecevable pour défaut d'intérêt ;
Juger l'appel en garantie de la société [K] [X] à l'encontre de la société Isopan SpA prescrit en application du droit italien ;
Plus subsidiairement,
En conséquence de l'irrecevabilité de l'action principale de la société Axa contre la société [K] [X] (voir paragraphes 7 et 8 ci-après),
Juger l'appel en garantie de la société [K] [X] à l'encontre de la société Isopan SpA irrecevable pour défaut d'intérêt,
En conséquence
Déclarer la société [K] [X] irrecevable en l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Isopan SpA
Sur les demandes de la société Axa
À titre principal
Juger l'action de la société Axa sur le fondement de la garantie des vices cachés contre la société [K] [X] prescrite ;
En conséquence
Déclarer la société Axa irrecevable en l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société [K] [X] ;
À titre subsidiaire
Juger l'action directe de la société Axa sur le fondement de la garantie des vices cachés contre la société Isopan SpA prescrite
En conséquence
Déclarer la société Axa irrecevable en l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Isopan SpA
En tout état de cause
Condamner la société [K] [X] et la société Axa à payer chacune la somme de 4 000 euros à la société Isopan SpA en application de l'article 700 du code de procédure civile
Condamner la société [K] [X] et la société Axa au paiement des entiers dépens et dire que les dépens relatifs à l'appel pourront être recouvrés directement par la société Régnier, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 14 mai 2024, la société [K] [X] demande à la cour de :
A titre principal :
Infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :
- Rejeté les fins de non-recevoir tirées du défaut d'intérêt et de qualité à agir de la société Axa à l'encontre de la société [K] [X] ;
- Rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de la société Axa fondées sur la garantie des vices cachés à l'encontre de la société [K] [X],
Et, statuant à nouveau :
Juger que la société Axa ne justifie pas de sa qualité à agir à l'encontre de la société [K] [X] ;
Juger l'action de la société Axa sur le fondement de la garantie des vices cachés contre la société [K] [X] est prescrite ;
En conséquence,
Déclarer irrecevables l'ensemble des demandes formées par la société Axa à l'encontre de la société [K] [X] ;
A titre subsidiaire :
Confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :
- Déclaré irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par la société Isopan SpA ;
- Déclaré recevable l'action de la société [K] [X] à l'encontre de la société Isopan SpA ;
- Rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de la société [K] [X] à l'encontre de de la société Isopan SpA ;
A titre très subsidiaire, si la cour devait infirmer l'ordonnance en déclarant recevable l'exception d'incompétence de la société Isopan SpA, il est alors demandé de statuer en ce sens :
Déclarer les juridictions françaises compétentes pour connaître du présent litige ;
Rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de la société [K] [X] à l'encontre de de la société Isopan SpA,
Déclarer recevable l'action de la société [K] [X] à l'encontre d'Isopan SpA
En toute hypothèse :
Condamner la société Axa et la société Isopan SpA à verser la somme de 5 000 euros à la société [K] [X] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner les mêmes aux dépens de la procédure.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 7 mai 2024, la société Axa, ès qualités, demande à la cour de :
Juger que le point de départ de l'action en garantie des vices cachés court à compter du 15 octobre 2018, à tout le moins à compter du 27 septembre 2018.
Juger que l'action exercée par la société Axa sur le fondement de l'article 1641 du code civil est parfaitement recevable.
Juger que la société Axa justifie être subrogée dans les droits et actions de son assuré, la société BATI VB, pour avoir versé, au titre des dommages affectant la cartonnerie Garnung les sommes de 19 587,45 euros et 169 386,40 euros.
Débouter les sociétés Isopan SpA et la société [K] [X] des incidents inscrits tendant à faire juger irrecevable l'action de la compagnie Axa.
Débouter les sociétés Isopan SpA et la société [K] [X] de l'ensemble de leurs demandes.
Confirmer ainsi le jugement en ce qu'il "rejette l'exception de nullité de l'assignation délivrée à l'encontre de la société Isopan Italy", "rejette les fins de non-recevoir tirées de la prescription des actions fondées sur la garantie des vices cachés" et "rejette la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la société Axa au titre de son recours subrogatoire".
Condamner in solidum les sociétés Isopan SpA et la société [K] [X] à verser à la société Axa la somme de 5 000 euros en remboursement de ses frais irrépétibles et aux entiers dépens, dont le montant pourra être recouvré directement par la société Chetivaux Simon, représentée par Me Didi Moulai.
La clôture a été prononcée par ordonnance du 14 mai 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 28 mai 2024, à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré.
MOTIVATION
Sur la subrogation de la société Axa
Moyens des parties
La société [K] [X] soutient que la société Axa n'a pas d'intérêt à agir à son encontre dès lors qu'elle ne démontre pas la réalité de sa subrogation et le paiement de son indemnité à la société Gan assurances.
Elle souligne ainsi, en premier lieu, que la société Axa ne justifie pas de l'obligation garantie dès lors qu'elle se prévaut de l'existence de dommages qui sont, en réalité, des préjudices consécutifs à une absence de travaux non couverts par sa garantie.
En deuxième lieu, elle énonce que la société Axa ne justifie pas non plus du montant réclamé dès lors qu'elle n'établit ni la solution de reprise retenue pour remédier aux désordres ni ne fournit la méthode de calcul justifiant qu'elle aurait coûté 169 386,40 euros.
En troisième lieu, elle relève que la production d'une simple capture d'écran est insuffisante à démontrer la réalité du paiement de cette somme à la société Gan assurances et ce d'autant plus qu'elle n'est accompagnée d'aucune quittance subrogative de la part de cette société, à qui il appartenait de subroger la société Axa dans ses droits et actions, l'assuré, en l'occurrence la société Vergne construction, n'ayant aucun droit pour ce faire.
En réponse, la société Axa fait valoir qu'elle démontre la réalité du paiement et de sa subrogation, tant légale que conventionnelle, dans les droits de son assuré.
En premier lieu, elle indique que l'obligation garantie est la responsabilité décennale pour travaux de construction soumise à l'assurance obligatoire et que l'exclusion invoquée par la société [K] [X] n'est pas applicable à cette garantie.
En deuxième lieu, elle énonce que la solution de reprise et son coût sont justifiés par les rapports d'expertise du cabinet Saretec et l'accord définitif sur l'indemnité conclu le 4 novembre 2020.
En troisième lieu, elle relève qu'elle justifie tout à fait de la preuve du paiement par la production, notamment, d'une lettre de la société Gan assurances mentionnant expressément l'avoir perçu.
Réponse de la cour
A titre liminaire, il sera rappelé que les personnes responsables de plein droit en application des articles 1792 et suivants du code civil, lesquelles ne sont pas subrogées après paiement dans le bénéfice de cette action réservée au maître de l'ouvrage et aux propriétaires successifs de l'ouvrage en vertu des articles précités, ne peuvent agir en garantie ou à titre récursoire contre les autres responsables tenus avec elles au même titre, que sur le fondement de la responsabilité de droit commun applicable dans leurs rapports. Dès lors, le fabricant qui a vendu à une société les éléments dont les défauts ont entraîné la condamnation de celle-ci à l'égard du maître de l'ouvrage sur le fondement de la garantie décennale en sa qualité de locateur d'ouvrage, doit, avec ses assureurs de responsabilité civile professionnelle, relever et garantir cette société, des condamnations mises à sa charge à l'endroit du maître de l'ouvrage, au titre de la garantie des vices cachés des articles 1641 et suivants du code civil (3e Civ., 8 juin 2011, pourvoi n° 09-69.894, Bull. 2011, III, n° 93 ; 3e Civ., 20 avril 2022, pourvoi n° 21-14.182, publié au Bulletin).
Il en résulte que l'action récursoire exercée par la société Axa est, à bon droit, fondée sur la subrogation intervenue dans les droits de son assuré et non dans ceux de l'assureur dommages-ouvrage qui a indemnisé le maître de l'ouvrage de son préjudice.
Il s'ensuit qu'est inopérante l'argumentation de la société [K] [X] aux termes de laquelle l'action de la société Axa serait irrecevable en ce qu'elle ne justifierait pas avoir été subrogée dans les droits de la société Gan assurances.
Par ailleurs, la subrogation dans les droits de son assuré aux fins d'exercer l'action en garantie des vices cachés peut être légale ou conventionnelle.
S'agissant de la première catégorie, aux termes du premier alinéa de l'article L. 121-12 du code des assurances, l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur.
Au cas d'espèce, il résulte, d'abord, de l'analyse des conditions générales et des conditions particulières de la police BTplus de la société Axa qu'elle garantit " la responsabilité décennale pour travaux de construction soumis à l'assurance obligatoire " de la société Vergne construction et que la clause d'exclusion du fait de " l'absence d'ouvrages ou de travaux qui auraient été nécessaires pour compléter la réalisation de la construction " figurant à l'article 2.11.12 des conditions générales ne concerne que les garanties prévues aux articles 2.9 et 2.10 de ces conditions, soit la responsabilité de sous-traitant en cas de dommage de nature décennale et la responsabilité décennale pour travaux de construction non soumis à l'assurance obligatoire en cas d'atteinte à la solidité qui ne sont, ni l'une ni l'autre, applicables en l'occurrence.
Ensuite, il résulte de l'examen des rapports de l'expertise DO Saretec que les dépenses effectuées par la société Gan assurances l'ont été afin de remédier aux désordres en cause.
Enfin, il résulte de l'examen conjugué de la capture d'écran informatique et de la lettre de la société Gan assurances adressée à la société Axa indiquant avoir encaissé la somme de 169 386 euros, que la seconde société a bien indemnisé la première au titre du désordre en cause.
Par suite, le paiement de la société Axa ayant réparé le dommage et étant intervenu en exécution de sa garantie, elle a été subrogée de plein droit dans les droits et actions de la société [K] [X].
L'ordonnance, qui a rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la société Axa, sera confirmée de ce chef.
Sur la prescription de l'action de la société Axa
Moyens des parties
La société [K] [X] soutient que le vice en cause a été découvert dès le 7 août 2018, date de la note aux parties du cabinet Saretec, le rapport subséquent ne reprenant que les termes de cette analyse, de sorte qu'initiée le 21 août 2020 l'action est prescrite pour l'avoir été au-delà du délai biennal.
Quant à la société Isopan SpA, elle énonce, faisant la même analyse, que l'action de la société Axa est prescrite à l'égard de la société [K] [X] mais également à son égard, dès lors que l'assignation à " Isopan Italy " n'a été délivrée que le 30 septembre 2020 et que, selon le droit italien applicable, le contrat de vente originel est soumis à une prescription annale.
En réponse, la société Axa fait valoir que ce sont les rapports du cabinet Saretec déposés les 27 septembre et 5 octobre 2018 qui constituent le point de départ du délai de prescription biennale et non la note d'étape du 7 août 2018 qui n'est pas constitutive d'un rapport arrêtant la position expertale.
A défaut, elle invite la cour à retenir le 2 mai 2018, date de la réalisation des investigations, et d'appliquer, en conséquence, les mesures de prorogation prises pendant la crise sanitaire.
Elle soutient que les conditions de la Convention de La Haye du 15 juin 1955 ne sont pas réunies en l'occurrence pour que la loi italienne soit rendue applicable dans les relations entre les sociétés [K] [X] et Isopan SpA.
Enfin, elle souligne que son action est exercée, à titre subsidiaire, sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun de sorte qu'elle ne peut, en tout état de cause, être considérée comme prescrite.
Réponse de la cour
A titre liminaire, il sera rappelé que la garantie des vices cachés constitue l'unique fondement possible de l'action exercée pour défaut de la chose vendue la rendant impropre à sa destination normale (1re Civ., 14 mai 1996, pourvoi n° 94-13.921, Bulletin 1996 I n° 213 ; 1re Civ., 12 juillet 2001, pourvoi n° 99-16.687, Bull. 2001, I, n° 225), de sorte que le fait que la société Axa se prévale, à titre subsidiaire, de la responsabilité contractuelle de droit commun, pour échapper à la prescription biennale, est inopérant.
Aux termes de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
Aux termes du premier alinéa de l'article 1648 du code civil, l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice.
Il est établi que la connaissance du vice par l'acquéreur, point de départ du délai de forclusion de l'action en garantie des vices cachés, n'est pas conditionnée par la connaissance du coût des travaux nécessaires pour y remédier (3e Civ., 29 juin 2022, pourvoi n° 21-17.502, publié au Bulletin).
Au cas d'espèce, il résulte des productions que le 7 août 2018, M. [M], expert au cabinet Saretec construction, a, ensuite de la réunion sur place s'étant tenue le 2 mai 2018, en présence notamment de la société Vergne construction, et qui avait pour objet " de réaliser des investigations en recherche de fuite sur les panneaux de couverture ", adressé aux parties mises en cause une " note d'information ".
Aux termes de sa partie " analyse technique " il est indiqué que l'origine des infiltrations est un défaut de préparation des " démoussages " de panneaux en bas de versant et en recouvrement ; l'isolant laissé sous le bac conduit l'eau par capillarité à remonter jusqu'au contact de l'isolant dans son épaisseur totale puis l'eau s'écoule sur la panne à l'intérieur de l'ouvrage.
L'expert ajoute que ce désordre est généralisé à l'ensemble des bas de pente et lignes de recouvrement des panneaux et conclut que la prochaine réunion avec les experts des parties mises en cause fera l'analyse de la solution réparatoire, par ailleurs proposée dans cette note.
Pour seule réserve, l'expert mentionne que " le présent rapport ne préjuge en rien de la garantie du contrat ".
Dans son rapport en date du 27 septembre 2018, l'expert reprendra, au titre de l'analyse technique, les termes de cette note à laquelle il se référera expressément puis donnera son estimation du coût de la réparation du dommage.
Il en résulte que la société Vergne construction a eu connaissance du vice affectant les panneaux dès la note du 7 août 2018, sans qu'il soit besoin d'attendre la suite de la procédure d'expertise qui ne portera que sur la détermination du coût de la réparation des désordres. Cette connaissance ne peut pas être fixée à la date de la réunion expertale, comme le propose à titre subsidiaire la société Axa, dès lors que celle-ci ne justifie pas que les conclusions expertales auraient été communiquées aux parties lors de celle-ci.
Par suite, l'action initiée le 21 août 2020 par la société Axa à l'encontre de la société [K] [X] est prescrite et, partant, irrecevable.
L'ordonnance sera infirmée de ce chef et la cour ne statuera pas sur les exceptions, devenues sans objet, opposées par société Isopan SpA à l'action en garantie de la société [K] [X].
S'agissant de l'action exercée à l'encontre de la société Isopan SpA par la société Axa, il sera rappelé que si un sous-acquéreur peut exercer directement l'action du premier acquéreur, qui lui a été transmise avec la chose vendue, le fabricant est en droit de lui opposer tous les moyens de défense qu'il peut opposer à son propre cocontractant (Com., 28 janvier 2004, pourvoi n° 02-11.522).
A cet égard, il a été jugé que, en vertu de l'article 3 de la convention de La Haye du 15 juin 1955, le juge est tenu de se prononcer, au besoin d'office, sur la loi compétente pour régir tant l'action contractuelle rédhibitoire intentée directement par l'acheteur que le recours en garantie exercé par le revendeur lorsque le vendeur a sa résidence habituelle à l'étranger (1re Civ., 10 octobre 1995, pourvoi n° 93-17.359, Bulletin 1995 I N° 348).
Au cas d'espèce, selon les productions de la société Isopan SpA, qui justifie avoir son siège social et son activité professionnelle en Italie, le droit italien soumet les actions dérivant du contrat de vente originel à une prescription annale courant à compter de celui-ci, de sorte que, la vente étant intervenue le 30 septembre 2016, l'action de la société Axa est prescrite selon le droit italien.
A titre surabondant, la cour observe que, si droit français était applicable, il en serait de même dès lors que l'action directe contre le vendeur initial a été exercée le 30 septembre 2020, soit postérieurement à l'expiration du délai biennal ayant commencé à courir le 7 août 2018.
Par suite, l'action exercée par la société Axa à l'encontre de la société Isopan SpA est prescrite et, partant, irrecevable.
L'ordonnance sera infirmée de ce chef.
Sur les frais du procès
La société Axa, partie succombante, sera condamnée aux dépens et à payer à la société [K] [X] la somme de 4 000 euros et à la société Isopan SpA la somme de 4 000 euros, au titre des frais irrépétibles.
Le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile sera accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme l'ordonnance en ce qu'elle rejette la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la société Axa France IARD au titre de son recours subrogatoire,
Infirme l'ordonnance en ce qu'elle rejette les fins de non-recevoir tirées de la prescription de l'action de la société Axa France IARD,
Statuant à nouveau,
Déclare irrecevable l'action de la société Axa France IARD à l'encontre de la société [K] [X] ;
Déclare irrecevable l'action de la société Axa France IARD à l'encontre de la société Isopan SpA ;
Y ajoutant,
Condamne société Axa France IARD aux dépens d'appel ;
Admet les avocats qui en ont fait la demande et peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Axa France IARD et la condamne à payer à la société [K] [X] la somme de 4 000 euros et à la société Isopan SpA la somme de 4 000 euros.